Cette histoire débute dans une forêt, plus précisément, dans une cabane isolée caché dans une forêt dans le territoire de ce qui deviendra le pays du feu. La fumé s’élevant en volute de la cheminé pratiquement recouverte de lierre est la seule chose qui peut laisser penser que l’endroit puisse être habité. Derrière cette façade de pierre et de bois livré à la nature, on pourrait ne pas croire que vit un homme, seul dans cette forêt sans frontière. Seul, pas vraiment. Alors qu’il touille une soupe dans sa marmite, alitée, une enfant se débat dans son sommeil, une compresse sur le front.

À son réveil, un bol de soupe attend l’endormie à son chevet. L’arôme n’est pas des plus engageants, même avec la faim qui tiraille son estomac. Dans son fauteuil, invisible pour elle, qui est encore alitée, il contemple le feu en tirant sur sa pipe, dont la fumée s’élève de derrière le dossier de son siège.

? - Tu devrais manger, quand je t’ai trouvé, tu t’étais évanouie à cause de la faim. Les corbeaux commençaient à se rassembler autour de toi.

D’abord suspicieuse vis-à-vis de ce ragoût, dans lequel flotte des morceaux non identifiés, dans le meilleur des cas, et non identifiable, pour le reste d’entre eux, les gargouilles de son ventre se font si peu discrets qu’il est inutile de niez qu’elle meure de faim, littéralement. Une première fois, la cuillère qu’on avait posée à côté du bol, va s’y tremper, puis une seconde fois et une troisième, ainsi jusqu’à ce qu’il ne reste plus de soupe dans laquelle tremper quoique ce soit. Tout en léchant le fond du bol, la jeune fille réussi malgré tout à émettre quelques sons intelligibles.

Suki – Slurp… En fait, c’est très bon… slurp.

? – Haha, c’est bien la première fois qu’on dit ça de ce que je cuisine. En fait, c’est très mauvais. La seule raison pour laquelle je mange ça, c’est que les racines avec lesquelles je fais cette soupe sont faciles à trouver et que je ne sais rien faire d’autre.

Suki – Pourtant, moi, je trouve que c’est le meilleur repas que je n’ai jamais mangé.

? – Il y a une bonne raison, c’est que j’ai utilisé la meilleure des épices.

Suki – La meilleur des épices?

? – La faim. Quand on a faim, tout semble meilleur. Avant, il y avait d’autres gens qui vivaient ici. Ils sont partis parce qu’ils n’en pouvaient plus de manger des racines. Pourtant, personnes ici n’a jamais connu la faim ou la guerre. Donc, je peux t’assurer que ce n’est pas «bon», comme tu dis.

Le ventre plein de soupe et la tête pleine de cette histoire de racines et d’épices, le sommeil ne tarde pas à gagner la petite Suki. S’écroulant dans le lit, elle laisse tomber son bol de soupe impeccablement nettoyé, pour sombrer dans le sommeil, ne laissant que l’inconnu tiré sur sa pipe en regardant l’âtre.


? – Ça fait deux jours que tu dors et que tu vide mon chaudron. Je crois tu devrais pouvoir marcher maintenant.

S’extirpant des couvertures et posant un pied hésitant sur le sol de terre battu, la jeune fille réussi à se lever. Faisant quelques pas vers le feu, elle chancelle avant d’être rattrapé par l’inconnu, qui la soutient jusqu’au fauteuil où il l’installe, face au feu.

? – Tu ne risques plus de t’évanouir à tout bout de champ, maintenant, je crois que nous pouvons parler un peu. Je suis Irato et tu es chez moi.

Maintenant qu’elle se sent mieux et qu’elle peut enfin observer son hôte attentivement, la petite Suki se rend compte qu’il s’agit d’un homme d’une quarantaine ou d’une cinquantaine d’année. Difficile à dire avec cette barbe d’un brun profond qui lui couvre le visage. Mais comme à l’image de sa maison recouverte de lierres qui cache un feu accueillant, sa barbe cache, elle, un sourire chaleureux et bienveillant.

Suki – Je suis Suki, Suki Satô.

Irato – Alors, Suki, qu’est-ce qu’une petite chose comme toi faisait seule dans la forêt.

Suki – Mon papa nous avait dit que le village pourrait être en danger parce que le Daimyo ne pouvait plus maintenir la paix sur ses terres. Maman et grand frère sont partie dans la forêt avec moi. Comme papa ne revenait pas, je suis retourné sur nos pas pour le chercher et…

Irato – Laisse-moi deviner. Tu t’es perdu et tu es presque morte de faim dans la forêt.

Un peu gêné de s’être montré ridicule en ayant failli mourir d’une manière aussi bête, la jeune fille ne sait faire quoi d’autre que de regarder vers le sol. Irato, lui, pousse un bol devant elle. Encore la même soupe tiré de la même marmite qui semble ne jamais se vider. Au grand damne de Suki, qui la faim passé, commence à comprendre pourquoi ceux qui habitaient cette endroit sont partie. Bien que l'ayant ramené des portes de la mort, cette soupe est surement la chose la plus immonde qu'elle ait mangé depuis toujours. Ce qui fait regretter les légumes que sa mère devait presque lui faire avaler de force.

Irato – Mange, ça te fera du bien. Dans quelques jours, tu devrais pouvoir te déplacer normalement et je vais t’aider à retrouver ta famille.

Suki – Vous allez vraiment faire ça pour moi, c’est vrai.

Irato – Je connais la forêt, remonter les pistes, c’est mon petit talent caché. De toute façon, je ne peux pas te garder trop longtemps avec moi, tes parents vont s’inquiéter… et j’ai besoins de récupérer mon lit. Je suis en train de me casser le dos à dormir dans mon fauteuil depuis trois jours.



Irato – Alors, fatiguée?

Suki, assise sur une vieille souche, essaie de reprendre son souffle. La marche entamée en début de journée l’ayant minée physiquement et porté un coup à son moral qui était pourtant au plus haut lors du départ.

Suki – Mais on marche depuis des heures, on peut bien faire une pause.

Irato – Pfff, ces jeunes. De mon temps, on passait notre journée à travailler au champ et gare à celui qui se plaignait.

Suki – Pfff, ces vieux, Toujours à rechasser le passé.

Irato – Bon, d’accord. Nous allons faire une pause.


Irato – Cela fait trois jours que nous cherchons tes parents, tu es certaines que c’est la bonne direction pour retrouver l’endroit où vous deviez aller ensemble?

Suki – Bien sûr. Je reconnais l’arbre, là-bas, qui pousse sur un rocher. Je suis déjà passé par là avec maman et grand-frère. Ça ne devrait plus être très loin.

Irato – C’est ce que tu disais hier en passant devant la cascade.

Suki – Cette fois, j’en suis certaine.

Irato – C’est aussi ce que tu as dit à propos de la cascade.

Les larmes commencent à monter aux yeux de la jeune fille. L’idée qu’elle ne pourrait jamais revoir ses parents est plus dure que tout. Même ne pas revoir son frère la chagrine, ce qui la surprend. Toujours à se disputer qu’ils sont, il commence lui aussi à lui manquer. Irato, mal à l’aise à cause de l’état de la petite Suki, provoqué par son manque de tact, tente de se rattraper comme il peut.

Irato – Allons, je plaisante. Pas besoins de pleurer, je suis certain que nous allons bientôt les retrouver.

Suki – Merci monsieur, je sais que ça ne vous fait pas plaisir de faire tout ça pour moi, je devrais être plus forte pour vous remercier. Je ne pleurerai plus avant d’avoir retrouvé ma famille.

Malgré toute sa bonne volonté, la petite Suki pleura une partie de la nuit après qu’une chauve-souris se soit glissée sous la tente à la faveur de la nuit.

***

Une autre journée, un autre arbre que la petite Suki est «certaine» de reconnaître, une journée comme chaque autre depuis leur départ… si ce n’est cette femme puisant de l’eau dans un ruisseau. Une femme aux cheveux brun tombant en cascade et qui porte sur son dos un fagot de bois. Le vielle homme qui l’accompagne esquisse un geste en direction de la jeune fille à ses côté, avant de se rendre compte qu’elle n’est plus derrière lui. Avant qu’il ne s’en soit rendu compte, cette petite boule d’énergie sur deux pattes a déjà traversé la moitié de la distance séparant le vieil homme et la femme.

Suki – MAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAMAN!!!

Mitami – Su…

Sautant dans ses bras, Suki entraine sa mère avec elle et toutes deux se retrouvent à l’eau. Trempées et le fagot de bois éparpillé dans le ruisseau, la mère extrait sa fille de l’eau en la portant à bout de bras et la serrant contre elle arrivé sur la berge, en larme.

Mitami – Suki, nous nous sommes tellement inquiétés. Ton père est revenu deux jours après ton départ et est reparti tout de suite pour te retrouver dans la forêt. Je suis tellement contente que tu ailles bien.

Suki – Maman, tu m’étouffes, arrête. Aaaaaaaaaaarg.

Sans l’écouter, elle resserre d’avantage son étreinte jusqu’à donner une couleur rouge puis violacée au visage de Suki.

Irato - «Hum, je ne sais pas si cette gamine n’était pas plus en sécurité avec moi… bah, mon lit m’attend.»

Sur cette dernière pensée, le vieil homme s’éclipse en silence, laissant cette retrouvaille mère fille avoir lieu sans lui, dans les larmes, la joie et l’asphyxie la plus heureuse qui soit.


Au soir, Mitami prépare le repas alors que Suki et son frère, Kira, attendent à table. Un repas en famille comme les autres, Suki et Kira qui se disputent, les assiettes qui se posent sur la table, les cris et les menaces pour que Suki mange ses… non, pas de plaintes émanant de la jeune fille contre les épinards et autres légumes verts. Elle mange même de bon cœur.

Mitami – Suki, tu avais faim. C’est la première fois que tu manges tous tes légumes sans que j’aie besoin de te forcer.

Kira – Sans qu’on est besoin de lui enfoncer dans la gorge plutôt.

Suki – Non, c’est que j’ai de la chance d’avoir de la nourriture dans mon assiette. Personne ne devrait avoir faim, surtout s’il y a à manger.

Bon, voilà, après plusieurs problèmes d'ordinateur qui m'ont empêchés d'écrire, j'ai enfin terminé l'histoire du nindo de Suki.

«Personne ne devrait avoir faim»

Pour le reste, je préfère continuer une fois au village avec des gens. Comme on dit, Fuki est morte, vive Suki.