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| [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot | |
| Aller à la page : 1, 2 | | Sujet: [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot Mer 20 Oct - 16:26 | |
| 1 Il n'avait rien eu à dire. Elle s'était contenté d'accepter sans l'interroger. » Et si nous prenions la route ? Lui avait-elle demandé. Le temple sera sûrement un endroit plus chaleureux, et je suis si pressée.Il s'était contenté d'acquiescer et de sourire, prisonnier d'une logique qui le dépassait. Il était retourné sur ses pas, avait rangé les restes de leur repas dans son sac, s'était vêtu de son manteau, avait passé le nodachi à sa taille puis son sac sur son épaule, puis il était sortit. Une fois dehors, il s'était surpris à ne pas la trouver. Au nord, au sud, à l'est, à l'ouest, rien, la saltimbanque avait disparu. Au lieu de s'inquiéter, il avait empoigné la tête en cuivre de son kiseru pour en étouffer le brasier, sans grand succès. Une voix l'avait interpellé. Sa voix à elle. Il s'était retourné et avait finis avec un beau pâté de neige sur le visage. » Merci, je cherchais justement un moyen de l'éteindre.C'est ce qu'il lui avait dis en se nettoyant le visage d'un revers de manche et en vidant son kiseru de toute la neige qu'il avait avalé. Il avait lâché un semblant de rire puis il l'avait rejoins sur les hauteurs où ils erraient encore... ₪ » Est-ce que tu sais où tu vas ? Demanda Shiro alors qu'ils abordaient la descente d'un col pour le moins " pentu ". » Je crois.Il sourit et s'enfonça toujours plus loin avec prudence. Une avalanche était vite arrivée dans les parages pour qui ne prenait pas garde. Tout autour d'eux le panorama leur offrait la plus pure vision qui soit d'un paradis blanc ici et là écorché par de grandes masses rocheuses aux reflets de ciel orageux. Le pays n'en portait pas le nom pour rien. La neige en était un élément, un vivarium, mais aussi un cimetière comme Sho le constata. La couche de neige montait jusqu'à ses genoux lorsque sa jambe droite heurta quelque chose de solide. En creusant un peu, la découverte n'en fut que plus macabre. » ...L'ambre de ses yeux croisa l'obscurité d'un crane vide dont la mâchoire se décrochait sensiblement. Fracture, se dit-il. Il glissa ensuite son index sur le sommet du crâne humain et le tourna vers ses yeux. Aucun résidu. Le froid l'avait conservé en parfait état. La chair qui l'entourait autrefois, elle, s'était évaporée. » Restons vigilants. Je ne sais pas toi mais moi je tiens à mon crâne.Leurs pas les menèrent au pied d'un second col par lequel on accédait par une mince bande rocheuse. Sho jeta un œil des deux côtés et constata avec un certain pessimisme que le passage ne laissait que peu de place à l'erreur ; sous peine de quoi ils finiraient une vingtaine de mètres plus bas, leur corps brisé à flanc de montagne. Une perspective peu tentante qui ne sembla pas refroidir Shiro. Jouant de son plus bel équilibre, elle le dépassa sans rien dire et traversa le passage aussi facilement que si ses deux pieds avaient évolués sur un plancher parfaitement droit. Arrivée de l'autre côté, elle lui adressa un grand sourire qu'il interpréta comme une manière de lui faire savoir que ce n'était qu'un jeu d'enfants. Il s'arma donc de courage et posa le pied sur le premier rocher, aussi plat qu'il pouvait être glissant. Il aborda sa progression en jouant des bras quand à mi-chemin sa jambe droite s'affaissa brusquement. La roche sous son pied tangua, craqua, puis dégringola dans le vide, entraînant avec elle une réaction en chaîne qui obligea Sho à user d'un shûmpo pour ce sortir de ce bien mauvais pas. » Pas mal, mais ça manque d'un soupçon artistique, lui fit remarquer une Shiro passablement amusée. » Je n'en doute pas, dit-il en se passant une main sur sa nuque. Mais pour ma défense, ce n'était pas l'occasion rêvée de se donner en spectacle.Leurs regards se croisèrent. Sho prit le parti de ne rien ajouter qui aggraverait son cas. Il lutta contre sa propre honte qu'il emprisonna derrière un masque d'impassibilité et poursuivit simplement leur périple, essayant de faire comme si rien ne s'était passé. Une heure après avoir quitté la grotte, le duo arriva dans une large vallée où une rivière de neige serpentait entre les montagnes. Aucune trace d'habitation ni la moindre trace de vie n'était visible à des kilomètres à la ronde. Ils étaient seuls au milieu d'un désert enneigé. Seuls au milieu de nul part. Sho grimpa sur un rocher d'où il put observer le panorama dans son ensemble. Il reconnaissait le cadre à deux ou trois détails près, mais n'arrivait plus à situer le vieux sentier qu'il avait arpenté jusqu'au sommet de la montagne où il avait pu voir le temple. La tempête avait tout recouvert. Son regard se posa un instant Shiro, se demandant comment elle prendrait leur halte. Ils étaient arrivés à mi-chemin selon ses propres estimations. L’autre moitié était sans doute la plus éprouvante des deux. Mais ils leur fallaient tout d’abord retrouver le sentier s’ils espéraient poursuivre leur route. Sans un mot, il prit place sur le rocher, ses jambes se ballottant dans un vide de deux mètres tout au plus. Il râpa la fine pellicule de neige qui reposait par endroit sur la pierre gelée et la porta à son regard. La neige n’était pas compact. Au contraire, elle était plus fragile qu’elle n’aurait du l’être ; signe que la tempête n’avait fait qu’effleurer la région selon toutes vraisemblances. Sho referma son poing et leva le nez en l’air, noyant ses yeux dans le ciel incertain d’un bleu maquillé de blanc. Il conserva cette position pendant quelques secondes, observant le ciel sans vraiment le voir alors que devant ses yeux défilaient les images de son dernier voyage. Si certaines étaient devenues floues après une année d’errance, d’autres laissaient apparaître quelques détails importants. Il se remémora par hasard un immense pic rocheux qui sous un certain point de vue s’apparentait à la tête d’un aigle. Dans ses souvenirs, ce pic marquait le début du sentier montagneux mais après tant de temps il lui était difficile de dire s’il pouvait encore se fier à sa mémoire et tenter le risque de se perdre en cherchant quelque chose qui n’existait peut-être même plus. Mais contre toute attente sa décision fut vite prise. Il ne pouvait pas se permettre d’errer plus longtemps dans cette vallée perdue. Où qu’ils se dirigent, ils leur fallaient en tout cas progresser, quitte à se tromper. S’armant d’un sourire, Sho bascula vers l’avant et retomba sur le sol de ses deux pieds. La couche de neige était moins importante dans la vallée qu’elle ne l’avait été sur le flanc de la montagne. Leur progression n’en fut que plus facile. En deux fois de moins de temps qu’il leur en avait fallu pour arriver dans la vallée, ils trouvèrent le fameux pic en forme de tête d’aigle posé au pied d’une montagne menaçante. De là, Sho dégagea le sentier aussi précisément que ses souvenirs le lui permirent. Ils errèrent longtemps à flanc de montagne, découvrant un panorama pour le moins saisissant ; la chaîne de montagnes se livrant à eux comme un territoire particulièrement somptueux mais tout aussi périlleux. Ils descendirent plus loin une courte pente enneigée qui leur fit atteindre deux petits monts blottis l’un près de l’autre et que Sho savait marqué le seul passage qui pourrait les conduire sur le plateau où le temple était construit. Le passage consistait en un ponton en bois branlant dont les grincements permanents apportaient une touche particulièrement sinistre à l’endroit. Sho s’avança le premier. Par mesure de précaution, il appuya son pied sur la première planche et porta tout le poids de son corps sur elle afin d’en tester la résistance. Rien, pas même un grincement. Intrigué, Sho avança prudemment son second pied et toujours rien. Malgré ce qu’il laissait paraître, le ponton semblait en bon état. En tout cas en assez bon état pour supporter le poids d’un homme. C’est alors qu’il se surprit à sentir quelque chose de très particulier. Il fronça légèrement les sourcils et porta toute son attention sur son propre corps, oubliant aussi bien le ponton que le décor. » Les planches absorbent le chakra…La courbe de son sourire s’accentua un peu plus. Le ponton paraissait en mauvais état parce qu’il l’était réellement. Mais il n’était pas fait dans n’importe quelle matière. Arpenté par n’importe quel être humain normalement constitué, le ponton s’écroulait de lui-même. Seul le chakra d’un individu ouvert à cet art pouvait le traverser sans risques. Il pouvait le percevoir plus clairement à mesure qu’il avançait. Le bois absorbait son chakra pour solidifier la construction dans sa totalité, rendant de ce fait le temple accessible que des seuls personnes capable de malaxer leur chakra. Astucieux. Shiro traversa sans difficultés et tous deux restèrent un moment contemplatif devant l’œuvre de ce qui devait être un sage ou un génie. Mais leurs pas devaient les mener plus loin, aussi continuèrent-ils leur périple à travers un plateau vallonné de petits monts sculptés comme des crocs. Derrière cette véritable « muraille » de dents acérés, le plateau s’ouvrit à eux jusqu’à perte de vue. Élevé sur ce qui semblait être le centre de gravité du plateau, le temple se révéla à eux dans une pierre grise qui depuis leur position semblait scintiller. Comme si les murs pouvaient réfléchir le moindre rayon de lumière perdu. » C’est le temple que tu cherchais ? |
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| Sujet: Re: [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot Ven 22 Oct - 14:54 | |
| [Seuls les administrateurs ont le droit de voir ce lien]Chapitre 2 : L'apprentissage de la vie - Entre Sho Nagoshi et Aishuu Satsubatsu -
[Seuls les administrateurs ont le droit de voir cette image] [Sho] : « C’est le temple que tu cherchais ? »
La voix du médecin coupait le calme planant du lieu. Aishuu était médusée devant une telle prestance, qui s’imposait dans non pas par la force, mais par la monumentalité de l’architecture. Ses yeux se perdaient dans les détails. Rehausser de quelques marches pour accéder à son palier, il se dressait fièrement en haut de la dentition des pics. Il se dressait, neutre, dans un gris étincelant qui tranchait avec l’harmonie blanche. Il se dégageait une force tranquille de ses pierres gelées. Aishuu ignora presque la présence de Sho, tant l’appel du domaine l’attirait. Elle s’avança timidement vers les marches verglacées. Le regard figé vers la toiture d’ardoise de glace qui se creusait sensiblement dans son ascension vers le ciel, la jeune femme se laissa absorbée. Des colonnes grises formaient un couloir ouvert, fermé par de longs rubans de lanternes bleues qui valsaient au vent. Ce fin mouvement ondin hypnotisait muettement les âmes admiratives. Le temple, un tout peu plus haut, se dressait largement derrière des portes de papier japonais derrière lesquelles dansaient les ombres, telles des paravents d’ombres chinoises. Des symboles dansaient sur le papier, serpentant dans une ligne arabesque bleue.
La saltimbanque se retourna, après avoir abandonné le ninja derrière elle. Elle lui afficha un visage si lumineux et si joyeux que ça en était éclatant. Elle lui sourit tendrement et lui fit un signe de la main.
[Aishuu] : « Viens ! C’est ici ! Regarde comme c’est beau et majestueux ! On dirait un rêve ! »
Le jeune homme semblait tout aussi étonné par l’endroit. Aishuu pouvait voir dans son regard une sorte d’intrigue pour les secrets que renfermait le temple. Comme il ne se décidait pas, la musicienne descendit les quelques marches qu’elle avait monté auparavant, se dirigeant pour lui, attrapant sa main entre ses doigts blancs. Toujours aussi souriante, elle le tira lentement vers elle, afin qu’il l’accompagne sur le seuil du temple.
[Aishuu] : « Approche… »
La jeune femme l’entraîna vers elle, commençant l’ascension vers l’antre de la sagesse. Ouvrant la route, Aishuu perçait une avancée entre les lampions qui cherchaient vainement la chute. Gravissant les échelons jusqu’au seuil des portes coulissantes, la saltimbanque resta muette. Elle se retourna, lui lançant un regard curieux. Son sourire se dissipait… Elle posa sa main sur le bois de la porte, devant Sho qui devait probablement se réciter ses instructions de bienséance. La saltimbanque caressa lentement la structure fine de la porte avant de la pousser sur le côté. La porte coulissa délicatement devant eux, ouvrant une nouvelle vision de cet endroit. Sous le regard neutre du médecin, qui cachait malgré tout une certaine réticence quant aux agissements de sa partenaire de voyage, la musicienne s’engouffra dans le lieu sacré. Il resta alors sur le seuil.
[Aishuu] : « Allez, entre ! »
Peut-être ne se rendait-elle pas compte, mais elle était d’une nature si fraîche. Elle contemplait l’intérieur du temple, entièrement muré de portes coulissantes impressionnantes rendues opaque par le papier japonais calligraphié et estampé. C’était un régal pour les yeux attirés par l’art. La jeune femme s’avança dans l’entrée, le sourire aux lèvres.
[Aishuu] : « Y a-t-il quelqu’un ? »
Aishuu était persuadée qu’en son intériorité propre, Sho aurait aimé se cacher, notamment parce qu’il n’avait toujours pas osé rentrer au sein du temple, préférant rester dehors, dans le froid. Pendant ce temps, l’oreille aux aguets, la saltimbanque entendait les coulissements de portes qui se rapprochaient. En face de l’entrée, les larges portes s’ouvrirent d’un coup, présentant un petit homme tassé, courbé par le poids des années. Sa peau légèrement dorée contrastait avec la blancheur des ses cheveux et de sa longue barbe. Il semblait paisible. Sur son visage était appuyée une paire de petites lunettes rondes qui lui donnait un petit air farceur. Largement vêtu de blanc, aux bordures brodées de bleues, il s’avançait, se présentant devant Aishuu. Il tenait dans sa main une petite lanterne de papier, qui luisait simplement d’une lueur bleue calligraphiée. C’était assez magique. La jeune femme s’inclina devant eux.
[Ankisuru] : « Va-t-il rentrer ? Ou espère-t-il que le vieux sage gèle dans son chez lui ? »
L’Améthyste se retourna et fit les gros yeux à Sho, tandis qu’il entrait dans l’entrée. Il s’inclina face à l’homme, puis regarda autour de lui la beauté du domaine.
[Sho] : « Belle demeure. »
La Blanche s’approcha de l’homme, lorsque celui-ci souffla, presque fatigué.
[Ankisuru] : « Ce n’était pas vous que j’attendais ma foi… Qui êtes-vous, et que venez-vous chercher ici ? »
Il fixait inlassablement le ninja, comme s’il attendait une réponse de sa part, alors qu’il ignorait totalement la raison de sa venue ici. Aishuu s’arrêta nette, s’inclinant timidement vers le sage.
[Aishuu] : « Shiro Kage, je viens suivre votre enseignement. »
La jeune femme se sentit soudainement fixée, non, épiée. Quelque chose, ou quelqu’un essayait de lui faire passer un message. Cette idée effleura son esprit, et c’est alors qu’elle se tourna discrètement vers Sho, qui la regardait, avec son éternel visage neutre, essayant de chercher une quelconque réponse… La jeune femme se suffit à lui sourire de toutes ses dents, et se retourna, lui présentant sa chevelure blanche. Le pauvre ninja s’approcha alors pour s’incliner vers le sage.
[Sho] : « Sho Nagoshi, je l’accompagne. »
Sa voix semblait assez plate. Il ne savait réellement pas dans quelle galère il était en train de s’inscrire.
Face à eux, le petit vieux se retourna, soupirant.
[Ankisuru] : « Sho, ferme la porte d’entrée. »
Le « s’il te plait » ne venant pas, le ninja plissa légèrement les yeux, un poil hostile, en visant les mouches qui volaient… Cependant, l’image de la vieillesse se présentant à lui, il se résigna, tournant les talons pour aller faire coulisser la large porte de l’entrée. Dès lors que le « clac » final retentit dans la pièce, le visage caché du sage se déchira d’un sourire…
[Ankisuru] : « Bien. A présent, le temple est scellé : vous êtes donc officiellement mes élèves. Vous pourrez partir quand je jugerai que vous le pouvez. Les incapables restent coincés ici, c’est un moyen de garder mon cachet de prestige. »
Sous les yeux médusés d’Aishuu et de Sho, les motifs bleus s’illuminèrent… La jeune femme avait envie de se cacher en quelque part, sentant que le ninja risquait de lui en vouloir au vue des tournures que prenaient les choses…
Sans dire un mot, le vieux prit la marche en travers des portes ouvertes, le sourire aux lèvres, laissant idiots ses deux nouvelles conquêtes. Il était plutôt fier des deux nouvelles têtes qui venaient d’entrer. Derrière son apparent masque de sournoiserie âgée, il savait analyser le potentiel des gens qui prétendaient vouloir étudier. Tout cela semblait prometteur.
Aishuu et Sho restèrent un moment sans bouger. Lorsque la jeune femme réagit, l’homme commençait à disparaître dans le couloir. Elle se retourna, et s’avança rapidement. S’arrêtant à quelques centimètres de lui, elle lui demanda de vive voix.
[Aishuu] : « Comment doit-on vous appeler ? »
Il répondit au tac au tac, sans réellement porter d’attention à la demoiselle. Sa voix tremblante lança dans la résonance de la pièce…
[Ankisuru] : « Ankisuru-sama, petite dame. Nous ne sommes pas suffisamment intimes encore, et je ne me laisse pas facilement dupée par les diablesses. »
La jeune femme se stoppa net, et se retourna pour lancer un regard meurtrier à l’attention de son compagnon si l’idée de se moquer lui venait à l’esprit. Elle le rejoignit, pendant que le sage s’enfuyait en quelque part. Aishuu se doutait bien que le jeune homme aimerait en savoir plus. Face à lui entre quatre yeux, elle se mordit la lèvre inférieure en cherchant comment lui expliquer ce que venait de se passer…
[Aishuu] : « Hm… Je suppose que tu te demandes où nous sommes, et pourquoi… »
L’absence de réponse eut autant de poids que s’il avait répondu.
[Aishuu] : « C’est un temple dédié à la calligraphie et à l’art des sceaux… Je suis venue me perfectionner… Désolée de t’avoir entraîné là-dedans. »
Les yeux violets de la jeune femme s’illuminèrent soudainement, et, sans prévenir, elle attrapa pour la deuxième fois la main du ninja. Elle s’approcha du creux de son oreille et souffla.
[Aishuu] : « Retrouvons Ankisuru-sama… »
Et une fois de plus, elle serra ses doigts frais sur sa main et l’entraîna dans sa foulée, faisant une unique halte afin de refermer les portes derrière eux. La Pâle souriait, joyeuse, comme si pour elle il n’y avait aucune gravité à la situation. Il fallait avouer qu’aux côtés de l’homme à la chevelure de feu, elle se sentait plutôt en sécurité. Apercevant la dernière porte ouverte par le sage, la saltimbanque ralentit le pas, pour s’approcher de la lumière qui illuminait le couloir. Elle s’arrêta ensuite pour lâcher sa main et se tourna vers lui, apposant ses lèvres sur sa joue. Aishuu lui glissa ensuite.
[Aishuu] : « Aucune raison de s’inquiéter. »
La jeune femme s’approcha de la salle ouverte, passant sa tête dans l’entrebâillement de la porte. Elle entra en souriant, se présentant devant le sage, accompagnée de Sho. La salle était éclairée de petite bougie, et la pièce sentait bon l’encens… Les effluves grises venaient lentement tourner vers leurs narines. La jeune femme laissa un moment tomber ses paupières pour valser ses sens. C’était une délectation sucrée…
Le vieux Ankisuru était muet, le kiseru aux coins des lèvres, assit sur le sol, attendant les deux petits néophytes. Ses petits yeux retroussés entre ses rides, cachés derrière les verres de ses lunettes… Son regard luisait d’une lueur sage, bien qu’il semblait presque facétieux. La fumée formait des ronds dans la salle…
Aishuu s’avança sur la pointe des pieds et se pencha dans une attitude qui ne convenait bien qu’aux gens du spectacle. Le visage fixait le nouveau professeur. Elle n’eut d’ailleurs pas le temps de dire la moindre chose que le vieux lâcha presque aussitôt.
[Ankisuru] : « La journée de cours se termine. Il vous faudra être ponctuel. »
La jeune femme s’arrêta dans sa lancée, retombant sur ses pieds maladroitement. Son regard curieux fit sourire l’homme qui se moqua ouvertement de son élève. Aishuu se renfrogna alors et fit la moue, lâchant d’une voix soudainement sèche et cassante…
[Aishuu] : « Pouvons-nous savoir ce que l’on doit faire alors ? »
Le sage hocha la tête, amusé par son empressement… Il se releva lentement, s’approchant de la saltimbanque pour poser sa main sur son épaule.
[Ankisuru] : « Ma petite, je vais te faire visiter les lieux. Après, je te dirais quoi faire. »
Il l’empoigna alors et lui fit faire demi tour, lui faisant signe de se reprendre car un vieil homme comme lui avançait plus vite qu’elle. La jeune femme grimaça dans son dos, Sho pu d’ailleurs assisté à cette merveilleuse scène. Elle lui emboîta alors le pas sans rien dire, tirant un tantinet la moue. Traversant le couloir sombre avec le kiseru en bouche et la lanterne à la main, le petit homme marchait voûté vers la terre qui allait un jour le reprendre. Il présenta à Aishuu la porte de sa nouvelle chambre, puis celle de Sho juste en face. Elles étaient situées totalement au fond du couloir, à côté d’une ouverture vitrée vers le paysage enneigé. Le lieu était des plus ravissants, ils avaient, dans leur malchance, un petit peu de chance. Le sage rajouta un peu de bonnes nouvelles en leur apprenant que le temple était muni de source thermale tout près de leur chambre respective. Ils leur suffisaient de descendre dans la zone vitrée et de suivre les bougies. La musicienne était ravie. Après ce tour des lieux, le vieux annonça ce qu’ils allaient faire.
[Ankisuru] : « Maintenant, vous allez devoir vous purifier. »
[Aishuu] : « Pardon ? »
Sa réaction fut immédiate après une telle demande. Elle se redressa et tendit l’oreille, visiblement surprise d’une telle annonce.
[Ankisuru] : « Lorsque l’on arrive au temple, il faut ouvrir son mental à une autre vision du monde. Il vous faudra prendre un bain. »
Sho hocha la tête et s’inclina silencieusement, pour rejoindre sa chambre. Aishuu resta seule face au sage, et lui demanda timidement.
[Aishuu] : « Vers où sont les bains pour femmes ? »
L’homme indiqua de son doigt tordu la descente de bougie. La jeune femme le remercia aimablement et lui sourit, avant d’entrer dans sa chambre pour se préparer. Le petit homme se retira dans sa pièce, ricanant à demi voix…
[Ankisuru] : « Vous êtes venus à deux mes petits, ne faites pas les innocents devant un vieil homme… »
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| Sujet: Re: [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot Ven 22 Oct - 20:49 | |
| 2 » Belle demeure, souffla Sho avant de redresser l'échine pour plonger son regard dans celui qui l'observait de si bas mais qui semblait pourtant le prendre de si haut.
Le ton était sans doute un poil ironique, peut-être même moqueur, mais ce n'était qu'un juste retour. Sho avait peine à croire que le pauvre vieil homme qui se reflétait dans ses yeux mielleux pouvait être le maître des lieux. Pourtant, personne d'autre n'était venu se présenter à eux. Un signe qui ne trompait pas malgré ce que cela pouvait avoir comme conséquence.
Sho jeta un regard en coin à Shiro alors qu'elle faisait un pas vers leur hôte. Celui-ci ne manqua pas de lui servir un soufflement que l'eisei-nin interpréta aussitôt comme un soupire de lassitude. Par tous les dieux, qui pouvait bien être ce pauvre homme pour les traiter comme des enfants ? Il n'eut pour seule réponse à cette question que le seul silence qu'engendra la véritable raison de la venue de la saltimbanque dans cet endroit.
Suivre son enseignement... est-ce que c'était une plaisanterie ? Il aurait voulu y croire de toutes ses forces, mais non, elle ne plaisantait pas malgré le sourire qu'elle lui servit dans la foulée. Alors cet homme était quoi, un enseignant ? Le maître d'un quelconque art trop ancien ? Dans quoi s'était-il encore fourré... il n'en avait pas la moindre idée mais il comptait bien en toucher deux mots à Shiro dès qu'il en aurait l'occasion. Soit, pas vraiment dans l'immédiat.
La question du vieil homme refit surface dans son esprit quand son regard croisa à nouveau le sien. Il leur avait demandé qui ils étaient et Shiro était la seule à avoir répondu. Restait qu'il lui était difficile de définir ce que lui-même était venu chercher dans cet endroit. Il eut beau tourner la question une dizaine de fois dans son esprit, il n'en sortit qu'une seule vérité..
» Sho Nagoshi, je l’accompagne.
» Sho, ferme la porte d’entrée, lui demanda simplement le vieil homme.
S'il n'avait pas eu plus de respect pour les gens d'un " certain age ", probablement aurait-il choisi une autre manière d'arranger les choses. Au lieu de ça, il balaya un moment le vide situé entre la tête de son accueillant hôte et le plafond en bois. Tu ne vas tout de même pas lui fracasser le crâne parce qu'il a oublié les règles de politesse avec le poids des années ? Se demanda-t-il en plissant légèrement les yeux. Et puis tout compte fait, la ligne de politesse n'était plus tracée entre eux depuis qu'ils s'étaient permis d'ouvrir la porte et d'entrer. Bien qu'encore une fois, il n'y était que pour très peu de choses.
Résigné à ne pas envenimer une situation dont il ne comprenait que trop peu les fondements, il pivota sur ses talons et partit refermer la porte quand un nouveau glas retentit dans la pièce.
» Bien. A présent, le temple est scellé : vous êtes donc officiellement mes élèves. Vous pourrez partir quand je jugerai que vous le pouvez. Les incapables restent coincés ici, c’est un moyen de garder mon cachet de prestige.
Sho entrouvrit la bouche, frappé par la conclusion du vieil homme, mais l'illumination soudaine de l'écriture bleue la lui referma aussi simplement qu'elle s'était ouverte. Un sceau ? De blocage ? Impossible. Il les connaissait assez bien pour savoir que ça ne pouvait être ça. Alors quoi, un sceau d'une autre couleur ? Il ne lui semblait pas ce souvenir que les sceaux bleu pouvait bloquer tout un temple.. ni aucun autre sceau d'une autre couleur d'ailleurs.
Il se tourna vers le vieil homme et lui lança un regard neutre sous bien des apparences mais s'il était aussi " sage " que ses manies le laissaient prétendre, il comprendrait assurément le message.
A quoi jouait-on ? Le flou total.
A vrai dire même Shiro ne semblait pas se soucier de trouver une réponse à cette question. Ce qui le déstabilisa encore plus. C'était comme s'il était le seul à se demander pourquoi la situation était aussi anormale ? Et il était bel et bien le seul à se le demander. Les deux autres acteurs de la pièce en avaient déjà accepté les rôles.
Le second acte se passait de mots.
Après avoir pris une de ces répliques piquantes en pleine figure, Shiro revint vers lui avec un air passablement coupable écrit sur son visage. Il remarqua la manière dont elle se mordilla la lèvre, un tic probablement, et plongea son regard dans le sien. Elle lui expliqua dans la foulée ce qu'elle était réellement venue chercher dans cet endroit et qu'est-ce qu'on pouvait y trouver. L'art des sceaux... cela expliquait en partie ce qu'il avait pensé en voyant l'écriture bleue s'illuminer quelques instants plus tôt.
Pouvait-il lui en vouloir à présent ? Ce n'était pas vraiment son genre et maintenant qu'il était " condamné " à l'intérieur, autant qu'il en tire un quelconque enseignement.
Shiro sembla lire dans ses pensées et pour la troisième fois, elle l'empoigna et l'entraina dans ses folies. Il la suivit jusque devant la porte par laquelle leur bourreau les avait abandonné. Là, elle le lâcha pour mieux l'embrasser sur la joue et le laisser chaos devant la porte. Il lui fallut plusieurs secondes pour mettre un pied l'un devant l'autre et entrer dans la pièce où ce cher et non moins tendre Ankisuru les attendait lui et Shiro. Et alors qu'il écoutait les chamailleries entre elle et le maître qu'elle était venue chercher - et que lui avait gagné dans un bien maigre tirage de loterie - il lui sembla que les lèvres de la saltimbanque n'avaient pas quitté sa joue.
Ne suivant le fil de leur conversation que d'une seule oreille, l'autre étant comme paralysée car rattachée à la joue que Shiro avait embrassé, il lui fallut un temps pour en comprendre le contenu. C'est d'ailleurs la grimace de Shiro qui le fit sortir de ses pensées nébuleuses. Un fin sourire se dessina sur son visage et lentement mais sûrement il emboîta le pas aux deux étoiles de la scène.
Plus loin, il apprit d'Ankisuru qu'une chambre était dores et déjà à sa disposition - à croire que le vieil homme avait prévu de longue date leur arrivée. Il tourna momentanément ses yeux vers Shiro mais n'obtient rien des siens. Elle semblait bien trop captivée par le discours du vieil homme pour le voir.
» Maintenant, vous allez devoir vous purifier, conclut Ankisuru avec un sourire énigmatique pendu à ses lèvres.
Si Shiro n'avait pas réagis avant lui, il aurait probablement eu la même réaction instantanée. Au lieu de ça, il accepta de jouer au petit jeu de leur hôte, s'inclina, et disparu à l'intérieur de la chambre qu'il lui avait alloué.
Au moment où la porte claqua derrière lui, il sentit un profond soulagement l'envahir. Ne plus entendre la voix sifflante du pauvre vieil homme qui l'avait condamné à rester ici était un réconfort de luxe. Il ne lui fallut qu'un instant pour détailler la chambre. Il avança vers le lit qui occupait le coin de la petite pièce et y posa toutes ses affaires - sac, nodachi et manteau - avant de s'y asseoir.
Décidément, aujourd'hui était un drôle de jour. Il avait fait la rencontre d'une saltimbanque pour le moins originale et surprenante, traverser l'une des chaines de montagnes les plus importantes du pays, trouver un temple caché dans ces mêmes montagnes, et fait la rencontre forcée d'un vieil homme à l'ombre de bourreau à défaut d'en posséder la silhouette. Il avait peine à croire que tout ceci c'était produis en à peine un jour.. un seul..
Il prit son visage dans ses mains et se redressa en entendant les pas de son hôte disparaître dans le couloir et ceux de Shiro s'éteindre derrière un claquement de porte. Il se sentait quelque peu épuisé et se persuada que l'heure du bain était peut-être mieux venu maintenant. Il n'avait aucune idée de ce à quoi les sources thermale pouvaient ressembler mais si cela pouvait lui permettre de se détendre et de faire le vide après tant de péripéties, il n'allait certainement pas s'en priver.
Fermant la porte de sa chambre derrière lui, il suivit le chemin indiqué par le vieil homme en se massant la nuque.
Le dit chemin descendait par un petit escalier dans une large cour bordée par des avants-toits aux tuiles grises. La cour était une sorte de petit jardin aménagé avec plusieurs chemins sablonneux, diverses fleurs et buissons verdoyant, des fontaines et des rigoles où on pouvait entendre l'eau circuler. Les avants-toits couvraient un large couloir extérieur en forme de U. Le même couloir bordé de bougies dont Ankisuru avait parlé.
Sho le suivit jusque devant une porte coulissante qu'il poussa sur le côté et qu'il referma ensuite derrière lui. Deux passages s'ouvrirent immédiatement à lui. Il prit naturellement celui de gauche où une pancarte en bois suspendue au plafond désignait le kanji " homme ". Il rejoignit ainsi une sorte de vestiaire rudimentaire centré autour d'une pièce rectangulaire recouverte de bois du sol au plafond. Un banc commun faisait le tour de la pièce et plusieurs compartiments étaient aménagés dans le mur pour accueillir les effets de ces messieurs. Collés à cette pièce, plusieurs espaces individuels étaient arrangés en box de deux mètres sur trois.
Sho se dirigea vers l'un d'eux et tira le rideau de lin blanc qui en délimitait l'entrée. Ses yeux se levèrent aussitôt vers la petite fenêtre à travers laquelle un bout de ciel rose orangé lui parvenait à travers de doux rayons de lumière. Lentement, il enleva son haut et le laissa tomber sur le sol. Les muscles de son torse sursautèrent au contact de l'air ambiant puis se crispèrent quand il commença à retirer le bandage qui les retenaient prisonniers. La naissance de son cou, ses clavicules, se révélèrent les premières. Puis se fut le tour de ses pectoraux et de ses abdominaux sensiblement dessinés de se livrer à la lumière du soir. Le sceau tatoué autour de son nombril s'illumina sensiblement, se nimbant de rouge, comme si lui aussi frissonnait. Sho passa une main sur ce cercle couvert de stries avant de la remonter sur son cou où trônait la naissance du collier de losanges qui se poursuivaient dans son dos et plus précisément le long de sa colonne vertébrale. Trois kanji les accompagnaient dans leur chute. Le premier brillait sur son cou, le second au premier tiers de sa colonne vertébrale, et le dernier sur le deuxième tiers.
La signification de ces deux alliages était enraciné dans son histoire. Une histoire tantôt éclairé, tantôt obscurcis, semblable à un voile auquel on ne saurait donné de véritable couleur. La lumière attendait autour de son nombril quand l'ombre habitait sa colonne vertébrale.. ses paupières se fermèrent et un sentiment d'infini solitude remonta de ses entrailles pour le submerger. Un long soupire, semblable à une agonie, sortit de sa bouche alors qu'il basculait sa tête vers l'arrière et rouvrait les yeux pour ne pas que les larmes lui viennent. Qu'il est lourd de porter certains poids... c'est ce qu'elle lui avait murmuré avant de tout lui prendre... mais qu'il est encore plus lourd de devoir les abandonner à d'autres.
L'ambre brillant de ses yeux redescendit sur la fenêtre et un à un il défit les bandages de ses bras à l'aveugle, habitué qu'il était à les refaire tous les matins de la même manière. Ses avant-bras accueillaient chacun un trait partant du coude jusqu'à l'extrémité du majeur. Un trait semblable à une ligne de vie qu'une conteuse de bonne aventure aurait abandonné là. Dans la foulée, il retira ses sandales et laissa tomber son pantalon au sol. Il attrapa la serviette accrochée au mur et la glissa autour de sa taille où la courbe de ses hanches ressortaient à peine plus légèrement que ses abdominaux.
En ramenant ses affaires soigneusement pliées dans l'un des compartiments mis à sa disposition, les " tatouages " particuliers de Sho attirèrent le regard d'un homme grassouillet au sourire particulièrement malsain et aux yeux de porcelet.
» Drôle de sceau que tu as là... c'est le mot nuit que..
Sho changea ses appuis et lui lança un regard noir par-dessus son épaule.
» Mêles-toi de tes affaires.
» Calmes-toi mon gros, je ne...
» Je croyais m'être montré assez clair pourtant.
Sho se tourna complètement vers l'espèce de porc sur pattes. L'homme releva le bandeau dans la main de l'eisei-nin et l'insigne qui y était gravé. Il baissa la tête, sourit et se tût. Sho n'y accorda pas plus d'attention et décida de garder son bandeau avec lui, dans le doute. Il quitta les vestiaires et entra au cœur des sources thermales. Il s'agissait d'une grande salle où une légère vapeur s'échappait constamment d'un grand bassin circulaire. Le bassin était vide. Sho balaya la salle du regard mais pas la moindre trace d'Ankisuru comme de Shiro. Tout du moins le croyait-il.
Il ôta la serviette autour de sa taille, la plia au bord du bassin et glissa son bandeau en-dessous. Entièrement nu, il descendit son corps dans le nuage de vapeur et s'immergea jusqu'au nombril avant d'appuyer son dos contre le bord arrondis du bassin.
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| Sujet: Re: [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot Sam 23 Oct - 0:44 | |
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A nouveau en tête à tête avec sa solitude, Aishuu poussa la porte de sa chambre jusqu’au « clac » qui annonçait la fermeture totale du spectacle. Se retournant, elle se laissa tomber, s’adossant contre la porte pour soupirer. Elle était plutôt fatiguée. La femme blanche monta sa main pâle sur son front, et recula sa chevelure. Ses paupières s’abaissèrent lentement pour fermer la porte de sa réflexion. Elle respira longuement pour exorciser la fatigue qui naissait en elle.
La petite chambre était décorée d’encre noire qui sentait et de meuble en bois blanc pure. Il régnait la sérénité entre ses quatre murs qui altérait lentement sur la personnalité de la jeune femme qui se calma des volutes tortueuses. Le lit trônait au centre de la chambre, face à une large fenêtre coulissante qui donnait sur les plaines colorées.
La Blanche se releva pour venir s’approcher du lit, sur lequel était pliée une serviette. Elle l’attrapa du bout des doigts, et se pencha sur sa sacoche pour vérifier si ses créations y dormaient toujours. Les apercevant, elle sourit, et se dirigea vers la porte, la serviette entre les bras. Posant le bout de ses doigts fins sur le bois de l’encadrement de la porte, elle la poussa lentement sur le côté avant de la franchir d’une enjambée féminine. Elle referma derrière elle, et se dirigea vers l’escalier qui menait au dessous du temple. La Pâle suivait la lueur timide des bougies avec un visage tendre et souriant.
Deux portes se dessinaient ensuite, ce qui rassura la jeune femme sur l’intimité qu’elle allait pouvoir avoir. Souriante, elle poussa la porte de son vestiaire respectif et entra dans le couloir qui était longé de petite cabine unitaire. Comme une fleur, elle se dirigea vers une cellule à intimité, attrapant délicatement le rideau de soie. Elle s’intima dans son alcôve, et ouvrit sa sacoche pour disposer deux petits flacons, une bande, qu’elle posa sur la serviette.
La saltimbanque porta sa main à sa ceinture, attrapant le large nœud de soie violet qui était lié dans son dos. Elle tira délicatement du bout de ses doigts frêles et elle défit le lien qui vint choir à ses pieds dans une chute longue comme les arabesques de fumées. Son kimono s’entrouvrit alors comme une plaie béante dans un cœur, dévoilant sa poitrine blanche. Elle retira une de ses manches et laissa le reste du tissu perdre vie à ses pieds, rejoignant la soie dans les limbes. Un fin bandage se mêlant sur environ cinq centimètres de large, légèrement perlé de sang. Sa main vint caresser la bande pour la retirer. Elle la roula alors entre ses doigts avant de revenir couvrir la petite plaie dans son dos de la bande fraîche, qui avait infusé dans des herbes. La jeune femme se pencha ensuite pour faire glisser ses bas de ses cuisses, les attrapant délicatement pour ne pas déchirer leur étoffe délicate. Elle prenait soin de son apparat de scène.
Son corps de coton blanc, fin comme des nuages, entièrement dévoilé, elle se pencha pour attraper la serviette et fit alors une mine déconcertée. Soit celui qui avait pensé à ses serviettes portait toute son attention pour les petites demoiselles, soit, c’était l’œuvre d’un véritable pervers. En effet, lorsqu’elle s’enroula dans sa serviette, elle devait choisir entre ce qu’elle préférait cacher. En effet, il fallut qu’elle pose sa serviette au milieu de sa poitrine afin de pouvoir faire descendre la serviette un peu trop haut sur ses cuisses. Elle fit une petite grimace, car, bien qu’elle ne soit pas une sainte, elle jouissait d’une certaine pudeur. L’Améthyste se baissa pour attraper ses effets, mais pas trop, sentant bien que de toute façon, elle ne le serait pas permise. Intérieurement, elle râla après celui qui avait illustré ce canular.
Quittant le rideau d’étoile de sa cellule dorée, la Pâleur se rendit dans le vestiaire, où elle tomba nez à nez avec une femme qui la dévisagea avec un sourire béa et idiot sur les lèvres. Elle avait des cheveux longs et bouclés, se dandinant vers elle avec un visage porcin. Aishuu la regarda un peu inquiétée, lorsque la dite demoiselle s’approcha d’elle et vint regarder la taille de sa serviette.
[ ?] : « Hm, ça se veut séductrice hein ? »
La saltimbanque de releva pas, longeant son épaule pour la contourner sans un mot de plus. La femme se tourna vers elle et afficha un rictus comblé devant la froideur de celle qui la regardait. Aishuu était gênée par un tel comportement, et l’ignora, ce qui accéléra son entrée dans les termes. La fine bué rendait l’endroit presque mystérieux. La musicienne fixa derrière elle si on ne l’avait pas suivit. Afin de se rassurée, elle s’enfonça dans la fine brume chaude lorsqu’elle tomba face à Sho. La jeune femme resta figée le regard posé sur lui… Elle ne réagit pas vraiment à la scène, elle était plutôt étonnée par la mixité des bains. La jeune femme eut le rouge lui monter aux joues pour la première fois.
Il fallait dire que cet homme semblait prendre un malin plaisir à lui faire découvrir des états qu’elle n’avait jamais explorés. Subitement peinte de couleur, elle tourna la tête pour fixer le sol blanc, tandis que le médecin entrait petit à petit dans l’eau. La jeune femme se sentait particulièrement gênée d’assister à ce genre de scène, et promit qu’elle se vengerait d’Ankisuru de s’amuser ainsi avec ses nerfs. Ses dents blanches vinrent pincer la chair de ses lèvres, sachant que si elle tentait de jouer avec la mèche de cheveux fluette qui tombait de son front, la serviette ne lui résisterait pas. D’ordinaire, elle n’aurait probablement pas réagi de cette manière, cependant, elle ne s’attachait pas forcément aux inconnus d’une nuit. Avec un compagnon de voyage, c’était pour elle une autre façon d’être, avec le respect que cela sous-entend.
L’envie de prendre un bain la rendit un tantinet hésitante, l’Améthyste n’était pas certaine que le médecin l’avait déjà aperçu, mieux valait qu’elle entre dans l’eau. Espérant que la fine vapeur lui serait plus une alliée qu’une ennemie, la saltimbanque se baissa dans son simple apparat qui semblait rétrécir plus elle y pensait. Elle s’assit au bord du bassin, entrant lentement ses pieds dans l’eau chaude et pénétra cette chaleur jusqu’au dessous des genoux. Sa poigne de fer se retira de son gant de velours pour venir attraper un petit flacon que la Blanche ouvrit du bout des doigts, éventrant d’une manière provocatrice le tissu. De douces effluves s’extirpa de leur ivresse, venant embaumer petit à petit le lieu d’une senteur sucré du pays du thé. En effet, dès lors où Aishuu y partait, c’était toujours pour cueillir des herbes bien particulières qu’elle conservait sur elle pour les retravailler quand l’occasion se présentait. Dans les termes, c’était pour une véritable cérémonie afin de purifier et assainir son corps et son âme, comme le vieux sage souhaitait qu’ils fassent.
Le Rayon de Lune vint verser avec délicatesse le contenu du flacon dans l’eau chaude, l’agitant d’une tendresse partageuse. Des odeurs ressortaient plus que d’autres, notamment une plante très connue à Cha, épineuse mais magnifique : la fleur du diable, qui était réputé pour attirer l’inconscience et la réveiller douloureusement. Cette fleur sournoise sentait bon, sucrée et parfumée, dans un timbre de pétales de rose et de jasmin. Aishuu fermait les yeux, transportée, inclinant lentement la tête vers la droite, vers la gauche, se remémorant quelques bons moments… Mais ses paupières se leva brusquement, lorsqu’un évènement plus sombre lui revint en tête. Elle lâcha le flacon dans l’eau dans un moment de trouble, et se baissa au dessus du bassin pour essayer de le ramasser. Elle parvint à le récupéra, et se décida de conserver l’eau qui s’y trouvait, scellant le flacon.
Son visage semblait tiraillé entre l‘expression de son corps et de sa tête. Elle se mordillait frénétiquement la lèvre, attrapant un petit sachet d’herbe pillé qu’elle déposait, pour les laisser infuser, dans le bain. Elle ne fit pas attention à l’odeur, préoccupée. La jeune femme posa ensuite une soucoupe en forme de nénuphar sur la surface du liquide brumeux, avant d’y déposer une bougie travaillée comme un lotus sur le sommet de son crâne, l’allumant tendrement avant de pousser le plateau pour qu’il navigue, diffusant le calme de la fleur comestible. Troublée, Aishuu en oubliait certain détail, comme la situation dans lequel elle se trouvait. Elle avait la tête ailleurs lorsqu’elle repoussa la serviette de sa nudité pour se laisser glisser dans l’eau.
Glissant son corps frêle comme une naïade dans l’eau, la jeune femme se prolongea dans la vie liquide qui lui arrive à mi chemin sur sa poitrine. Comme Tsukuyomi, dieu de la Lune, la jeune femme pâle se montrait en un quart cette nuit. Sa blancheur rappelait tristement l’écume qui venait choir dans les larmes d’Izanagi. Elle avançait, aveugle, dans le bain de brume, cherchant l’éclat du lotus qui s’immolait en silence sur l’eau muette.
La chaleur de l’eau venait caresser son corps frais, tentant de réchauffait la jeune femme de glace qui attendait que sa tête se vide. Elle voulait juste oublier un évènement qui la hantait tant qu’elle n’aurait pas achevé ce qu’elle s’était donnée à faire. C’était en partie la raison de sa situation, enfermée dans un temple réputé mais discret dans le pays des neiges. Il fallait qu’elle passe la vitesse supérieure : elle avait une vie à venger.
[Eido] : « Je n’vous dis pas au revoir. J’ai particulièrement la flemme, et je n’aime pas bien ça. De plus, d’ici quelques semaines et je me retrouverai encore avec l’un d’entre vous dans les pattes. »
Cette phrase ne quittait plus son esprit. Un rictus malsain s’inscrivit alors sur son visage, comme tailladé à la lame de rasoir.
[Aishuu] : « A bientôt… »
Sa voix fine se fondait dans l’harmonie aqueuse qui perlait de gouttes de miroir. La main en avant, l’eau glissait au creux de ses doigts, tandis qu’elle chassait le lotus qui s’enfuyait dans le bassin, navigant d’un bout à l’autre. L’eau freinait ses mouvements serpentins qui s’agitaient à la poursuite de la senteur qui l’enivrait. Ses yeux améthystes semblait s’embuer d’une fine couche de chaleur, le sourire revenant illuminer son visage dès qu’elle s’approchait de la bougie…
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| Sujet: Re: [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot Dim 24 Oct - 1:31 | |
| 3 L'eau était limpide.. pure.. aussi pure que pouvait l'être le puits sans fond d'une source. En abaissant ses yeux sur elle, il découvrit un monde renversé, chaotique, où le plafond faisait office de sol et où son corps était affublé d'abdominaux de part et d'autre de son nombril. Lentement, il joignit ses mains sous la surface, engendrant un léger remous qu'il troubla encore davantage en remontant ses mains chargées d'eau sur son front. Millilitre par millilitre, il renversa le contenu de ses mains sur le sommet de son crâne, faisant couler une myriade de gouttes d'eau le long de sa chevelure et de son visage imperturbable.
C'était le seul rituel que sa mémoire avait conservé de ses jeunes années passées dans la Vallée Verte. On le disait aussi vieux que la vallée. Il pouvait d'ailleurs entendre la douce et rassurante voix de sa mère lui conter le récit de sa création... Saru, le premier des singes, et Saido, son égal, découvrirent à l'aube des temps le cours d'eau qui serpentait au cœur de la toute jeune vallée. Saido, dont le tempérament de feu le poussait continuellement à en dire plus que ses pensées n'en prononçaient, s'éprit de la vallée et en revendiqua la possession. Saru, plus modéré, lui demanda pourquoi ce territoire plus qu'un autre. Saido, trompé par son propre désir, crut que son égal cherchait à altérer sa vision de la vallée pour s'y asseoir en maître incontesté. Prit de folie, il attaqua Saru sur les berges du cours d'eau et durant six jours et six nuits ils se battirent sans jamais réussir à se départager. A l'aube du septième jour, la fatigue les prit et Saido roula jusqu'au cours d'eau où il s'immergea. La légende raconte que l'eau lui ouvrit les yeux sur ce qu'il avait osé faire et que prit de remord, il se prosterna devant Saru pour lui demander pardon. Alors Saru aurait marché jusqu'à l'eau, en aurait pris un peu dans ses mains et l'aurait ensuite versé sur le crâne de son égale pour le laver de sa faute. Le rituel servait à cela.. nettoyer les fautes de l'esprit pour mieux éveiller le cœur, plus bas.
Sa vue entrecoupée par les fragments de sa propre chevelure, Sho observa le déplacement des ondes à la surface du bassin. Chaque goutte d'eau qui coulait de son menton pour rejoindre l'océan à sa taille engendrait une onde qui se déplaçait jusqu'à l'autre bordure. La bordure absorbait le " choc " et renvoyait une réplique miniature de l'onde dans un doux clapotement. Apaisé par cette vision, l'eisei-nin prit une profonde inspiration, scella ses paupières, et bascula sa tête en arrière jusqu'à ce que sa nuque bloque naturellement le mouvement.
Pendant un temps qui lui sembla duré une éternité, il se concentra sur les pulsassions de son cœur. Régulières.. lentes.. calmes.. parfaites.. puis un retour d'onde plus important que ce qu'il avait pu observé lui fit ouvrir les yeux. Lentement, sa tête bascula vers l'avant pour retrouver sa position originelle. Ses yeux frémirent en remarquant la présence de Shiro à l'autre bout du bassin, et dont les pieds barbotaient sensiblement dans l'eau. Il eut à peine le temps de détailler sa silhouette qu'il détourna la tête pour ne pas avoir en voir plus qu'il n'en fallait. Pour qui aurait-il été pris s'il l'avait regardé avec insistance au lieu de détourner le regard comme il venait de le faire ? ... Probablement pour le même genre de personnage qu'il avait croisé dans le vestiaire en venant. Soit une bien piètre image de la noblesse masculine.
Piquées par la curiosité de l'instant, ses pupilles rejoignirent malgré tout le coin de ses yeux. Dans ce nouveau champ de vision, seules les genoux et les mains de Shiro lui apparurent. Son attention se porta aussitôt sur ses mains qui, s'il ne s'y trompait pas à cause de la vapeur, s'affairaient à verser le contenu d'une fiole dans le bassin. Mais si en tout simplicité il aurait du s'interroger sur le contenu, ses questions se dirigèrent plutôt vers les tremblements soudain de la saltimbanque. Il regarda la fiole lui échapper des mains et tomber à l'eau, engendrant une multitude de remous qui vinrent s'échouer contre son torse. Il baissa ses pupilles et fronça sensiblement les sourcils, passablement intrigué.
L'incident ne sembla pas retenir Shiro qui continua son propre rituel, déversant autre chose dans le bassin que Sho ne put identifier. Il l'observa allumer une toute petite flamme flottant à la surface de l'eau, se demandant quelle genre de signification cela pouvait avoir pour elle. Puis il détourna de nouveau les yeux en la voyant remonter ses mains sur sa serviette. La mélodie de l'eau ne le trompa pas. Elle venait de se mettre à nu pour s'immerger dans l'eau.
Soudainement, il réalisa qu'ils se trouvaient tous les deux nus dans le même bassin. Encore une ruse du vieux fou qui leur servait de maître, probablement, car il ne lui semblait pas avoir entendu que les thermes étaient mixtes avant de le découvrir de ses propres yeux. Dire qu'il était gêné n'était pas tout à fait vrai. Il ne ressentait aucune honte à être déguisé du plus simple apparat devant une femme ou devant n'importe qui d'autre. Son corps était son outil de travail. Il avait appris à le tailler pour en exploiter les meilleurs capacités une fois propulsé sur le champ de bataille. Mais ce qui le gênait un peu plus, c'était de se trouver face à face avec une femme dont il savait très peu de choses et avec qui il avait pourtant tissé un lien persistant. Regarder ses épaules blanches dénudées, détailler la naissance de son cou, revenait à la découvrir d'une autre manière, d'une manière qu'on explorait habituellement après avoir appris à connaître la personne et en être tombé amoureux.
Que devait-il faire ? Ou plutôt que pouvait-il faire ? Pouvait-il troubler la paix et la sérennité de cet instant en s'adressant à elle ? Devait-il rester à sa place où marcher vers elle ? Devait-il la laisser errer dans le bassin sans interrompre sa procession ? Après tout, peut-être accomplissait-elle un rituel qui le dépassait de bien des manières ; peut-être pas. En tout cas, il ne pouvait la quitter du regard, sa silhouette se découpant comme une ombre dans la vapeur, son cou et ses épaules apparaissants plus nettement que le reste car éclairés par la bougie.
Une bougie.. qui lui rappelait la nuit des morts célèbrée tous les ans à Kumo. Cette nuit était chère au coeur des kuméens car c'était la seule nuit de l'année où le village tout entier célèbrait l'honneur de ses nombreux morts et disparus. La tradition voulait que chaque demeure présente sur le palier de sa porte un nombre de bougies équivalent au nombre de morts et de disparus que la famille pleurait. Un feu gigantesque était également placée au sommet de la plus haute montagne encadrant le village, brûlant dans la nuit comme une torche brandit vers les cieux par un géant. Cette nuit là, Kumo jouait à refléter la voûte céleste avec ses nombreuses bougies en guise d'étoiles et l'ombre de ses bâtiments pour nuages. Sho se demandait si Shiro avait perdu quelqu'un elle aussi. Elle était d'un naturel si enjoué qu'il lui avait été difficile de percevoir ses blessures jusqu'à présent. Des blessures que tout un chacun possédait, mais que certain arrivait à mieux dissimuler que d'autre.
SHO. – Dans mon village, il existe une tradition qui veut qu'une bougie soit l'incarnation d'une âme disparue et pleurée par quelqu'un.
L'écho de sa voix se dissipa promptement. Il ne savait pas pourquoi il avait prononcé ces mots ou plutôt pour quel résultat. La paix et la sérénité étaient rompues mais ne tardèrent pas à reprendre leur droit pour autant. L'eisei-nin baissa les yeux sur la surface de l'eau en se demandant s'il n'allait pas trop loin, s'il ne cherchait pas inconsciemment à trop en savoir. Shiro était une énigme jusqu'à maintenant. Une énigme qu'il n'avait pas voulu déchiffrer. Mais maintenant qu'il se savait condamné dans ce temple en sa compagnie, il voulait la connaître, la comprendre si tant est que cela soit possible. Sans doute était-ce présomptueux de sa part de penser ainsi car après tout, n'était-il pas lui-même un inconnu pour elle ?
Restait que son désir le pressait de continuer, d'aller jusqu'au bout de sa pensée, quitte à faire une erreur.
SHO. – Est-ce que tu pleures quelqu'un toi aussi ?
Sho perdit la notion du cadre dans lequel il était, se demandant brusquement si Ankisuru avait voulu qu'ils en arrivent à ce degré d'intimité ? Peut-être était-ce là sa vision de la purification.. peut-être pas. Sho ne pouvait de toute façon nier qu'il était plus proche de Shiro qu'il ne l'avait jamais été depuis la grotte. Et il n'était pas ici question de rapprochement physique, mais bien spirituel. Il pouvait sentir le fragile fil de soie qui le reliait à la saltimbanque. Ce lien particulier qui ne demandait qu'à se renforcer. Oui, tout compte fait, c'était peut-être ça qu'attendait Ankisuru.. que leurs âmes se lavent de leurs troubles en les partageant.
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| Sujet: Re: [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot Dim 24 Oct - 20:58 | |
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Elle était calme, l’eau entourant son corps de ses bras limpide dans une étreinte chaleureuse. Les quelques ondes, qui tentaient de fuir, venaient s’échouer vainement sur la peau blanche de la femme de givre. Aishuu se pinça délicatement la lèvre inférieure, appuyant sur la partie charnue rosée. Son index vint se poser à la surface de l’eau, venant effleurer le contour de son reflet qui dansait. Amputée de ses membres qui lui permettaient son agilité dans ses déplacements, elle se regardait, perturbait par l’image qui était projetée sur la surface liquide. Le contact avec sa propre matérialisation aqueuse la rendit confuse, se diffusant timidement pour se cacher dans les troubles de l’eau. Elle entrouvrit la bouche surprise, échappant une fine buée, résultat de l’alchimie entre la chaleur thermale et la fraîcheur de son corps. Qui était-elle ?
Ses paupières fines tombèrent un instant sur ses trésors sensitifs… L’obscurité s’épanouit dans l’esprit de la Satsubatsu qui commençait à se perdre dans l’absurdité de l’aberration naturelle… Etait-ce elle qui s’observait depuis les profondeurs marines ? La peur de s’affronter vint s’immiscer en douceur de son esprit perturbé. Un frisson lui parcouru l’échine avec sournoiserie. Dans cette situation, elle jugea que savoir ce qui se passait autour d’elle était plutôt une bonne chose, ainsi, elle retira ainsi le voile de la cécité. Ses yeux se posèrent à nouveau sur le reflet qui s’était stabilisé… Aishuu égara un sourire qui tenta de dissoudre l’image, mais en vain. Elle regardait, détaillant celle qui lui faisait si peur…
La blancheur de sa peau éclatante créait une confusion dans sa perception des rapports de couleurs. La vision de ce linceul humanisé lui faisait peur. Elle se rappelait du temps de l’innocence, lorsqu’elle priait chaque soir « pour que son père et elle ne deviennent pas des fantômes comme le disait les gens ». Cette phrase la frappa en plein cœur, et dans un instant de panique elle lâcha la bougie qu’elle effleurait, remuant subitement l’eau pour ne plus se voir. Un de ses gestes brusques se remarqua plus que d’autres. En effet, prise à nouveau dans les angoisses qu’elle fuyait, elle frappa l’eau de toute sa paume, comme si elle cherchait à l’écraser, ce qui eut pour résultat d’éclabousser les alentours, jusqu’à proximité du ninja. Aishuu pivota alors violement, créant une marée d’écumes qui vint éloigner le lotus parfumé. Elle ne voulait plus croiser celle qu’elle était. Les miroirs étaient condamnés depuis qu’elle avait eu le malheur de rencontrer les améthystes qui siégeaient sur son visage. Elle était une ignominie dont chaque agissement provoquait son dégoût, même passif.
Cherchant à éviter son reflet, Aishuu perdait totalement la notion de détente du bain. Elle tourna le dos au médecin, sans penser un instant à ce qu’elle pourrait le laisser entrevoir. Dans sa torpeur, sa bande fraîchement enroulée autour d’elle s’imbibait de petites perles de sang. La jeune femme ne voulait plus croiser le regard blafard du fantôme qui la suivait comme son ombre dans le bassin. La pâleur de sa peau témoignait à ses yeux plus la maladie que la beauté lumineuse que les lyriques lui attribuaient. Elle savait qu’elle était malade.
La Satsubatsu ne parvenait plus à dissocier la blancheur de sa chevelure à la maladie qui infestait ses cellules. L’infection se répandait dans ses tissus depuis des générations, et personne n’eut jamais pu parvenir à un remède. Son père était mort comme un chien, loin de tout et près de rien, et elle savait pertinemment qu’avec le choix de vie qu’elle avait fait, il en serait de même pour elle. Elle avait peur de disparaître sans que personne ne se rende compte de rien. Cette saloperie qui creusait les fins sillons de sa chair, sous le bandeau de confusion de la gaze, rendait Aishuu totalement fermée et irritable.
Un jour, elle y passerait aussi.
Les rares personnes susceptibles de s’inquiéter pour elle n’en étaient plus, puisqu’à chaque fois, brutalement, la saltimbanque rompait tous liens avec eux pour s’approcher d’un peu plus près à la liberté. Sans le savoir, dans sa recherche de la vie et de sa douceur, elle s’approchait lentement vers la mort douloureuse et creuse qui lui était programmée.
Sa lèvre s’inclina sous le joug de la morsure qui lui était infligée. Avec le froid de l’après-midi qui avait fragilisé sa peau déjà faible, le passage frêle de ses dents sous l’agacement, déchirèrent le tissu, laissant fuir une goutte de sang. Aishuu paniqua, cachant son visage entre ses mains mouillées, craignant une propagation soudaine des synapses
La perle rouge vint mourir au creux de son menton, essuyé d’un geste saccadé par le dos de la main blanche. Lentement, elle releva la tête, cessant de cacher ses quelques traits. La fine buée venait s’accrocher délicatement à sa peau, comme un habit céleste, tandis que la jeune femme tentait peu à peu de reprendre son rôle. Dans la chute de ses mains qui lui servait de cache-misère, elle retrouvait le sourire, jusqu’à ce qu’elles pénètrent dans l’eau chaude. Son visage à nouveau illuminé d’un éclat faux, elle avança de quelques pas vers le médecin, commençant à avoir des frissons de fraîcheur à force de rester immobile dans l’eau.
[Sho] : « Est-ce que tu pleures quelqu’un toi aussi ? »
Aishuu se contenta d’abord de sourire, fortifiant le masque qui séchait sur son visage. Elle glissa ensuite sa main mouillée dans le blanc de ses cheveux en bataille, fixant le plafond avec un regard serein et apaisé.
[Aishuu] : « Plus le temps passe, et moins je sais quel mort je dois pleurer. »
Un léger rire quitta l’antre intime de ses lèvres, juste après qu’elle ait passé timidement sa langue par-dessus dans le but de les humidifier. L’éternel douceur qu’elle dégageait revint avec un petit goût d’ivresse. Elle continua finalement de s’approcher du médecin qui était un peu plus loin dans les vapeurs.
[Aishuu] : « Je préfère leur rendre hommage plutôt que de tarir des yeux de larmes. Je n’aimerai pas avoir cet effet sur les gens. »
Et elle ajouta, après avoir soupirer d’aise dans l’eau.
[Aishuu] : « Ils sont certainement mieux là où ils sont, je l’espère… »
Affichant un sourire qui tirait encore un peu plus ses zygomatiques vers le ciel, la saltimbanque attrapa la bougie fleurie pour la porter à ses lèvres. Elle déposa un baiser sur les pétales chauffés par la petite flamme puis fit couler la cire brûlante dans le creux de sa main pâle. L’écart entre la température du corps de la Satsubatsu, pourtant dans une atmosphère qui rehaussait sa fraîcheur, et le liquide épais fut tel que la cire se solidifia aussitôt à son contact. Elle déposa ensuite la bougie sur le long fleuve tranquille, et ajouta, le regard plongé dans l’ambre de ses yeux.
[Aishuu] : « L’eau est le conducteur qui nous rapproche le plus de la mort, il parait. C’est pour cela qu’elle a tant de vertu purifiante… »
Le lotus flottait timidement, vidé à moitié de sa consistance. Aishuu le suivait du regard, voyant qu’il se dirigeait peu à peu vers le ninja. Tout en frottant l’une contre l’autre ses mains afin de bien répartir la cire, elle demanda, voyant que la bougie ne semblait pas s’arrêter en chemin.
[Aishuu] : « Et toi, pleures-tu quelqu’un ? »
La voix si pétillante de la voyageuse descendait discrètement dans des tons plus sombres et plus intimistes. Plus l’énigmatique personne se découvrait, plus elle devenait un mystère. Il y avait constamment anguille sous roche, un petit détail qui faisait qu’elle ne pouvait être comprise des autres. Même dans ce bain, face à cet inconnu, elle savait que sa nudité n’était pas suffisante pour chercher à percer les petits points de suture délicats. Son corps pâle ainsi livré pouvait semblait entier, pourtant, il se murait derrière cinq centimètres de bandages un mal au-delà des croyances…
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| Sujet: Re: [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot Dim 31 Oct - 1:01 | |
| Il avait l’impression d’être face à deux visages, deux êtres différents qui se vouaient une haine sans limites. D’un côté, il y avait cette saltimbanque qu’il avait rencontré au fin fond d’une grotte, dans les montagnes situées plus au nord. Une artiste à la sensibilité beaucoup plus prononcée que la sienne, une artiste capable de se jouer de tout, même du mauvais sort. Cette femme là était une intrigue pour lui et, comme il pouvait s’en douter, pour la plupart des gens qu’elle avait du rencontrer au cours de sa vie. L’énigme qui pesait sur sa silhouette d’apparence plutôt frêle n’avait pas tendance à s’estomper avec le temps qui passe, mais plutôt à se renforcer. Shiro était ce qui, humainement parlant, se rapprochait le plus d’un électron libre. Quelqu’un qu’on ne pouvait pas retenir, mais qu’on pouvait toujours décider de suivre, pour peu que son rythme ne nous dépasse pas. De l’autre côté dormait un paradoxe, une colère, que Sho ne réussissait à identifier. Il n’avait fait que l’effleurer du regard depuis qu’il était entrer dans le bassin. La première fois en remarquant sa maladresse, la seconde en entendant le plat de sa main frapper la surface de l’eau. Aussi simplement que l’eau s’était agitée après coup, quelque chose agitait les pensées de Shiro au point de lui faire perdre son juste équilibre. Mais quoi ? Quelle chose pouvait tirailler l’esprit de la saltimbanque ? Sho était loin de pouvoir le deviner.
La réponse qu’elle apporta à sa question ouvrit un semblant de piste qu’il ne chercha pourtant pas à explorer. Il savait probablement mieux que quiconque qu’il valait mieux posséder toutes les pièces du puzzle avant de vouloir le recomposer. Shiro n’avait livré aucun secret jusqu’à présent, tout juste le nécessaire de survie. Mais à travers ses mots, Sho commençait à percevoir un pan de sa personnalité, quelque chose qui relevait beaucoup plus de son intimité que d’une vague information qu’on lâchait au premier venu. Évoquer sa vision de la mort revenait à se livrer sans trop en montrer. C’était évoquer des sentiments profonds, mais bien assez troubles pour ne pas trop éveiller les soupçons. La vision que Shiro avait de la mort, avait quelque chose de troublant, mais de profondément humain. Elle avait souffert, à ne pas en douter, mais impossible de savoir de quoi. La mort de ses proches semblait lui inspirer une forme de délivrance qui pourtant ne réussissait clairement à se détacher d’un certain remord.
Une vision que Sho partageait, mais peut-être d’un tout autre point de vu. Comme tous les êtres de ce monde, il avait vu des gens disparaitre soudainement de sa vie. Comme beaucoup, il en avait souffert. Pourtant, il n’en avait jamais rien montré à qui que ce soit. Il était resté maître de la situation, devenant de ce fait insensible à la profonde détresse qui envahissait habituellement les vivants. Les morts étaient certainement mieux là où ils étaient... mais la vérité voulait qu’ils ne soient plus là, au sens propre du terme. Peu importe les croyances, le vide laissé par une disparition ne se comblait jamais totalement. On pouvait essayer de colmater le néant, celui-ci laissait toujours échapper quelques uns de ses bras pour étreindre les cœurs. Le vide laissé par la mort ne trouvait d’échos que dans la solitude et l’errance. Deux aspects d’une vie qu’on prêtait facilement aux ninja et aux voyageurs. Pouvait-il affirmer pour autant qu’il souffrait à l’orée de la nuit, quand le calme balayait brusquement la surface du monde ? Non. Il ne souffrait plus. Même quand les souvenirs ressurgissaient, il ne souffrait plus. Avec le temps, on apprenait à mentir à son cœur, à lui faire entendre que la douleur, quelle qu’elle soit, devait s’autodétruire à l’amorce. Quitte à n’en subir les dégâts que beaucoup plus tard.
Dans ses yeux d’or, Sho vit le voile de vapeur se fendre progressivement à l’apparition d’un éclat de lumière. L’éclat se fit plus insistant à mesure qu’il plongeait la toile de fond dans l’ombre. La silhouette de Shiro se laissa engloutir par cette ombre, avant de retrouver lentement son contour. La bougie venait de s’arrêter contre l’index du médecin. Pendant d’interminables secondes, il fixa la flamme qui se débattait au sommet de la mèche. Il observa sa danse, comme s’il cherchait à en décomposer les mouvements, alors qu’il n’en était rien. Aussi puissante soit la flamme, elle était toujours soumise à la force du vent. L’eau pouvait écourter son existence, comme la mort pouvait interrompre celle des hommes. Destin, c’est ce qui venait naturellement à la bouche des sages quand cela se produisait. Sho parlait plutôt de fatalité.
Shiro · Et toi, pleures-tu quelqu’un ?
Pleurer... ses yeux n’avaient pleurés personne, pas même sa mère. Son âme, elle, c’était une tout autre histoire ; de celles qu’il ne valait mieux par raconter. En apprenant la mort de sa mère, il n’avait eu aucune réaction apparente, si ce n’était celle d’être resté des heures durant assis sur la même chaise, à regarder la même lettre. Ce jour là, il avait scellé tout ce que les sentiments humains pouvaient engendrer de plus néfastes. Il avait scellé tout ça quelque part au fond de lui, sans relever l’endroit, certainement parce que ça n’avait aucune importance. Ou peut-être parce que c'était mieux de cette manière. Encore aujourd’hui, il lui arrivait de se remémorer ce triste jour, et finalement de fermer les yeux et de se dire que ce n’était jamais plus qu’un mauvais rêve. L’auto-persuasion était un procédé capital pour un ninja de son calibre. Il savait pertinemment qu’il se mentait à lui-même, et par le même procédé se tailladait l’âme coup après coup. L’avantage, c’est qu’il ne pouvait se blesser qu’en lui-même et ainsi épargner une douleur inutile à son entourage. Le prix fort à payer pour continuer à préserver la vie des autres... quoi de plus digne de la part d’un médecin ?
Restait que même sa vie de médecin avait été bouleversé par la mort, tout d’abord avec Sawako, puis plus tard avec Setsuko. Sawako Tsugi était morte au cours d’une mission de repérage à laquelle il avait participé quelques années plus tôt. Malgré ses compétences, il n’avait pas réussi à tenir le lien qui les retenait l’un à l’autre. Ce lien que tout médecin apprenait à maîtriser pour soulager les blessures de ses victimes, en se les infligeant à sa place. Des années plus tard, Setsuko Oïshi avait déserté, le laissant pratiquement pour mort. Aujourd’hui, personne ne pouvait dire si elle avait trouvé la mort ou non, mais pour lui, c’était tout comme. Le seul réconfort qu’il pouvait tirer de tout ça, c’est qu’elles avaient disparus soudainement. Si soudainement qu’il ne l’avait pas vu venir. Mais qui pouvait se vanter de voir la mort venir ?
Sho · Je suis médecin.. j’ai accepté le combat entre la vie et la mort en le devenant. J’ai accepté que des monstres vivent et que des justes meurent.. que la vie offre réconforts et malheurs, tout autant que peut l’offrir la mort.
En prononçant ces mots, Sho leva son regard vers le visage de Shiro qui lui apparaissait plus nettement à présent. Ses yeux suivirent les traits de son visage jusqu’à son cou, avant de descendre soudainement vers la petite flamme qui brûlait à la surface de l’eau. Sans trop savoir pour quoi, il présenta la paume de sa main droite juste au-dessus de la minuscule langue de feu. Il s’imprégna de cette chaleur, tenta de la dompter en fermant son poing, mais rien à faire. Le feu était ce qu’il était, la main humaine ne pouvait le dompter qu’à un certain point, aussi petite qu’en soit la source. Sa vie, comme celle de Shiro, répondait au même critère. Quelqu’un ou quelque chose pouvait essayer de le dompter, il restait malgré tout seul maître de son destin. La mort dans tout ça, n’était jamais plus que le dernier mot d’une histoire plus ou moins longue.
Sho · Comme toi, j’ai laissé partir certaines personnes sans chercher à les faire revivre ensuite. Que mon existence croise la leur était le gage suffisant que je ne les oublierais pas.
Pour clore ce chapitre, Sho glissa sa main droite sous l’eau, paume tournée vers le ciel. Il retira ainsi un peu d’eau du bassin qu’il fit ensuite couler sur sa nuque légèrement inclinée vers l’avant. Les yeux fermés, il se demanda si lui-même n’était pas entrain de livrer un pan de sa personnalité à sa mystérieuse interlocutrice. C’était sans doute les règles du jeu, se persuada-t-il en esquissant un léger sourire. Ankisuru les connaissait probablement sur le bout des doigts.
Amusé, le médecin décida de jouer le jeu du vieil homme. Il ne comprenait ni les raisons ni les enjeux de la partie, mais jusqu’à maintenant le maître des lieux les avait parfaitement mené à la baguette. Il ne savait pas où cela le conduirait, mais le goût de l’aventure avait définitivement piqué sa curiosité. Inconsciemment, peut-être avait-il accepté les règles du temple parce qu’elles n’avaient pas plus de sens que ce qu’il s’apprêtait à faire. Lentement, il pivota sur ses talons, engendrant un léger remous qui ramena la bougie vers Shiro. A la lumière de la bougie, son dos se révéla dans toute sa splendeur et dans tout ce qu’il avait de plus étrange. Le tatouage rougeoyant gravé le long de sa colonne vertébrale annonçait une énigme d’une toute autre sorte.
Le médecin tourna sa tête vers son épaule et rouvrit lentement ses paupières pour regarder la saltimbanque en coin.
Sho · Je t'ai accompagné jusqu'ici pour apprendre l’art des sceaux, n’est-ce pas ? .. alors peut-être, un jour, m’accompagneras-tu, toi aussi, pour découvrir la signification de celui-ci.
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| Sujet: Re: [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot Dim 7 Nov - 2:37 | |
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La buée ondulait avec une tendresse délicate, caressant la peau des joues charnues de la saltimbanque. La main d’eau condensée posait son index sur la lèvre inférieure de la jeune femme, glissant lentement sur sa chair pour tendre largement un sourire de nacre. Le rosé transcendait le bas de son visage tandis que les pierreries de ses yeux s’illuminaient d’une vie. Il régnait chez elle une perturbante sérénité si soudainement parvenue. Aishuu avait gagné en un éclair une certaine assurance face au regard de l’homme, et du sien. Leur corps nu se saluait, mais ne pouvait se tenir tête. Totalement neutre, ils se taisaient, de peur de faire penser à une chose déplacée. La jeune femme comprit que la seule parure qui lui restait pour se protéger des tracés d’ambre, c’était l’enveloppe invisible de la confusion, dont elle aimait parfois se vêtir en secret.
Son corps, toujours aussi blanc, se voyait aménager d’un fin film de folie aux nacres illusoires, perlant de vapeur et d’eau fugace. Sa peau semblait si douce, et sa chair si ferme… Ce fut sur son visage que l’habit se montra le moins discret, revêtant sur ses lèvres un sourire sournois, qui contrastait avec la bienveillance de ses améthystes. Lentement, la musicienne vint porter le bout de son index sur sa lèvre inférieure qui, sous la pire des gourmandises, se vit pincer par ses dents d’ivoire.
Bien sûr, elle l’accompagnerait, cependant, il ne le saurait que par pure déduction.
Aishuu se sentait beaucoup plus à son aise, bien que cette nudité n’engage aucun rapprochement. Dans sa tête, cette façon d’agir lui semblait déplacée, à la limite du voyeurisme, et elle n’en comprenait pas réellement l’utilité : ce n’était pas dans sa manière d’agir, ni de profiter de la vie que de se laisser aller au gré des chaleurs souterraines. Ankisuru avait pourtant une idée pour avoir agit de cette manière, et elle se jura de trouver laquelle. A vrai dire, l’Améthyste ne se questionna pas un instant sur l’impression que Sho et elle donnaient, venant ensemble dans un temple dédié à l’apprentissage des sceaux bleus. Après tout, y avaient-ils d’autres inconnus prêts à s’enfermer dans la gueule du loup sans chercher plus loin à se connaître ?
Elle sourit, son visage si fin se vit totalement déchirer en deux hémisphères contrastés. Il y avait en son regard quelque chose de pétillant, qui s’opposait radicalement avec la neutralité figée de sa peau tendue. C’était agréable, pour une fois, de se laisser aller tendrement dans la chaleur des vapeurs. Aishuu sentait les ondulations de l’eau chaude qui glissaient le long de ses jambes, la faisant frémir de tout son corps.
Sa main vint écailler la surface de l’eau, la laissant glisser entre ses doigts blancs. Elle attrapa le lotus, et vint éteindre la mèche d’un souffle court.
[Aishuu] : « Finit le temps des morts ! Soyons vivants, c’est la plus belle des façons de penser à eux. » Inclinant légèrement la tête sur le côté, la jeune femme lui fit un petit signe de la main, comme pour retirer le trouble invisible qui masquait son cœur. Cependant, en elle régnait une sorte de malaise qui désignait la sensation d’impuissance qu’elle conservait, face au statut du ninja devant elle, à la distance qui les séparait, et à cette nudité qui rendait la situation plus ambiguë qu’elle ne l’était. Cela sortait de son mode de vie de se tenir avec une pudeur si dissimulée sans but ni raison. Ce fut pour rompre cette sensation qu’elle s’avança de quelques pas vers lui, pour laisser sa voix rompre le silence vocal.
[Aishuu] : « Penses-tu que nous vivrons ? Tu m’as suivi dans un bel enfer tu sais ? J’espère que tu ne m’en voudras pas. Si j’avais su, je t’aurais semé du côté du pont. »
Elle lâcha un petit rire sournois, capturant sa lèvre au creux de ses dents… Puis laissa tomber le lotus sur la chaleur d’eau, qu’elle envoya vers le médecin.
[Aishuu] : « Tu peux toujours venir me noyer, si tu m’en veux. »
Le visage de la Pâle s’animait d’une expressivité joyeuse et heureuse, ce qui s’opposa aussitôt avec le recueillement passé. Elle était ainsi aussi changeante que la Lune, aussi légère sur tous les sujets que le vent. D’ailleurs, après un petit clin d’œil complice, elle changea à nouveau du tout au tout. Son large sourire éclatant s’était assagit, s’ornant simplement d’une inclinaison de ses lèvres assaillis par sa mâchoire. Délicatement, elle vint pincer la pulpe de ses lèvres entre ses dents d’ivoire, donnant un petit accent sensuel à cette allégorie du mystère. Son regard précédemment si grand, si brillant, s’était vu réduit par ses paupières, à demi closes, sous lesquelles ses pupilles d’un violet foudroyant s’étaient placées sur la droite pour regarder en coin l’homme présent. Elle dégageait une certaine assurance attirante que possèdent les femmes à hommes. Sur son dos étaient venus se plaquer sa longue chevelure de nacre, mouillée et alourdit par les fourberies des sources. Dans l’inspiration des muses, la musicienne vint porter sa main dans ses cheveux, les élançant vers l’arrière, ce qui laissa un instant en suspension une traînée de perles d’eau. Au même instant, dès lors où les gouttelettes avaient cessé de jouer, un son si particulier s’évada de l’antre de sa bouche, fuyant dans les vapeurs dans une vibration céleste.
[Aishuu] : « Je t’aiderai à traquer la nuit qui a gravé dans ta peau sa signature, si ta curiosité est trop grande. C’est la moindre des choses que je puisse faire. »
Elle regardait, avec analyse, le kanji tatoué dans le dos du médecin qui ne la voyait plus dans son champ de vision. Ses yeux rivés sur l’empreinte de sa peau, qui perlait sous les gouttes d’eau, l’envie de caresser ce velouté l’éprit inconsciemment. En silence, elle s’avança lentement, jusqu’à se retrouver à quelques centimètres se lui, traçant du bout de son index le kanji scellé. Son souffle respiratoire venait caresser son dos, tandis que ses doigts glissaient sur sa peau mouillée…
[Aishuu] : « Sais-tu de quand il date ? Ankisuru pourrait t’aider. »
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| Sujet: Re: [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot Mar 30 Nov - 17:25 | |
| Shiro · Penses-tu que nous vivrons ? Lui demanda-t-elle. Tu m’as suivi dans un bel enfer tu sais ? J’espère que tu ne m’en voudras pas. Si j’avais su, je t’aurais semé du côté du pont.
Le visage de Sho s’éclaira d’un sourire. Ankisuru avait beau être un vieillard amateur de fourberies en tout genre, Sho avait bien du mal à le considérer comme un danger potentiel. La manière qu’il avait eu de les accueillir, lui et Shiro, était sans doute un poil déplacée, mais ce n’était que le juste prix à payer pour être entré sans autorisation préalable. Alors vivre, oui Sho était persuadé qu’ils ressortiraient vivants de cet endroit. Pouvait-il en vouloir à la saltimbanque de l’y avoir conduis ? Non. Il était venu de son plein gré, bien que traîné par sa curiosité.
Sho · Je ne peux m’en prendre qu’à moi-même, répondit-il en ramenant son regard droit devant lui. Ankisuru est un vieux singe en quête d’amusement. Je ne le crains ni lui ni son temple. Quelle que soit les surprises qui nous attendent, je ne crois pas que nous ayons à craindre pour nos vies.
Les cheveux ruisselant, l’eisei-nin plia sa main droite sous la surface de l’eau, la tourna, jongla de ses doigts, s’amusant à ressentir le contact subtile des courants aquatiques qu’il créait lui-même.
Noyer… Sho eut brusquement la vision d’un corps flottant à la surface de l’eau, dos tourné vers le ciel, surnageant dans une marre de sang. Ses yeux s’écarquillèrent sensiblement, bien à l’abri des regards, puis la vision se dissipa, sans raisons. Pendant un court instant, Sho resta béat de stupeur, se demandant où son cerveau avait pu enregistrer cette image. Aucune réponse. La vision avait été des plus claires, mais il n’avait aucun souvenir d’elle. A croire que quelqu’un l’avait sournoisement insinué dans son esprit.
Passablement troublé, l’eisei-nin ne se réveilla qu’au son de la voix de Shiro et encore d’avantage au souffle de sa respiration sur sa peau.
Passablement troublé, l’eisei-nin ne se réveilla qu’au son de la voix de Shiro et encore d’avantage au souffle de sa respiration sur sa peau. Il frissonna. L’air contenu dans ses poumons se figea quand il réalisa pleinement que la saltimbanque se tenait juste derrière lui, un doigt posé sur son tatouage. Les muscles de son dos se crispèrent, comme si le simple contact de son doigt suffisait à les tendre. Leur nudité n’était pas un problème. Pour tout dire, Sho peinait à comprendre pourquoi il réagissait de cette manière. Peut-être qu’il ne s’habituerait jamais au contact des gens, comme une peur incompréhensible terrée au plus profond de ses entrailles. Peut-être qu’il ne comprendrait jamais parce que, tout compte fait, il n’y avait rien à comprendre. Il sourit en se persuadant qu’il perdait la tête à s’interroger de la sorte. Lentement, ses poumons se vidèrent de leur air et les muscles de son dos se détendirent. Finalement, il tourna sur ses talons pour faire face à celle qui partageait son infortune.
S’il y avait bien une question à laquelle il n’avait jamais trouvé ni pistes ni réponses, c’était celle de savoir à quand remontait son tatouage. Il lui semblait simplement qu’il trônait là depuis toujours, qu’il était même né avec. Mais la réalité voulait qu’il ne se souvienne de rien. Ankisuru en saurait peut-être quelque chose, peut-être rien, mais il n’avait rien à perdre à lui poser la question. L’intuition de Sho lui murmurait qu’il s’agissait d’une affaire personnelle, quelque chose qu’il devait résoudre lui-même car lui seul pouvait comprendre. Il ne savait pas pourquoi il avait cette intuition. Il ne s’était jamais vraiment soucié de découvrir le secret de ce tatouage parce que cela revenait toujours à buter contre un mur épais. L’énigme qu’il représentait avait peut-être occupé son esprit quelques nuits passées, il avait aujourd’hui accepté d’être un parfait ignorant.
Ankisuru en saurait peut-être quelque chose, c’est vrai, mais Sho voulait-il réellement savoir ?
Sho · Je n’ai aucun souvenir. Pas le moindre indice. Je crois qu’il est là depuis toujours et pourtant je ne peux m’empêcher de croire que non par moment. Quoi qu’il en soit, tu as raison, je ne perdrais rien à interroger le vieux singe.
? · Et le vieux singe t’écoute.
Il tourna aussitôt la tête. La silhouette ratatinée d’Ankisuru se tenait au bord du bassin, la petite lanterne de papier qu’il tenait dans sa main projetant des ondes bleues à la surface de l’eau. Son regard malicieux filtrait à travers ses petites lunettes ronde. Sho pouvait clairement sentir le poids de ce regard peser sur ses épaules. Il hocha de la tête pour saluer le vieil homme, amusé de ne pas l’entendre rouspéter après le surnom qu’il lui avait donné. Sans doute le lui ferait-il payer plus tard.
Le vieux singe l’écoutait, mais Sho était décidé à le laisser dans l’ignorance pendant un temps. Sa main gauche caressa l’épaule de la saltimbanque puis remonta jusqu’à son oreille.
Sho · Laissons-le mijoter un peu, murmura-t-il en se penchant légèrement vers l’avant.
Sho croyait le vieil homme sensible aux secrets pour se risquer à en garder quelques uns en sa possession. Il adressa un sourire sans teneur à Shiro, et troubla de nouveau la surface du bassin, se dirigeant lentement vers le bord opposé à Ankisuru, sa silhouette se fondant dans la vapeur pour lui cacher le tatouage gravé à même son dos. Arrivé au bord du bassin, il se hissa hors de l’eau et noua la serviette autour de sa taille sans se sécher. Ankisuru leur avait demandé de se purifier et c’est ce qu’ils avaient fait. Sho se sentait en paix avec lui-même. Son corps semblait parcouru d’une force nouvelle et réconfortante. Le vieux singe savait y faire, à ne pas en douter, mais jusqu’où les aiderait-il ? Cela restait à déterminer.
Sho · Quelle est la suite du programme ? |
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| Sujet: Re: [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot Ven 10 Déc - 14:14 | |
| : Pause XP
Sho ( Niveau 31 ) : +60% Bonus Inclus : + 74 XP
Shiro ( Niveau 10 ) : +20% Bonus Inclus : + 48 XP
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| Sujet: Re: [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot Dim 26 Déc - 21:35 | |
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Clap… Clap… Clap…
Les ghetta de la jeune femme claquer le planché dès le petit matin. Sa chevelure était un peu ébouriffée et elle était habillée de travers, comme un matin clôturant une nuit courte. Aishuu s’étirait le dos, faisant timidement craquer les os de sa colonne vertébrale, réveillant une douleur enroulée dans les bandages. Ses améthystes à demi closes, elle posa sa main sur la porte pour la faire coulisser, passant un pieds dans l’entre bâillement. La Blanche étira ensuite sa mâchoire, avant de remarquer la présence du ninja, sur le seuil de sa chambre, tourné vers la vitrine sur l’extérieur qui leur était interdit. L’apercevoir lui ouvrit grand les yeux, et elle fit aussitôt demi tour pour se mettre dans une tenue plus décente, fermant son bref passage d’un glissement de la porte qui heurta timidement le bois en face.
[Aishuu] : « N’a-t-il donc pas accédé au repos ? »
La jeune femme lâcha un soupir, se plaquant un instant dos à la porte, réfléchissant à ce qu’elle pourrait bien porter, lorsque son regard se posa sur une petite note qui dépassait de son placard… Sur la pointe des pieds, la saltimbanque s’approcha, poussant légèrement la porte de l’armoire pour attraper le petit message…
[Aishuu] : « Une tenue pour la petite dame aperçue dans les bains. »
Le papillon fit une grimace en voyant le petit clin d’œil rédigé d’Ankisuru, la main tremblant légèrement, alors qu’elle tentait d’attraper le tissu… Il n’avait pas la couleur escomptée, loin du violet qui lui collait à la peau. Elle attrapa la tenue d’un rouge des plus vifs, et écarquilla le regard en l’apercevant…
[Aishuu] : « Assez tape à l’œil… Penserait-il que je dois me faire remarquer ? »
Un petit rire fuyait de ses lèvres, lorsqu’elle entendit la voix du vieux singe de l’autre côté du mur de sa chambre.
[Ankisuru] : « Les femmes fatales attirent plus le regard demoiselle ! »
Sursautant, Aishuu soupirant à la remarque de ce maître qui semblait fort étrange… Il ne fallait pas chercher à comprendre. Elle déplia le linge, dévoilant une tenue vraiment charmante, mais un peu disproportionnée face à la taille de la jeune femme. C’était en effet assez court et échancré, dévoilant un somptueux décolleté, et de longues jambes fines… La saltimbanque était un peu gênée. Le haut de son kimono se nouait assez bas sur sa poitrine, dévoilant ses formes et quelques uns de ses bandages qui soutenaient son buste. Le motif brodé sur le tissu était si fin qu’il montrait une préciosité agréable l’œil. L’épais ruban violet qui mettait ses yeux à l’honneur encerclait sa taille dans un fourreau étroit, afin d’évaser le tissu sous son étreinte. Le nœud tombait jusqu’à quelques centimètres du sol, où trônait un énorme grelot au tintement grave. Le vêtement cessait à mi cuisse, une longueur qui la mettait un peu mal à l’aise. On voyait à sa cuisse la gaine qui lui servait à attacher ses pinceaux et ses kunai. Ce n’était pas une chose à voir… Avec ses ghetta, elle avait un air noble, ce qui ne lui ressemblait pas vraiment, d’autant plus qu’avec ses cheveux détachés, elle n’avait pas l’impression d’être elle. En effet, le collier de perle prune qui lui servait de lien ornait son cou, glissant sur sa peau blanche pour habiller son décolleté trop plongeant pour elle.
Elle fit une petite moue presque contrariée. Ce n’était plus elle. Alors qu’elle cherchait comment remédier à cela, la jeune femme se rendit compte que ses vêtements violets n’étaient plus là. Aishuu voulut jurer, mais ce n’était pas dans sa nature. Fermant ses yeux avec gêne, elle se mordit la lèvre, ne voulant pas sortir. Une note supplémentaire se trouvait sur son lit… Attrapant le papier entre son index et son majeur, elle lut…
[Aishuu] : « Je décide comment se tienne mes invités. »
La Blanche grogna un petit moment, avant de faire à nouveau claquer ses ghetta sur le planché. S’approchant de la porte, elle la fit lentement glisser, murmurant timidement…
[Aishuu] : « Sho… Tu n’aurais pas vu Ankisuru ? »
L’attente de la réponse fut si longue qu’elle comprit qu’elle parlait dans le vide. Après avoir soupirer en se regardant, Aishuu se décida à sortir de sa tanière. Faisant coulisser la porte, elle passa sa tête dans le couloir, pour n’apercevoir personne. Elle s’élança alors pour rejoindre la pièce à l’autre bout du couloir, depuis laquelle elle avait l’impression d’entendre des voix.
Clap… Clap… Clap…
[Ankisuru] : « Les femmes aiment se faire attendre… »
Ses rires résonnaient aux oreilles de la jeune femme, cependant, elle n’entendait pas ce qui se disait. Alors qu’elle avançait sans rien dire, un courant d’air vint souffler dans les volants de son tissu. La musicienne n’eut le temps de tourner la tête qu’elle entendit un « Hm » se dégageait dans son dos, un monosyllabe sans intonation ni émotion. Ses yeux se posèrent sur les deux silhouettes vides. Les regards étaient creux dans leurs iris saphirs. Leur chevelure était d’une couleur ciel, mais aussi profonde que les bas fonds. Ils passèrent leur chemin sans rien dire, avec un air hautain à l’encontre de la femme en rouge…
Elle ne dit rien… La voix de Sho se fit entendre, et elle afficha le sourire sur ses lèvres. Elle approcha sa tête dans l’entrebâillement de porte, affichant son plus radieux visage.
[Aishuu] : « Bonjour ! »
[Ankisuru] : « Montre-toi demoiselle, ravie le regard du jeune homme. »
Le vieux sage vint la chercher jusqu’à l’entrée, puisqu’elle avait baissé la tête et avait cessé toute avancée.
[Ankisuru] : « Aujourd’hui, nous allons commencer la leçon de calligraphie ! Placez-vous en face des bacs de sables fins. »
Aishuu s’inclina, et s’exécuta, se plaçant devant le rectangle noir et creux qui contenait environ dix centimètres de sables blancs. Il y avait disposé à côté un petit râteau et un bâton, comme pour entretenir un jardin japonais. L’air devint si léger dans ses poumons à la vue de ce matériel. Elle lança un regard amusé à Sho, et attrapa du bout des doigts ce qui lui servait de pinceau, et leva les yeux vers son enseignant…
[Aishuu] : « Qu’écrit-on Ankisuru-sama ? »
Le sage sourit, inclinant la tête, réajustant ses lunettes avant d’annoncer, triomphant…
[Ankisuru] : « Ecrivez épée… Il existe plus d’une douzaine d’écritures différentes… »
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| Sujet: Re: [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot Mar 28 Déc - 15:21 | |
| 二 Ni - A l'épreuve des Plumes
Il remuait ses doigts, la main grande ouverte, son regard suivant chaque mouvement, chaque articulation, en parfaite opposition avec la lumière du matin qui perçait à travers la grande fenêtre de la chambre. Une nouvelle nuit sans sommeil, une nouvelle nuit passée les yeux fermés à mimer l’endormit. Il sourit. Voilà une chose qui n’avait pas changé, une chose qui ne changerait probablement jamais. Derrière son majeur, l’aura du soleil levant tentait par tous les moyens de déborder pour mieux l’aveugler. Ses yeux dorés clignèrent et lentement il fit osciller son majeur vers la droite. Un puissant rayon de lumière lui bondit aux yeux. Il referma ses paupières pour se défendre et poussa un profond soupire en ramenant son bras le long de son corps allongé. Une nuit était passée depuis l’épisode des bains et il ne savait toujours pas comment prendre les paroles qu’il avait échangé avec Shiro. Il n’arrivait pas à s’expliquer pourquoi il se sentait si apaisé alors que tout aurait du le déranger, de la nudité de la saltimbanque, aux mystères d’Ankisuru, en passant par cet endroit. Il bascula sa tête contre son épaule, ses cheveux flamboyant échouant sur son visage. Il rouvrit sensiblement les yeux en direction de la porte et soupira à nouveau. Qui es-tu Shiro Kage ? La question résonna un long moment dans sa tête avant qu’un détail n’attire son regard. Posée sur la petite commode de l’entrée, une pile de vêtements qu’il ne reconnaissait pas avait remplacé celle qu’il avait lui même confectionnée la veille. Il se redressa brusquement en position assise et bascula ses pieds dans le vide avant qu’ils ne touchent le parquet. Non, cette pile de vêtements n’était pas la sienne. Il ne reconnaissait aucune des couleurs posées sur la commode. Le rouge et le violet avaient fait place au noir et au bleu. Les sourcils légèrement froncés, Sho se leva et marcha jusque dans l’entrée. Il balaya la chambre du regard, à la recherche des vêtements qu’il avait abandonné la veille, ses vêtements ! Mais rien, il ne voyait rien. Son nodachi était bien posé contre le mur, là où il l’avait laissé, son sac de voyage juste à côté, mais ses vêtements, eux, avaient disparu. Il ne s’était pourtant pas assoupi au cours de la nuit. Il lui semblait hautement improbable que quelqu’un ait pu entrer dans sa chambre sans même qu’un seul bruit le trahisse. Sho glissa une main sur sa nuque pour s’assurer qu’il ne rêvait pas et qu’il était bien vivant. Il l’était ce qui lui fit froncer encore un peu plus les sourcils. Histoire d’en avoir le cœur net, il fit coulisser la porte de sa chambre et jeta un regard dans le couloir. Rien. Aucun signe de présence, même Shiro devait encore dormir à cette heure de la matinée. Il referma la porte et s’adossa contre elle. Après un moment de réflexion, il retourna à la pile de vêtements et déplia le premier linge. Il s’agissait d’une veste courte aux tons bleu cassis dont les manches larges étaient repliées à hauteur des poignets. Deux boutons et une épaisse sangle servaient à resserrer la veste tout juste sous le cou. Le bas restant parfaitement libre. Sho la jeta sur le lit et déplia ensuite un pantalon à sa mesure d’un noir terne. Le pantalon était lui aussi retroussé à l’orée des tibias et boutonné sur le côté. Peu commun, pensa Sho en le jetant sur la veste. En tout et pour tout, il compta cinq ceintures en fin de pile. Les trois premières ressemblaient plus à d’interminables foulards, chacune d’une matière et d’une couleur différente : noir et losanges marrons pour la première, bleu encre et traits horizontaux bleu turquoise pour la seconde, gris et bordures de couleur noir pour la troisième. La quatrième avait la forme d’un triangle. Elle ressemblait à une peau de bête tannée aux tons marrons clairs avec des nuages dessinés dans un des coins. La dernière ceinture en était une authentique, en cuire avec une belle boucle en bronze frappé d’un drôle d’insigne. Cette fois-ci, Sho écarquilla les yeux. Son bandeau ! Où était également passé son bandeau ? Ankisuru – Soit rassuré. Tu retrouveras tes affaires en partant... enfin, si jamais tu réussis à obtenir mon autorisation pour partir, bien sûr.La voix du vieil homme venait de surgir de derrière la porte. Mais quand Sho la fit coulisser, il ne trouva personne. Sho – A quoi est-ce que vous êtes entrain de jouer ?Sho n’obtint aucune réponse si ce n’est le souffle de la brise venant effleurer la vitre de la fenêtre. Bien décidé à comprendre ce qui se tramait dans la petite tête du vieillard, il referma la porte coulissante et s’habilla en toute hâte. Au final, la tenue complète lui allait comme un gant – à croire que quelqu’un avait pris ses mesures au cours de la nuit. Le seul détail qui lui paressait étrange était la manière dont le manteau s’ouvrait sur la moitié inférieure de son torse. Moitié qu’il s’était efforcé de cacher un maximum sous les épaisses ceintures de tissus ; le triangle au toucher de velours parachevant la décoration de sa taille en tombant sur sa cuisse gauche et la ceinture de cuire retenant fermement les quatre autres contre sa peau. Il hésita à prendre son nodachi, mais décida finalement que ça ne lui servirait probablement à rien, même si l’envie lui démangeait d'apeurer le vieil homme avec le tranchant de sa lame. Il chaussa, pieds nus, la paire de geta en bois qui attendait dans l’entrée et sortit de sa chambre. Il porta aussitôt son regard vers l’extérieur et le ciel encore teinté d’un bleu rappelant que la nuit était encore là une poignée d’heures plus tôt. Il entendit une porte coulissée, mais en tournant sa tête vers l’origine du bruit il ne vit que des portes parfaitement fermées. C’était à croire qu’il rêvait même des bruits. Un poil agacé, il longea le couloir en se demandant où il devrait se rendre pour trouver Ankisuru quand une porte s’ouvrit brusquement sur sa droite. Le vieil homme se tenait là, un sourire aux coins des lèvres, à mimer des applaudissements. Ankisuru – Je savais que cette tenue était fait pour toi ! Entre, je sens que tu as quelque chose à me dire.Sho se déchaussa et entra dans la pièce où deux bacs rectangulaires de sable blanc faisaient office de décoration. Il jeta un regard interrogateur au vieil homme, mais celui-ci n’y accorda aucune attention, préférant lui tourner le dos pour aller s’asseoir à deux mètres tout au plus des bacs. Sho – J’exi...Ankisuru – Tu n’exigeras rien sous mon toit.Sho – Ma...Ankisuru – Je comprends, mais tu n’as qu’à suivre mes consignes et tu n’auras aucun mal à retrouver tes effets. Assis-toi je te prie.Ankisuru désigna le coussin disposé devant le bac de gauche. Sho resta la bouche entrouverte pendant un moment, se demandant comment ce vieux singe avait pu anticiper ses mots. Justement, sans doute, parce que c’était un vieux singe à qui on apprenait plus à faire la grimace.. Résigné, Sho s’assit sur les genoux à l’endroit désigné par Ankisuru. Ce dernier sourit. Sho – Qu’est-ce que...Ankisuru venait brusquement de lui faire signe de se taire. Sho le fusilla du regard, mais le vieil homme semblait trop attiré par la porte d’entrée. Ankisuru – 1.. 2.. et 3 !La porte coulissa et laissa apparaître le visage rayonnant de Shiro. Le vieil homme adressa un clin d’œil à Sho qui croisa ses bras sur sa poitrine en signe d’impatience. Ankisuru – Montre-toi demoiselle, ravie le regard du jeune homme.Le vieux singe se redressa et conduisit Shiro jusqu’à sa place. Sho observa cette dernière du coin de l’œil et manqua de rater une expiration en remarquant sa tenue. Un nœud serra son ventre et le fit battre des cils en ramenant ses yeux sur le petit bac de sable. Shiro prit place devant l’autre bac, juste à côté de lui, et il lui sembla soudainement qu’un mur invisible se dressait entre eux. Un mur qui l’empêchait de tourner sa tête vers elle. Il serra ses poings sur ses cuisses et lança un drôle de regard au vieil homme qui avait repris sa place assise. Ankisuru – Aujourd’hui, nous allons commencer la leçon de calligraphie ! Sho l’écouta à peine, autant qu’il écouta la question de Shiro. Il resta simplement à observer le vieil homme qui ne lui accorda qu’une brève attention. Un mouvement sur sa droite lui fit finalement tourner les yeux vers Shiro qu’il peinait presque à reconnaître dans sa tenue. Il baissa les yeux et la consigne d’Ankisuru s’éveilla dans son esprit comme une évidence. Épée... écrire le mot épée... est-ce que c’était.. Ankisuru – Non Sho, ce n’est pas une plaisanterie.Il soupira, passablement dépassé par l’anticipation du vieillard. Tel un automate, il se pencha légèrement vers l’avant et dessina une sorte de kanji dans le sable du bout de son index. Ankisuru – Qu’est ce que c’est que ça ?Sho ramena ses mains sur ses cuisses et soupira en fermant les yeux. Sho – Épée, tel que je l’ai appris à l’écrire dans ma vallée natale.Ankisuru – Et bien... nous allons avoir du travail..
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| Sujet: Re: [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot Dim 2 Jan - 22:00 | |
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Au-delà leçon, Aishuu se sentait assez mal à l’aise. Les vêtements ne correspondaient pas du tout à sa personnalité, rien que la couleur faisait qu’elle ne se sentait pas vraiment dans son costume de femme de spectacle. Bien que le rouge faisait ressortir la couleur de ses yeux, il s’harmonisait également avec la teinte que ses joues prirent lorsque Ankisuru était venu la èchercher. Certes, d’ordinaire, elle mettait son corps à l’honneur et le montrait sans gêne dans de large décolleté ou encore dans les fentes de son pantalon, or, le tissu était ample et léger, suivant le vent avec un caprice enfantin. Là, elle se sentait coincée et à l’étroit dans l’étoffe qui étreignait son corps. Déjà qu’elle ne se sentait pas forcément très bien, l’impression soudaine qu’elle eut lorsqu’elle s’imposa aux yeux de Sho la fit frissonner, se marquant sur sa peau. L’ivoire de sa dent vint pincer sa lèvre, ses yeux se détachant du jeune homme qui semblait faire de même.
La main de l’Améthyste se posa dans sa chevelure qui voguait alors qu’elle rejoignait sa place, s’agenouillant en face du sable qui lui était destiné. Cela faisait bien longtemps qu’elle ne s’était pas retrouvée face à face avec le souvenir de sa mère. Aishuu apercevait timidement le visage de la femme aux cheveux bleus, qui la regardait, avec une bienveillance pure, dans les sillons du sable dessinés par les dunes. Un fin sourire s’esquissa sur ses lèvres fines, très vite estompé par la gêne qu’elle sentait, comme si un mur s’érigeait et l’enclavait. Pour se protéger des regards, elle baissa la tête, faisant tomber les fils blancs de par et d’autre de son visage, le cachant dans la densité. La saltimbanque se pencha alors autour du bac, attrapant un nombre infime de grains pour les effriter entre son index et son majeur, afin de goûter leur essence. Le sable blanc, le plus fin et le plus doux. Epée, un mot si complexe. Il possédait autant de sens qu’il n’y avait de manière de le manier. Si la musicienne était experte dans le maniement de la plume, elle jouissait moins d’un savoir sur celui de cette arme. Elle l’aimait particulièrement, ce mot, elle l’aimait pour sa légèreté, sa fluidité. Sa tête rêvassait, abandonnant toute attention sur la scène actuelle. Elle imaginait les courbes du mot qui dansaient dans l’atmosphère avec une tendresse imitée. Cependant, la voix de Sho la réveilla de son état second.
[Sho] : « Epée, tel que je l’ai appris à l’écrire dans ma vallée natale. »
Sa voix douce montrait un peu d’animosité envers le vieil homme, bien qu’Aishuu n’était pas sûre de bien avoir été réceptive au timbre qu’il y avait donné.
[Ankisuru] : « Et bien… nous allons avoir du travail… »
La voyageuse s’intéressa alors à la scène qui se jouait, puisque jusqu’à présent, elle s’en était involontairement effacée. Elle se tourna alors vers son partenaire d’infortune et constata son petit gribouillage du bout du doigt, alors qu’il se rasseyait alors. Aishuu inclina la tête sur le côté en le regardant, et se mit à sourire, avant d’étouffer un petit rire. Il n’était nullement méchant ou moqueur, elle était simplement attendrie par un déroulement qui aurait pu se produire avec un enfant.
Elle espérait ne pas l’avoir vexé, car elle ne s’était pas rendue compte plus tôt que cela aurait pu être mal interprété. Sans dire un mot, la jeune femme se releva, et vint briser le mur invisible en milles éclats. Ses pas légers vinrent s’arrêter juste derrière le dos de Sho. Lentement, elle glissa vers le sol, s’agenouillant tout juste derrière lui. Aishuu se pencha ensuite, attrapant sa main pour la diriger sur sa droite, pour la diriger sur le fin bâton souple qui se tenait là. Elle glissa ses lèvres au creux de son oreille et lui susurra.
[Aishuu] : « Je vais t’expliquer, attrape-le et suis-moi. »
Aishuu se releva lentement en tenant le dos de sa main dans sa paume. Après cela, elle déposa son menton dans la vague de son épaule et souffla le long de son cou. L’air était chaud, afin de le détendre…
[Aishuu] : « Tu dois te détendre, et suivre mes mouvements avec légèreté. Fais-moi confiance. »
Lentement, elle fit un geste léger pour amener le bout de bois jusqu’au centre du bac blanc. En abaissant sa main, Aishuu descendit la main de Sho suffisamment pour qu’il glisse l’extrémité du bâton dans le sable. Elle fit quelques gestes délicats du poignet, ce qui fit voyager l’épée dans le nid de sable. Ses yeux s’étaient fermés, puisqu’elle écrivait avec le cœur. La saltimbanque voulait toucher au cœur le ninja pour peut-être lui faire découvrir une manière de penser totalement différente.
[Aishuu] : « Epée, d’une plume d’artiste. La plus fine lame qui soit, celle qui sait lire au travers des apparences… »
Elle serra avec douceur l’étreinte de sa main et saisit son visage d’un sourire tendre. La jeune femme jouait au possible avec ses savoirs de calligraphe qui lui avait été hérité de sa mère. Si jusqu’à présent elle n’avait pu pratiquer cet art, c’était parce que son mode de vie ne lui permettait pas de pouvoir le faire. La saltimbanque adorait écrire de cette manière, c’était en parti pour cela qu’elle avait voyagé jusqu’à Yuki pour commencer un tel apprentissage.
Ankisuru souriait en les voyant, hochant la tête dubitativement, spectateur. Il venait d’apprendre que la jeune femme en rouge, dont le nom lui était probablement inconnue de mémoire qu’elle avait eu un enseignement noble. Il toussota un moment avant de dire à voix basse…
[Ankisuru] : « Je savais bien que je ne devais pas préparer deux chambres. »
Aishuu sursauta, reculant d’un pas et lâchant soudainement le jeune homme, sentant une certaine gêne monter à ses joues. Son regard s’enfuit à l’opposer de la grande silhouette, et elle fit un pas sur le côté pour s’extraire de sa proximité. Elle se pencha pour attraper le bambou placé à son attention et se mit à calligraphier, instinctivement, la tête baissée, mais les yeux fermés.
[Aishuu] : « L’épée guerrière… »
Sans ajouter un mot de plus, elle se pencha pour attraper le second instrument qui était composé d’un bambou long et fin en guise de manche, et d’un plus étroit perpendiculaire à son extrémité, et caressa le sable en effaçant les traces de ses vestiges passés. Dans ce malaise, elle cherchait à montrer autre chose, comme si de rien était. Elle faisait de grand mouvement silencieux pour rendre le bac à nouveau vierge. Alors qu’elle allait se ressaisir de ce qui lui servait de plume, le professeur l’arrêta d’une voix.
[Ankisuru] : « Arrête-toi Shiro. Tu vas apprendre cet art à Sho, je viendrais voir le résultat ce soir. »
Il fit un petit clin d’œil à son élève, derrière ses verres épais, et parti avec un petit sourire en coin, narquois. Il traça les derniers pas vers la sortie et se retira du devant de la scène.
[Ankisuru] : « Sois remarquable ! »
A ces derniers mots, Aishuu ne pu camoufler le rouge soudain qui lui montait aux joues, elle jura d’ailleurs qu’elle se vengerait. Son visage pivota un moment vers Sho, mais elle fit volte face, ses cheveux volant la couleur qui avait pris domicile sur ses pommettes. Elle serra le tissu de sa robe trop courte et murmura à mi-voix.
[Aishuu] : « Tu… Ca ne te dérange pas que je t’apprenne la calligraphie ? »
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| Sujet: Re: [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot Mar 4 Jan - 15:49 | |
| L’écriture est une vérité. C’est ce que sa tante lui avait dis le jour où pour la première fois il avait écris. L’écriture ne ment pas. Chaque trait emporte un peu de nous sur la page blanche. Chaque mot parle un peu de nous. Mais c’est l’association de tous les mots qui nous révèle aux yeux les plus affûtés. Maintenant qu’il y pensait, Sho se demandait où sa tante avait appris tout ça et de qui elle tenait cet enseignement. Maintenant qu’il y pensait, il regrettait de ne pas avoir suivi avec plus d’assiduité les quelques cours qu’elle lui avait donné. Cela lui aurait sans doute éviter le ridicule de cette situation. Écrire n’était pas un art qui lui était méconnu – comme tous les gradés de Kumo, il avait des rapports à rédiger. Non, le fond du problème venait de l’éducation qu’il avait reçu. Il était un enfant de la Vallée Verte, une région ouvertement agricole où les écoles avaient toujours fait place aux étables et aux cultures céréalières. Les mots étaient des armes qu’il avait appris à affûter à l’oral, mais beaucoup moins à l’écrit. En outre, la calligraphie révélait tous les défauts de son apprentissage car elle faisait autant appel au maniement du pinceau qu’au maniement de l’âme humaine et de sa culture. Il n’était sûrement pas un pauvre paysan sans la moindre culture – il avait dévoré nombre de livres de la bibliothèque à son arrivée à Kumo – mais force était de constater qu’il lui manquait la culture des signes et de leurs sous-entendus.
Épée.. un mot au demeurant si simple et qui revêtait pourtant bien des formes. Sho avait tout de suite relever le sarcasme dans la voix du vieillard. Sarcasme avec lequel il avait jugé son écriture. Les yeux baissés sur le bac de sable fin, Sho ne pouvait que constater sa propre ignorance ou pour être tout à fait exact, sa méconnaissance de la symbolique des signes. Le dialecte de la Vallée Verte n’avait pas la perfection du langage commun. Il était beaucoup plus brut, plus imprécis, et sans nul doute trop sauvage pour l’œil si entraîné d’Ankisuru. Sho ne doutât pas que l’homme connaissait le dialecte, mais probablement ne s’était-il pas attendu à le voir un jour tracé dans un cours de calligraphie. Le dialecte de la Vallée Verte n’était résolument pas fait pour la calligraphie. Il était fait pour être parlé de vive voix. Sho sentit le feu lui monter aux joues, mais s’efforça de conserver des traits neutres. Le rire étouffé de Shiro lui fit se mordre l’intérieur de la lèvre, tant il se sentait démuni. Il ne ressentait aucune forme de colère pour elle comme pour Ankisuru, juste de la honte pour lui-même. On demandait à un Juunin de savoir mettre en place une stratégie fiable et ça peu importe la situation et les forces en présence, d’être un exemple pour les jeunes pousses, de servir son village par tous les moyens. Jamais il n’aurait imaginé qu’un jour il puisse éprouver de la honte à ne pouvoir utiliser aucune de ses compétences et se retrouver ainsi ridiculiser devant des inconnus.
Il soupira et tourna ses yeux vers Shiro en remarquant un mouvement sur sa droite. La saltimbanque venait de rompre son immobilisme et vint s’agenouiller dans son dos. Sho fronça instinctivement les sourcils, relevant également le sourire amusé qui commençait à apparaître sous la barbe d’Ankisuru. Il n’avait pas la moindre idée de ce qu’il s’apprêtait à vivre. Ce n’est que lorsque la main froide de Shiro saisit la sienne qu’il réalisa qu’une nouvelle facette de la jeune femme allait s’ouvrir à lui. Son souffle chaud effleura son oreille et il se surprit à réprimer un frisson, ou en tout cas à le dissimuler le plus profondément possible.
Shiro – Je vais t’expliquer, attrape-le et suis-moi.
Il suivit les instructions quasi instinctivement. Sa main se referma sur le pinceau de fortune puis s’abaissa délicatement vers le bac de sable. Le souffle de Shiro descendit dans son cou et instantanément ses poumons se remplir d’air avant de l’évacuer dans un soupire contrôlé. Il pouvait le sentir très clairement, figé dans ses bras et quelque part dans le bas de son dos, ce frisson qui n’attendait que l’occasion de se manifester. Les muscles de ses bras et de son dos étaient crispés. La saltimbanque devait en être consciente. Leur rapprochement le plaçait encore une fois dans une position inconfortable, non pas parce que la présence de Shiro lui déplaisait – bien au contraire – mais parce qu’il était incapable de réagir convenablement. Chacune de ses respirations était un message de plus qui confirmait le trouble qui l’envahissait. Le corps de Shiro avait beau être dans son dos, sa présence était pour lui d’une évidence limpide. Il pouvait clairement sentir sa chaleur voguer contre son dos, la finesse de sa peau contrôler son bras droit, et son souffle s’éteindre contre son cou. Ses yeux ne pouvaient pas la voir dans cette configuration, mais son cerveau pouvait très clairement imaginer sa silhouette appuyée contre lui. Elle était là, plus proche encore qu’elle ne l’avait été dans la grotte. Plus proche parce qu’elle ouvrait un peu de son cœur à travers ses gestes. Plus proche parce qu’elle lui montrait un peu d’elle-même alors que lui se laissait gagner par ses émotions.
Elle lui demanda de se détendre et de lui faire confiance. Il ne sut dire si c’était parce qu’elle était consciente de son trouble ou bien parce que l’exercice le requérait. Son regard tenta de fuir vers la petite silhouette d’Ankisuru, mais le vieil homme se contenta d’un sourire appuyé comme pour lui faire comprendre qu’il serait ridicule de ne pas écouter les conseils promulgués par la femme qu’il avait décidé d’accompagner. Et au fond de lui, il se sentit ridicule de marquer son hésitation. C’était irrespectueux envers Shiro, irrespectueux envers ce qu’elle essayait de lui faire comprendre de bon cœur. Résigné, il prit une profonde inspiration et resserra son étreinte sur le pinceau, se laissant ensuite guider par le mouvement amorcé par la main de la saltimbanque. De nouveaux mots sifflèrent dans son oreille et Sho sentit son corps tout entier se relâcher. L’acte pouvait paraître magique, mais il savait que le timbre de voix de la saltimbanque et la douceur apparente de ses paroles avaient réussis à le soulager. Les points de retenu de son frisson disparurent par enchantement, ses yeux se fermèrent d’eux-mêmes, poussés par une fatigue qui n’en était pas une, pour enfin lui faire ressentir ce que Shiro souhaitait qu’il ressente. Sa main suivait des courbes précises que son esprit dictait presque instinctivement. Le mot épée résonnait régulièrement dans sa tête, mais à chaque fois dans un ton différent, comme si son esprit soulignait les nombreuses symboliques que ce mot pouvait prendre. Shiro voulait une épée faite d’esprit et non de fer. Une épée qui puisse percer son âme à jour, et non sa chair. Et c’est ce que Sho dessina grâce à elle. Quand ses yeux se rouvrirent, il distingua d’abord la main de Shiro sur la sienne, mais pour une fois il n’en frissonna pas, comme s’il en avait accepté la présence naturelle. Ensuite, ses yeux suivirent le prolongement de leur étreinte et il découvrit non sans un sourire le mot « épée » dessiné dans une langue qui dépassait toutes les intonations de voix, tous les dialectes, toutes les prononciations qu’on pouvait lui donner, car il était inscrit avec l’âme et en cela il prenait bien des sens.
Ankisuru – Je savais bien que je ne devrais pas préparer deux chambres.
Comme à son habitude, Ankisuru avait le chic de rompre la magie de n’importe quel instant – sans doute était-ce son but réel afin de toujours garder ses élèves dans le monde réel. Mais tout ce qu’il obtint ici c’est la gêne de Shiro. Sho tourna sa tête et la regarda s’éloigner presque à regret car il s’était surpris à apprécier la chaleur de sa présence près de lui. Elle qui lui était apparu si confiante jusqu’à maintenant, lui révélait une autre facette, plus secrète sans doute. Gêner, il l’était aussi, mais il n’aurait su dire pourquoi. L’éloignement soudain de la jeune femme y était peut-être pour quelque chose, ou peut-être était-ce le pic lancé à son encontre par Ankisuru qui le mettait mal à l’aise. Le vieillard semblait voir à travers leur rapprochement, un rapprochement à plus grande échelle. Sho baissa sa nuque et ramena ses mains sur ses cuisses, sa main droite toujours serrée sur le pinceau.
Sho – Je pensais qu’un vieux singe comme vous ferait preuve d’un peu plus de distinction.
Le vieillard balaya l’air d’un mouvement de main.
Ankisuru – Mon temple, mes règles, tu te souviens ?
Sho soupira. Ankisuru était invivable. Il avait beau percevoir toute la sagesse du personnage derrière ses lunettes, il ne pouvait s’empêcher de ressentir une forme d’aversion toujours plus grand pour son paraître. Pour ajouter à leur malaise, le vieillard ordonna sur un ton détendu à Shiro de lui apprendre la calligraphie avant de quitter la pièce comme si tout avait été prévu bien à l’avance dans son esprit mesquin. Un silence de circonstance s’imposa entre le shinobi et la saltimbanque. Silence durant lequel Sho s’interrogea sur ce qu’il devait dire ou faire pour débloquer une situation que le vieux singe avait visiblement souhaité trouble.
Heureusement, Shiro l’aida en le devançant.
Shiro – Tu… Ça ne te dérange pas que je t’apprenne la calligraphie ?
Sho pivota sur ses genoux pour lui faire face. Quand son regard croisa enfin le sien, il s’inclina en posant ses mains à terre.
Sho – Ce serait un honneur pour moi.
En se redressant, il repensa à la manière dont Shiro lui avait appris à dessiner le mot épée, à la force et à la patience dont elle avait fait preuve à son égard. Il sourit en se disant qu’elle devait le prendre pour un shinobi lambda, un shinobi qui pensait force quand il fallait penser finesse. La réalité était différente, mais il avait conscience de s’être montré sous un jour particulièrement maladroit depuis qu’ils s’étaient rencontrés. A vrai dire, il avait même peine à se reconnaître dans ce qu’il venait de vivre. Au contact de Shiro, il avait plus souvent perdu pieds qu’il ne l’avait fait avant cela. Pouvait-on prêter ça à l’aura de la saltimbanque, au pouvoir magnétique des femmes, ou tout simplement à sa seule incompétence en matière de gestion des sentiments ? Difficile à dire de son point de vue.
Shiro – Je vais te montrer comment dessiner le mot vérité.
Il acquiesça et ramena ses genoux face au bac de sable, bien que son regard resta fixé sur elle. Il suivit attentivement les mouvements qu’elle décrivit à l’aide son pinceau ; le sable fin s’écartant au passage du bout de bambou pour former le mot vérité dans un sens qui dépassait encore son entendement. Décidé pourtant à lui montrer qu’il était impliqué dans cet apprentissage, il utilisa le râteau pour effacer l’épée de son bac de sable puis il se concentra sur le mouvement de son pinceau et essaya tant bien que mal d’imiter les mouvements qu’il avait mémorisé. Malheureusement sa main manquait d’adresse.. ou peut-être était-ce son cœur qui peinait à retranscrire le sens de ce mot. Il se massa la nuque et tourna un regard incertain vers Shiro.
Sho – Tu veux bien..
Comment lui dire ? Comment lui faire comprendre qu’il avait besoin de son aide sans faire passer sa demande pour un rapprochement irrespectueux ? Il secoua sa tête et baissa ses yeux.
Sho – Tu veux bien me prendre par la main.. me montrer ce que mes yeux ne voient pas.. s’il te plait. |
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| Sujet: Re: [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot Mer 5 Jan - 19:44 | |
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Aishuu se sentit soudainement gênée. Voir ainsi cet homme s’inclinant devant elle n’était pas une situation qui lui était commune. Elle avait toujours eu un peu de mal avec la hiérarchie et son fonctionnement, ce qui fait que ce geste poli ne lui était pas forcément connu. Qu’était-ce au final que la hiérarchie pour une femme qui vivait seule, ne connaissant guère les relations humaines et se suffisait à elle-même ? La hiérarchie commençait dès la naissance par les parents. Un père qui avait péri comme un chien, au milieu de l’inconnu, sans laisser de traces de son existence. Une mère romancière, souvent inquiétée de rien, entre son mari qui ne donnait que peu de nouvelle, et une enfant tiraillée par des questions, trop souvent absente ayant décidé que la bibliothèque était son chez elle. Elle ne connaissait plus la hiérarchie, et n’était pas sûre de l’avoir connu. Sa lèvre se pinça sous l’ivoire de ses dents de glace, appuyant délicatement une morsure gênée. Ce malaise naissait de ce sentiment qui ne la concernait pas : la supériorité face à un autre. Ses yeux rivés sur lui réveillèrent une impression qu’elle avait jusqu’à présent totalement éluder.
Sa chevelure enflammée glissait lentement sur sa nuque, avec une souplesse et une fluidité aqueuse. Elle sentait jusque les cendres et voyait les braises, vestiges d’un tel présent des dieux des volcans. Si ses doigts voulaient se mêler à leurs méandres, son esprit lui disait de fuir l’incendie. Elle ne disait rien. Alors que le visage de Sho se relevait, ses yeux d’ambre vinrent fondre comme un filet de miel dans l’eau tiède, qu’Aishuu aurait aimé goûter. Leurs quelques reflets allant entre le jaune et le marron lui rappelait l’étrange lueur dans le regard de Kaishin. La saltimbanque ne voulait plus le voir. Pourtant, ce n’était pas lui. Ainsi figée, elle se tenait là, immobile, tenant dans sa main le bambou qui lui servait d’arme à son cœur pour s’exprimer.
[Sho] : « Ce serait un honneur pour moi. »
La Pâle se réveilla de son emprise envoûtante, reposant ses deux pieds sur le sol de bois. Elle hocha dubitativement la tête avant de peindre un sourire apaisé sur son visage : sa voix était bien plus douce. L’Améthyste s’inclina à son tour et après s’être sournoisement approcher de lui, jusqu’à l’effleurer à quelques millimètres près, susurra au creux de son oreille.
[Aishuu] : « Ce n’est pas un honneur, mais une fatalité, d’apprendre à comprendre son cœur. »
N’ajoutant rien à cela, elle revint à sa place, basculant le bambou dans sa main gauche pour attraper la sorte de râteau. D’un geste si souple et si ample, elle rendit vierge la nappe de sable, la caressant du bout des doigts ce qui la rendit si plane qu’il était difficile d’imaginer que précédemment, le cœur avait encré en lui ses sillons les plus profonds.
[Aishuu] : « Tout comme un cœur, ses pensées peuvent être soudoyées. Il est possible pour le cœur d’oublier, et d’apprendre de nouveaux sentiments. »
Son sourire sembla resplendir comme le soleil au zénith. Sa voix était si calme et apaisée qu’elle donnait presque l’impression d’être entre la parole et la chanson. La douceur dont elle faisait preuve donnait écho à ses mouvements féminins. Quelque chose en elle la rendait si étrange. Son naturel, parfois déconcertant, son mode de vie incompréhensible ainsi que son éducation parfois très rustre, d’autre fois très pointue. En elle se mêlait une multitude d’ambiguïtés qui étaient lisibles en un trait de sa calligraphie, tout simplement car une ligne et un prolongement de soi. Sa main ne flanchait pas, travaillant le sable comme une matière à sculpter, une source à faire vivre.
[Aishuu] : « Je vais te montrer comment dessiner le mot vérité. »
La main droite, aussi blanche que la mort, vint se ressaisir du pinceau d’infortune, se posant délicatement au centre du bac. Avec une souplesse délicate, il descendit lentement, caressant écume, mer et place avec une précision fine, creusant un sillon avec une volupté tendre. Le pinceau glissait, créant quelques courbes, mais beaucoup de linéarité horizontale et verticale donnait une structure forte au mot, le rendant primordiale, vital. Indéniablement, c’était une remise en question illustrée que la jeune femme peignait avec son âme : le dire ou se taire, Aishuu ne savait toujours que faire. Si son ombre était blanche, c’était parce qu’elle-même était noire, contrairement aux apparences. Pleines de troubles et d’une complexité unique, elle n’était réellement connue de personne, et quelqu’un devait-il la connaître ?
Les lignes étaient tracées, et la réponse était donnée.
La jeune femme inclina la tête et la tourna vers le médecin qui tentait maladroitement de reproduire ses mouvements. Son visage illuminé d’un sourire tendre et affectueux, elle le voyait comme un enfant qui cherchait à suivre la même démarche que ses parents, sans pour autant posséder la technique. Ses gestes étaient réfléchis, intimidé et concentré, mais pas sur ce qu’il fallait. C’était assez attachant à voir, il essayait, au moins, il était de bonne foi.
Sa voix vint naître au creux de son oreille. Elle était hésitante, comme si même son esprit était trop embrouiller pour penser limpidement. Etait-ce pour cela qu’il avait du mal à dialoguer avec son cœur ?
[Sho] : « Tu veux bien me prendre par la main… me montrer ce que mes yeux ne voient pas… s’il te plait. »
Le regard tendre d’Aishuu se posa sur lui, calme et touchée par les mots qu’il avait employé. Ils étaient d’une justesse incroyable. Il regardait le visible et non l’impalpable. Se penchant pour déposer le long du sol le morceau de bois, elle laissait glisser sur son visage ses cheveux blancs qui tombaient comme des fils de soie. Ses iris violets demeuraient cependant timidement accrochés à la silhouette du jeune homme. Le dos de sa main foulant avec légèreté le sol, elle commença doucement à déplier son corps pour se remettre en posture humaine. Lui refaisant face, la Blanche s’approcha calmement de lui, pour effleurer son corps jusqu’à ce qu’elle soit blottit contre son dos. La jeune femme était douce, acheminant son menton au creux de son épaule, tandis que ses lèvres filaient vers son oreille. Alors qu’elle se plaçait pour lui apprendre, elle arpenta du bout de ses doigts fins le long de son avant bras, caressant délicatement sa peau. La Pâle en oubliait qu’elle était d’une fraîcheur morbide, laissant probablement un frisson courir le long de son échine. Son index et son majeur marchaient timidement au coin de son poignet, avant de franchir sur sa paume, absorbant par petite touche sa chaleur. La musicienne ferma les yeux, se laissant enivrer par ce contact délicat. Dans son ascension jusqu’à son corps, elle arriva jusqu’à se saisir de sa main gauche, paume contre paume et les doigts tous entrecroisés.
C’est alors qu’elle souffla le long de sa nuque un souffle chaud, avant de murmurer d’une voix calme. Il y avait tout un nuage de douceur que tentait de matérialiser le corps entier de cette femme qui connaissait de nombreux visages, de nombreuses questions, sans en avoir les réponses.
[Aishuu] : « Connais-tu le mot Peine ? Il est assez simple à retranscrire, on passera ensuite à la Vérité. »
Elle soupira alors, sa main droite se posant sur la seconde main du ninja, armé du pinceau. L’harmonie produite par ce geste créait une attraction de l’ambiance, auquel la jeune femme se montrait particulièrement sensible. Elle lui indiqua, délicatement, le coin supérieur du bac, caressant le sable pour former des lignes douces à la courbe féminine. « Peine », un mot si sombre qu’elle avait dû lui injecter de la lumière en s’appelant « Shiro Kage ». Un mot lugubre dont elle n’aimait aucunement les échos qui lui évoquait le plus souvent la douleur qui remuait son corps charcuté au vif de l’intérieur, et ce, par les gênes. Etait-ce sans doute pour cela qu’elle préférait que ceux qui la connaissaient la nomment Ai. « Ai », dont le sens était si différent.
Le tout prenait forme avec subtilité…
[Aishuu] : « Voilà Aishuu. Avant de retourner sur la vérité, tu dois savoir que Shiro n’est qu’un pseudonyme. Au-delà du mot, du sens qu’il a, sache que c’est également mon prénom. »
Son sourire se tint un moment sur son visage, bien que tout son corps soit remué par un long frisson.
[Aishuu] : « Simplement, c’est entre toi et moi. »
Prenant instinctivement le râteau pour effacer le prénom de la femme, Sho rendit au sable sa virginité blanche. Aishuu n’avait pas ressenti de réaction suite à ce qu’elle venait de lui apprendre, probablement parce qu’elle ne pouvait voir son visage, se contentant d’imaginer ses galbes depuis l’arrière de son corps.
[Aishuu] : « Tu dois penser par le cœur, le laisser illustrer ses vérités dans ton esprit, et c’est ton âme qui doit l’écrire. Ni tes yeux, ni ta main n’ont à s’utiliser dans cette maîtrise. Il faut se confronter à soi-même. »
Sa main glissa le long de son poignet, libérant sa mobilité autour du pinceau. Afin de rendre son corps plus apte à apprendre cet art, elle souffla un air chaud au creux de son cou pour détendre la totalité de ses muscles, et calmer ce qui pourrait le troubler. C’était ainsi qu’elle soufflait sur les poussières qui entravaient la vision.
Le rayon de Lune affichait un air posé, bien que dans sa tête il régnait une anarchie de questions. Au final, elle était peut-être plus trouble que lui, comme l’eau glacé qui heurtait l’eau limpide. Ses paupières se fermèrent timidement, ouvrant une nouvelle dimension à ce moment privilégié. La caresse de son âme vint se confronter à un tourment qui lui semblait presque inconnu. Qu’était-ce que l’attachement ? Ce sentiment étrange de ne plus être seule et d’apprécier cette sensation ? Aishuu était une solitaire, au-delà même de l’imaginable, elle vivait au non de la liberté, s’accaparant même des hommes comme objets de pouvoir et de maîtrise de ses lendemains vaquant. Si le silence la transcendait, dans son esprit, c’était une cacophonie pépiante et une harmonie bruyante.
[Aishuu] : « Imagines-toi dans une prison de glace, seul, à chanter pour ton âme. »
Ce petit clin d’œil ne put qu’entraîner un rire de sa part. Aishuu ne se rendait pas compte du fait qu’elle resserrait lentement l’étreinte de sa main dans la sienne. La fraîcheur de ses doigts, de sa paume, devenait de plus en plus tiède et agréable. Ses joues également se chauffèrent d’un rouge discret. Son souffle descendit du creux de son oreille jusqu’à sa nuque, pour filer au départ de son épaule.
[Aishuu] : « Tu dois juste penser à la vérité de son cœur pour pouvoir calligraphier un tel mot. Certains mots sont plus durs que d’autres à visualiser. C’est ce qui différencier les calligraphes des guerrières, d’un sabre ou d’un pinceau. »
Elle ne savait pas tellement si elle devait rester à cette proximité de Sho, ou si elle devait se reculer pour que ses idées lui reviennent. Cette blanche n’avait jamais douté d’elle jusqu’à présent, or, il lui retirait inconsciemment cette assurance, en la détournant de la voie de sa raison.
La musicienne n’eut pas le temps de se rendre compte que son visage était posé contre l’épaule du shinobi. Se surprenant, elle sursauta presque, reculant d’un pas, sans pour autant lâcher la main qu’elle tenait fermement depuis le début. Pourtant, dans sa tête tout lui disait de le lâcher, ou d’agir différent avec lui, seulement, quelque chose la retenait.
Libre comme le vent, elle ne pouvait plus se permettre ce genre de défaillance, d’autant plus qu’elle vivait très bien jusqu’à présent, d’eau fraîche. Ce n’était pas normal pour elle d’agir de cette manière. Les hommes étaient en général un moyen de s’abriter, ou de s’alimenter, lorsqu’ils se montrent plus galant, mais ils n’étaient pas pour elle un soutient. Encore moins des élèves. La saltimbanque ne se le justifiait pas, sans doute en voulait-elle un peu à Kaishin de l’avoir envoyé se jeter dans la gueule du loup, d’avoir apprécier cette sensation pour finir par le laisser disparaître sans prévenir. Elle lui en voulait, ensuite, d’avoir fait comme si de rien était jusque là, revenant comme un cheveux sur la soupe, comme s’ils avaient vécu ensemble, sans s’être quitté. Oui, certainement, elle en voulait à Kaishin d’avoir inscrit son cœur d’une émotion sans sentiment fatal, bien qu’elle savait que ce n’était pas aussi simple. Pourtant, il n’y avait plus rien de compliqué.
L’ambre et l’améthyste étaient-ils fait pour cohabiter ?
La chaleur de son corps paralysait momentanément sa pensée. Pourtant, il ne manquait guère d’activité dans sa tête tourmentée, mais il la soulageait du poids de ses propres questions. C’était réellement agréable, reposant, un tel pouvoir d’apaisement. Sho était médecin, la probabilité qu’il le fasse donc exprès était assez élevée. Combien de médecins n’avaient pas connaissance de la manière de calmer un esprit, et l’employer à des moments qui ne s’y prêtent pas forcément ? De forts soupçons se posèrent sur les épaules du ninja, au-delà du simple poids de sa tête.
Aishuu reprit sa petite habitude, soufflant chaudement sur l’épiderme du jeune homme, levant le prune de ses yeux sur le sable blanc. Au vue de ce qui se passait plus loin que le bambou, naviguant dans les dunes planes de sables, la jeune femme approcha davantage ses lèvres de son oreille, l’effleurant de sa présence.
[Aishuu] : « A quoi penses-tu pour ainsi agir face au sable ? »
Le timbre de sa voix claire vint briser le silence de la scène, brisant peut-être un moment privilégié. La douceur de sa peau caressa celle du ninja, inspirant les effluves qui la composaient pour en faire une parure unique.
Quelque chose la laissait penser qu’Ankisuru était dans les parages, il était étrange de sa part d’ainsi les laisser, probablement reviendrait-il au moment où plus personne l’attendrait. Un peu comme il se l’était permis au bain, la veille. C’était en effet un moyen de faire la plus mauvaise impression possible pour un premier jour. Ce qui l’éveillait sur cette piste était le fait qu’un silence quasi parfait régnait dès lors que Sho où elle ne déniait parler, pourtant, elle avait croisé deux inconnus, qui, selon leur situation, devait être dans les bains tous deux. Mais où était Ankisuru ? La Pâle avait beaucoup de mal à se faire à l’idée qu’il se soit laissait aller à embêter les deux autres sans se manifester auprès d’eux. Pourtant, Ankisuru n’était pas là.
A vrai dire, dans la tête d’Aishuu, Ankisuru sonnait plutôt comme une excuse, ou même plutôt un moyen de s’extirper de la situation qu’elle avait inconsciemment crée, et qui semblait lui échapper avec langueur.
[Aishuu] : « A quoi penses-tu ? » répéta-t-elle comme une amorce, une accroche, un refrain afin de restructurer son attention sur un domaine palpable qu’elle était en mesure de contrôler…
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| Sujet: Re: [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot Ven 7 Jan - 13:54 | |
| Le silence embaumait la pièce. Les yeux rivés sur ses mains, Sho se demandait jusqu’où cette expérience les conduirait lui et Shiro. Il commençait à s’en rendre compte ; les méthodes d’Ankisuru avaient changé les rapports entre eux. Lui qui criait au vieux singe à chaque fois qu’il le croisait, devait bien reconnaître que celui-ci cachait plutôt bien son jeu sous son épaisse barbe blanche. Son sourire s’affina sensiblement. Quelque chose avait changé entre lui et la saltimbanque.. peut-être leur manière de s’appréhender ? Il lui était difficile de se l’avouer, mais sa présence avait quelque chose de réconfortant et d’apaisant pour le solitaire qu’il était. Elle n’appartenait pas à son monde, n’en connaissait probablement pas les codes, c’est sans doute ce qui la rendait si unique à ses yeux. Elle n’était pas corrompue par une doctrine encrée dans son crâne depuis son plus jeune age.
Shiro suivait le cours de sa vie sans se soucier des grandes intrigues politiques. C’est le sentiment qu’il en avait.
Subitement, ses pupilles de feu roulèrent sur le côté et suivirent les déplacements de la saltimbanque jusqu’à ce que sa silhouette s’efface de son champ de vision. Son sens de l’ouïe et du toucher prirent aussitôt le relais, suivant instinctivement les perturbations dans l’air ambiant pour comprendre que Shiro retournait se placer dans son dos. Il se demanda si la voie du corps était réellement indispensable au bon usage de la calligraphie ou si c’était le moyen trouvé par Shiro pour l’y sensibiliser. Ankisuru lui aurait probablement répondu que ça n’avait pas d’importance, que seul le résultat final en avait. Il frissonna. Les doigts de Shiro étaient froids, mais pas le genre de froid qu’on pouvait ressentir en enfonçant sa main dans la neige. Non, il s’agissait d’une froideur contenue, une sorte de brise fraîche qui ne laissait aucun résidu d’humidité, juste le souvenir vivace d’une caresse.
Sho initia un mouvement pour entrevoir le visage de la saltimbanque, mais c’est finalement sa main serrée paume contre paume contre la sienne qui attira toute son attention. Nécessaire ou non, leur rapprochement lui inspirait quelque chose.. un mot perdu.. depuis trop longtemps. L’Eisei cligna des yeux puis il les ferma instinctivement en sentant à nouveau le souffle de Shiro se précipiter le long de sa colonne vertébrale depuis sa nuque. Elle voulait qu’il dessine le mot « peine ». Elle le disait simple, mais Sho lui connaissait bien des traductions et bien des sens. Un si grand nombre en réalité qu’il hésita encore une fois. La main droite de la saltimbanque le guida jusqu’au chemin de sable. Avec la légèreté d’une plume – ce que sa main n’était sûrement pas – elle lui fit tracer un mot sombre, tortueux, mais dans lequel un semblant de lumière semblait se débattre. Sho l’observa longuement, allant même jusqu’à incliner légèrement sa tête pour en découvrir les contours les plus sournois.
Peine.. c’est bien ce qui était écris. La main gauche du shinobi laissa échapper une étreinte nerveuse. En découvrant le mot sous cette forme, il se surprit à voir un puit sans fond où le reflet de sa propre douleur dégringolait au son d’un écho sourd, semblable à un chuintement. Oui.. il connaissait bien la peine que Shiro lui présentait. Une peine vivace et omniprésente que certains êtres humains portaient comme un fardeau ; et dont il avait lui-même fait l’expérience. Un mauvais souvenir tout au plus.
Shiro – Voilà Aishuu. Avant de retourner sur la vérité, tu dois savoir que Shiro n’est qu’un pseudonyme. Au-delà du mot, du sens qu’il a, sache que c’est également mon prénom.
Il cligna des yeux et s’appuya un peu plus contre le corps de la saltimbanque. Shiro… Aishuu… il lui semblait que ces deux prénoms s’opposaient comme l’ombre et la lumière ou l’eau et le feu. Il aurait pu s’interroger sur la raison du mensonge, mais c’était une perte de temps pure et simple. Les faux noms étaient monnaie courante dans le monde shinobi. Et si Shiro, ou Aishuu, n’en était pas issue au prime abord, elle devait avoir de bonnes raisons de cacher sa véritable identité. Après tout, ils étaient des inconnus l’un pour l’autre ou pour être tout à fait exact, ils l’étaient jusqu’à cet instant. L’Eisei ne savait pas pourquoi la jeune femme s’était résolue à lui révéler son véritable prénom, mais c’était une marque de confiance, une preuve qu’elle ne le craignait pas. Il serra sa main gauche et releva ses yeux vers le coussin où Ankisuru se trouvait installé quelques instants plus tôt. Il entendit le rire de celui-ci résonner à son oreille comme un lointain songe. Vieux singe mesquin, pensa-t-il.
Sho – Entre toi et moi.
L’Eisei accompagna son murmure d’un mouvement de la main. Il saisit le râteau et effaça le prénom de la saltimbanque. Le geste se voulait symbolique. A travers lui, Sho montrait à Aishuu que son secret resterait caché aux yeux du monde. Il lui montrait qu’elle pouvait avoir confiance en lui.
La vérité était là, quelque part, mais le chemin pour la tracer demandait encore d’autres détours. Sho prit une profonde inspiration, ses poumons se gorgeant d’air pur, et ferma ses yeux. Sa main droite retomba d’un centimètre dans le vide, pendant mollement au bout de son poignet. Les paroles d’Aishuu martelèrent son cerveau avant de se dissiper dans un panache d’idées et de visions. La vérité absolue, celle que tout homme rêvait d’obtenir, celle pour laquelle on pouvait déclarer guerres et malédictions ? Ou la simple vérité, la connaissance, le savoir, le désir de comprendre ? Sho commença à douter, mais comme si Aishuu lisait clairement dans son esprit elle le guida et lui demanda d’imaginer l’inimaginable. Une prison de glace.. le shinobi la fit éclater autour de lui et resserra un peu plus son étreinte sur la main gauche de la saltimbanque pour s’assurer un pied dans la réalité. Seul à chanter pour son âme.. surgissant de nul part, il entendit ses propres battements cardiaques. Le rythme était résolument calme, résolument apaisé.
Le bout du pinceau se planta dans le sable, mais Sho n’amorça aucun mouvement. Il se laissa simplement bercer par son cœur, par le corps chaud d’Aishuu appuyé contre son dos, la fraîcheur de ses doigts serrés contre les siens à gauche, entourant son poignet à droite, et son souffle chaud endormant son épaule. Le voile qui séparait sa réalité du rêve était mince et il commençait à comprendre qu’un seule seconde d’inattention lui coûterait l’harmonie qu’il lui fallait atteindre pour réussir le geste parfait. Un frisson remonta le long de sa colonne vertébrale alors que le corps d’Aishuu se décalait pour imposer un léger vide entre eux. Une voix émergea brusquement de ce vide et lui insuffla un mot à la sonorité discordante, puis un autre, lavé de tous soupçons. Les deux mots firent échos à un lointain passé, du temps où aucun bandeau ne trônait sur son front et où Kumo n’était qu’une vague idée, ou tout au plus un rêve utopique.
Une mèche violette glissa sur son visage et ses yeux se rouvrirent brusquement. Il l’avait trouvé.. il avait trouvé sa vérité.
Il restait très peu de traces de ce passé. Sho doutait même qu’il en restât une seule. Son histoire personnelle commençait à s’effriter dans son esprit. Sa mémoire qui lui jouait des tours probablement. Pourtant, il avait réussi à ce souvenir d’un mot, d’un son, une chose dont sa tante avait évoqué l’existence et dont il ne faisait que la récente découverte. Il abaissa ses yeux sur le bac de sable, conscient qu’il devait y tracer ce mot, ce tout petit bout d’histoire dans l’espoir que Aishuu le comprendrait. Le dialecte de la Vallée Verte provenait d’une tradition orale. Il s’agissait d’un langage difficile à dompter, autrefois utilisé par les commerçants de passage dans la région. Les habitants de la Vallée se l’étaient appropriés et l’avait fait évolué avec le temps. Aujourd’hui, Sho avait toutes les raisons de penser que ce langage était sur le déclin et que tôt ou tard il finirait par être totalement oublié.
L’écrire serait sans doute une manière de lui rendre un dernier hommage. Sho n’était plus un enfant de la Vallée Verte, mais un fils des Nuages. Le dialecte qu’il avait pu entendre étant enfant finirait bien par disparaître un jour ou l’autre de sa mémoire, mais ce mot, ce son, Sho ne pouvait l’oublier.
Aishuu – A quoi penses-tu pour ainsi agir face au sable ?
Aishuu avait peut-être sentit le trouble grandissant en lui ? L’Eisei cligna des yeux et laissa un frisson faire osciller sensiblement le pinceau dans sa main, sa pointe encore immobilisée dans le sable. La calligraphie était un art complexe, il est vrai, mais un art grâce auquel on pouvait réveiller des instincts qu’on croyait presque éteint à jamais. Le sable et le pinceau n’étaient que des détails dans cette scène. Aishuu avait souvent évoqué le rôle de l’âme humaine dans cet exercice. Elle avait évoqué le cœur et l’esprit. Sho pensait avoir tiré un enseignement de ces sages paroles, quelque chose qui lui permettrait de retranscrire un mot perdu que sa tante croyait pourtant essentiel à la vie. Lentement, le shinobi se défit de son statut et se mua en un simple homme agenouillé devant une page vierge qui ne demandait qu’à être remplie. Ses paupières glissèrent sur ses yeux et l’obscurité s’imposa d’elle-même. Les battements de son cœur retrouvèrent leur trône dans cet univers chaotique. La respiration de la saltimbanque aussi. Avec l’aisance d’un maître tai, il calla sa respiration sur la sienne et accorda son univers avec le sien. Un détail crucial pour dessiner le mot que leur rapprochement avait réveillé.
Le frottement quasi imperceptible des grains de sable entre eux marqua le début du processus. Sa main n’était plus sa main, son pinceau n’était plus son pinceau. Tous deux étaient les sujets d’une pensée unique qui résonnait avec vigueur dans l’esprit du shinobi. Sous cette main et ce pinceau, des traits se matérialisèrent au milieu du sable. Des traits qui correctement assemblés formaient un mot qui trouvait écho dans la langue commune, bien que le sens qu’on lui donnât ne fut pas son sens premier. Le temps d’un court instant, Sho était devenu le calligraphe qu’il devait être pour exprimer cette pensée. Un temps suffisant, pensa-t-il en entendant la question d’Aishuu.
Aishuu – Ensemble ?
A un détail près, c’était bien le mot inscrit dans le sable. Tout du moins était-ce le sens qu’on pouvait lui donner dans le langage commun. En réalité, le mot « ensemble » pouvait s’écrire de différentes façons, celle-ci n’était que la plus commune de toutes. Sho sourit et posa son pinceau à côté du bac. Sa main ainsi libérée de son poids, il la ramena contre son ventre, la main d’Aishuu toujours appuyée sur son poignet. Le mot qu’il avait écrit n’était pas un mot de la langue commune. Il avait sans doute été repris, transformé, à des kilomètres de la Vallée Verte pour devenir le mot « ensemble » dans la main d’un calligraphe désireux de conserver un aspect purement traditionnel dans la confection de ce mot. Mais chez lui, et dans l’esprit de sa tante, ce mot ne signifiait pas « ensemble » mais « amour, affection ». Son sourire rehaussa ses joues. Finalement, c’était là une vérité que cet exercice avait révélé. Sho – De là où je viens, ce mot signifie amour, affection. Un membre de ma famille disait que c’était un mot perdu. Un mot qu’il fallait chercher au plus profond de soi-même car sa sonorité n’était pas faite pour être entendu de toutes les oreilles.
Il se pencha légèrement vers l’avant et planta son index dans le sable pour ajouter un trait supplémentaire à son œuvre.
Sho – Voici le véritable mot ensemble, celui de la langue commune. Dans ma Vallée, on peut dire que le fait d’être ensemble demande une forme ou une autre d’affection.
Sur ces mots, l’Eisei décolla sa main droite de son ventre et relâcha l’étreinte de sa main gauche sur celle d’Aishuu. Il ne se l’expliquait pas et il n’avait pas envie de se l’expliquer, mais il ne pouvait caché qu’il s’était lié d’affection pour la saltimbanque. Elle était différente, c’est vrai, mais tout le monde l’était à une échelle plus ou moins grande. La calligraphie avait révélé un sentiment tenace. Sentiment qui expliquait sans doute pourquoi il avait atterri dans ce temple alors qu’il aurait pu déjà se retrouver à des kilomètres d’ici. Il avait accepté de la suivre parce qu’elle représentait quelque chose pour lui. Et si près d’elle maintenant, il ne le regrettait aucunement. Il pivota sur ses genoux pour lui présenter son profil.
L’ambre de ses yeux croisa l’améthyste des siens. Il se contenta d’un sourire, tout ce qu’il y a de plus simple. Difficile de dire s’il y avait des mots corrects pour ce genre de circonstances. S’il fallait dire quelque chose ou tout simplement se taire. L’éducation militaire de Sho trancha pour lui. Le shinobi qu’il était n’aimait pas les secrets, il leur préférait la clairvoyance absolue. Il croyait par conséquent qu’il n’avait rien à gagner à garder ce qu’il ressentait pour lui-même.
Sho – Je ne pense plus en l’état. Mon âme a écrit ce mot quand tu lui as demandé la vérité. Je n’ai pas envie de me l’expliquer. Sache simplement que j’ai de l’affection pour toi.
Le ton était doux, solennel, comme une confidence dénuée d’un quelconque sentiment de honte. C’était sûrement là l’une des nombreuses forces qu’on pouvait prêter aux shinobi. Ils étaient peut-être, pour la plupart, incapables de sentiments forts comme pouvait en connaître le commun des mortels, mais il arrivait que certains d’entre eux n’éprouvent aucune pudeur à les ressentir. Ils y puisaient une certaine force, une certaine vérité aussi, le genre de vérité que leur quotidien imbibé de sang ne pouvait leur offrir. L’Eisei l’avait compris à travers la calligraphie, d’autres le comprendraient par d’autres biais.. peut-être.
Une main libre se posait sur une autre. |
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| Sujet: Re: [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot Lun 10 Jan - 22:36 | |
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La lumière et l’ombre devaient-ils se rencontrer ? L’Ombre était une femme au visage impassible, caressant entre ses doigts plus de tourments que le trouble. Elle n’était pas de ces femmes que l’on traquait, bien que sa beauté n’en soit d’un éclat noir. Compagne et épouse de la Mort, elle était vouée aux abysses, elle, femme pour qui n’existe que le vice. Son mari, si égoïste, lui fit construire un palais : les ténèbres devirent son sanctuaire, enveloppant son corps dans les limbes noires, la dissimulant des regards. Invisible elle était, absorbée par un décor qui l’attrayait. Pourtant, la Mort était un bien piètre amour.
La Lumière était un homme pour qui les limites n’étaient qu’illusoires. Sa confiance venait du fait qu’il était assuré, assuré par un statut à sa mesure : lui, le protecteur des aubes blanches. Il n’avait à craindre que la splendeur de son reflet, car chez lui ne demeurait guère de spleen. La Lumière était joueur, et doté d’un charme ravageur. Pourtant, il cherchait à être discret, et ne pas trop briller. N’en serait-ce pas un comble si la Lumière en venait à faire de l’ombre aux autres ?
Ombre et Lumière devaient-ils se rencontrer ? L’Ombre était prisonnière dans sa cage éphémère, caressant délicatement les barreaux de sa folie. Ses doigts de velours finement appuyé sur l’écrin dansaient tristement au gré du vent. Si son sourire voulait éclore, c’était sans escompter sur la lassitude de son amour avec la Mort. Elle aurait aimé s’en défaire, cependant il était le seul à posséder la clef de sa liberté. Son éclat s’éteignait, s’estompait, dans les flots des encres. L’Ombre était malade dans son cercueil.
Qui l’aurait cru ? A la recherche de la découverte, la Lumière était venue se perdre dans ses méandres des ténèbres. Son éclat mettait en défaite les noirceurs viles de l’abysse. Léger et doux, il titillait la fierté de l’ébène, jouant à l’écarter de son butin si bien gardé. Un butin, ô combien le trésor était grand, la Lumière s’en rendit compte lorsqu’elle effleura le visage d’une beauté rare de l’Ombre qui y dormait. Il était d’une curiosité à en faire pâlir les secrets, et il s’aventura, assuré, vers la perle qui s’éveillait.
Qui l’aurait cru ? L’Ombre croisa le regard de cet amant et retrouva le sourire.
L’Ombre et la Lumière devaient-ils se rencontrer ?
Aishuu ne se souvenait plus de la fin de ce conte qui avait été rédigé par sa mère, peu avant son départ. Peut-être ne l’avait-elle jamais connu, cependant, elle se souvenait parfaitement du début de ce dernier. Alors que son esprit divaguait dans les comptines enfantines, la jeune femme perdait un peu pieds dans la réalité étrange qui s’était étalée devant elle sans l’avoir prévenue de son arrivée. Une véritable boule de neige qui fit valser les quelques assurances qu’elle se donnait. Il lui avait été donné d’apprendre autant du ninja sur la calligraphie qu’elle n’essayait de lui enseigner. Un mot était une connaissance inestimable dans ce milieu, et Aishuu venait de gagner un peu plus de valeur à son vocabulaire. « Ensemble… »
Si son visage s’anima d’un sourire, c’était pour contraster avec son visage qui se baissait pour se cacher derrière les quelques mèches de cheveux pendantes. Lové derrière les fines pluies blanches, le satin de sa peau pâle se réfugiait afin de s’éviter une teinte gênante. Cependant, dans sa grande recherche d’une cachette, la saltimbanque vint poser son front contre l’épaule du ninja. Au-delà, certes, de ce contact, elle il trouva le meilleur des refuges, car en effet, ici il n’irait pas chercher la couleur de ses joues. Néanmoins, c’était à se demander si elle ne rougissait pas davantage au touché de sa peau. Entre ses lèvres glissèrent un soupir fin et discret, qui n’eut pour seul moyen de reconnaissance que la caresse qu’il vint produire le long de l’épiderme du médecin. Son corps était chaud et faisait tiédir les joues de la musicienne, le traître. Cependant la sensation ne lui déplaisait pas, mais elle semblait gêner de la ressentir.
Aishuu ferma un instant les yeux, le temps pour elle de replacer son masque d’artiste et de retourner dans le jeu de sa comédie. Elle releva alors aussitôt la tête, et se déplaça afin de se retrouver face à lui, en tenant cependant toujours sa main. Le petit pas sur le côté étant fait, la jeune femme approcha son visage à quelques centimètres du sien, suffisamment près du sien pour qu’il puisse sentir son souffle sur ses lèvres, suffisamment pour qu’il n’ait plus à respirer que les effluves de son corps. Ses yeux améthystes vinrent transpercer l’ambre des siens avec une lueur délicate. Elle commençait à se plaire dans cette atmosphère taquine. Aishuu leva sa seconde main pour venir la déposer sur sa joue, venant glisser sur son velours, et elle vint approcher ses lèvres à quelques centimètres des siennes, soupirant à voix basse, comme si elle voulait se cacher des oreilles d’Ankisuru.
[Aishuu] : « Veux-tu continuer la leçon ? »
Les deux coins de ses lèvres s’élevèrent, affichant un sourire aussi doux qu’un bouton de rose qui s’apprêtait à éclore. Elle se mit sur la pointe des pieds et vint déposer sa bouche sur la joue du jeune homme, avant de se reculer radicalement, lâchant sa main dans le même geste. Son corps sembla onduler comme l’écume sur le dos de la vague. Aishuu se retira de l’emprise de l’inconnu pour s’enfuir du côté de son plateau de sable. Elle reprit alors ses attitudes de saltimbanque, sautillant avec une gaieté surhumaine. La jeune femme se cambra vers l’arrière, et son corps sembla prêt à se casser en deux, ses mains vinrent se poser à plat à quelques centimètres de ses chevilles. La pointe de son pieds, tendue, se décolla du sol pour venir balayer l’air en un arc de cercle parfait avant de rejoindre le sol et ainsi, attirer la seconde vers elle afin de lui permettre de se redresser. Dans sa main se trouvait la baguette de bambou qui lui servait d’humble pinceau.
La distance avait eu pour effet d’estomper un peu l’atmosphère qui était d’une chaleur douce. Aishuu s’était placée sur son terrain, mais en avait fait le tour pour pouvoir faire face à Sho, et ainsi le voir écrire, tout comme il pourrait la voir faire. Elle pinça discrètement sa lèvre et se décida.
[Aishuu] : « Que dirais-tu de calligraphier le mot sentiment ? »
Ses doigts se tournèrent autour de la tige, son index tendu le long du manche alors que le bois glissait calmement dans les grains blancs. Le silence prit place à la mélodie du sable qui chantait sous les caresses de la jeune femme. Si sa main s’agitait avec une agilité qui lui était si propre, ses yeux pourtant demeurèrent fermés, comme si elle ne se laissait guidait que par son cœur et ses dictées. Rien n’estompait son sourire…
[Aishuu] : « C’est l’emprunte du cœur… »
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| Sujet: Re: [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot Jeu 13 Jan - 16:48 | |
| On pouvait s’attendre à toute sorte de réactions. Ça pouvait aller d’une simple gifle à un baiser langoureux, en passant par différents états intermédiaires qui variaient selon les caractères de la femme et de l’homme qui se faisaient face. Avec un certain amusement, Sho se persuada qu’il ne s’en était pas trop mal tiré. Comme il avait pu s’y attendre, Aishuu avait inventé son propre état intermédiaire. Un état que l’eisei savait singulier. Aishuu n’avait pas une vision de la situation qui différait beaucoup de la sienne, c’est son langage qui différait. Beaucoup de femmes auraient cherché à poser des mots là où il n’y en avait pas, comme si elles se sentaient redevables de l’homme qui avait réussi à percer leur cœur à jour. Elles auraient employé des mots maladroits, entrecoupés d’un silence gêné, et leur message ne serait finalement pas passé. Au contraire de ça, Aishuu avait répondu par le corps, par les quasi imperceptibles changements dans sa respiration et dans sa manière de le toucher.
Le corps de la saltimbanque semblait fragile d’apparence, mais à chaque nouveau contact qu’elle déployait contre le sien, Sho y ressentait une robustesse et une force rare. Derrière les voiles de douceur qui recouvraient sa peau, il pouvait sentir un cœur battre avec vigueur et un organisme tourné avec la rigueur d’une machine militaire. Ce corps était d’une beauté sans pareille, non pas seulement par ses formes mais parce qu’il était porteur de messages, et que lorsque le silence s’imposait comme à cet instant, il suffisait à l’oreille entraînée d’entendre ce message et à l’œil avisé de traduire ce langage pour comprendre qu’Aishuu n’avait pas besoin de parler pour se faire entendre.
Quand son souffle vint s’éteindre sur ses lèvres et que le sien en vint à faire de même, l’eisei se retrouva face à son regard, un regard qui silencieusement répondait à ses paroles. Une simple lueur, simple mais enivrante, qui fut rapidement accompagné d’une caresse, sensible, le long de sa joue. A ce geste, Sho ne répondit rien car il savait que cela aurait été comme interrompre un discours passionné. Il se contenta de la regarder, lui faisait ainsi comprendre qu’il entendait son message et qu’il s’en sentait honoré. Elle aurait pu le gifler ou l’embrasser, mais elle avait simplement décidé de s’approcher de lui, de s’approcher si près qu’il lui était impossible de ne pas ressentir son entière présence. Des lueurs dans son regard, à sa respiration changeante, jusqu’aux oscillations dans les battements de son cœur, il percevait cela et comprenait qu’elle venait lui murmurer dans sa langue « je suis là et nous sommes ensemble ».
Aishuu – Veux-tu continuer la leçon ?
Il aurait pu lui murmurer que oui, mais il préféra lui offrir un léger sourire en réponse comme pour ne pas briser la magie de cet échange. Le masque de la saltimbanque retomba et dans son propre sourire elle s’éloigna pour retourner à son bac de sable et à cet art qu’elle connaissait si bien. Pendant un court moment, Sho se demanda où elle avait bien pu acquérir toute cette connaissance. La calligraphie n’était pas un art très répandu après tout. Malgré ça, elle restait une artiste et une artiste ne se devait-elle pas d’élargir ses connaissances à toutes les formes d’art pour mieux compléter le sien ? A cette question, l’eisei n’avait pas de réponse à donner. La médecine n’était pas un art à proprement parler, si ce n’est peut-être l’art de redonner la vie et un semblant d’espoir. Chaque combat, chaque style d’adversaire, était une leçon de plus pour le shinobi qu’il était, mais était-ce la même chose pour une artiste ? Trouvait-elle réellement de nouvelles méthodes à suivre l’art d’autres artistes ? La question était tortueuse. La situation actuelle non.
Il tourna légèrement la tête et l’observa se placer de sorte à lui faire face, bien qu’en retrait par rapport à sa position. Il accentua son sourire et se tourna vers son propre bac de sable, en se disant qu’il venait d’apprendre une nouvelle leçon mais qu’elle demanderait encore le silence de la nuit pour en saisir toute l’importance. En attendant, ses yeux d’or et de feu s’abaissèrent sur le sable blanc, son cœur commençant tout juste à se remettre de ce qui avait été une intensité folle. Aishuu évoqua le mot « sentiment ». Un mot tout aussi complexe que les autres choisis précédemment, mais que Sho percevait mieux avec ce qu’il venait de se passer. Sentiment… il y en avait tellement, et ce seul mot pouvait tous les symboliser en calligraphie. De sentiments, on ne disait bien qu’il en existait des bons et des mauvais, des doux et des néfastes, des légers et des forts, alors comment se représenter ce mot, comment lui donner son sens propre au lieu de qualifier les formes qu’il pouvait prendre ? En remarquant les yeux fermés d’Aishuu, Sho comprit que la réponse ne lui viendrait d’aucune réflexion mais bien de son propre ressenti. Alors lui aussi se plia pour saisir la plume de bambou posée au bord du bac, lui aussi ferma ses yeux avant de laisser son cœur s’exprimer librement.
Dans un silence presque religieux, Sho et Aishuu se laissèrent guider par leurs propres sentiments sans chercher à les révéler dans le sable, non, ils n’en avaient plus le besoin. Simplement en y trouvant une part de vérité, cette même vérité qui était sensé représenter le mot voulu dans son écrin le plus pur. Le sable remua, les minuscules petits grains s’écartèrent au passage du bambou, traçant des reliefs que le papier ne pourrait jamais conserver. Sho se laissa presque guider par ce bruissement, sa main s’animant avec moins de talent que n’en faisait preuve Aishuu, mais avec la même volonté vivace de bien faire. Les traits se joignirent aux points, les points se mirent à suivre des courbes, et les courbes à croiser d’autres chemins. Le tout donnait lieu à un rassemblement de baies et de racines enchevêtrées pour un œil non avisé. Mais quand l’eisei rouvrit ses yeux pour contempler ce que le sable avait conservé de son for intérieur, son regard et son visage s’illuminèrent, convaincu qu’il s’agissait là de son sentiment le plus pur.
Aishuu – C’est l’emprunte du cœur…
Sho – … un fragment d’âme.
Il n’en fallut d’avantage pour que les deux se regardent et se sourient. Il y avait peut-être beaucoup plus à apprendre dans ce temple que l’utilisation des sceaux, tout compte fait. Sho commençait même à reconnaître qu’Ankisuru gérait parfaitement bien son affaire. Et comme s’il ne suffisait pas de penser à ses méthodes douteuses mais efficaces, la porte de la pièce coulissa à nouveau sur le côté et laissa le vieil homme réapparaître aux yeux de ses élèves. Difficile de croire ou de se persuader qu’Ankisuru avait tout vu et tout entendu de leur échange, pourtant le doute subsistait, noyé dans un certain malaise.
Quand le vieillard s’arrêta devant son bac, et se pencha légèrement en avant pour étudier son écriture, Sho ne put s’empêcher de le regarder avec un petit air soupçonneux. Ankisuru n’y attacha aucune importance au début, trop absorbé qu’il était par son analyse. Il suivit des yeux, et d’un léger mouvement de la tête, chaque trait, chaque courbe, et chaque point matérialisé dans le sable, s’arrêtant même par moment pour caresser sa barbe et y marmonner des choses inaudibles. Les vieilles manies avaient la vie dure et Sho commença à se demander si le vieil homme n’essayait pas de titiller ses nerfs. Il conserva malgré ça une profonde neutralité, encore retenu par les liens qui s’étaient tissés avec Aishuu quelques instants plus tôt. Ce n’est seulement qu’après plusieurs minutes d’analyse que le vieillard redressa la tête et lui lança un regard espiègle derrière ses petites lunettes rondes.
Ankisuru – Voilà bien un mot qui ne te semble pas méconnu. A moins que ça ne soit Shiro qui te l’ait inspiré ?
Sho esquissa un sourire.
Sho – Les deux sont vraies.
Ankisuru plissa les yeux et se pencha un peu plus vers lui, comme s’il cherchait à distinguer les moindres détails de son visage. Sho y resta insensible et se permit même de se pencher légèrement lui aussi pour offrir une meilleure vue au vieillard. Celui-ci recula aussitôt, grimaça, et finalement éclata d’un rire neutre. Un rire qui ressemblait pourtant plus à des moqueries qu’à l’expression d’une joie sincère.
Ankisuru – N’est-ce pas amusant !
Amusant ? Sho l’interrogea du regard.
Ankisuru – Un shinobi ne saurait pas calligraphier « épée » correctement, mais trouverait une facilité à calligraphier « sentiment ». Sho, on peut dire que tu me surprends ! Mais je crois que tu ferais mieux de changer de métier, une épée pourrait te glisser des mains assez facilement il semblerait. Devient poète ! Non pas poète, tu manques de vocabulaire.. que dirais-tu de musicien ?
Sho – J’en dis que vous êtes un bon flûtiste, vieux singe.
Le rire du vieil homme devint plus insistant. De son côté, Sho céda peu à peu à un sourire de circonstance, soit à la limite du rire. Ankisuru avait relevé un point amusant, même si comme à son habitude il rivalisait de génie pour l’enfoncer toujours plus bas. Heureusement, l’eisei commençait à s’y habituer. A tel point qu’il riait presque de sa propre bêtise. Épée était un mot trop brusque à son sens, un concept plus qu’un véritable mot. Une épée était forgée pour mener des guerres et des batailles aux quatre coins du monde. Sous ce toit, Sho ne ressentait pas la nécessité de se battre, d’être sur le qui-vive, d’être préparer à tout. En cela, les sentiments lui étaient plus communs, car ils prenaient tous leur sens ici, encore plus qu’ailleurs. Sous ce toit, Sho ne souffrait d’aucun statut. Il n’était qu’un simple homme venu apprendre une écriture du passé. Cette écriture servirait certainement à son statut de shinobi, mais pour l’heure tout du moins il n’en était plus un. Il était simplement lui-même face à l’inconnu.
Ankisuru – Tu as la réplique facile, c’est une grande qualité quand on est capable de mesurer ses paroles.
Ankisuru grimaça et se remit à caresser sa barbe.
Ankisuru – Oublie ce que je viens de dire, ça te fait paraître moins crétin que tu ne l’es réellement, je n’aime pas ça. Oublie.
Sho acquiesça en se retenant de rire. Le vieil homme ne lui accorda pas un seul regard, préférant poursuivre ses déambulations vers l’autre bac de sable. Encore là, il étudia minutieusement le mot sillonnant le sable fin. Cependant, il sembla y accorder moins de temps qu’il n’en avait accordé à celui tracé par Sho. Ca n’avait rien de bien étonnant, sachant que Aishuu était beaucoup plus douée en la matière. Ankisuru se redressa et leva sa tête vers la saltimbanque avant d’hocher simplement de la tête. Pas le moindre mot, pas la moindre remarque, son tracé était-il donc si parfait ? Se demanda l’eisei. Sans doute l’était-il pour n’éveiller aucun commentaire de la part du maître lieu. Aishuu était douée et son maître semblait s’y résoudre sans la moindre amertume. Lancer quelques pics à un shinobi devait lui paraître hautement plus distrayant.
Ankisuru – Comme je pouvais m’y attendre, tu as été remarquable. Faire entrer quelque chose dans cette tête – il pointa son doigt vers Sho – croit-moi, ce n’était pas une mince affaire. Tu peux être fière de toi. Les shinobi ont l’esprit trop étriqué, mais nous ne pouvons pas leur en vouloir, ils répondent toujours qu’ils n’y sont pour rien. Et ils n’ont pas tout à fait tort, je le crains. Les villages cachés du monde entier apprennent à leurs petits soldats qu’il faut se tenir bien droit et les servir jusqu’à ce que mort s’en suive ou que la vieillesse s’en charge. Que peuvent-ils y faire ? Bien que pour ce soldat là, le travail n’ait pas été correctement fait, je le crains aussi.
Sho baissa la tête et se tut une fois de plus. Un léger sourire aux lèvres, il ne pouvait que constater l’amertume habilement dissimulé dans le discours du vieil homme. Il imaginait sans difficultés que bon nombre de shinobi avant lui avaient du franchir les portes de ce temple pour apprendre auprès d’Ankisuru. Suite à quoi, la plupart d’entre eux avaient très probablement utilisé ce qu’ils avaient appris ici à un bien mauvais usage – comme on pouvait toujours plus ou moins s’y attendre en parlant de shinobi. Si nombre d’entre eux se voulaient justes, le monde ne pouvait pas empêcher que des hommes sans scrupules s’élèvent dans cette masse de combattants et qu’à travers les enseignements d’hommes de sagesse, ils viennent à dévier des armes profondément justes à l’origine pour en faire de véritables instruments de mort et de torture. Ankisuru devait simplement se méfier de lui, comme il semblait se méfier de tout ce qui touchait de près comme de loin aux villages cachés, surtout les plus importants d’entre eux.
Sho avait finalement conscience qu’il pouvait représenter un danger pour l’enseignement d’Ankisuru. Non pas par ce qu’il était en tant qu’homme, mais bien par son pouvoir de shinobi. Restait à lui prouver qu’il se trompait et qu’il pouvait lui faire confiance.
Sho – Votre enseignement ne quittera pas cette tête.
Ces mots résonnèrent avec conviction dans toute la pièce, avant que le silence ne reprenne ses droits. |
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| Sujet: Re: [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot Jeu 13 Jan - 21:31 | |
| [Sho] : « … Un fragment d’âme. »
Aishuu ne disait rien, se contentant de s’enivrer de la présence distante du shinobi. Sa lèvre pincée entre ses dents, la jeune femme le regardait, avec une lueur un peu taquine dans le regard, un regard qui en disait long sur les pensées de la saltimbanque. Elle lui lança un clin d’œil discret, alors qu’elle sentait la venue proche de leur maître de l’instant.
En effet, son arrivée ne tarda pas, et sitôt eut-elle pensé qu’il allait venir briser la magie qui planait, sitôt la longue barbe blanche vint se dessiner au travers de l’encadrement de bois de la porte. D’ailleurs, Ankisuru n’avait pas encore franchi le seuil de la porte qu’il avait déjà lancé un regard complice à la jeune femme qui préféra détourner les yeux et estomper son expression un peu trop joyeuse pour une scène d’apprentissage.
Le vieux sage s’introduisit ensuite dans une scène dans laquelle il faisait tache, et s’en alla presque aussitôt flairer son petit préféré. En effet, il se dirigea sans sourciller, le pas lent et le poids du monde sur le dos, jusqu’aux côtés de Sho, se plaçant là, silencieusement. Il scrutait, cherchant les défauts, mais surtout, ne les énonçant pas, histoire de conserver ce non-initié dans l’ignorance. Sa main vint se poser sur sa barbe, la frottant tel un vieux sénile qui cherchait la pensée qu’il venait d’oublier.
Aishuu se sentait gênée pour le médecin, qui se voyait ainsi mis à nu sans aucune pudeur, par un vieux pervers. En effet, elle lui en voulait encore pour l’affront qu’il lui avait fait en la travestissant de cette sorte. Lançant des regards bienveillants sur le jeune homme, elle guettait également les réactions, souvent désagréables, du vieux singe. Discrètement, elle vint s’approcher de Sho, tournant autour de son propre bac de sable sur la pointe des pieds, afin de gagner un peu de terrain face à la distance qui la séparait de lui. Sans doute attendait-elle autant que lui le verdict du Maître Sceau, cependant, leurs quelques échanges la réveilla, la piquant à vif.
[Aishuu] : « Y’aurait-il un souci avec les musiciens ? »
Ses yeux se relevèrent, inquisiteur, se figeant sur les deux hommes en leur témoignant qu’elle ne partageait pas leur humour, avec une petite moue grimaçante. Elle tourna les pupilles vers le sage et fit une mine un peu hautaine pour lui faire sentir qu’elle vivait très bien ce type de vie, et qu’elle ne voyait pas ce qui lui permettait d’ainsi la dénigrer. Elle fut ravie qu’Ankisuru ne relève guère sa remarque.
Par la suite, Aishuu se retira totalement de la scène n’écoutant plus la moindre parole qui pouvait s’échanger entre les deux hommes : en effet, c’était une conversation d’hommes. A vrai dire, des choses un peu plus importantes importunaient, le genre de choses qui souvent sont sujets à la remise en question. Elle ne comprenait pas réellement ce qui était en train de se passer inconsciemment entre Sho et elle. Au contraire, plus l’intrigue s’avançait, et moins elle trouvait la réponse à l’enquête. Elle n’était pas le genre de femme à se créer des besoins plus grands que celui d’être libre, alors qu’était-elle en train de faire ?
Dans sa tête, il y avait un torrent de confusion très simple à comprendre, mais beaucoup plus difficile à démêler. Les pensées filaient, légères, mais sans règle, anarchiques, allant peu à peu jusqu’à s’entre choquer, se heurter, se brouiller et se mélanger avec violence. Cependant, le plus gros trouble qu’elle abritait, était également son plus grand réconfort. La présence de Sho calmait un peu les ardeurs de ses tourments excités, elle apaisait même les douleurs que lui offraient les dénies de son corps. Ses paupières s’abaissèrent, et son sourire revint alors qu’elle se remémorait le moment passé. Il y avait la chaleur de la proximité, la douceur des gestes, et de complicité dans leur compréhension muette. Un tas de petits détails qui réussissaient à retourner l’esprit de la jeune femme aussi facilement qu’un cyclone. Il fallait dire que son sourire avait de quoi charmer un bon nombre de personne, et, Aishuu s’était lancée prendre sous le charme…
Sans qu’elle n’en soit consciente, sa main vint se poser sur le tissu de son kimono rouge et le pinça entre ses doigts, sa tête s’inclinant timidement vers le bas, alors que le coin de ses yeux d’améthystes restait posé dans la direction de l’homme. Un peu gênée puisqu’elle sentait ses joues se farder de rouge, elle n’avait néanmoins pas envie de détourner le regard de sa direction. Aishuu ne savait même plus ce qui se passait entre Ankisuru et Sho puisqu’elle avait préféré vogué à d’autres cieux, mais elle s’amusait, regardant le visage d’un calme serein du ninja, alors qu’elle savait pertinemment que le vieil homme venait le provoquer. Son visage était une finesse d’orfèvre, notamment la courbe de son ovale qui était plus calligraphiée que celle d’un homme d’ordinaire. Ses yeux d’ambres s’animaient avec un apaisement contrôlé et modéré, mais son regard se savait être protecteur et rassurant, tout comme il pouvait, ce fourbe, devenir incroyablement attractif. La minuscule pièce d’or et de miel qui bougeait suivant les mouvements et les gestes des autres, dans son air apaisé, montrait la constante préparation à faire face à un imprévu. Ses lèvres, lorsqu’elles dessinaient un sourire, avaient pour effet de tendre les zygomatiques d’Aishuu, comme une réaction automatique, voire épidermique. Elle ne se l’expliquait pas, mais il y avait une attraction, une sorte d’intérêt chez lui auquel elle se montrait particulièrement sensible.
Pourtant, la paix sur son visage était également ce qui lui faisait peur. Alors qu’elle semblait troublée par leur dernier échange, lui y semblait totalement étranger à cette heure. Cette sérénité désignait pour Aishuu aussi une sorte d’impassibilité et de froideur. Comment devait-elle le prendre puisqu’elle considérait ses paroles en désaccord avec son comportement. La saltimbanque était de ceux qui apprenait des gens par les gestes, par leurs manières et leur façon d’agir selon les situations. Bien que ses relations humaines ne soient que trop rares, elle avait une connaissance totale de l’homme et de la manière dont elle avait à le manipuler pour entraîner chez lui telle ou telle réaction. Elle l’avait tout simplement étudié à Suigara. Cependant, ce qui se passait actuellement lui échappait totalement, et elle ne pouvait jouir d’aucun contrôle, tout lui glissait des doigts.
Il était si calme… La musicienne ne connaissait rien de lui, c’était le plus parfait des inconnus. Les rares choses qu’elle aurait pu dire, c’était qu’il dégageait une sorte d’altruisme maladif, dont elle aurait aimé le préserver des retours trop violents. Comme elle l’imaginait, Sho serait un homme qu’il ne faudrait pas emmener dans son refuge d’enfance. Au-delà de cela, il ne lui laissait rien pour apprendre à le connaître. Qu’était-ce qu’un ninja ? Aishuu avait toujours associé ça à une déshumanisation dans laquelle l’homme se retrouvait être un jouet politique, et bien plus encore : une arme. La gentillesse de Sho l’empêchait de l’imaginer de cette manière sans avoir une sorte de malaise mentale. « Tout est alors sujet au mal dans ce monde… »
La Blanche avait une estime très limitée pour le style de vie que les shinobi avaient opté. Ce sentiment naissait probablement du fait que son père, n’en étant pas un à la solde d’une grande puissance, avait passé plus de temps à prôner la vie en semant la mort. Il était tellement absent qu’il n’existait presque pas au sein de la petite famille de femmes, et elle connaissait parfaitement mes craintes que nourrissait sa mère chaque jour, craignant que des gens malsains ne tentent de s’emparer de la pureté de sa vie et surtout de l’avenir de sa fille. Mais lui ne connaissait que le mot « devoir », rien n’était plus traître que ce mot : était-ce la raison pour laquelle Aishuu l’avait toujours fuit ? Ce personnage fut tragique et source de chagrin jusqu’à sa mort. Absent, inconnu au bataillon, il décéda, aux yeux du néant, comme un chien on ne sait où, on ne sait comment ou pourquoi. Il n’a pas même dit au revoir et s’est même permit de retirer aux deux seules personnes qui l’attendaient la possibilité de faire leur deuil. C’était un fantôme, la plus grande des peurs de la jeune femme.
[Aishuu] : « Un fantôme… »
Au travers de cette rancune se nourrissait ce qui était indéniablement la plus grande peur de la jeune femme, et cette peur venait de plus en plus se collait sur le visage serein de Sho. Une arme, une arme vivante dans laquelle coule le sang dans les veines. Une arme qui laisse s’abattre une pluie de sang sur le monde. Elle ne comprenait pas. Dans la mort qu’elle infligeait, il n’y avait aucun sentiment : pas de rancune, pas de haine ni de vengeance, juste l’accomplissement d’un ordre. Cette soumission étreignait aussi fort son cœur qu’elle sentait les chaînes des responsabilités et des obligations tenter d’étrangler ses libertés. Qu’était-il ?
Sa main lâcha le tissu pour balayer l’air devant elle d’un revers, avant qu’elle ne se retourne pour s’agenouiller devant le bac à sable qui lui était assigné. Dans son monde, il n’existait que peu de chose digne de dégoût : cette soumission humaine se pliant aux petits doigts d’un Kage était sans doute la pire chose que pouvait voir Aishuu, malgré les horreurs à laquelle sa vie s’était tournée. Pourquoi ? Etait-ce un respect total, ou une idiotie inventée pour dissimuler de plus sombre dessein ? Quelques grains de sable vinrent caresser sa peau alors qu’elle laissait sa paume naviguer sur un petit coin du bac. Ce qui se passait était dangereux. La jeune femme se sentait, de près ou de loin, attaquée par une sensation à la fois douce et agressive. Elle n’en était que plus exquise.
[Ankisuru] :« Comme je pouvais m’attendre, tu as été remarquable. Faire entrer quelque chose dans cette tête… »
Si la voix d’Ankisuru réveilla momentanément la Pâle, ce n’était que pour mieux la faire rêver par la suite. Ainsi elle se retira aussitôt de la scène qu’on tentait de l’introduire. Faire entrer quelque chose dans cette tête ? Qu’est-ce qu’y avait su y entrer ? Comment et pourquoi ? La saltimbanque avait plus particulièrement l’impression que c’était dans sa tête qu’il se produisait quelques choses. Une chose inexplicable qui prenait une ampleur un peu trop forte à son sens. Il était un de ses oiseaux de mort : un de ses beaux oiseaux aux plumages d’un coloris parfait, mais au cris ténébreux. La mort, elle y était suffisamment confrontée en restant passive de toute violence, pour aller la chercher au creux des bras de quelqu’un.
L’animation entre les deux hommes ne l’effleura pas, alors qu’Ankisuru étalait le point de vue qu’il avait sur les ninja, un point de vue qu’Aishuu partageait au final. Pourtant, ses oreilles semblaient étanches à chacun des reproches qui étaient lancé à Sho, comme si elle ne voulait pas les entendre, les nier. Elle voulait nier cette existence.
[Sho] : « Votre enseignement ne quittera pas cette tête. »
La jeune femme finit par ouvrir les yeux, tournant son visage vers les deux hommes qui venaient de mettre fin à leur discussion. Elle déposa les pierreries de ses yeux sur le médecin, mais plus au niveau de son visage comme elle le faisait précédemment, se limitant à la hauteur de ses épaules. Bien qu’elle sentait son regard fuyant, la jeune femme ne chercha pas à cacher cette attitude.
Le vent frappait de plein fouet les parois du temple, créant un sifflement serpentin sourd et cinglant. Au dehors, les éléments semblaient s’être à nouveau querellés. Le vent revenait pour provoquer les flancs de la terre, et l’essence de l’eau glacée. Instinctivement, Aishuu tourna la tête vers l’unique ouverture qui donnait vers l’extérieur, admirant les valses que donnaient les tourbillons de la bise avec les flocons de givre. La douceur de leur caresse mêlait la violence d’un combat et la complicité d’un fond commun.
Le visage du vieil homme derrière ses épais carreaux semblait un tantinet moins serein qu’à son habitude. Il fit un geste de la main pour signaler qu’il partait, et glissa discrètement de sa voix railleuse.
[Ankisuru] : « Le dîner est pour bientôt, il vous sera apporter dans vos chambres. Vous avez jeûné hier, je ne vais pas être un bourreau. »
Par la suite, l’homme qui était à présent plus recroquevillé vers la tête qu’il ne s’érigeait dans le ciel prit lentement le chemin de la porte, n’indiquant rien de plus à ses deux élèves. Comme elle l’avait songé, il était simplement passé cassé la magie. Cependant, son visage lui avait semblait plus satisfait qu’il ne le donnait à être habituellement dans les yeux d’Aishuu, ce qui la rassura malgré tout.
Agenouillée devant son bac de sable, la jeune femme s’en alla pour prendre la suite du vieux singe, relevant sensiblement son assise pour se relever. Adressant un regard discret, furtif et curieux à l’intention du jeune homme, elle esquiva également un de ses gestes et se dirigea vers la porte sans rien dire, ses pieds nus glissant délicatement entre les liens de ses ghetta. Pour conserver un équilibre correct, bien qu’elle n’en avait pas besoin, elle avait déposer sa main de glace sur l’encadrement de la porte, le temps pour elle de se chausser.
Ses doigts glissèrent sur les nervures du bois avec une langueur calme, jusqu’à s’en défaire avec une délicatesse féminine. Elle ne se retourna pas lorsqu’elle s’élança dans le couloir une fois ses pieds vêtus… Aishuu n’avait pas connaissance de la réaction du ninja, ni même de ce qu’il comptait faire. Elle marchait lentement dans le couloir les yeux si bien rivés sur le sol qu’elle n’en remarqua pas les deux silhouettes bleues qu’elle croisa au niveau de l’entrée : elles accompagnaient Ankisuru. La jeune femme avançait, encore hésitante sur sa direction. Irait-elle confier son âme à la chaleur de la buée qui ondulait fémininement en volute, ou devait-elle chercher des réponses dans sa chambre. La saltimbanque n’eut la réponse que lorsqu’elle approcha la porte de sa chambre qu’elle fit lentement coulisser devant puis derrière elle. Elle la referma si promptement que le nœud de soie de son kimono resta coincé entre la chambre et le couloir, seulement, elle ne s’en rendit pas compte, car, sans même vérifier de sa solitude, elle laissa le vêtement rouge tomber à ses chevilles pour aller se saisir du sien.
La mauvaise surprise fut de voir que bien que le vêtement semblait ressemblait au sien en qualité d’étoffe et de gammes colorée et de motifs, il n’avait rien de semblable en terme de coupe et de forme. Inconsciemment, elle croisa les doigts et ferma les yeux en espérant qu’Ankisuru n’est pas massacré sa tenue à coups de ciseaux. Lassée, elle l’enfila sans se poser de question, commençant par dénouer le large nœud de soie violette permettant d’ouvrir le reste du kimono. Elle se saisit du tissu et l’enfila, manche après manche, et remarqua l’étrange et nouvelle coupe que lui sied l’habit. Elle s’étonna même à la préférer.
Le kimono n’était plus qu’une sorte de veste qui cachait ses bras, le haut de ses cuisses, puis, derrière, tout le long de son dos jusqu’à ses mollets. Le décolleté, qui lui, lui était familier, était pourtant plus osé que celui de la seconde tenue, mais elle se sentait plus à l’aise avec sa couleur. Les pants du tissu s’harmonisaient, parallèlement, couvrant les flancs opposés de sa poitrine, soutenue par les bandages serrés. Sous cette dernière s’établissait une large ceinture noire sur laquelle dansaient les motifs argentés autour du lien améthyste qui la tenait liée. L’originalité d’Ankisuru venait dans une nouvelle pièce de tissu, découpé de manière à rejoindre le corps d’Aishuu à la manière du ceinture, enlaçant sa taille. C’était un pant de tissu long, qu’elle lia juste sous sa ceinture, de sorte à pouvoir davantage caché ses jambes, puisqu’il descendait jusqu’au niveau de ses genoux, et portait une ornementation fine.
Le sourire de la jeune femme revint lorsqu’elle s’assit pour remettre les long bas de noir et d’argent qui meublait l’ivoire de sa peau, et qu’elle acheva le tout pas ses long gants noirs qui rejoignaient ses manches. Ce qu’elle aimait dans cette tenue, à vrai dire, c’était qu’au-delà de sa coupe osée, on ne voyait rien, simplement. Les hommes qui la voyait passait s’imaginaient souvent plus de chose qu’ils ne leur étaient donné de voir. La Blanche remarqua qu’Ankisuru avait même reprit soin de reposer son collier de perles violettes qui lui servait à orner ses cheveux. Elle laissa fuir un soupir d’aise, envoyant valser le ruban rouge sur le sol, délivrant ses longs cheveux blancs de son étreinte, avant de se laisser tomber sur son lit de tout son corps, reposée.
[Aishuu] : « Faut-il rester seule ? »
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| Sujet: Re: [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot Dim 16 Jan - 19:22 | |
| Ankisuru – Le dîner est pour bientôt, il vous sera apporter dans vos chambres. Vous avez jeûné hier, je ne vais pas être un bourreau.
Sho observa le vieil homme du coin de l’œil et acquiesça sobrement. Ankisuru n’était peut-être pas un bourreau au sens propre du terme, mais il en reprenait quelques méthodes peu conventionnelles. Ce n’était pas sans amuser l’eisei qui voyait désormais en cela une méthode certes dépassée, mais bel et bien concluante si on en croyait les effets qu’elle avait eu sur lui et sur Aishuu. Il l’avait sans doute mal jugé en arrivant. Et sans doute le jugerait-il encore mal en partant. Ankisuru était un puit sans age dont l’eau cristalline, l’essence même de son savoir, dormait paisiblement tout au fond de lui, loin, très loin, de la portée d’un regard même entraîné.
Le vieil homme ne demeura pas plus longtemps en place. Dans un silence que seul les étoffes qui le recouvraient pouvaient briser, il quitta la pièce de la même manière qu’il y était entré quelques instants plus tôt. Sans un regard, sans un mot de trop. Aishuu suivit ses traces à peine quelques secondes plus tard. Sho échangea un regard en biais avec elle et la laissa s’en aller malgré la sensation de cœur lourd qui pesait sur sa poitrine.
Pendant un temps, l’eisei resta droit comme un i au milieu de la pièce désertée. Les bras le long du corps, la tête légèrement baissée, et le regard tourné vers le bac de sable, il se repassa le film du cours de calligraphie, se remémorant chaque scène l’une après l’autre, chaque échange avec Aishuu pour finalement fermer ses yeux en lâchant un soupire. Il avait presque peine à croire qu’un simple cours de calligraphie avait réussi à réveiller autant de choses en lui après tant d’années de silence. Pourtant, les faits étaient bien réels et il lui fallait bien apprendre à les gérer maintenant. Décontenancé, l’eisei se massa la nuque en tortillant sa tête avant de se figer. Son bras retomba le long de son flanc, lentement, Sho bascula vers l’avant, assez pour que sa main puisse saisir la branche de bambou. Dans le coins inférieur gauche du bac de sable il redessina le mot « ensemble », en contempla le sens, sourit, puis quitta la pièce en le laissant gravé dans le sable.
Ses pas l’amenèrent de la pièce au couloir, et du couloir à sa chambre. L’eisei s’arrêta encore sur le pas de la porte et jeta un coup d’œil rapide vers la chambre d’Aishuu. La porte était fermée. La saltimbanque avait sans doute trouvé de quoi s’occuper en attendant l’heure du repas. Sho s’engouffra dans sa propre chambre et en ferma la porte, non sans regarder s’effacer la porte d’Aishuu à peine à quelques centimètres de là, un drôle de pincement au cœur.
Sur la commode de l’entrée, l’eisei trouva une nouvelle pile de vêtements. Nouvelle, si on considérait qu’il n’avait pas encore retrouvé ses vêtements d’origines. Cette pile là, pourtant, valait mieux à ses yeux que celle dont il était habillé. C’est donc sans la moindre hésitation qu’il se débarrassa en premier de ses habits, les laissant tomber un à un sur le sol sans s’en préoccuper, et qu’il enfila les nouveaux. La première pièce était un hakama blanc comme neige, ample et long à souhait, idéal pour les mouvements rapides comme pour tous les déplacements du quotidien. La deuxième pièce était une ceinture résistante de lin blanc, parfaite pour retenir les fourreaux d’un katana et d’un nodachi comme ceux qu’il trimballait presque toujours avec lui. La dernière pièce était un haut de kimono d’une couleur bleu nuit que Sho se surprit à préférer au rouge de son ancienne tenue.
Sous la pile, un rouleau de bandelettes blanches ne manqua pas d’arracher un sourire au shinobi. Ankisuru avait pensé à tout, même au détail les plus infimes, se dit-il en ouvrant grand son kimono pour commencer par dérouler les bandelettes autour de son torse et du sceau qui dormait au creux de son nombril. Une fois le bas de son torse recouvert d’une légère couche de bandage, Sho réitéra l’opération pour chacun de ses avant-bras, terminant par nouer habilement le tout dans la paume de chaque main. Contrairement à ce qu’on pouvait penser, ces bandages ne servaient pas à dissimuler des blessures. Sho se servait de ceux qui recouvraient le bas de son torse pour mieux contrôler sa respiration et s’assurer un meilleur centre de gravité. Les bandages entourant ses avant-bras servaient quant à eux à barrer les éventuels tremblements qui pouvaient secouer ses bras en état de fatigue avancée, ceci afin de s’assurer qu’il ne perdrait pas la moindre seconde à former ses taos, même épuisé.
L’héritage du mode de vie shinobi qui demandait d’être toujours prêt à toute éventualité, même les plus saugrenues.
Son kimono encore largement ouvert, Sho s’assit sur le sol, appuyant son dos contre l’armature du lit. Le calme plat qui régnait dans la chambre lui fit fermer les yeux, sans pour autant s’endormir. Il bascula simplement sa tête en arrière jusqu’à ce que sa nuque se retrouve bloquer par le matelas. Il conserva la position plusieurs minutes durant, ses pensées défilant à un rythme anormalement bas.
Il pensait à Aishuu.
Il ne s’expliquait pas le pourquoi de cette attirance pour la saltimbanque. Il savait simplement qu’elle était bien là, à chaque instant et qu’il ne savait pas comment la gérer. Aishuu était un mystère plus grand encore qu’Ankisuru. Plus il y réfléchissait, plus Sho se rendait compte qu’il ne savait pas grand chose à son sujet en dehors de son prénom. Peut-être cela jouait-il aussi.. Sho était habitué à connaître les grandes lignes de la vie de chaque personne qu’il croisait à Kumo. Il était Juunin, des dossiers, il en voyait défilé des dizaines par jour. Mais là, tout était différent. Il apprenait à découvrir un être à travers ce qu’il était au quotidien, loin de tous rapports à son sujet et du résumer plus ou moins complet de ses services. Aishuu était une femme qu’il s’était surpris à suivre parce qu’elle lui plaisait.
Un sourire plus franc entailla son visage. Akai l’aurait probablement enfermé dans sa serre s’il elle le savait si peu méfiant envers une parfaite inconnue.
Il tourna sa tête jusqu’à ce que sa joue se colle au matelas. Aishuu était un mystère, mais un mystère pour qui il avait des sentiments. Peu importe ce qu’elle était réellement – Sho espérait qu’elle n’était pas une Nukenin toutefois – il aimait sa présence autant que sa manière d’être. Il ne savait dire si c’était une forme d’insouciance ou bien une implacable curiosité, mais il lui semblait qu’Aishuu ne craignait rien ni personne. Cette idée le fit sourire encore un peu plus. Cette femme était une force de la nature, il en était persuadé, malgré le corps relativement frêle qu’elle exposait. Ses jambes étaient puissantes. Ses poings aussi. Sho se demandait même si elle n’était pas capable de lui coller une dérouillée.
Deux coups retentirent contre la porte. L’eisei rouvrit ses yeux et ramena sa tête solidement sur son cou.
Sho – Entrez.
Intimement, il aurait voulu que ce soit Aishuu qui apparaisse dans l’embrasure de la porte, mais la réalité lui présenta une jeune fille aux cheveux bruns. Sho lui donnait entre onze et treize ans à tout casser. Elle portait un plateau sur ses petits bras et inclina respectueusement la tête.
Tomoe – Votre dîner est prêt.
Sho se leva et saisit le plateau des bras de ce qu’il pensait être une servante. Une bien jeune servante, nota-t-il pour lui-même.
Sho – Merci
La jeune fille abaissa brusquement la tête, les joues rougissantes. Surpris par cette réaction, Sho se permit de l’interroger.
Sho – Comment t’appelles-tu ?
Tomoe – Tomoe monsieur, Nanbu Tomoe.
Sho – Pourquoi fuis-tu mon regard, Tomoe ?
Elle se mit à triturer ses doigts nerveusement, comme si elle luttait contre quelque chose ou qu’elle se sentait tout simplement trop hésitante.
Sho – Est-ce que tu as peur de moi ?
Tomoe – Oh non monsieur !
Elle avait brusquement relevé les yeux, des yeux sincères, avant de les abaisser, rougissant à nouveau. L’eisei se persuada qu’il n’obtiendrait aucune réponse et tourna les talons sans prendre le temps de fermer la porte derrière lui. Il posa la plateau sur le sol et s’assit à genoux au même endroit qu’il s’était assis quelques instants plus tôt. D’une main légère, il retroussa la manche droite de son kimono et retourna la coupelle posée sur le plateau avant d’y verser un peu d’eau. Il porta la coupelle à ses lèvres, mais rompit son mouvement en voyant que la jeune fille s’était permis un pas à l’intérieur de la chambre.
Il resta figé dans cette position inconfortable pendant une poignée de secondes, attendant un mot quelconque de la jeune fille. Mais rien. Elle semblait décidée à ne pas parler. Finalement, Sho ramena ses yeux sur la coupelle d’eau et l’avala dans la foulée avant de la reposer sur le plateau.
Tomoe – Est-ce un nodachi ?
Tomoe pointait l’arme appuyée contre le mur. Sho fit osciller son regard entre son nodachi et la jeune fille puis acquiesça.
Tomoe – Vous êtes un shinobi… ?
Sho acquiesça de nouveau, se demandant où elle voulait en venir. Il sentait une forme de crainte à son égard, même si elle avait prétendu avec sincérité ne pas avoir peur de lui. Si elle ne le craignait pas lui, Sho commençait à croire qu’elle craignait plutôt son statut sans pouvoir se l’expliquer concrètement. Tomoe se tenait à distance raisonnable de lui, elle osait à peine le regarder, mais elle semblait intéresser par ce qu’il était, et plus particulièrement par son nodachi qu’elle ne quittait plus des yeux.
Sho – Tu en as déjà rencontré auparavant, n’est-ce pas ?
Elle tourna ses grands yeux marrons vers lui en se pinçant nerveusement les lèvres.
Tomoe – Est-ce que vous voulez du mal à Ankisuru-sama ?
Sho ramena ses mains sur ses cuisses.
Sho – Non, je ne lui veux aucun mal. Il a sa manière à lui de me traiter de tous les noms, mais je suppose que s’il n’en avait rien à faire de moi, il ne se donnerait pas tout ce mal. Tu as faim, Tomoe ?
La jeune fille semblait étonnée. Elle avait cessé de triturer ses doigts et de se pincer les lèvres. Elle le regardait à présent avec appréhension.
Tomoe – Ça fait longtemps qu’Ankisuru-sama n’a plus accueilli un shinobi sous son toit. Par le passé, ils lui ont causé beaucoup d’ennuis et de souffrances. Mais vous ne ressemblez pas aux shinobi dont il parle parfois.
C’est donc ça, pensa Sho. Les paroles rudes que le maître des lieux avait prononcé à son égard trouvait une justification dans son passé tortueux avec les shinobi. Sho comprenait mieux pourquoi il ne manquait jamais une occasion de le critiquer ou de lui lancer différentes sortes de pic. Il souhaitait ainsi mettre à l’épreuve son caractère, et peut-être même voir s’il n’était pas capable de le faire sortir de ses gongs et de révéler ainsi un caractère colérique. Heureusement pour lui, Sho n’était pas colérique de nature. Il était plutôt tout le contraire. Sacré vieux singe, pensa Sho, tu te méfies de moi, croyant sans doute que je suis comme tous les autres et que je ne suis ici que par intérêt, alors que c’est le hasard qui m’a conduit jusqu’à toi.
L’eisei souleva le couvercle d’une assiette, révélant plusieurs brochettes de tsukune qu’il leva en direction de la jeune fille.
Sho – Tu as faim, Tomoe ?
Tomoe – Non merci monsieur, mangez. C’est pour vous.
Sho sourit et mordit dans la première boulette de poulet.
Sho – Les shinobi sont de parfais crétins pour la plupart. Mais il faut des exceptions à tout, tu ne crois pas ?
Pour la première fois, Tomoe se laissa aller à un sourire ravi. Elle s’inclina poliment et recula jusqu’à la porte quand la voix du shinobi la fit presque sursauter.
Sho – J’ai une question à te poser, si tu me le permets ?
Tomoe – Oui monsieur ?
Sho reposa le pic de bois nettoyé de sa viande sur l’assiette et leva son regard d’or vers la petite servante.
Sho – Que dois faire un homme quand il a des sentiments très forts pour une femme qu’il ne connaît pas ?
Tomoe sourit, comme si elle savait où il voulait en venir.
Tomoe – Quel que soit le statut de cet homme, il doit apprendre à connaître cette femme et l’aimer pour ce qu’elle est.
La porte se referma. Le silence s’imposa de lui-même et Sho abaissa un regard amusé sur son repas. Les enfants voyaient plus loin que les adultes. Ils ne prenaient jamais en compte les paramètres extérieures, la multitude de paramètres extérieures. Ils se contentaient de répondre avec la justesse que tous recherchaient ensuite avec l’âge. La question que Sho avait posé à Tomoe, était précisément celle sur laquelle il ne cessait de s’interroger. Il était un shinobi, un shinobi puissant affilié à l’un des grands villages cachés du monde. Qui que soit Aishuu, il savait qu’ils ne venaient pas du même monde même si ces mondes devaient bien partager quelques similitudes. Ces éléments extérieurs perturbaient considérablement sa réflexion, mais Tomoe ne les connaissait pas et ne s’en était pas soucié. Elle avait répondu avec la justesse qu’il avait attendu d’une enfant. Elle avait répondu avec la sagesse que les adultes tendaient à oublier.
Plongé dans une réflexion nouvelle, l’eisei poursuivit son repas dans le silence le plus total. Boulettes de riz, brochettes de poulet et de porc, légumes en bouillon, il n’eut que l’embarras de choix pour rassasier sa faim. A terme, il reposa ses baguettes sur le plateau et bascula à nouveau sa tête en arrière jusqu’à ce qu’elle se retrouve bloquée par le matelas du lit. Il contempla le plafond de la chambre en se demandant comment il devait s’y prendre pour apprendre à connaître Aishuu. Peut-être suffirait-il simplement de passer plus de temps avec elle ? Faudrait-il faire preuve d’intimité, comme cela avait été le cas dans les bains et durant le cours de calligraphie, pour espérer la découvrir sous son véritable jour ?
Il ferma ses yeux et sourit. Aishuu apparaissait continuellement sous son véritable jour. Tous les masques qu’elle pouvait revêtir faisaient partie d’elle. Ils n’avaient rien avoir avec les masques de froideur ou de neutralité que les shinobi revêtaient, par exemple, pour se donner une stature plus importante qu’elle ne l’était réellement.
Aishuu était authentique et Sho l’aimait pour ça.
L’eisei se leva et rangea le plateau repas sur la commode de l’entrée. Il serra son haut de kimono à la taille et fit coulisser la porte de sa chambre avant de parcourir la courte distance qui le séparait de l’entrée de la chambre d’Aishuu. Il leva son bras droit, prêt à taper à la porte, mais le silence apparent dans lequel baignait la pièce l’empêcha de pousser plus loin son mouvement. Il tourna sa tête et posa son oreille contre le bois. Pas le moindre bruit ne filtrait de l’intérieur. Sho savait que sa chambre n’était pas bien insonorisée et il doutait fort qu’il en fut autrement pour celle de la saltimbanque. Non, Aishuu ne devait plus être dans sa chambre.. peut-être était-elle sortie pendant qu’il discutait avec Tomoe ? Et si elle l’était, il était très probable qu’elle se soit endormie tout simplement.
Sho secoua la tête en se traitant de crétin et referma la porte de sa chambre avant de s’asseoir contre elle, les yeux rivés sur la porte qu’il aurait aimé ouvrir pour discuter avec celle qui l’avait entraîné dans ce temple. Celle qui avait révélé bien des choses au fond de lui d’ailleurs. Il replia ses jambes et appuya ses avant-bras contre ses cuisses. S’il n’avait pas été un shinobi, Sho se serait probablement interrogé sur les raisons de sa présence ici et de sa rencontre avec une saltimbanque perdue au beau milieu du paysage blanc du Pays de la Neige. Certains sages appelaient ça le Destin, avec un grand D. Seulement, Sho ne croyait pas que quelqu’un, fut-il un dieu ou tout autre chose, puisse rédiger l’histoire de son existence à l’avance. Non, Sho prenait trop de soin à cacher la plume avec laquelle il rédigeait son cheminement personnel pour se la faire voler par un esprit à peine plus consistant que l’air.
Le shinobi qu’il était se disait que le hasard avait bien fait les choses, tout simplement.
Les secondes passèrent et avec elles les minutes. Après une heure de déambulation spirituelle, Sho décida qu’il devait provoquer le hasard, saisir pleinement la chance que cette rencontre n’avait fait qu’esquisser jusqu’à présent. Il se leva, sûr de lui, et toqua à deux reprises à la porte de la saltimbanque. Ce qu’il allait lui dire une fois qu’elle apparaîtrait dans l’embrasure de la porte ? Il n’y avait pas réfléchi…
… il s’en remettrait à son instinct, comme toujours. |
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| Sujet: Re: [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot Dim 16 Jan - 22:48 | |
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La solitude, un éternel problème au regard de la jeune femme. La solitude était une sorte de fléau qui ponctuait la vie de la saltimbanque comme une bactérie qui saignait son corps. Elle s’écoulait lentement dans ses veines depuis son enfance. Aishuu était comme la peste, l’enfant maudite des contrées alentours de Taki. Les autres enfants n’approchaient pas ceux dont les parents se méfiaient. Pourtant son destin était le même que les leur : mourir. Elle avait simplement une avance de prévue quant à cet accomplissement. Pourtant, la compagnie pure à l’époque enfantine est souvent la plus belle, celle dont les souvenirs ne meurent jamais. C’était une vie de solitude qu’elle avait choisi. Elle vivait seule, déambulait seule, dans un monde qu’elle contemplait seule. La musicienne avait toujours su comment se débrouiller.
Alors qu’est-ce qui la faisait douter ?
Aishuu était une saltimbanque : une femme sans attache et sans lien, qui voguait au gré de son envie et au bon vouloir de ses besoins. Son corps était une arme qui lui servait aux petits stratagèmes malsains qui lui permettaient de vivre d’une manière plus simple au dépend des hommes. C’était un moyen de se sentir en vie, le temps d’une nuit, au travers de quelqu’un d’autre. Seulement, ces petits écarts d’une nuit n’étaient pas des faits isolés en tant qu’éventuelle réponse à un besoin.
Il y avait également eu Kaishin. Ils avaient été ensembles, mais d’une manière si étrange qu’Aishuu ne savait même pas qui d’entre eux cherchaient la présence de l’autre. En effet, cette relation se désignait uniquement par le petit jeu du « fuis-moi, je te suis et suis-moi, je te fuis ». Etait-ce un comportement qui la poussait à s’approcher, ou à s’éloigner de lui ? Comme elle n’était pas à même de trouver la réponse, elle continuait de torturer son esprit à la recherche d’un quelconque indice.
Etait-elle solitaire, ou juste une femme perdue ?
Sa main tomba, pendante, sur le côté du lit. Elle semblait sans vie tant elle se délaissait mollement, sans résistance ni opposition à Newton. La jeune femme fixait le plafond avec un air blême, et un visage totalement absent : Aishuu aurait pu être morte qu’elle n’en aurait pas été différente. Son immobilité était la plus parfaite, allant jusqu’à ses paupières qui avaient cessé de battre, son souffle semblait ne même plus relever sa cage thoracique, et son sang n’irriguait plus son corps. Blanche comme la mort en personne, elle demeurait dans un état hypnotique qui était, sans nul doute, l’affaire d’une réflexion.
Au dehors, le temps s’était peu à peu calmé, comparé à la violence des éléments il n’y a encore quelques minutes. Minutes, le croyait-elle : le noir avait déjà investi le ciel et les âmes. Le soir s’était déjà allongé sur la totalité de Yuki, mais elle n’avait fait aucun bruit. Le ciel prune ne cessait d’apaiser le regard des voyageurs et les ardeurs de la neige. Les aiguilles avaient tourné à une vitesse hallucinante, puisque la jeune femme n’avait ni sourcillé, ni manqué de quelque chose pendant les heures qu’elle avait passé à ne rien faire physiquement. C’était son mental qui s’interrogeait sans cesse, se tournant sans dessous dessus. Aishuu n’avait ni faim, ni soif malgré le fait qu’elle n’avait pas mangé depuis plus de deux jours. Les instincts d’ermite revenaient avec une facilité déconcertante.
Entre ses lèvres s’éleva un soupir… Long et agonisant, cherchant à se mourir sur la peau de quelqu’un, mais elle était seule. Aucun repas ne semblait vouloir arriver, et ainsi, aucune présence ne vint chercher la jeune femme dans sa bulle de solitude. Et probablement personne ne viendrait, notamment parce qu’elle ne voyait aucune raison de trouver une compagnie.
Le pourpre de ses yeux chercha le sommeil, se cachant sous ses paupières afin de fuir le flot de questions et d’images qui inondaient son cerveau. Son visage sembla soudainement apaisé, comme si elle n’existait plus… La saltimbanque releva sa main et la glissa dans sa chevelure, agitant les fils blancs qui volaient gracieusement. Son corps dormait de fatigue, mais pleurait de solitude. Il lui manquait…
Aishuu se redressa sur son lit, se relevant lentement pour venir s’asseoir sur le bord du lit. Elle croisa les bras sous la poitrine, la rehaussant sensiblement, constatant dans quel état elle avait délaissé sa chambre. Sur son visage s’encra une petite moue abattue, alors qu’elle se remit droite sur ses deux jambes flagellantes, afin de venir ranger son vêtement de la journée. Elle s’approcha de la porte, ramassant une à une les étoffes douces au creux de ses bras, et vint s’arrêter devant le ruban qui était là, coincé dans la porte coulissante. Le bordeaux lui résistant, elle dû entrouvrir la porte de soie, et de bois afin de la rattraper.
Son échine fut parcourut d’un langoureux frisson, ayant le maigre espoir d’apercevoir Sho derrière cette fine cloison illusoire. Rien que par avance, son sourire vint s’imaginer sur son visage. Etait-il là ? Aishuu aurait aimé le voir et sauter à son cou. Cependant sa déception n’en fut peut-être que plus grande lorsqu’elle remarqua son absence.
Ses traits se durcirent légèrement, rendant son visage d’une neutralité froide. Les doigts glissant délicatement dans les plis de l’étoffe, elle s’en saisit sans mot dire, quelque peu déçue, plaçant la pointe de son pieds en retrait afin pour pouvoir lui permettre de pivoter. Aishuu appuya le poids de son corps sur sa jambe arrière et se redressa, déposant sa main sur la porte, avant d’entamer un long mouvement circulaire, ample et long comme le serait une courbe de danseur. Son corps ondulait comme le dos de la vague, s’enroulant gracieusement pour violement s’écraser sur le sol sablé. Le tissu vint suivre son corps, s’entortillant dans une spirale interminable, alors que son corps se mouvait subtilement.
A nouveau, un soupir las s’échappa, pour laisser place à un visage radieux. Dans la vie, il fallait savoir se satisfaire de ses acquis, et la saltimbanque était une femme jusqu’à présent heureuse de son rythme de vie. Pourquoi devait-elle se laisser aller à un tel comportement ? Comportement qui n’était pas le sien.
La musicienne s’approcha du lit avec une délicatesse dans le geste digne d’une personne de sa prestance, et déposa lentement le kimono rouge sur le lit, conservant uniquement le long et large ruban de soie rouge. Une fois ses mains débarrassées, Aishuu laissa son corps s’exprimer par le biais de la danse. Lentement, elle leva sa jambe droite, et l’élança derrière sa tête d’une manière parfaitement verticale. Lâchant un délicat souffle d’air chaud, elle laissa son buste se cambrer, ses mains glissant le long de sa peau, jusqu’à rejoindre de ses deux paumes son pieds au sol. Ainsi pliée en deux, la saltimbanque élança sa seconde jambe et resta en suspension dans l’air sur l’appuie de ses bras et elle se maintenait dans cette posture avec une souplesse fine, laissant ses bras se fléchir pour finir appuyée sur ses avant bras. Son corps s’emplissait d’une joie inouïe dès lors où il se laissait aller sous des pulsions de folie. Son sourire illuminait son visage alors qu’elle déposait son menton sur le planché froid, abaissant ses pieds au dessus de sa chevelure. Ses doigts caressaient soigneusement l’étoffe d’une douceur délicate.
La silhouette d’un homme se découpait derrière le pas de la porte, son souffle se déposant sur sa rigidité douce. Aishuu aurait aimé savoir que cette présente était si proche d’elle, cependant, elle en resta très loin, puisqu’elle ne la remarqua pas, tout comme ce dernier n’osa pas franchir le cap. La jeune femme déposa ses pieds sur le sol, et forçant légèrement sur les muscles de ses cuisses et de ses mollets, elle se releva, le buste cambré vers l’arrière, l’âme vibrante d’une joie lumineuse.
La musicienne déposa ses doigts sur sa joue et caressa sa peau, murmurant avec décontraction qu’il lui était tant d’aller prendre se rafraîchir le corps. Elle tourna une dernière fois le visage vers la porte d’entrée, mais il n’y avait rien. Cette absence continuelle la fit abandonner l’idée de recevoir de la visite, accrochant plutôt ses pensées vers la porte d’une pièce entièrement constituée de bois, directement reliée à sa chambre. Elle s’avança, discrètement, et appuya sa paume contre la porte, imposant gentiment sa force entre ses doigts pour entrouvrir la plaque de bois. Curieusement, elle regarda s’établir sous ses yeux une salle de bain, avec un imposant robinet sur lequel elle devait poser une pression pour recevoir l’eau, et une large bassine vide. A côté se trouvait une petite sorte de table sur laquelle dormait une serviette violacée, probablement à son attention.
Trouvant la surprise agréable, mais se demandant si Ankisuru n’était pas magicien par moment, elle libéra son corps du tissu, laissant tomber les différents morceaux de son kimono sous ses chevilles. Elle fit un premier pas dans la petite salle confinée puis referma la porte derrière elle, déposant ses doigts sur le manche du robinet, le levant, puis l’abaissant paisiblement afin de pomper l’eau, probablement l’eau pure de Yuki, et plus fantasque, l’eau de la source juste située en dessous. La bassine se remplit dans un bruit cristallin et métallique, laissant fuir une fine vapeur de sa bouche béante.
Du bout des doigts, Aishuu définit l’étreinte sous sa poitrine en retirant avec minutie le bandage qui tenait en place ses légers synapses, et enroula la bande pour la déposer dans une corbeille servent l’usage de recueillir les déchets. Elle se sentait soulagée de retirer cette tension, ses paupières s’imposant avec politesse devant les pierreries de ses yeux. Par la suite, la saltimbanque s’approcha de la bassine, rejoignant ses deux mains en son centre de manière à épouser les courbes de l’ondine et d’en capturer l’essence qu’elle se tamisa sur le visage, mouillant par la même occasion ses longs cheveux blancs au niveau de leur pointe. Plongeant ses avants bras dans la tiédeur de l’eau, elle nettoya ses mains de l’encre fictive qui tachait ses extrémités, avant de se saisir de l’eau pour la faire couler sur son corps.
De longues gouttes sensuelles dévalèrent sournoisement les courbes de sa peau, les galbes de ses formes, les épousant comme de tendres amants qui s’éprenaient de son âme. Elles perlaient comme le givre, se figeant dès lors qu’il leur fallait se laisser choir de son corps, l’abandonnant, ruisselante. La fine buée dansait avec son esprit, tournoyant délicatement afin d’embaumer son corps endolori par les interrogations. Son corps réagissait tendrement, cambrant sous les caresses malicieuses de cet homme de brume, créant une sorte d’extase inouïe.
Il suivit de cette intimité une caresse d’une délicatesse pure dès lors où la texture vint embrasser sa peau blanche. Son pâle velours frissonna sous le rectangle de tissu dans lequel elle s’enroula. Sa peau réagit de tendresse sous son touché, le grain de sa peau se révélant sans discrétion. Elle se sentait calme et apaisée, poussant la porte pour regagner sa chambre. Cependant, elle entendit un petit son s’extirpait de la porte qui condamnait sa chambre.
Aussi vite eut-elle entendu cette sonorité banale, que tout son calme s’en réchappa, pour la remettre à son état d’excitation enfantine devant un cadeau. Son sourire s’enraya sur son visage comme un rayon illuminant son ovale en coupant en deux hémisphères. Aishuu sauta au dessus de son kimono violet posé au sol devant la petite salle, s’élançant vers l’entrée, le corps enrobé des bras de sa serviette. Sa main fit coulisser la porte, un peu trop au vue de la force que lui conférait son impatience, se dévoilant un peu trop sur le seuil face à Sho.
La découverte de son corps fit chanter son âme, regardant son visage ressortir de la pénombre causée par l’heure, sans doute tardive. Elle ne remarqua pas tout de suite certain changement, puisqu’elle était un tantinet trop pressée, mais ne put retenir ses rouges de rougir.
[Aishuu] : « Entre, j’arrive dans deux minutes le temps d’être présentable. »
La saltimbanque s’élança alors, se penchant pour ramasser ses vêtements et s’enferma dans la petite salle, fermant délicatement la porte, sèchement, derrière elle. Elle s’empressa de revêtir son corps des parures de prune, nouant les bandes autour de sa taille, puis enchaîna avec la mise en place de ses bas, de sa veste, jusqu’à la ceinture longue qui camouflait timidement ses jambes. Prête d’un coup, elle ouvrit d’un geste ample la porte coulissante, et se retrouva face à Sho. Dans son empressement, elle n’avait pas eu l’occasion de retrouver la teinte lunaire de sa peau au niveau de ses joues. Elle resta un moment figée devant lui, ses cheveux ruisselant par perle de rosée sur son kimono, qui absorbait l’eau dans ses fibres pour en foncer la couleur. Ses cheveux retombaient sur son visage, l’encadrant d’une manière peut-être un peu négligée. Aishuu s’en retrouva gênée.
[Aishuu] : « Je suis désolée… Je n’ai rien à te proposer, puisque je n’ai à moi que cette chambre… Assis-toi, et… »
Plus sa voix résonnait, et plus la jeune femme avait l’impression de creuser son propre emplacement dans un cimetière. C’est d’ailleurs pour cela qu’elle préféra se taire, histoire de faire cesser le flux de paroles illogiques et intéressantes qu’elle enchaînait de manière naturellement stupide.
Sa main blanche remonta sur sa joue, le bout de ses doigts caressant la chaleur qu’elle déversait, et laissa son index dévaler sa joue jusqu’à la commissure de ses lèvres, jusqu’à en caresser la partie inférieure de sa pulpe, en fixant le regard d’or du jeune homme… Comme à chaque fois qu’elle lui faisait face, elle se sentait mise à nue : sans doute était-ce pour ça qu’elle avait profité de son avantage pour se placer le long de son dos durant le cours. Rien ne semblait pourtant vouloir sortir de sa bouche, pas le moindre son pour témoigner le trouble qu’il avait la chance de pouvoir maîtriser sur elle. Aishuu se sentait faible. Son regard s’enfuit, glissant sur le parqué, alors qu’elle s’avançait vers lui. Elle s’approcha de lui, venant déposer sa main contre sa joue. La saltimbanque approcha ses lèvres du creux de son oreille et lui souffla du bout des lèvres…
[Aishuu] : « Je t’attendais… »
Elle déposa sa joue le long de la sienne et souffla délicatement au creux de sa nuque, avant de déposer ses lèvres comme un bouton de rosée sur le plat de sa joue, restant posée contre lui, en le tenant dans ses bras à une proximité rougissante. Sa seconde main glissa le long de son bras pour lui étreindre la main entre ses doigts, insurgeant son sourire sur ses lèvres. Elle conserva cette posture un moment, s’accaparant de la chaleur corporelle dont elle se nourrissait.
Elle serra ses doigts autour de sa main, laissant sa respiration lente arpenter les sillons du corps du jeune homme, et s’abandonnant aux soupirs langoureux d’un frisson le long de son échine. Mordillant timidement sa lèvre, elle se rendit compte que ses cheveux étaient en train de ruisseler le long du torse du médecin, et se recula machinalement pour s’excuser, lâchant presque par réflexe sa main. Son visage se retourna vers le sol, et s’y déposa un long moment, avant de laisser fuir un : « Fais comme chez toi, même si je ne sais pas réellement ce que veux dire cette expression… »
Alors que son regard détaillait les sillons du bois du sol, suivant leurs courbes et leur contre-courbes, elle se demandait pourquoi elle agissait ainsi, elle qui était une femme vivant sans tabou ? Sa gêne, elle ne la découvrait qu’en sa présence, elle, Aishuu Satsubatsu, qui avait appris à vivre dans l’exubérance et la vente de soi pour la survie. Son agissement et son attitude ne semblaient pas lui correspondre, mais elle lui collait indéniablement à la peau comme un costume qui avait fini par devenir trop petit pour être retiré. Alors qu’elle cogitait, Sho donna l’impression de vouloir dire quelque chose, cependant, elle ne put se résigner à écouter le timbre de sa voix. La jeune femme s’arrêta, se figeant devant lui le temps de quelques secondes, puis vint apposer ses lèvres sur les siennes.
Bien que le baiser ne dura guère plus de cinq secondes, tout son corps sembla réagir à ce contact. La proximité qui s’était engendrée entre eux avait considérablement apporté une touche de couleur sur la toile blanche de la peau de la jeune femme qui se mourait de vie. C’était un échange solennel qui venait de se sceller dans un geste aussi vif de sa part marquait peut-être la faiblesse de la Blanche qui cédait à la torture que son esprit s’était insurgé. La sensation des lèvres de Sho lui semblait tellement douce et pure, alors qu’elles étaient apposées sur les siennes comme une ode au sublime. Aishuu s’évada durant ce court laps de temps, rêvant presque éveillée sous le joug de ce baiser.
Puis, il y eut le réveil du Rayon de Lune, qui vint réagir à son acte, rompant ainsi la saveur de ce partage. Elle délia leurs lèvres et recula son visage, relevant les yeux vers le regard de miel du ninja qui se tenait là. Sa gêne ne parvenait plus à s’inscrire tant son visage était saturé par ses pigments. Elle contourna l’eisei pour s’avancer à côté de lui, s’enfonçant dans son dos pour trouver un quelconque appuie, dans un quelconque endroit saugrenu. La jeune femme finit par se décider, se laissant s’asseoir sur le lit, regardant furtivement la silhouette tournée de l’homme aux cheveux de flammes.
Son visage se releva et se tourna, cette fois franchement, vers Sho. Ses yeux le fixant, et le scrutant de haut en bas, elle lui envoya un sourire, un sourire qui n’avait rien de faux. Il était emplit de joie et de bonheur. Ses iris semblaient pétiller, reflétant l’image de l’homme qui se tenait devant elle. [Aishuu] : « … Je… »
Elle se mit à rire, fermant un instant ses paupières sur ses pierreries. Amusée par ses idioties, elle ne parvint pas à le retenir, se livrant, avec maladresse, devant l’homme qui se tenait là.
[Aishuu] : « Je suis désolée. »
La saltimbanque le regardait avec tendresse. Son vêtement lui sauta enfin aux yeux, remarquant le bleu nuit qui était aussi intense que la nuit elle-même qui laissait Yuki sommeiller. Il gagnait une prestance dont il n’avait pas besoin pour faire succomber Aishuu. Et cet ajout perturba davantage cette dernière, qui mordilla délicatement sa lèvre, la faisant plier sous son ivoire.
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| Sujet: Re: [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot Jeu 20 Jan - 13:08 | |
| La porte coulissa subitement sur le côté. Sho se vit sourire, prononcer une phrase accrocheuse, tout en paraissant parfaitement calme et détendu, mais la réalité lui rappela avec fermeté qu’il existait un gouffre entre ses songes et ce qu’il était réellement capable de faire dans l’instant présent. Face à Aishuu, il se sentit tout juste défaillir. Pas un sourire, pas une phrase accrocheuse pour justifier sa présence, rien de tout ça, juste un regard qui le temps d’un court instant se perdit dans les yeux de la saltimbanque. Si son instinct devait lui faire dire quelque chose, on pouvait résolument dire qu’il s’était complètement raté. Heureusement, Aishuu l’invita à entrer et s’éclipsa dans la foulée sans porter d’attention à son manque de réaction. C’était à croire qu’elle l’attendait, qu’elle savait qu’il taperait à sa porte à ce moment précis, comme si rendez-vous avait été fixé entre eux. Ce qui n’était pourtant pas le cas. Sho avait tapé spontanément à sa porte par nécessité. Le besoin de la voir était trop pressant pour le tenir plus longtemps en cage ; alors il était venu à elle, et elle à lui, comme si tout été écrit depuis bien longtemps par une main soigneuse.
L’eisei referma la porte derrière lui et jeta un rapide coup d’œil à la chambre. A deux ou trois exceptions près, elle ressemblait en tout point à la sienne, même si quelque chose, notamment dans l’agencement du mobilier, laissait entendre que la chambre était bien occupée par une femme et non par un homme. Les affaires d’Aishuu dormaient dans un coin de la pièce, rangées plus soigneusement qu’il ne l’avait fait de son côté. Il sourit pour lui-même et porta son regard vers la porte en bois derrière laquelle Aishuu avait disparu.
Sho ne pouvait s’empêcher de croire qu’il agissait bizarrement en sa compagnie. Il n’était pas à proprement parler dans un état second, ou partiellement déconnecté de la réalité, non, il se sentait tout simplement différent. Cette sensation lui était particulière et entrait en quelque sorte en résonance avec son passé. Avant de devenir un bras armé du Village Caché des Nuages, il avait été un enfant, banal, sans doute un peu perdu dans sa bulle, mais banal tout de même. Il avait des rêves, le pouvoir d’être affecté par les malheurs qui préoccupaient son entourage, la force de distinguer le premier jour de la semaine du dernier, et tout un tas d’autres choses qui le rendaient si humain. Entrer à Kumo avait quelque peu effacé ces éléments de son quotidien. Il avait perdu un peu de son humanité, un peu de sa faiblesse sans doute, pour devenir l’homme qu’il était aujourd’hui. Un homme capable de préserver la vie, et peut-être même de défier la Mort, mais un homme qui avait à présent du mal à gérer ses sentiments au lieu de les laisser voguer vers leur destination. Rencontrer Aishuu avait modifié cette perspective. Sho ressentait de nouveau des choses qu’il avait pourtant appris à mettre de côté. Ses sentiments en premier lieu, mais aussi sa capacité à profiter des petites choses du quotidien, comme s’il les vivait pour la toute dernière fois. C’était en quelque sorte la chance de pouvoir se redécouvrir, et de retrouver ce qui faisait son unicité.
Une chance qu’il devait à la femme qui venait de réapparaître dans un magnifique ensemble aux tons améthystes.
Il lut dans son regard le même trouble qui l’habitait. Ne pas savoir quoi dire, ne pas savoir quoi faire si ce n’est fixer le regard de l’autre comme si toute notre vie ne dépendait plus que de ça. Ankisuru aurait sans doute jugé cela affligeant, et il aurait eu tort. Car il y avait du bon à se perdre dans un regard qu’on ne faisait que découvrir. Il y avait du bon à ne pas savoir quoi faire, à ne pas savoir quoi dire, du bon à redevenir un simple être humain soumis à des sentiments trop importants pour pouvoir les taire. Aishuu lui murmura qu’elle l’attendait et il lui répondit, à sa manière, que lui également. Cette réponse ne prit pas la force d’un son ou d’un souffle, mais d’une simple caresse sur sa main. Douceur dont il se croyait encore incapable quelques jours plus tôt. Le reste se passait de mots.
A retrouver la chaleur corporelle d’Aishuu contre lui, il retrouva son sourire. A sentir son souffle parcourir sa peau, il opposa le contact de la sienne contre son corps. Leurs mouvements, leurs caresses, ne suivaient pas un ordre logique, non comme la danse de deux corps qui se connaîtraient à la perfection depuis de longues années, et que le temps aurait soumis à un semblant d’habitude. Il était ici question de gestes attentionnés, doux, maladroits peut-être même, soumis à l’exploration d’un corps qui leur était parfaitement méconnu malgré la proximité qui avait été la leur dans les bains. En sentant les gouttes d’eau qui ruisselaient des cheveux d’Aishuu percer silencieusement le tissu de son kimono, Sho releva ses yeux et laissa courir ses doigts le long d’une de ses mèches. Toucher, ressentir l’alchimie singulière entre son corps et un autre, s’émerveiller, et finalement se rendre compte qu’on attendait cet instant depuis longtemps.
Aishuu – Fais comme chez toi, même si je ne sais pas réellement ce que veux dire cette expression…
Aishuu eut beau se reculer et briser le lien qui les réunissait, Sho laissa sa main pendre dans l’air, ses doigts encore resserrée sur une mèche de cheveux qui n’y était plus. Son regard suivit le mouvement de ses doigts, admiratif de l’hypnotisme dans lequel il était retenu. A cet instant précis, l’eisei savait qu’il aurait pu trouver la mort par vulnérabilité plus que par absence de réactions. Si Aishuu avait été une ennemi cachée, elle n’aurait eu aucun mal à briser la simili défense qui lui restait. Cette réalité, terrifiante pour n’importe quel shinobi, le laissa pourtant perplexe.
D’autres, réalisant leur propre faiblesse, aurait sans doute déserter la pièce et tenter par tous les moyens de quitter le temple, pour échapper à la honte de faillir si facilement après tant d’années d’entraînement. Mais Sho ne bougea pas, et ne s’accorda aucune honte. Son regard oscilla de ses doigts au visage de la saltimbanque, en se disant qu’il avait fini par renouer avec ce qu’il était réellement. Kumo l’avait accueilli à bras ouverts, l’avait nourri, entraîné, et destiné à être ce qu’il était aux yeux de tout un village. Un Juunin sur lequel on pouvait se reposer en toute situation. Mais au-delà de la fonction, que restait-il du véritable Sho Nagoshi ? La réponse se trouvait entre ses doigts resserrés. Le temps pouvait enterrer bien des choses, mais pas la nature de l’âme que renfermait chaque être humain.
Dans son regard d’ambre, le visage d’Aishuu se refléta un moment avant d’être brusquement happé par les ombres. Les yeux à demi-clos, il goûta ses lèvres sans forcer le geste, suivant simplement la direction que la saltimbanque avait bien voulu lui donner. La surprise n’était pas figée sur son visage, mais au plus profond de lui-même. Surprendre un shinobi en dehors d’un champ de bataille relevait sans doute du phénomène, surprendre un Juunin de sa trempe relevait précisément du miracle. Un miracle qui s’était dessiné en à peine quelques secondes avant de se rompre, une nouvelle fois emportée par Aishuu. Sho la suivit du regard et lui fit face quand elle s’installa au bord de son lit. Le parfum et la douceur de sa chair étaient encore imprimés sur ses lèvres ; l’effet électrisant de son baiser, dans tout son organisme.
Aishuu lui sourit comme jamais. Sho était désormais habitué à ses sourires mutins, à ses perpétuelles double sens, il n’eut donc aucun mal à remarquer que celui-ci était différent, mais il n’aurait su dire en quoi. Le mot sincérité lui venait en tête, mais ce n’était pas le bon mot. Ce sourire était plus solennel, plus personnel. Elle voulait lui communiquer quelque chose qu’on ne pouvait pas exprimer par des mots simples ou compliqués. Le baiser qu’elle venait de lui donner était le départ de cette idée, la naissance d’un sentiment enfoui, sans doute, et que l’eisei se surprit à partager. Il ne savait pas si c’était simplement de l’attirance, si Aishuu venait de l’embrasser par simple désir plus que par sentiment. Mais lui était bien conscient du cœur qui martelait sa cage thoracique. Conscient que la respiration de la saltimbanque avait grimpé d’un échelon et que la pigmentation de ses joues ne laissait que peu de place aux interprétations. Alors pourquoi ce doute ? Pourquoi craignait-il encore d’avancer et de répondre dignement au pas qu’Aishuu avait fait vers lui ? Elle eut beau s’excuser, il secoua la tête pour lui faire comprendre qu’elle n’avait pas à le faire. La seule personne qui avait à s’excuser ici, c’était lui.
Donner de l’importance aux sentiments qu’on pouvait ressentir représentait une faiblesse de taille pour un shinobi. C’est ce qui se disait plus ou moins communément dans les couloirs de l’Académie comme en dehors. Un shinobi ne devait pas avoir de sentiments, c’était une loi plus ou moins admise. Les sentiments étaient trop instables, trop incertains, pour qu’un shinobi se permette de les manipuler sans risques. Dans les mains de deux personnes différentes, un même sentiment pouvait provoquer des réactions diamétralement opposées. Était-ce néanmoins une raison de les écarter, Sho n’en était pas convaincu. Il croyait au contraire qu’on pouvait y puiser des forces insoupçonnées, pour peu qu’on sache les contrôler. C’était là tout le problème, contrôler, toujours contrôler, ce mot rythmait la vie de tous les gens qui luttaient pour une raison ou pour une autre dans ce monde. Le contrôle absolu, la maîtrise totale de soi, relevait de l’utopie aux yeux du Juunin. A son sens, c’était jouer à contrôler l’incontrôlable au lieu d’essayer, tout simplement, de vivre avec et de s’accepter tel qu’on pouvait l’être.
A bien y réfléchir, rien ne valait mieux que de s’abandonner à ses sentiments. Ne serait-ce pour ne pas vivre avec l’éternelle insatisfaction de ne pas les avoir suivi à un moment ou à un autre de sa vie. Un shinobi ne vivait pas avec des « j’aurai dû ».
La nuit était d’un noir profond et les étoiles scintillantes lorsque Sho tourna sa tête vers la seule fenêtre de la pièce. C’était une belle nuit pour laisser cours à ses sentiments. Une belle nuit pour oublier les règles. Alors l’eisei s’approcha du lit et fléchit sur ses genoux pour se retrouver accroupi à quelques centimètres d’Aishuu. Son regard appuyé vers la fenêtre, il rechercha une nouvelle proximité. Une proximité qu’il aurait choisi pour une fois. Ses avant-bras se posèrent sur les genoux de la saltimbanque, parallèle l’un à l’autre. Ses mâchoires se serrèrent et se desserrèrent pour dessiner un creux éphémère au coins de son visage, signe qu’il était plongé dans une profonde réflexion. Si profonde en réalité et pourtant si simple.
Que lui dire qu’il n’avait pas encore réussi à prononcer jusqu’à maintenant ? Quels mots choisir, quels mots écarter ? L’eisei réfléchissait.
Au bout d’un temps, Sho tourna son visage et ramena son regard dans celui d’Aishuu. Il l’observa longuement, comme si c’était la première fois qu’il la rencontrait, ses yeux, ses joues, son nez, sa bouche, il observa chaque détail avec l’œil d’un homme qui voit au-delà des apparences, et non avec celui de l’analyste qui cherche le moindre petit défaut. Aishuu n’avait fait que le surprendre jusqu’à présent. Elle lui avait montré une autre manière de concevoir et de penser. C’était maintenant à lui de la surprendre, à lui de lui montrer qu’il était beaucoup plus qu’un shinobi à la solde d’un puissant Village Caché, beaucoup plus que l’homme qu’il prétendait être depuis que leurs pas les avaient conduis sous ce toit.
Sho – On m’a appris tout jeune que les gens comme moi ne devaient pas accorder une trop grande place à leurs sentiments. Aujourd’hui, je comprends un peu pourquoi les instructeurs nous racontaient tout ça. Au-delà de la faiblesse, ils voulaient établir une première sélection naturelle. D’un côté, ceux qui seraient capable de les renier en une fraction de seconde et qui seraient condamnés à vivre leur existence dans l’ignorance la plus totale. De l’autre, ceux qui essayeraient, mais qui se laisseraient finalement submerger pour le meilleur et pour le pire.
Un fin sourire animait son visage. Le ton de sa voix frôlait le murmure, mais conservait cette passion et cette sincérité à toute épreuve qui l’animaient habituellement.
Sho – Si avoir des sentiments pour toi est une faiblesse, je considère que s’en est une qui mérite d’être vécu pleinement.
Il sourit un peu plus en plissant les yeux. Puis ses mains s’animèrent pour chercher celles de la saltimbanque. Ses doigts suivirent les interstices séparant chacun des siens et lentement il resserra son étreinte.
Sho – Il se dit que pour trouver ce qu’on cherche intimement, il faut savoir se perdre. Or je crois qu’au cours de ces dernières quarante huit heures, mon sens de l’orientation en a pris pour son grade.
Son regard roula vers sa main droite et celle d’Aishuu. La vie se résumait à très peu de choses en réalité, et le choix se faisait plus restreint encore pour un shinobi. Laisser passer la chance de vivre quelque chose d’intense, d’exceptionnel, n’était pas permis. Vivre ne se résumait pas à regarder la vie des autres se consumer plus ou moins rapidement, mais au contraire à consumer la sienne avec tout les faiblesses que cela pouvait représenter. Ce n’est qu’en étant faible qu’on peut prendre la mesure d’une joie intense.
Sho – Aishuu…
Il approcha lentement son visage du sien, se figeant un instant au plus près de son regard. Puis encore plus lentement, il apposa ses lèvres contre les siennes comme pour lui signifier qu’elle n’était pas la seule à l’avoir désirer. Ce contact si particulier électrisa le cœur du shinobi qui glissa aussitôt une main le long de sa mâchoire. On n’aurait pu imaginer échange plus doux que celui-ci, plus calme et plus paisible également. Les mouvements des deux âmes se répondaient idéalement comme si elles se faisaient échos naturellement. Mais Sho finit par rompre cet échange car au fond de lui venait de s’éveiller les mots qu’il avait tant cherché à prononcer.
Lentement, ses doigts glissèrent sur le buste de la saltimbanque jusqu’à s’arrêter sur son cœur.
Sho – Me laisseras-tu sceller mon nom à cet endroit ? |
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| Sujet: Re: [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot Dim 23 Jan - 12:43 | |
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Ses yeux étaient posés sur le ninja, mais ne pouvaient s’en détacher. Glissant sur les moindres traits de son visage, ils cherchaient d’eux-mêmes à caresser ses courbes. Des cheveux rougeoyants, aux terminaisons violines, qui en fines mèches venaient tapissaient son visage dans un univers coloré. Un univers qui s’opposait à celui de la jeune femme. Sa peau beige donnait un éclat vivant à son être, face au blanc neigeux de la peau de la saltimbanque. Ses lèvres s’animaient doucement pour laisser fuir de douces sonorités qui venaient directement empoigner le cœur d’Aishuu. Ses améthystes finirent de détailler son visage en s’abandonnant au plus profond de ses yeux de miel, qui luisaient d’un éclat humain.
Son contact lui était infiniment agréable, sentant la chaleur de ses doigts enrober sa main, la chaleur de son souffle dévalant les plaines de sa peau. C’était exactement cette sensation que tout son être avait cherchée, toute sa vie, en secret. La jeune femme avait la soudaine impression qu’un vide béant s’était comblé, au détour d’une rencontre, et d’une alchimie particulière qui avait su faire de l’or à partir du pauvre plomb qui se noyait dans son cœur.
Délicatement, le plat de son pousse vint caresser les doigts du médecin qui trônaient sur les siens, toujours figée dans une sorte de contemplation naïve. Elle se nourrissait lentement de sa présence, cherchant à découvrir les moindres bienfaits que cette dernière pouvait lui apporter en si peu de temps. Son visage s’en vit ravi d’un sourire qui vint fendre son visage d’un éclat rosé.
Lorsque le regard de Sho vint s’approcher du sien, il s’engagea une petite valse entre leurs yeux, s’amusant à voir qui des deux perceraient l’autre au plus profond. Personne ne saura qui des deux fut victorieux, puisque leur visage continua de se rapprocher. Le contact de ses lèvres éveilla un frisson langoureux dans tout son corps, alors qu’elle savourait ce rapprochement avec délectation. Ses paupières s’abaissèrent doucement, Aishuu concentrant tous ses sens sur cette sulfureuse caresse. Malheureusement, cette douceur ne fut pas infinie…
Le visage de l’eisei se recula quelque peu et laissa filer le doux son de sa voix jusqu’au creux de son oreille, tandis que l’une de ses mains se détachait de la sienne pour venir se déposer la où son cœur battait dans sa poitrine.
[Sho] : « Me laisseras-tu sceller mon nom à cet endroit ? »
Les yeux d’Aishuu se baissèrent, comme si ce geste empêcherait ses joues de s’enflammer. Inexplicablement, elle sentit son corps perdre pieds, et n’en possédant plus le contrôle, elle se retrouva à subir ses impulsions imprévisibles, tout comme l’homme aux yeux de miel en face d’elle. Ses mains se retirèrent de ses doigts, et vinrent s’enrouler autour de son cou, alors qu’elle approcha tout son corps pour venir s’emparer de ses lèvres. Cependant, avec l’élan qu’elle s’était donnée, l’équilibre approximatif du Juunin qui était accroupi, et surtout, à son étonnement, la jeune femme vint sauter à son cou pour déposer ses lèvres contre les siennes. Cette action se solda par une chute de Sho qui se retrouva par terre, poussé en arrière, Aishuu se retrouvant au dessus de lui, à partager un baiser.
Le violet de ses iris caché par le blanc de ses paupières, la jeune femme s’abandonna un instant pour profiter des arômes des lèvres du ninja. Ses saveurs électrifièrent tous ses sens, et la déstabilisèrent aussitôt lorsqu’elle prit conscience de la situation. Elle recula lentement le visage, constatant la situation, puis, la tête que faisait Sho, et se mit à rire, amusée. Aishuu posa ses genoux à terre, de par et d’autre de la pauvre dépouille du médecin, ne pouvant que difficilement s’empêcher de rire. La saltimbanque déposa sa main sur la joue du jeune homme, le sourire amusé gravé sur le visage et murmura, entre deux petits rires…
[Aishuu] : « Sceller, c’est exactement pour cela que je suis ici. »
Sho déposa délicatement les paumes de ses mains sur les cuisses de la jeune femme. Son visage semblait amusé, et le doux son de son rire léger confirma cette impression. Ses yeux étaient fixés sur le plafond, puisqu’Aishuu ne lui avait offert que cette vue dans la chute, puis il les abaissa sur elle, au moment. Sans doute ne l’écoutait-il que d’une oreille, puisque qu’avant même qu’elle n’eut le temps de finir, qu’il souleva sa main droite suivit de son index pour venir dessiner sur le cœur de la saltimbanque. La musicienne ne dit rien, le regardant faire, constatant qu’il inscrivait son nom sur sa poitrine. Le ninja souriait d’un sourire rayonnant, et laissa fuir sa voix pour développer des mots d’une tendresse délicate…
[Sho] : « Voici le premier sceau que tu auras appris ici. »
Appuyant davantage son corps sur le sien et laissa ses joues rougir sous ses mots, leur répondant d’un tendre sourire. Elle regarda Sho avec douceur, et souffla à son tour.
[Aishuu] : « Et moi, me laisserais-tu graver mon nom sur ton humanité ? »
Sans le laisser répondre, elle se pencha sur lui pour venir s’emparer de ses lèvres, lui volant un chaleureux baiser qui venait marier leur bouche. Sa main froide de la jeune femme vint se déposer sur la joue du médecin, la caressant, avant que son index entraîne ses autres doigts ailleurs. Glissant le long de sa peau, ils dévalèrent son cou, caressant ses clavicules, pour s’immiscer dans l’ouverture de son kimono, pour venir mourir sur son torse. Aishuu sourit, abandonnant son bien le plus précieux sur l’endroit où son cœur battait, palpitait.
Elle glissa sur lui pour apporter au creux de son oreille sa bouche, et susurra non loin de son lobe…
[Aishuu] : « Laisserais-tu l’arme que tu es perdre en efficacité en échange d’un soupçon de l’âme que tu as oublié ? »
Aishuu se rapprocha encore davantage, de manière à ce que chacune des courbes de son corps s’harmonisent avec les siennes, pour terminer.
[Aishuu] : « Laisserais-tu une autre personne que ton village marquer tes sillons ? »
Ses doigts vinrent danser sur le velouté de sa peau, avant de sceller, en quelques traits, son prénom sur l’essence de son âme. Elle mit un accord décisif à cette cérémonie en venant déposer ses lèvres sur les siennes, pour savourer envieusement leur goût et leur parfum.
Son cœur semblait battre comme si elle avait courut des heures. Il martelait sa poitrine avec une hâte incontrôlable et une ardeur brûlante. Il s’électrisait à chaque pulsation qu’il avait en commun avec lui. Même si elle donnait l’impression de s’imposer, toute entière elle trembler à l’intérieur même de son âme. Un long frisson vint s’emparer de son échine, Sho sembla d’ailleurs le sentir.
[Aishuu] : « Puis-je mon confier à toi en espérant la même fidélité que ton village ? »
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| Sujet: Re: [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot Mar 8 Fév - 17:51 | |
| Sho · Voici le premier sceau que tu auras appris ici.
Aishuu · Et moi, me laisserais-tu graver mon nom sur ton humanité ?
Son humanité… que valait-elle réellement ? Il n’en savait rien et ne chercha même pas à le savoir. Il se contenta d’échanger un long baiser, de faire courir ses lèvres sur celles d’Aishuu, et ses doigts sur son cou. Cet instant, il ne pouvait pas le voler. Il ne pouvait pas le dénaturer, le changer en quelque chose qui n’aurait plus de sens, non. Son cœur lui murmurait qu’il devait le vivre pleinement, s’abandonner tout aussi pleinement, quitte à se perdre. Plus que tout autre chose, il se sentait voyager contre ce corps inconnu, cette chaleur si singulière et pourtant si étrangère. Aishuu était un brin de mystère dans son monde trop obscure en profondeur. Et comme tous mystères qui se découvraient avec le temps, Aishuu l’inondait d’une lumière radieuse et apaisante à la fois. Blottit contre elle, le reste n’avait plus d’importance. Elle seule comptait, elle seule valait quelque chose.
Il se surprit à regretter que ses lèvres ne se décollent des siennes quand le souffle de la saltimbanque se mit à courir vers son oreille. Elle l’interrogea encore comme on pouvait interroger une âme dont on cherchait à percer le secret. Il se dit qu’une arme émoussée ne fait pas un bon samouraï. Perdrait-il en force à se lier de sentiments pour elle ? Deviendrait-il un piètre shinobi parce qu’il vouerait de lourds sentiments à cette femme ? Qui pouvait le dire ? Lui ? Il était pourtant convaincu que l’un n’avait aucun rapport avec l’autre. Un shinobi pouvait se jeter au cœur d’une bataille par haine ou par vengeance et ainsi omettre tous les détails qui l’auraient pourtant retenus en temps normal, mais un shinobi sujet à l’attachement, à l’amour, pouvait-il réellement agir de la même manière ? Il n’en avait pas la moindre idée et quelque part la réponse à cette question l’importait peu. Offrir une partie de ce qu’il était à Aishuu ne signifiait pas perdre la raison à ses yeux. C’était là simplement une manière de redevenir l’homme qu’il aurait du être, un meilleur homme.
Un shinobi se devait d’avoir quelque chose à défendre. Défendre son village et la population qui y résidait n’était qu’une formalité, une promesse qu’on se devait d’honorer en attachant son bandeau chaque matin. Défendre une vie, lui donner plus de valeur que n’en aurait jamais la sienne, c’était là une raison qu’un shinobi digne de ce nom devait se donner. La vie d’un homme comme Sho n’avait que peu de valeur pour lui-même. Aux yeux d’autres, sans doute valait-elle largement plus, seulement lui ne la concevait pas de cette façon. La vie avait plus de valeur pour un eisei-nin que pour n’importe quelle autre personne. Certains détournaient cette valeur à des fins malhonnêtes, d’autres, comme lui, ne lui donnait que plus de poids avec le temps. Blottit comme il l’était contre Aishuu, cette valeur venait de gagner un cran et la vie de la saltimbanque avec.
S’il était une arme, une bonne lame, il se laisserait volontiers élimé pour frapper avec plus de force. Car on frappait forcément avec plus de force quand les sentiments devenaient plus forts.
Ses grands yeux d’ambre scintillant au devant de ceux d’Aishuu, Sho ramena la main sous sa mâchoire pour en dessiner le contour. Il sourit comme si cela suffisait à lui donner une réponse plus claire et concise qu’aucune parole ne pouvait lui délivrer. Puis lentement, très lentement, il s’abandonna à nouveau au toucher de sa chair, au contact si doux de ses lèvres. Le nom d’Aishuu graver sur sa peau, son cœur s’emballa. L’eisei-nin entoura la taille de la jeune femme de son bras libre et lentement la serra contre lui. Cette proximité, cette chaleur qu’il n’avait jamais réussi à apprécier à sa juste valeur depuis toutes ces années, se libérait sans crainte à lui, en cet instant. Aishuu n’était plus l’inconnue d’une équation sans réponse. Elle était la réponse en elle-même. Une réponse que Sho avait longuement cherché, sans doute inconsciemment, et qu’il serrait à présent contre lui comme une révélation qu’il ne voulait plus quitter. Son cœur frappait alors sa poitrine avec une douceur inconsidérée, comme si son rythme se détachait du sentiment qui l’habitait. L’eisei-nin entraîné qu’il était, percevait très clairement les pulsassions qui parcouraient le corps d’Aishuu au même moment. Et c’était une sensation particulièrement étonnante de sentir deux cœurs s’aligner l’un sur le rythme de l’autre. Deux cœurs qui semblaient répondre à un même désir et un même sentiment.
Aishuu · Puis-je me confier à toi en espérant la même fidélité que ton village ?
Elle l’avait déjà acquise, mais sans doute ne s’en était-elle pas encore rendu compte.
Sho servait un monde et un idéal depuis de longues années déjà. La fidélité qu’il éprouvait pour Kumo était celle qu’un fils pouvait attacher à sa mère à moindre échelle. Kumo était la patrie qui l’avait en quelque sorte recueillie. Il aurait très bien pu atterrir à Konoha ou même à Kiri, au fil des années le sentiment aurait été le même dans ces deux villages. Kumo avait juste eu le hasard d’être le village caché le plus proche de la vallée où il avait vu le jour. Aishuu lui demandait cette fidélité là, mais il pensait lui offrir beaucoup plus. Si son dévouement pour Kumo serait sans faille, il le serait tout autant pour Aishuu. Les deux n’étaient pas incompatibles à son sens. Il était seul maître de son âme, après tout.
Sho · Qui que je soi, je te l’offre de bon cœur. La fidélité que j’ai pour Kumo est une chose qu’il m’est difficile de reproduire. Alors accepte que je t’offre un peu plus que ça.
Au détour de ces paroles, l’eisei-nin fit glisser son visage en large du sien, atteignant son oreille pour mieux lui murmurer ce qu’il avait sur le cœur.
Sho · Je ne crains pas d’être faible, si aimer veut dire être faible. Je ne crains pas de me perdre puisque je t’ai trouvé.
L’étreinte qu’il exerçait sur elle se relâcha sensiblement dans un froissement de tissu. Lentement, il ramena son regard droit dans le sien pour observer ce que beaucoup croyait être le reflet de l’âme humaine. Dans les yeux d’Aishuu, Sho voyait un avenir différent, un avenir heureux dans une certaine mesure, car il n’était pas dupe. Lui et elle appartenaient à des mondes différents imbriqués dans un univers plus vaste, mais tout aussi hostile. Vivre ce qu’ils vivraient dans deux sphères éloignées, quoi que proches par moment, aurait des conséquences, forcément. Mais ces conséquences, il les jugeait surmontables. La force qu’il puiserait dans cette relation si singulière vaudrait bien tout le reste. Il avait trouvé une voie qui méritait quelques sacrifices. Au delà de ce que l’Eisei lui avait appris, Aishuu lui offrait une alternative à une vie qu’il croyait sans véritables fondements. Pour cette raison et pour d’autres encore, il lui vouerait des sentiments forts, même loin de tout.
Son visage au demeurant si doux et si neutre se fendit d’un sourire sincère. Une nouvelle fois il se laissa conquérir par ses lèvres en épousant son corps. La sensation de chaleur se répandit à tout son corps, comme s’il était enveloppé d’un manteau de tiédeur. Ses doigts se cramponnèrent légèrement à sa chair puis ses lèvres se reculèrent à nouveau pour que ses yeux puissent contempler son visage.
Sho · Suis-moi.
Il roula sur le côté et lui offrit sa main en se levant. Il voulait lui montrer, lui révéler une partie de ses secrets. Des secrets qu’il terrait volontairement au fond de lui pour que personne ne puisse les atteindre. Aishuu était l’exception à la règle, et si cela devait le conduire à sa perte, il en acceptait volontiers le terrible coup du sort. Confier une partie de son histoire, une partie de soi à quelqu’un c’était la seule liberté qu’un homme pouvait se permettre.
Sa main resserrée sur celle d’Aishuu, l’eisei-nin prit la direction de la sortie. Avant d’en ouvrir la porte, il adressa un sourire à la saltimbanque, comme pour la rassurée sur ses intentions. Jetant un coup d’œil dans le couloir et remarquant que personne n’y circulait à cette heure tardive, Sho sortit de la chambre d’Aishuu et se dirigea discrètement vers l’extrémité du couloir par laquelle on pouvait descendre dans la petite cour intérieure jouxtant les bains. Une fois la dernière marche de l’escalier foulée, Sho fit volte-face et plongea son regard dans celui de la jeune femme. Du bout des doigts, il l’attira un peu plus à lui avant d’abaisser les yeux sur ses mains.
Sho · Je t’ai montré l’écriture scellée dans mon dos, mais je veux que tu en saches plus que quiconque à ce sujet. Prend ça comme le témoin de ma confiance.
Délicatement, l’eisei-nin remonta les mains sur son kimono et en écarta les deux pans pour se retrouver torse nu. Conservant le tissu pendu à sa main droite, il pivota sur ses talons et révéla à la lumière des étoiles et aux yeux d’Aishuu l’étendu de son dos. Les losanges rouges le long de sa colonne vertébrale, les trois kanji placés stratégiquement pour un œil entraîné, tout était là, figé sur sa peau de velours. L’eisei-nin abaissa sensiblement sa nuque et prit une profonde inspiration. Le secret gravé dans sa peau valait de l’or pour qui voudrait l’abattre, si tant est que la puissance nécessaire à cet exploit soit réunie. Sho ne s’était pas réveillé un beau jour avec cette inscription dans la peau. Il avait grandi avec sans en connaître tous les tenants et aboutissants, c’est vrai, mais aussi loin que sa mémoire remontait, cette inscription habitait son dos et son cou partiellement. Les rares personnes qui avaient eu le hasard de voir cette inscription avait détournée le regard en se demandant quel genre de secret elle pouvait renfermée. Sho en avait eu un semblant de réponse quelques années plus tôt. C’est ce semblant de réponse qu’il voulait donner à Aishuu. Pour que rien ne soit hasard ; qu’en sa présence cela soit une chance.
Sho pouvait encore sentir la brise qui parcourait son corps le jour où pour la première fois le sceau gravé dans sa peau s’était révélé aux yeux du vieux Hondô. Il lui semblait encore voir la lueur qui avait traversé le regard du vieil homme, un mélange d’étonnement et de peur, d’appréhension et de tristesse. Comme beaucoup d’autres choses en ce monde, le vieux Hondô lui avait appris que l’inscription dans son dos rassemblait toutes les caractéristiques des sceaux perdus. Ceux que des hommes illustres en leur temps avaient jugés trop dangereux, trop inhumains, ou tout simplement contre principe. Des sceaux que l’Histoire avait volontairement effacé, que des hommes de bon sens avaient détruits ou enterrés dans quelques lieux perdus de ce monde. Pour la postérité sans doute.
Un sceau… de blocage, pensa Sho. Il ne lui était jamais venu à l’idée avant ce jour qu’on puisse bloquer une vie. Sa vie. Il ne savait pas vraiment comment ni pourquoi ce sceau avait atterri sur son dos, mais le vieux Hondô avait laissé entendre que la position des trois kanji n’avait pas pu être choisie au hasard. Chaque kanji marquait un point faible de son anatomie, comme autant de cibles tout désignées pour un poignard affûté. Chaque losange contenait un peu de chakra, son chakra. Et là encore ce n’était pas un hasard si la chaîne de losanges ceinturait son cou. C’était pour mieux l’étrangler. Mais Sho n’avait aucune idée, tout comme le vieux Hondô, de la manière dont il fallait s’y prendre pour activer les effets du sceaux, quand bien même tous les effets ne leur étaient pas connus. Ce sceau était un sceau qui flirtait avec les règles de la mort. Sho imaginait sans trop de mal depuis ces révélations que la contrepartie devait surpasser le prix d’une vie humaine. Même si c’était la sienne qui entrait en jeu.
Sho · Il y a maintenant de ça six ans, un homme d’une rare sagesse m’a dit que ce sceau attenterait un jour à ma vie si je n’en perçais pas le secret avant de l’activer par mégarde. Aujourd’hui encore, je ne sais pas comment il s’active et pourquoi j’en suis le porteur. Je sais simplement qu’il est là et qu’il pourrait bien servir à ma mort si je n’apprends pas à le connaître et à le contrôler. Les losanges sont autant de petites réserves de chakra placées le long de ma colonne vertébrale, et je suppose capables de la paralyser en cas de besoin. Ils encerclent également mon cou, peut-être pour mieux l’étrangler. Les trois kanji que tu as sous les yeux, sont autant de points faibles qu’il suffit de percer pour me clouer à terre. Tout ceci me laisse penser que ma vie ne représente pas grand chose au regard de ou des individus qui ont scellé ce sceau sur ma peau. Offrir trois points faibles, menacer ce qui me tient debout, et ce qui permet à l’air d’entrer dans mon corps, voilà bien des conditions douteuses pour un sceau de blocage. Je me dis que le gain doit en valoir la chandelle, même si je n’ai pas la moindre idée de sa nature.
Sur ces mots, il se retourna en renfilant son kimono, les yeux baissés vers le sol. Que dirait Aishuu de tout ça ? Elle qui avait dit vouloir l’accompagner pour percer le secret de la nuit noire, le premier kanji qui obstruait son dos. Finalement, ce n’était qu’une question de confiance et il avait bien assez confiance en elle, sans vraiment se l’expliquer, pour croire qu’elle comprendrait l’importance des mots qu’il venait de prononcer. Il n’était pas à sa merci parce qu’il lui avait révélé ses points faibles, non, Sho pensait à raison qu’il faudrait encore atteindre ses points pour lui faire du mal ( si tant est que le sceau ne les protège pas d’une manière ou d’une autre ). Mais d’une certaine manière, il voulait lui montrer qu’il ne craignait pas de remettre sa vie entre ses mains. Même si ses mains lui étaient encore méconnues.
Sho · Ces informations se revendraient un très bon prix à Suigara…
Il releva la tête et noya ses yeux dans les siens.
Sho · … mais je crois en toi. |
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| Sujet: Re: [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot Mar 15 Fév - 15:43 | |
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Il existait des chaleurs et des douceurs plus tendres qu’une flamme, et des délices plus sucrés que le miel, tant il était possible de surpasser l’appât du gain sensoriel. Il naissant une communion d’une rare puissance, une attraction d’une rare capacité entre les deux personnes. Au départ timide, elle n’osait prendre ses marques et s’imposer d’elle-même, or, il n’en fallut que peu pour déclencher l'ouverture la porte de l’inhibition. A présent, jamais elle ne séparerait les corps, comme s’ils venaient d’acquérir un statut vital l’un pour l’autre, comme si quelque chose s’était mise à s’éprendre de l’un à l’autre, pour ne nécessité que lui seul. Elle était là, cette force douce, glissant d’un cœur vers l’autre, le faisant battre délicatement.
Il existait des caresses plus langoureuses que des baisers. Les doigts glissant avec une lenteur sensuelle sur l’épiderme claire, engendrant de discrets picots sur la peau, témoin d’un frisson. La sensation que produisait ce contact étirait les zygomatiques, quelque peu titiller par la douceur des doigts chatouillant le grain de la peau. Les mains glissaient, délicates, sur les galbes du corps pour s’imprégner de ses courbes, pour les mémoriser dans les moindres galbes, et les reconnaître parmi des millions. La peau se heurtait à l’autre, l’épousant chaudement pour ne chercher que l’unité entre les deux entités.
Il existait des parfums plus possédant plus de goût qu’un délice sacré. La tiédeur se mêlait, s’emmêlait, pour s’entretenir en privé avec l’onctuosité sucrée de leur langue. Entre les bras l’un de l’autre se nourrissait le plus précieux des mets, celui dont la saveur se partage uniquement dans le soupirail de l’intimité. L’échange était muet, les mots retenaient leur souffle, laissant les lèvres s’enlacer comme si le lendemain était le dernier. La pulpe de leur lèvre soupirait d’une tendre envie de proximité et de complicité, une confiance sans mot, se contentant d’acte et de gestes.
Le bout de ses doigts de neige vint glisser le long du rosée de sa peau, caressant le velours si doux qui en constituait les textures. Lorsque leurs lèvres parvenaient un moment à se séparer, c’était pour se ravir d’un sourire qui reflétait un état second, une sorte d’hypnose interne provoquée par l’onctuosité de ses baisers. Sa main caressait son avant bras, filant lentement vers son torse en remontant la vallée de ses bras. Aishuu était bien, naturellement, au creux de ses bras, tendrement enveloppée d’une chaleur protectrice aussi douce qu’intime. Cet instant était le leur, et elle n’aurait, pour rien au monde, cherché à troquer cette préciosité. Ses mots qui avaient coulé dans son oreille comme du miel glissait de la courbe d’une cuillère. Ses joues rougirent peu à peu, offrant une teinte unique sur sa peau monochrome. La saltimbanque se sentait bien, la vie abreuvait ses sillons d’une douce euphorie. C’était un réel bien être que d’entendre un cœur battre au même rythme que le sien.
[Sho] : « Suis-moi. »
L’homme la quitta, et elle fut surprise de l’instantané vide qui s’était emparé d’elle à ce même instant. Son sourire commença à s’estomper, tandis que Sho venait lui tendre la main afin de l’aider à se relever. Aishuu attrapa sa main, caressant sa paume, et suivit l’attraction de ses bras pour se relever contre lui, suffisamment près pour pouvoir lui voler une fraction de seconde ses lèvres.
Leurs pas s’élançaient dans un même rythme, un même temps, comme s’il ne s’agissait que d’une seule personne. Ils n’étaient qu’un, ne formant qu’une seule entité si unie qu’il était difficile de créer une distance entre elles. Sa main resserra son étreinte sur ses doigts…
[Sho] : « Je t’ai montré l’écriture scellée dans mon dos, mais je veux que tu en saches plus que quiconque à ce sujet. Prend ça comme le témoin de ma confiance. »
La fine vapeur des bains vint s’échapper pour envelopper l’imaginaire des deux personnes, créant un flou agréable autour de leur corps. L’homme venait de lui tourner le dos, le tissu s’écartant lentement de chaque côté de ses épaules pour ouvrir son torse à la vue de la demoiselle. Alors que son kimono venait s’endormir à sa taille, Aishuu regarda avec une vision plus nette, le sceau qu’elle avait vu en catimini dans la densité des buées chaudes. Les trois kanji qui ornaient ses omoplates avaient des significations qui semblaient énigmatiques quant à leur interprétation possible en terme de technique de fuuinjutsu.
[Sho] : « Il y a maintenant de ça six ans, un homme d’une rare sagesse m’a dit que ce sceau attenterait un jour à ma vie si je n’en perçais pas le secret avant de l’activer par mégarde. Aujourd’hui encore, je ne sais pas comment il s’active et pourquoi j’en suis le porteur. Je sais simplement qu’il est là et qu’il pourrait bien servir à ma mort si je n’apprends pas à le connaître et à le contrôler. Les losanges sont autant de petites réserves de chakra placées le long de ma colonne vertébrale, et je suppose capables de la paralyser en cas de besoin. Ils encerclent également mon cou, peut-être pour mieux l’étrangler. Les trois kanji que tu as sous les yeux, sont autant de points faibles qu’il suffit de percer pour me clouer à terre. Tout ceci me laisse penser que ma vie ne représente pas grand chose au regard de ou des individus qui ont scellé ce sceau sur ma peau. Offrir trois points faibles, menacer ce qui me tient debout, et ce qui permet à l’air d’entrer dans mon corps, voilà bien des conditions douteuses pour un sceau de blocage. Je me dis que le gain doit en valoir la chandelle, même si je n’ai pas la moindre idée de sa nature. »
Aishuu buvait chacune de ses paroles comme si sa propre vie en dépendait. L’ivoire de ses dents vint mordiller sa lèvre, l’anxiété envahissant lentement son être dans une confusion trouble. Sho se tournait vers elle, se rhabillant en fuyant son regard. De son côté, elle ne le quittait plus. Alors qu’elle voulut s’approcher, la voix de l’eisei résonna à nouveau.
[Sho] : « Ces informations se revendraient à un très bon prix à Suigara… mais je crois en toi. »
Il avait relevé la tête, leur regard s’était à nouveau retrouver, pour ne plus se quitter. La musicienne fit un pas en sa direction, puis un second, jusqu’à se trouver dans une proximité suffisante pour déposer la paume de sa main sur sa joue et déposer ses lèvres sur sa bouche. Un long silence prit place à ce discours infernal, le temps d’un baiser. Délicatement, leurs lèvres se quittèrent…
[Aishuu] : « Nous sommes deux condamnés, prêts à défier la mort et à la faire défaillir. »
Sa voix résonnait calmement dans la naissance des bains chauds, un timbre clair vibrant sur la surface fine du liquide. Elle releva ensuite la tête pour placer ses lèvres à l’orée de son oreille, sa main caressant sa joue.
[Aishuu] : « Je réitère… Je t’aiderai à en découvrir le secret… Jusqu’à temps que mon souffle foulera ta peau, que mon cœur répondra au tien, je ne laisserai rien de tout cela se produire… »
Ses lèvres vinrent à nouveau épouser les siennes, caressant la pulpe de leur chaire, et s’enivrant pour ses délices sucrés autrefois interdits. Rien de tout ça ne trahirait l’harmonie de leur corps, rien ne saurait en mesure de le faire dès lors qu’ils seraient ensemble.
Un craquement de plancher se fit entendre juste au dessus de la tête des deux amoureux, laissant imaginer un déplacement furtif le long du couloir. Serait-ce Ankisuru qui vérifiait que tout se passe comme il le voulait ? Nul ne saurait le dire, et jamais il ne répondrait à cette accusation. Aishuu sourit, amusé de voir jusqu’où se piquait la curiosité de ce sage unique en son genre, tandis que ses doigts s’entremêlaient avec ceux du shinobi.
Elle se pencha sur lui, soufflant au creux de son cou après avoir senti un courant d’air marque sa peau d’un frisson langoureux.
[Aishuu] : « Accepterais-tu de remonter avec moi ? »
Sho hocha la tête, serrant sa main dans la sienne, tandis qu’elle l’attirait lentement au travers des escaliers. Leurs pas perçaient l’obscurité pour s’entretenir avec une lumière plus spirituelle. L’attraction du corps de la saltimbanque était telle qu’elle ne voulait plus le quitter. Le couloir était vide, ce qui fit davantage sourire la jeune femme, persuadée encore qu’un peu plus tôt, Ankisuru guettait. Ainsi, ils s’arrêtèrent, seuls, au bout du couloir, perdus entre leurs deux domaines. Mais la jeune femme ne voulait pas se séparer de lui, ne serait-ce même que le temps d’une nuit. Elle se retourna alors vers lui, venait se blottir au creux de ses bras, son regard glissant sur la naissance de ses clavicules, et son sourire s’estompa timidement.
[Aishuu] : « Je sais que tu n'as pas dormi hier. Je t’entendais derrière la cloison de papier, en espérant tout le long de la nuit que tu trouverais le repos. Accepterais-tu de passer la nuit avec moi ? Je ne m’en sentirais que mieux, et je serais plus calme de savoir que tu seras tout près… »
Le regard gêné, elle releva la tête vers lui pour croiser ses regards. Partageant tous deux un sourire, Aishuu comprit sa réponse et se tourna vers la porte de sa chambre. Déposant ses doigts blancs sur le papier japonais, elle fit lentement coulisser la porte pour les laisser s’engouffrer dans l’obscurité.
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| Sujet: Re: [Yuki] Deux Sceaux ne font pas un Sot | |
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