Histoire :
« Me faut-il une raison pour agir comme je le fait ? Non. » Craquer un œil ouvert après ma nuit n’est pas ce que j’aurais appelé une « bonne idée ». Mon crâne me fait mal comme si deux tsunamis et un typhon – pour faire bonne mesure – avaient décidé de s’installer pour voir les dégâts qu’ils auraient pu faire. Ma langue est pâteuse et semble coller contre mes dents. A moins que ce ne soit l’inverse ? Urh… Peu importe.
Je serais bien restée cinq ou six heures de plus à dormir moi. Avec un grand verre d’eau glacé et plusieurs pilules antidouleur.
Mais ces foutus rayons de soleil en ont décidés autrement.
Oui je rage contre la nature.
Quel est l’andouille qui a mis sa fenêtre de façon à se prendre les rayons dès que ces derniers arrivent aussi ? Une andouille de première catégorie.
Lentement.
Je me lève avec la force d’un paresseux après trois nuits blanches. Vraiment pas cool. D’un geste rageur je tire les rideaux… Pour les arracher complètement, les gardant en main alors que je me fais agresser par plus qu’un ou deux rayons de soleil.
Cette journée promet vraiment…
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« Saeko ! Reviens ici tout de suite ! »J’éclate de rire alors que je « m’échappe » à travers les rues de Kiri. Ma mère à mes trousses, une expression de rage maternelle sur le visage. Peut-être que ma plaisanterie à été trop loin ? Nan ! C’était drôle !
« Saeko Suzuki ! Si tu ne t’arrête pas maintenant tu vas avoir de sérieux problèmes ! »Mince. L’utilisation complète de mon nom. Cela veut dire que je vais avoir des soucis. De gros soucis. Et pourtant cela ne fait rien pour m’arrêter.
Et pourquoi pas ?
Après tout, quitte à avoir des ennuis, autant faire en sorte qu’ils en vaillent la peine.
Je continue de courir.
C’est une scène classique. Je ne suis pas vraiment une enfant sage mais pas non plus une enfant à soucis. Plutôt… Que je manque d’occupations ? Ouais. On va dire ça.
C’est aussi pour cela que nos voisins ne semblent même pas faire attention à nous alors qu’on court en rond au milieu de la place près de notre appartement à ma mère et moi.
Ils sont tellement habitués…
« Aha ! Je te tiens ! »Oh mince !
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Je me passe la main sur la figure alors que j’essaye d’ignorer les mouvements de l’autre côté de la pièce. Quel que fut les raisons qui les auraient poussés à venir me rejoindre hier soir pendant la troisième – ou quatrième – tournée, ne me regarde absolument pas. Et tout état de décomposition dans lequel ils se trouveraient serait de leur faute.
Et puis je m’en fous.
Mais je suis une incorrigible curieuse.
Je jette un coup d’œil vers l’autre côté de la pièce. Je ris.
Étalé au sol et sur un siège se trouve le reste de mon équipe. Deux garçons qui ne tiennent vraiment pas l’alcool. Hirano est en train de se baver dessus tandis que Komuro, lui, se sert de la jambe droite de Hirano comme doudou.
Je baille.
Je savais que j’aurais dû limiter mes consommations la nuit dernière. Mais ces marins étaient marrants et si « désireux » de payer qu’il aurait été impoli de refuser. Ah ! Quelle blague…
J’ai pratiquement tout fait pour me faire payer des consos sauf me mettre à poil. Et ce n’était pas loin pourtant. Faut vraiment que je parle aux médecins pour renforcer les effets de leurs pilules. Je tiens mieux l’alcools mais pas assez pour faire rouler sous la table tout l’équipage d’un navire.
Heureusement qu’ils n’ont fait que me payer à boire tiens…
Bon avantage les petites pilules… Pas de nausées du matin. C’est que du bon pour éviter de réveiller mon partenaire, ou pour éviter de me rendre malade. Beuh.
Je dois vraiment avoir une sale tronche. J’ai la sensation d’avoir une sale tronche.
En tâtonnant dans la chambre d’hôtel prise pour là soir, j’arrive finalement à trouver ce qui ressemble à une salle de bain. Super. J’ai même réussit à trouver la majorité de mes vêtements sur le trajet. Plutôt satisfaite de voir que rien n’a abimé de ma tenue.
Refermant la porte derrière moi, je laisse mes yeux s’habituer à la lumière blanche de la pièce. Quelle merde. Revoilà les Tsunamis et leur copain le Typhon.
La prochaine fois je reste à l’eau.
Je me frotte doucement les paupières alors que j’actionne le robinet. Mettant l’eau le plus froide possible. J’en aie vraiment besoin. Récoltant l’eau, je l’asperge plusieurs fois sur mon visage. C’est froid. Revigorant. Satisfaisant.
Je laisse échapper un râle de plaisir qui n’aurait pas été tout à fait déplacé dans des activités de chambre. Au moins est-il honnête.
Je ricane.
Passant l’eau sur mon visage et mon cou, je les ouvre enfin vers le miroir en face de moi. Accueillant la personne aux cheveux blancs de neige et aux yeux vert émeraude avec un sourire amusé. Délicatement je tente de recoiffer quelques mèches devenus rebelle après ma nuit passée avec un oreiller différent. J’en profite pour observer mon corps nu devant ce miroir sale. Pas de marques distinctes. Tant mieux. Je suis presque sûre de m’être cognée plusieurs fois pendant la soirée d’hier, mais il semblerait que cela n’ait laissé aucunes marques. Ce qui est une bonne chose. Il aurait été intéressant d’essayer d’expliquer ce genre de marques après tout.
Mon sourire s’élargit pour dévoiler des dents blanches.
Je secoue doucement la tête en riante. Silencieusement.
Plus qu’à me laver et me changer et je pourrais enfin rentrer chez moi.
Chez moi… Hum. Amusant. Alors que je me lave je ne peux m’empêcher de repenser aux raisons qui m’ont - enfin nous - poussé vers ce port du pays du Feu.
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« Saeko Suzuki. Hirano Takuii, Komuro Saeba, Équipe sept… »Je baille doucement. « Enfin » j’ai envie de dire. Je fais enfin partie d’une équipe de genin pour le village caché de Kiri. J’en aurais mis du temps.
Seize ans. J’ai seize ans et je viens enfin de passer genin. Ca a quelque chose de pathétique.
C’est vrai quoi. Il suffit que je regarde autour de moi pour voir des enfants, douze ou treize ans, pas plus, devenir genin. Des « adultes » comme moi, c’est déjà plus rare. On appelle les gens comme moi « sans talent » généralement. C’est sans doute vrai. Je dois me battre deux fois plus pour arriver au même résultat qu’un de ces enfants. Quand j’y arrive.
Limite démoralisant.
C’est un sujet de discorde avec ma mère. Un de plus on va dire. Ces derniers temps il semble impossible pour nous deux de nous retrouver dans la même pièce sans qu’une dispute n’éclate. Bah.
Si seulement elle pouvait accepter sans croire à chaque fois que je le fait pour la contrariée… Mais ce serait trop en demander.
Et c’est aussi sans doute en partie ma faute.
C’est vrai que depuis très longtemps je fais des choses, juste parce que je sais que ça va énerver ma mère. Plaisanterie. Soirées. Vêtements provocants. Bref tout ce qui peut faire péter les vaisseaux sanguins de ma mère.
Mais ça c’est un choix conscient.
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Je suis une kunoichi de Kiri. J’aime à croire que je suis assez douée dans ce que je fais, mais, hélas, mes capacités réelles écrasent assez souvent mes fantasmes les plus dingues. Pas comme si j’en avais des masses de toute façon.
La mission que nous venions d’accomplir était plutôt simple dans l’ensemble. Rang C. Catégorie des livraisons et escortes.
Je sentais que j’allais bien m’ennuyer.
J’avais raison.
Aucunes difficultés notables si ce n’est quelques pirates un peu trop gourmand et encore, on n’a même pas eu à intervenir durant ce moment-là. Ces marins étaient vraiment quelque chose au final. Ils ont accueillis les pirates comme ils auraient accueillis des créanciers un peu trop entreprenant. Avec force, violence et aucune pitié. C’était marrant à voir.
C’était aussi marrant à encourager alors que j’étais assise sur un des mats. Meh.
Au final la livraison s’est passée sans soucis. Même le colis était très bien. Une peinture. Magnifique je suppose bien que je n’ai que très peu de goûts artistiques - Hirano dirait même que mes goûts sont atroces, mais qu’est-ce qu’ils en savent eux hein ?!
Évitons de m’énerver sur ce sujet.
On change.
Seul petite déception du voyage. Le navire qui nous avait amené ici ne repartait pas vers Kiri mais plus au Nord. Le prochain navire pour Kiri partait dans deux jours. Aujourd’hui ça fait deux jours.
Je ris doucement alors que je finis de remettre mes vêtements de la veille. Aucunes tâches. Parfait.
Avec tout ça j’ai presque mis une heure pour me préparer. Meh. Reste à savoir si je vais avoir besoin de discrétion pour sortir de là où si mes compagnon à décider de faire honneur à leur première gueule de bois en évitant de se lever pour ne pas risquer « l’accident » de l’estomac se vidant.
Je ris. J’ai presque envie de les réveiller avec un saut d’eau.
Bon. Aucun souci de ce côté-ci. Ces messieurs ne sont toujours pas revenus de leur voyage. Cela m’arrange. Je ris doucement alors que je récupère les quelques breloques que j’aurais pu laisser dans la chambre. Un bracelet. Deux. Ma ceinture. Tiens je me demandais où elle était passée celle-là.
Avec un dernier regard vers eux. Un sourire aux lèvres. Je m’échappe par la fenêtre, sautant sur le toit du bâtiment en face et je m’éloigne en courant. Direction les quais.
Le trajet est relativement court. Cette ville portuaire étant relativement plus petite que ce à quoi je m’attendais en arrivant. Les quais sont tout juste gigantesque. Pouvant accueillir un sacré nombre de navires. Et pourtant la ville ne semble pas s’être vraiment développer avec ce bonus.
Etrange.
Curieux même.
Cela ne me regarde pas cependant. Si une ville souhaite rester petite et sans ambition c’est son choix. Un choix débile.
Stop. Cela ne me concerne pas.
Mais ça reste idiot.
Raaah !
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Devenir membre d’une équipe ninja ne ressemble en rien à ce à quoi je m’attendais vraiment. Ou alors c’est pire que ce que mes cauchemars les plus vivants auraient pu faire.
J’exagère.
Il n’est un secret pour personne, ou presque, que la vie des nouvelles équipes de ninjas ne sont en rien palpitante ou incroyable. C’est plutôt une suite constante de tâches répétitives suivit d’entraînements, puis de nouvelles tâches jusqu’à ce que notre sensei nous trouve prêt et se décide à nous faire participer à quelque chose ayant un peu plus de cœur.
Généralement.
Au moins cela nous permet d’en apprendre plus sur chacun d’entre nous.
C’est comme ça que j’ai découvert que Komuro et Hirano, deux personnes avec qui je n’entretenais aucunes formes de relations durant notre temps passé à l’académie, sont en fait cousins. Et vivent ensemble.
Surprenant.
J’en apprends pas mal sur leur vie, sur leur envie, sur leur rêve. Je suis asse surprise d’ailleurs. Des enfants comme eux savent déjà ce qu’ils veulent faire, savent déjà la raison pour laquelle ils sont devenus des ninjas.
Et moi ? Pourquoi suis-je devenue genin outre le fait que c’est parce que je le voulais ?
Je l’ignore. Peut-être que je profiterais de cette équipe pour le découvrir ?
Bien sûr en apprendre sur chacun n’a pas que des points positifs, surtout quand ils ont enfin rencontré ma mère… Ou que je me suis engueulée de nouveau avec elle à cause de ma décision de devenir ninja…
Ces derniers temps… Cela devient de pire en pire. Quand je suis à la maison – si je rentre chez moi, ce qui n’est pas arrivé depuis quelques jours, là déjà. Quand je suis à la maison, donc, il n’est pas rare que ma mère ne m’adresse pas du tout la parole sauf pour m’engueuler sur des sujets qui n’ont rien à voir, ou dont je ne suis responsable en rien.
C’est lassant. Usant. Démoralisant. Et je finis en sortant souvent de la maison en claquant la porte. Repartant vers mon équipe.
C’est ma vie.
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Je crois que les gens me prennent pour une folle. Ils me voient courir sur les toits et voilà que je viens de m’insulter de sale garce trop curieuse. Dérangeant. Non, vraiment. D’habitude je m’insulte de sale vierge vérolée.
Je deviens moins vulgaire. Ce doit être l’âge… Héhé… Évitons de rire. Je serais capable de manquer un saut et de me retrouver au milieu d’hameçons rouillés. Une fin assez pathétique.
Voilà le port.