Rayons de soleil à travers le store mi-clos de la petite chambre. Depuis quelques temps déjà le jeune Gennin pouvait profiter de sa nouvelle indépendance dans son propre appartement, situé non loin de celui où il avait passé son enfance, en plein cœur du village. Il se força tant bien que mal à ouvrir les yeux, alors qu’il serait bien resté deux heures de plus au fond de son lit douillet, emmitouflé dans cette couette épaisse qu’il affectionnait particulièrement.
* Bon, suffisamment dormi. Si je dois partir à la guerre un jour, il serait bon que j’apprenne à vivre à la dure*, ricana t’il intérieurement.
Kimaru avait apporté avec lui les quelques éléments de décoration qui composaient son ancienne chambre, de manière à ne perdre aucun repère essentiel. Il observa son ours en peluche, abandonné sur une étagère immédiatement en face du lit, à côté de la porte fermée de sa chambre. Son kimono confortable était accroché à celle-ci, de façon à ne pas prendre la poussière ni côtoyer la saleté du sol, que le genin peinait à nettoyer, étant donné sa motivation inexistante pour n’importe quelle sorte de ménage. Néanmoins, il se faisait un point d’honneur à conserver un cadre de vie un minimum salubre, de manière à ne pas marcher sur ses sous-vêtements qui finiraient bien un jour à former une montagne.
Kimaru entreprit de se lever, relativement frais et dispos malgré l’envie perpétuelle de rester dans son lit. Une fois complètement debout et habillé de son kimono, il balaya sa chambre d’un regard circulaire pour vérifier que tout était en ordre, et que l’heure du ménage n’était pas encore arrivée.
Il jeta un œil distrait à la peinture qui ornait le mur près de la fenêtre. Une peinture de Mizuki, sa mère, qui représentait une imposante chute d’eau. Selon son oncle, elle avait passé des jours et des nuits sur les lieux, à danser et à peindre de grandes toiles, lorsque son mari s’en était allé rejoindre les limbes. De nombreuses fois il s’était imaginé dans son esprit le combat qui opposa Hayate au mystérieux shinobi qu’il traquait naguère. Kyo voyait Hayate vainqueur, tout comme Kimaru, ce qui les laissait perplexe quant aux talents de son adversaire.
Le jeune genin repensa également à sa soirée de la veille sur sa terrasse favorite, en compagnie de Miya. Le souvenir qu’il en avait ne correspondait pas exactement à ce qui se passait d’ordinaire, mais peut être était-ce lié au lieu et au moment :
*Un magnifique coucher de soleil amplifie toujours les sentiments. Ou bien un bon sort de Genjutsu peut être…*, pensa Kimaru.
Miya excellait dans l’art de l’illusion, et il n’aurait pas aimé être à la place du frère de son ami, quand quelques mois auparavant une violente dispute avait eu lieu sous ses yeux.
A vrai dire il n’avait jamais vu Miya dans un état pareil, elle qui d’ordinaire se comportait en véritable kunoichi, sûre d’elle et bienveillante auprès de tous ses camarades. Sauf son grand frère. Cela se comprenait puisque celui-ci s’était toujours comporté comme une ordure avec sa sœur, et un beau jour, tous les mauvais souvenirs de Miya s’étaient mêlés entre eux, avant que la dispute ne dégénère soudainement en un violent affrontement.
Kimaru n’avait pas pu intervenir avant qu’Akame ne se retrouve au sol, en proie, semblait il, à de noires illusions qui le faisaient souffrir atrocement.
Lorsque Miya finit par rompre l’illusion, le pauvre bonhomme gisait au sol, dégoulinant de sueur, sa fierté brisée, et sa colère disparue pour laisser place à la crainte. Il s’enfuit bien vite, quelques minutes après, lorsque ses jambes décidèrent à nouveau de le porter vers un autre lieu moins dangereux pour lui.
* J’ai vraiment besoin d’apprendre tout cela.*
Réflexion typique d’un Kimaru décidément adepte du combat à distance, détestant le corps à corps avec son adversaire. Il se surprit à espérer que son père ou sa mère lui avaient légué quelque talent en matière de Genjutsu. Un art complexe et envoûtant, comme il aimait que sa musique fusse.
*Il faudrait que j’aille voir Miya. Ou alors être plus assidu à l’Académie.*
Pour le moment, il entreprit de terminer les restes de son dîner d’hier soir, avant d’effectuer quelques exercices d’assouplissement, puis respiratoires.
A la suite de ça, il se sentait prêt à entamer une nouvelle journée, et l’envie de reprendre l’entraînement se fit de plus en plus prononcée. Mais d’abord il n’avait pas oublié le conseil de Miya rejoignant sa promesse qu’il s’était faite la veille au soir. Il décida donc qu’il était grand tant de se plonger dans la lecture du journal que son père lui avait légué, contenant sans doute de précieuses informations sur les états d’âmes de son père à l’époque, sans retenue, espérait Kimaru.
*J’espère que je n’aurais pas droit aux mêmes explications que maman ou Kyo. C'est-à-dire rien du tout, en définitive. Bon, direction la terrasse pour…*
Un bruit à l’extérieur interrompit soudainement sa réflexion. Après quelques secondes, on frappa à la porte de l’appartement.
Kimaru se dirigea vers l’ouverture et s’interrompit brusquement juste avant de tourner la poignée. Il parvenait à sentir un chakra littéralement en ébullition juste derrière la porte de bois. Mais selon ses estimations ce n’était pas dû à de l’excitation, ou un excès de bonheur, bien au contraire. Les trois coups suivants qui retentirent manquèrent presque de passer au travers du bois, et une voix d’homme tonna de l’autre côté :
- Ouvre immédiatement, Honi ! Je te laisse dix secondes pour ouvrir sinon je te promets que je saccage ton appart ‘ !
Kimaru tourna la poignée, ouvrit rapidement la porte et fit un rapide pas en arrière.
*Humpf. Akame, comme par hasard au moment où je me rappelle la raclée qu’il a pris*
Rouge de colère, le frère de Miya bondit sur le genin et tenta de l’attraper par le col.
La tentative manquait de concentration, ainsi Kimaru parvint à s’extirper avant d’envoyer une claque dans le visage de l’homme qu’il n’aimait guère. Cette de perte de contrôle faisait suite à toutes les fois où les deux hommes en étaient restés aux mots, souvent opposés par rapport à Miya, qui avait passé ses jeunes années à se faire insulter par son frère.
Au lieu de répliquer, Akame porta son regard empli de haine sur le jeune homme en face de lui, qui semblait déjà adopter une toute autre attitude que d’habitude.
- Qu’est ce que tu as fait à ma sœur ? Où est elle ? Dans ton lit, saloperie ?! Elle n’est même pas rentrée hier soir, alors qu’elle a dit à père qu’elle te rejoignait !
Tout en pointant un doigt accusateur sur Kimaru, il fonça jusqu’à la chambre, dont la porte était restée ouverte. N’y trouvant personne, il s’attrapa la tête entre les mains et décida de se calmer un minimum.
- Tu ne te contentes plus de tes regards menaçants, tu viens maintenant m’agresser chez moi. Je ne sais pas où est Miya, imbécile. Elle est rentrée après une heure environ passée avec moi sur la terrasse, je ne sais pas du tout où elle a pu aller ensuite. Il va falloir que tu changes si tu veux un jour devenir Juunin, meilleur que moi comme tu le répètes sans arrêt. Tu as vu ce que tu fais ? Dans quel état tu finis ? Pourquoi tout ça , à chaque fois qu’il est question de Miya ?
- Ferme la ! Je sais que tu es mauvais pour elle, toi l’orphelin qui n’a rien à perdre, ne l’approche plus !
Kimaru durcit encore son regard.
*Orphelin.*
- Miya est mon amie. Si tu as quelque chose à redire, soit, mais pas ici. Tu vas partir. Et nous allons nous battre, si tu le désires tant. Mais pas ici.
Akame lança un regard encore plus mauvais au jeune homme. Un sourire malveillant apparut sur ses lèvres.
- Depuis le temps que j’attends ça. Ne t’approche plus de Miya.
Il bouscula Kimaru en sortant, et claqua la porte sans rien ajouter.
Le Genin resta pensif quelques instants, secoua la tête et tenta de passer à autre chose. Déjà motivé par l’entraînement, Akame l’avait suffisamment chamboulé pour réveiller en lui ce sentiment de ténacité disparu depuis longtemps.
*Ca ne t’a pas suffit, et bien soit. Mais j’ai autre chose à faire.*
Kimaru inspira profondément en sachant l’odieux visage de son esprit, et entreprit de récupérer le précieux journal de son père dans le tiroir de son bureau.
*Direction la terrasse…*