Ce jour était enfin arrivé. Cela faisait longtemps que notre petit prince attendait l'occasion de prouver ce dont il était capable, et quoi de mieux pour cela qu'un test de la première académie du monde ninja? Pour l'occasion, il s'était maquillé avec soin, donnant à son visage cet air à la fois mystérieux et légèrement androgyne, mais qui avait le mérite de faire briller ses yeux émeraudes. Des vêtements de lin le couvraient de la tête et au pieds, mais cette fois il ne s'était encombré d'aucun manteau, une chemise à manches longues faisait amplement l'affaire.
Il était arrivé en avance, et pourtant il ne fut pas le premier. Certain attendait déjà au rez de chaussé de l'académie, et bien qu'il aurait surement pu reconnaître quelqu'un, il était trop stressé pour entamer une quelconque conversation. Son estomac avait décidé de se lancer dans une longue série d'étirements, et nul exercice de relation ne pouvait changer cela. Heureusement qu'il n'avait point fait d'excès au petit déjeuner.

Le moment décisif arriva enfin, et avec une mise en scène monstrueusement efficace, la "généreuse" Takki lança le début de l'examen. Évidemment, le Toshiya ne faisait pas partie des premiers à y pénétrer, mais il n'était pas non plus parmi ceux qui fermait la marche. Il prenait son temps, et il tenta même de se lancer dans une fausse contemplation de ce couloir sordide afin de trouver un peu de quiétude. Inutile, la porte se retrouva bien trop vite devant lui. Très bien, il était temps qu'il arrête d'être un petit prince, et qu'il devienne un homme. Prenant une profonde respiration, Saru pénétra dans l'enceinte.

Comme on pouvait s'y attendre du "très diplomate" Hikari, le lieux de l'examen suffisait à dissuader les plus faibles. Cependant Saru avait choisi depuis longtemps que rien ne le détournerait de sa route, et s'il avait un commentaire à faire sur l'ombreuse majestueuse de cette salle, il le garda pour lui.
Comme pour reprendre un peu de contenance, il prit le temps de regarder les environs. Du noir. Il n'y avait rien à voir. L'endroit était apparemment trop vaste pour être complètement éclairé, et hormis le sol qu'il foulait en ce moment, et le précipice, il n'existait rien d'autre à quoi se raccrocher.

"Et merde..."

Et oui, il venait de le remarquer, un bon vieux brasier dans la plus pure tradition masochiste. Connaissant les lubies sadiques de son enseignant, il ne prit pas la peine de regarder s'il y avait un autre chemin. D'ailleurs, Takki lui indiquait la direction du pont, et il semblait presque y avoir de la compassion dans sa voix. Saru lui offrit un sourire absolument charmant, puis, lentement s'en alla vers l'enfer. Plus il observa le feu, plus il se rendit compte qu'il n'y avait aucune faille. Aucun tour de passe passe ne pouvait les sauver. Ils allaient tous souffrir.
Enlevant sa chemise, le challenger déchira les longues manche afin de les enrouler autour de ses pieds. Il espérait adoucir un peu le contact avec les pierres brulantes. De la même façon, il utilisa le reste du vêtement pour l'enrouler autour de son crâne, car il était hors de question que visage et cheveux souffrent de quoique ce soit. De plus, il serait bien triste de réussir à traverser cet enfer pour finalement mourir empoisonné par la fumée.

"Let's go."

Reculant hors du pont afin de prendre son élan, il prit une profonde respiration, puis s'élança. Courir vers la douleur était un véritable test de volonté, mais on ne leur avait jamais caché que le monde actuel était cruel, et qu'il devait apprendre à souffrir. Saru pénétra dans le feu avec un saut prodigieux, tentant ainsi de réduire au maximum le contact avec la pierre. Inutile, la chaleur le rattrapa bien assez tôt, et il fit au mieux pour museler son corps, ne résumant sa pensée qu'à une seule idée : Vitesse. Ceci dit, bien qu'il poussa son corps au maximum, les flammes étaient toujours là, léchant douloureusement sa peau. Allait-il réussir?

Il s'en était finalement sorti. Intact, non, mais bien mieux que ce qu'il avait pu s'imaginer. Ses pieds souffraient de quelques brulures superficielles, et son visage était indemne, mais il ne pouvait en dire autant de son buste. Une douleur s'était emparée de son dos, comme si on y avait greffé une plaque de fer encore brulante. Cependant, il n'avait ni le temps de se reposer, ni le temps de se plaindre. Aussi, Saru s'offrit quelques secondes pour reprendre son souffle, enlevant les morceaux de tissus calcinés.
Il était bien loin notre prince. Torse nu, la peau mise à mal par les flammes, il portait un pantalon plus tout à fait en forme, et des sandales qui feraient bien de la peine à ceux de son clan. Un Toshiya se retrouva rarement aussi dépouillé, mais en ce moment qui s'en foutait? Il était là pour prouver sa valeur, et c'est ce qu'il allait faire.

Continuant le parcours, ce qui s'avérait une petite pulsation prit rapidement de l'ampleur. Il ne put s'empêcher de soupirer lorsqu'il vit la source de ce vacarme. Décidément, Hikari était bel et bien derrière cet examen. Deux gigantesques rondins faisaient un étrange ballet, et tout comme ce brasier, ils étaient bien trop gros pour être contourner. Ceci dit, après avoir traverser les flammes, Saru était presque soulagée par cette épreuve. Après tout un peu d'observation lui confirma qu'ils battaient en rythme, et tout ce qu'il avait à faire était de passer au bon moment. Facile à dire, un peu plus difficile à faire.

"1...2, et TROIIIIIIIISSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSs!"

Oui, il avait toujours rêver de courir en hurlant, et vu qu'il n'y avait personne pour l'entendre, autant en profiter. Notre héros commença sa course juste avant que les rondins ne s'entrechoquent, si bien qu'il entama la traverse juste après leur rencontre. Il courrait comme un dératé, et dans son élan, son pied gauche décida d'embrasser son pied droit. Mauvaise idée, puisque personne n'était au rendez-vous pour le pas successif, et c'est avec un superbe vol plané que le challenger termina cette épreuve.
Il était encore en vie, et même s'il s'était mangé le sol, ça valait toujours mieux que de se retrouver au milieu d'une dispute de couple entre deux troncs d'arbre. Il n'était pas de ceux qui croyaient au divin, et pourtant il remercia dame chance et toute autre divinité pour leur aide très opportune. Quoiqu'il en soit, il avait réussi l'épreuve, certes avec peu de classe, mais il était quand même passé.

Heureusement il y avait un peu de temps entre les rondins marteleurs et la prochaine épreuve. Bon, on ne parlait que d'une petite minute, mais c'était toujours ça de pris. Saru tentait de faire le vide de son esprit, respirant profondément afin de calmer la brulure de son dos. Cela ne l'handicapait pas particulièrement, mais chaque mouvement tirait désagréablement sur sa peau, accentuant une douleur qui n'était pas forcément agréable. Heureusement, il faisait plutôt frais dans cet endroit, et cela combiné à la légère humidité rendait l'incident un peu plus supportable.
Au détour d'un couloir, le prochain obstacle apparut enfin. Rien. Il n'y avait strictement rien entre ce côté et l'autre côté, rien d'autre qu'un immense fossé dont on n'apercevait à peine le fond. Ceci dit le petit prince ne s'en étonna pas. Il avait déjà compris qu'il devait être prêt à tout, l'investigateur de cet examen n'étant évidemment que peu préoccupé par leur intégrité physique. Quoiqu'il en soit, Saru s'approcha lentement du précipice afin d'observer cet abîme.

"Au moins ça le terrain n'était pas glissant."

Piètre encouragement quand on voyait la distance qu'il devait franchir, ceci dit il fallait s'attendre à tout. Le jeune homme recula lentement, pas à pas, mesurant chaque étape de sa course d'élan. Quand il jugea la distance suffisante, il respira un bon coup et démarra sa course. Chaque pas ajoutait de la vitesse à l'ensemble, et prenant son appuis sur l’extrême bord du néant, le Toshiya prit son envol. Comme pour se donner plus de suspension, il s'était bloqué dans une respiration. Il ne pouvait pas fermer les yeux, car c'était suicidaire, mais il faisait tout son possible pour ne pas regarder en bas.
Il voulait réussir, il devait réussir, mais était-il prêt pour un tel exploit?

Le saut avait duré à peine trois secondes, mais cela lui sembla une éternité. Son cœur battait la chamade, et il crut bien défaillir lorsqu'il toucha l'autre côté. Ce fut bien de la terre sous ses pieds, et il s'offrit même le luxe d'une élégante roulade afin de se réceptionner. Saru resta un moment agrippé au sol, tel un félin aux aguets. Pétrifié par ses émotions, il entendant le sang battre dans ses veines, il sentait l'air frais sur son dos meurtri, il sentait chacun de ses muscles gonflés par l'adrénaline. Il n'avait jamais été aussi vivant, et pour tout dire, il adorait cela.
Un sourire se dessina sur ses lèvres, et alors que des lumières sortirent de nul part, notre futur aventurier se releva, et continua sa route. Jusque là il s'en était plutôt bien sorti, aussi il était hors de question de changer d'état d'esprit. Il continua à faire le vide dans son esprit, fixant toute son attention sur l'instant présent. C'est avec une concentration exacerbée qu'il arriva à la prochaine épreuve.

Apparemment Hikari était de ceux qui croyait au vertu de l'échauffement, car la nature de ce quatrième test relégua les autres au statut de préliminaires. Douteusement accrochées au plafond, des poutres faisaient offices de pont. Elles n'avaient l'air ni stables, ni aptes à supporter son poids, mais cette fois comme les autres, notre Toshiya n'avait pas vraiment son mot à dire.
Se rapprochant du bord, Saru se prépara de nouveau à se surpasser.

D'un petit rebond, il atterrit sur la première poutre, profitant de la corde qui la rattachait au plafond pour stabiliser son équilibre. Il avait prévu de prendre son temps, mais l'hésitation n'avait pas sa place sur un support instable. Chacun de ses mouvements faisaient valser la poutre, et rapidement Saru retourna de l'autre côté. Il avait bien compris, il devait y aller d'un pas décidé, car moins de temps il passera dans cet équilibre précaire, mieux ce sera pour tout le monde.

C'est d'un pas décidé qu'il entama sa seconde tentative. Non il ne courrait pas, ça serait suicidaire sur ce genre d'édifices, mais il ne prenait pas le temps d'assurer ses pas. Plusieurs fois il se reprit de justesse sur les cordes, ne devant qu'à la chance de maintenir son équilibre, et pourtant il continuait sa route. Cependant, lorsqu'il arriva sur le troisième pont dansant, il fit un pas trop à droite. Grave erreur.
Le sol se mit à valser, tentant furieusement de dérober aux pieds de l'apprenti. Maintenant il fallait courir! Tentant un saut aussi désespéré que ridicule, Saru arriva, Dieu seul sait comment, sur la quatrième poutre. Il s'y agrippait en bon lézard, et il ne relâcha son emprise que lorsqu'on lui offrit un semblant de stabilité. Non, il ne se releva pas, mais c'est dans cette position absolument indigne de tout ninja qu'il traversa cette dernière passerelle. Il faut l'avouer, ça manquait à la fois d'élégance et de style, mais aucun des deux n'étaient requis pour un Shinobi, tout ce qui importait était l'efficacité, et il l'avait été.

Alors qu'il continuait son chemin, il arriva à la prochaine étape. Le passage jusqu'alors si vaste se rétrécit, et Saru se retrouva dans une sorte de couloir pavé de bois. Une étrange porte se trouvait devant lui, et sur le coté, une machine ou siégeait boutons et leviers. Comme d'habitude, personne n'eut la décence de mettre un mode d'emploi, une indication, ou au moins une note sur le fonctionnement de ce...cette...chose. Il n'y avait qu'un levier, et ce dernier était déjà tiré vers le bas. Notre jeune homme tenta bel et bien de le remettre en haut, mais rien n'y fit. Il commença donc à explorer cette machine.
Le premier bouton ne modifia rien sur la porte, mais le boucan qui se déclencha alors trahissait une bien plus grande mécanique derrière cette simple façade. De plus, le levier remonta au moment même où il toucha à quelque chose. Juste pour voir, il l'abaissa, et les mêmes opérations furent faites en sens inverse. Très bien, ce devait être un truc pour réinitialiser la machine.

Après plusieurs tentatives, le petit prince comprit qu'il s'agissait là d'une sorte de code, et que tant qu'il n'aurait pas trouvé la solution, il pouvait toujours crever sur place. Or, il ne l'avait toujours pas trouvé.

Continuant sur sa lancé, Saru tenta différente combinaison, faisant tout son possible pour se souvenir de chacune de ses tentatives. Cet engin semblait avoir un millier de possibilités, et si dame chance ne lui venait pas en aide, cette méthode empirique prendra du temps... beaucoup de temps. En y repensant, ce qui ressemblait tout d'abord à un test d’intelligence s'avéra être une épreuve de patience. Il semblait impossible, sans le moindre indice, de trouver le fonctionnement de ce truc, aussi les aspirants n'avaient qu'un seul recours : Patience et répétition.
Après quelques minutes, un bruit différent s'ajouta à la symphonie mécanique, et petit à petit, l'étrange porte s'ouvrit. Il n'avait rien fait d'autres que persévérer, et il fut heureux de voir que, parfois, cela s'avérait payant. C'est le sourire aux lèvres qu'il traversa l'étrange couloir, constatant l'importance du mécanisme qu'il venait d'affronter sans pour autant en comprendre le sens. Disons le clairement, il avait eut du pot, car il aurait très bien pu passer encore une bonne demi-heure à trifouiller leviers et manivelles.

Notre challenger s'en allait donc vers son destin, et s'il n'avait ni les cheveux au vent ni le visage baigné de lumière, il portait toutefois le masque plus austère, mais tout aussi élégant de la concentration. Tant que Hikari en personne ne lui aura pas signalé la fin de ce test, il restera sur ses gardes. En parlant de fin, la prochaine étape arrivait à grand pas.
Contrairement aux autres endroits, ce dernier était généreusement éclairé. Ceci dit, ce n'était pas tellement pour aider les participants que pour mettre en valeur la chute qui sanctionnerait la moindre erreur. Dangereusement espacés, des piliers de bois sortaient des tréfonds d'un gouffre, formant un chemin pas vraiment penser pour un être humain. S'ils n'étaient pas très épais, ces troncs semblaient plutôt stables, mais ici il n'y avait aucune corde pour se raccrocher.

Saru ne prit même pas la peine de chercher une autre solution, il avait déjà compris qu'on ne pouvait se dérober aux épreuves. La ruse avait peut-être sa place sur un champs de bataille, mais apparemment pas lors des examens de Konoha. Il n'avait pas besoin de prendre d'élan, dès lors le Toshiya sauta sur le premier pilier. Aucun mouvement de balancier, tant mieux, il pouvait prendre un peu plus de temps. La technique du crapaud semblait appropriée, espérons qu'elle l'emmène de l'autre côté.

Ploc

Saru venait d'arriver sur un énième pilier, persévérant dans l'art de la grenouille. Il aurait pu tenter une traversée plus rapide, mais il n'était passez confiant en ses capacités pour cela. Il ne sera surement pas le premier, mas au moins avait-il une chance d'arriver à la fin. En parlant d'arrivée, il jeta un œil de l'autre côté, constatant non sans aigreur que l'éclairage se faisait plus rare. Il était d’ors et déjà dans la pénombre, et à cette allure il finira ce parcours à l’aveugle. Ceci dit, cette absence de lumière ne faisait qu'accroître sa concentration, et paradoxalement, cette difficulté en plus l'avait sans doute aidé à arriver jusqu'au bout.
Enfin, il y était. Il avait triomphé des flammes, de l'instabilité et du vide. Ne pouvant s'empêcher de ressentir une certaine fierté, le Toshiya prit un moment pour regarder en arrière. Même s'il échouait maintenant, il pouvait se féliciter du chemin parcouru. Quoiqu'il en soit pourquoi parler d'échec lorsqu'il avait encore quelques cartes à jouer. Les ténèbres n'aidant pas, l'aspirant évoluait à une vitesse d'escargot. Conscient du sadisme de ce cher Hikari, il ne souhaitait faire aucun faux mouvement. Empaler, bruler, écraser, il y avait tout un tas de façon de mourir, et aucune ne seyait à notre petit prince.

Alors qu'il excédait dans la prudence, il entendit trop tard le vrombissement naissant. Soudainement, la lumière revint, mais loin d'aider notre challenger elle le déstabilisa. Cela combiné au vent violent qui venait d'apparaître lui firent perdre son équilibre. Il fut quelques secondes balloté contre le sol avant de se souvenir du fossé qui siégeait derrière lui, et s'agrippant de toute ces forces à tout ce qu'il pouvait avoir sous la main, il arrêta sa dégringolade.
Le vent ne faiblissait pas, mais au moins ses yeux s'habituaient à la lumière. Restant le plus proche possible de sol afin de diminuer sa prise au vent, Saru avait tous les muscles en éveil. Plus proches de la panthère que de l'homme, il se maintenant sur quatre appuis. Tout d'abord, il libéra un de ses mains pour la replanter un peu plus loin, puis il fit de même avec une jambe. Tout comme un alpiniste, il se lança dans une sorte d'ascension horizontale. Sauf qu'il lui manquait un outil tranchant ou perforant afin de s'assurer une prise solide.

La situation était précaire, et cette fois-ci, toutes les capacités du jeune homme étaient mises à rude épreuve. En lutte perpétuelle contre le vent, il ne pouvait se permettre de soulager ses muscles, et chaque centimètre gagné était un véritable exploit. Évidemment, au fur et à mesure, il trouva un moyen d'avancer un peu plus vite. Il avait compris quand pousser sur ses jambes, et comment placer ses mains afin d'avoir une prise maximum sur ce sol plutôt ferme. Cela lui donnait un peu d'assurance, mais le vacarme perpétuel de cette soufflerie le rappela rapidement à l'ordre.
La moindre erreur sera fatale.