Réminescences [Ft. Miyuko]

- Alors, t'en penses quoi ?

Le café dans lequel je me trouvais était somme toute sympathique. Peu peuplé à cette heure de la journée, je jouissais d'une table bien placée, au fond de la pièce, près d'une fenêtre, aux cotés de ma chère Miyuko. Son visage affichait une expression sérieuse, qui ne lui allait guère. Elle, comme tous les *blondies* de son clan, n'étaient pas crédibles. Il était vrai néanmoins que, c'était de circonstance. Je lui avais fait part de ce qui arrivait à Mianzo. De ce que j'avais décidé, seule.

Pourquoi me demanderez-vous ?
Parce que c'était ma meilleure amie. Vraiment, je ne voyais pas d'autres raisons. Elle partageait ma vie depuis bientôt une dizaine d'années, alors je me voyais mal faire autrement. Elle m'avait toujours soutenue et compris, même si je ne savais pas si c'était parce que nous étions ou parce qu'elle était Yamanaka. Bref, je m'en remettais à elle, et à elle seule.

Elle soupira, ce qui n'était pas vraiment de bonne augure. Miyuko ne s'énervait pas, jamais. Et parfois c'était clairement embêtant.

- Attend, je résume ... En gros, ton frère est devenu alcoolique parce que sa copine a déserté, et personne sait où elle peut bien être, c'est ça ?

- Oui.

- Et toi tu veux partir dans la nature pour la retrouver.

- Oui.

- Sachant qu'elle était connue pour bousiller tout ce qui la dérangeait, et que ça lui fera super plaisir de voir de nouveaux chasseurs de déserteurs.

- Oui.

- T'es comme ça ?

Je me sentais stupide, et bah bravo là !
Je lui lançais un regard noir, qui me valait un simple et unique coup de petite cuillère sur la tête.

- MAIS T'ES CONNE OU QUOI ?!

Je crois que c'est la première fois que je la vois crier. A moitié, dans la mesure hein.
Je me frottais la tête, la rougeur sur mon front qui commencer à me gêner. Avant de répliquer, sèche.

- Un problème, blondie ?

Je détournais mon visage du sien. Je sentais la rougeur caractéristique de la colère monter à mes joues. Dehors, il faisait beau. Les passants profitaient des dernières journées d'un été mourant, laissant place à un automne vigoureux. Le soleil était haut dans le ciel, caractéristique d'un début-milieu d'après-midi. Je ne voulais pas regarder Miyuko, même si je sentais son regard dardé sur moi.

J'étais navrée, dans un sens. C'est sûrement pour ça que j'ai rajouté.

- Tu comprendrais si ça arrivait à quelqu'un de ton clan.

- T'es bête, bien sûr que je comprends ...

Un demi-sourire illumina mon visage, alors que j'osais à nouveau affronter le regard compatissant de ma comparse, alors que je sentais sa main caresser doucement mon bras, en signe de réconfort.

- Tu sais ce qui t'attends ? Suigara, les déserteurs, les terres hostiles ..?

- J'en ai une vague idée.

- Et tu vas y aller comme ça ?

- Comment voudrais-tu que j'y aille ? Répliquais-je, en roulant les yeux.

Elle sourit, avant de répondre.

- T'es bête.

- Je préfère dire que j'ai de l'ambition.

Un demi-sourire se logea sur mes lèvres.

- J'ai connu mieux comme ambition, que de mourir.

Elle avait exprimé sa pensée. Ma pensée. Oui, c'était clairement ça qui m'attendait, là si j'essayais de la retrouver. Mourir de la main d'un inconnu dans un endroit plus ou moins sordide, mais sûrement plus. Suigara était connu pour ce genre de disparitions. Les endroits que côtoyaient les nuke-nin aussi. En bref ? Dans neuf cas sur dix, mes recherches me mèneraient dans des endroits que personne de sain d'esprit voudrait visiter.

- J'ai beau être tolérante et tout ce que tu veux, mais je comprends pas ce qu'on fait ici ...

Même si, à vrai dire, j'en avais une vague idée.

La forêt nous entourait de toute part. Innombrables arbres à la silhouette centenaire nous observaient dans ce presque angoissant calme. Le vent soufflait, mais peu. Les insectes et autres animaux s'exprimaient, mais ils n'avaient guère d’intérêt pour nous. Et, à part ça, nous devions être bien seules, elle et moi. Miyuko m'avait juste dit de la suivre, après le silence gênant qu'elle avait provoqué. Puis plus rien. Et nous étions ici pour une raison qu'elle seule connaissait exactement. Elle finissait par se tourner vers moi, un petit sourire aux lèvres, avant de dire tout simplement.

- C'est juste un endroit adapté pour ce qu'on va faire, j'trouve.

Je roulais des yeux, en répliquant.

- Laisse-moi deviner, ramasser des baies ?

- Je pensais à quelque chose de plus mouvementé. Comme nous battre.

N'aurait-on pas échangé ma Miyuko pendant le chemin ?

Une interrogation qui avait du sens, malgré son absurdité. Elle si pacifique, fragile, si ... Si Yamanaka quoi !
Et la voilà, avec son minois sérieux, à me regarder de ses yeux carmins. Nan, j'y crois pas. Il y a une combine là dedans, même si, pour l'instant, je n'arrive pas à la discerner. En désespoir de cause, je pause mes mains sur ses épaules, avant de dire sur un ton faussement compatissant.

- Mais c'est que je risque de te faire mal, blondie.

- Tu sais à quel point j'aime ça.

Je la regarde. Elle me regarde. Je souris. Elle sourit. On éclate de rire.
Bref, elle finit par s'assoir sur l'herbe, et sans attendre d'invitation que je la rejoins, elle me regarde longuement, avant de me demander, l'air de rien.

- Nan, sérieux ... Dis-moi ce que tu sais sur le Genjutsu.

- T'as pas plus vaste comme sujet ?

- Raison de plus pour que tu commences maintenant.

Je penchais la tête sur le coté, curieuse.
Nous avions pris nos cours ensemble, à l'Académie. Elle savait donc, à priori, tout ce que je savais sur le sujet.
Miyuko n'était pourtant pas du genre à m'attirer sur de tels sujets pour des raisons bénignes.

- M'oui. Le Genjutsu, c'est l'art de l'illusion et de la tromperie. C'est lui qui permet de sublimer le cerveau d'un individu afin de troubler sa perception de la réalité, en altérant ses sens, les notions de temps et d'espace, ou encore ses souvenirs.

- Quels sont les différents types de Genjutsu existant ?

- Il y en a de quatre types : Les altérations, chiantes seules mais handicapantes en nombre, les chocs, style coup de bélier mental, les barrières qui permettent de se protéger des illusions, et les jeux d'esprit, qui permettraient d'emmener dans une réalité parallèle soi-même et une victime de son choix.

- Tu connais bien tes leçons.

Je lui tirais la langue, comme ça.

- Mais est-ce que tu connais la règle d'activation d'un Genjutsu ?

Je fronçais les sourcils. Question à la con, ça.

- Signes, chakra, visualisation ...

- Tu touches le point essentiel, tu peux t'attarder sur la définition de visualisation ?

- Miyu ...

- Allez, s'il te plaît.

Elle me souriait. Je soupirais. Nan, vraiment, je ne voyais pas ce qu'elle cherchait à me faire comprendre.

- Il faut avoir l'image qu'on veut imprimer dans l'esprit de la cible.

- Et tu crois que tu en es capable ?

- Bah oui ...

- Y compris la douleur ?

Je fronçais les sourcils. Elle touchait un point. Un point d'importance. Je la regardais, en silence.
A part le coup de poing que m'avait mis Azami, il y a ... Une dizaine d'années, je dois bien avouer n'avoir ressentie aucune douleur aussi aiguë. Et quelque chose me disait que les gens qui m'attendaient dehors tiendraient la douleur d'un coup de poing d'une gamine de quatorze ans.

- C'est bien ça, le problème. Si notre arme est celle-ci, comment pouvons nous nous défendre avec si elle est semblable à une lame émoussée ?

Contrairement aux autres types de combats, le Genjutsu ne demande pas que de la volonté et de la force intérieure. De tous les domaines, il est le plus tactile, car une illusion ne peut être réelle que si celui qui lui donne forme la vit lui-même. En poussant la réflexion plus loin, c'est pour cela qu'on trouve majoritairement deux profils d'utilisateurs faisant preuve de talent dans l'exercice : Celui qui prend plaisir dans les tourments, et celui qui a vécu dedans.

Je hochais la tête pour moi-même. Miyuko faisait preuve d'une rare sagesse, et cette réflexion en était la preuve. Il ne suffisait pas d'être fort pour être doué dans les illusions, il fallait, avant tout, les avoir vécu soi-même à un certain degré. Elle amenait aussi des questions morales. Étions nous prêts à souffrir pour causer une souffrance de même magnitude à notre adversaire ? En sachant pertinent la douleur que nous allions lui causer, pouvions nous décemment la lui faire ressentir ?

- Et toi alors ? Toi et les Yamanaka, vous faites comment ?

Miyu souriait doucement, avant de répondre, une pointe de regret dans la voix.

- Les sots se moquent de nous, car ils nous croient inoffensifs. Les gens avisés se méfient de nous, car ils savent qu'il leur est difficile de nous cacher quoi que ce soit. Nous lisons dans les pensées, mais ... Beaucoup d'entre nous vivraient mieux sans, vraiment. Nous ne choisissons pas ce que nous entendons ou voyons. Il y a beaucoup de haine, d’amertume, de regrets, de tristesse, de désarroi et désespoir partout, et même dans ce village. Nous n'arrivons pas totalement à fermer notre esprit, alors nous captons parfois cela. Et en combat, nous sommes obligés de l'ouvrir afin de pouvoir répondre au mieux aux intentions de nos ennemis ... Mais leur âme est parfois si noire qu'elle nous souille à jamais. Qu'elle nous marque au point qu'elle nous hante la nuit ... Les seuls à qui cela plaît, c'est bien aux enfants et adolescents au don peu éveillé. Mais ceux qui savent lire, eux, ne veulent plus savoir ce qui se passe dans la tête d'autrui.

J'attirais ma tendre amie contre moi, et elle se laissait faire.
Le geste était instinctif, et je ne le regrettais pas, au contraire. Tout clans a ses démons, et Miyuko venait de révéler un des siens. Et je la remerciais, de me faire assez confiance pour me le dévoiler. Ma tendre amie aux cheveux de blé et aux yeux de soleil couchant.

Personne ne nous interromprait ici, il n'y avait qu'elle et moi.

[Demande de validation des techniques Kajino Reikon - Morsure de l’Âme (Rang C) et Eiensei - Esprit Infini (Rang D), merci d'avance !]

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