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| | Sujet: AK002 - Loin des Yeux... Jeu 19 Mar - 18:54 | |
| [Akogare] – Non. Je veux Ten.Cela faisait vingt minutes maintenant qu’Akogare était entré. Keira se massait doucement la tempe, sa mine sévère du début à présent traversée par une authentique fatigue. Elle avait tout essayé ; la raison, la courtoisie, la menace, les gardes. Il ne restait plus qu’à lui lancer des projectiles jusqu’à ce qu’il sorte, mais quelque chose lui disait que ce serait stérile. Akogare se tenait bien droit face à elle, les bras tour à tour croisés sur la poitrine ou posés sur le bureau. Elle avait beau le connaître, il était impressionnant. Surtout quand il était en colère. [Keira] – Pour la énième fois, Ten est en mission. Sans toi. Ce sont des choses qui arrivent.[Akogare] – Ouais, ben moi qui reste à Konoha c’est aussi quelque chose qui arrive. Je veux Ten. C’est tout. Personne d’autre.[Keira] – Il s’appelle...[Akogare] – Iki, oui, je sais. Moi elle s’appelle Ten, ils se connaissent ?Elle perdait patience, il le sentait. Il aimait taquiner ses limites. Elle taquinait bien les siennes… Il ne savait pour quelle mystérieuse raison Keira acceptait ces petites joutes incessantes. Ce devait être sa façon à elle de se relaxer. Il lui suffirait de dire : vous êtes shinobi, fermez donc votre grande gueule et faites ce que je dis. Et alors Akogare devrait obéir. On ne démissionne pas facilement de ce poste, ou alors les pieds devant. [Keira] – Je pense que tu pourras lui être bénéfique. Et je pense qu’il pourra t’aider.*** Et il était là à présent. A attendre Iki. Keira lui avait donné son dossier, qu’il avait parcouru davantage par ennui que par réelle volonté de s’informer sur son coéquipier. Toutefois, ce qu’il lut l’intrigua suffisamment pour dissiper ses soupçons. Peut-être que cela s’avérerait moins rébarbatif que prévu. N’empêche, Ten n’était pas là. Qu’est-ce qu’elle était allée faire, seule, au loin ? Il y avait des choses que Keira lui taisait – et ce que Keira taisait était généralement plus intéressant que ce qu’elle martelait. Depuis le combat contre Asahi, Ten avait repris quelques couleurs, mais elle était vaguement distante. Comme si elle était en souffrance. Ah… Le visage d’Akogare portait encore légèrement les cicatrices du barbare d’Asahi, Toguro, mais cela s’était arrangé. Il repartait finalement en mission. Après deux semaines de… repos. Keira savait qu’il préparait quelque chose, elle voulait l’en empêcher. Elle était fourbe, et maligne. Mais elle n’arriverait pas à le détourner de la date fatidique, qui s’approchait lentement, sans se presser, comme une femme timide mais désireuse. Akogare était assis aux portes du village. Le soleil se reflétait au sol à travers les feuilles de la forêt, les gardes discutaient à voix basse. Il faisait vraiment beau. Et il attendait toujours Iki. Sans bien savoir pourquoi, il était venu plus tôt aux portes. Ou plutôt, si, il savait pourquoi. Cela faisait trois fois désormais que Sayuri essayait de lui parler. Elle s’y était prise à deux reprises de manière détournée, et Akogare pouvait bien voir qu’elle avait besoin de savoir et qu’elle avait mal. Et que parlait à Akogare était gênant à présent pour elle, tant qu’ils n’auront pas discuté au sujet de Sabi. Mais le Hyuuga avait beau faire, il n’en avait pas envie. Il n’y avait rien à dire. Il ne s’était même pas présenté à son enterrement. Pas réellement. Il était resté à l’écart, avec son nouveau masque de loup sur les yeux. Sans doute que Sayuri lui en voulait sans s’y autoriser. Sans doute aurait-elle voulu l’insulter, lui dire qu’il avait tenu la vie de Sabi entre ses mains et qu’il l’avait laissé tomber. C’était la vérité, en fait. Il avait tout bonnement réagi trop tard. C’était impardonnable, pour un shinobi de sa classe. Et impardonnable, de la part d’un ami. Akogare se leva, s’étira, et se dégourdit les jambes au seuil de l’imposante porte de Konoha. Ce n’était pas par là qu’Asahi était entré, se dit-il. Pour cette mission, pas de masque. Il opérerait en tant qu’Akogare Hyuuga, Jounin de Konoha. C’était plus étrange que perturbant. Il s’était habitué à son masque, l’ancien ou le nouveau qui étaient parfaitement semblables. [Sayuri] – Akogare…Ah… Il avait senti sa présence et, un instant, l’idée de fuir encore lui était venue. Ce ne serait pas très discret, vraiment insultant, mais c’était la chose qu’il avait envie de faire. Au lieu de ça, il se retourna et fixa la belle jeune femme. Celle-ci se tenait à quelques mètres de là, droite au beau milieu de la route. Elle n’avait pas essayé de dissimuler son arrivée. Non, c’était vraiment parfait. Venir l’emmerder avant qu’il ne parte en mission. Vraiment parfait. Il ne trouva rien à dire, mais ne détourna pas la tête. [Sayuri] – J’aurais aimé qu’on puisse en parler avant que… que tu partes.Akogare essaya de trouver quelque chose à dire, vraiment. Mais les phrases qui défilaient dans sa tête lui paraissaient lourdes et maladroites, comme des jouets d’enfants. Sayuri était gênée. C’était un spectacle assez fascinant s’il n’était pas si douloureux. Elle s’approcha de quelques pas, mais il lui était impossible de ne pas sentir la rudesse des traits et de l’attitude d’Akogare. Elle s’arrêta. [Sayuri] – Je voulais juste te dire que je ne t’en veux pas.[Akogare] – Tu mens.[Sayuri] – C’est… vrai... Je voudrais ne pas t’en vouloir.Akogare eut un sourire sans joie. [Akogare] – Tu n’as pas à essayer.[Sayuri] – Tu ne comprends pas. Cela me fait mal de t’en vouloir. Je voudrais vraiment être capable de surpasser ça.[Akogare] – Mais je n’y mets pas assez du mien, c’est ça ?L’étincelle, dans les yeux de Sayuri, le rassura. Elle hocha sèchement la tête. Certaines situations pouvaient être désamorcées rien qu’en prenant le temps d’en discuter. Pour d’autres, eh bien, il fallait s’armer de patience… [Akogare] – Qu’est-ce que tu veux que je dise… C’était un imbécile, d’avoir fait ce qu’il a fait. Il m’emmerdait pendant que je faisais mon travail. Je lui ai demandé de se casser, putain, plus d’une fois. Il a mal interprété ma demande, j’en sais rien, je sais pas ce qui lui est passé par la tête. Il a dû se dire, tiens, si je démontais tout le quartier, pour voir.A cet instant, Sayuri détourna les yeux, et il vit son poing se crisper. [Akogare] – Tu m’en veux pour quoi ? Ne pas avoir été dans sa tête ? Ne pas avoir détecté l’afflux de son chakra ? Oh je l’ai détecté. Mais je ne savais pas quoi faire, figure-toi. J’avais un peu deux adversaires sur le dos, et ton cousin qui s’ajoutait là-dessus. Je me suis fais démonté par sa faute, et j’ai dû protéger mes ennemis pour essayer de sauver sa putain de vie. Désolé pour ça, ouais.Il saisit le poignet de Sayuri avant qu’elle ne rencontre son visage, et la plaqua violemment contre le mur. Encore à présent, il ignorait si elle avait voulu se jeter dans ses bras ou juste le frapper. Il serra le poing. Sayuri avait la respiration haletante, et la frustration ne pas avoir pu lui faire mal, qui sait, lui dévorait le ventre. Akogare n’aurait pas pensé qu’un jour, il la verrait réagir ainsi, sur lui ou sur un autre. Elle était impulsive, parfois, violente aussi et de temps à autre déséquilibrée. Mais ce qu’il voyait chez elle, à cet instant, alors qu’il percevait chacun des mouvements incontrôlés de son corps, c’était une grande tristesse, double, et un grand désespoir, unique. En plus, Iki était arrivé depuis un petit moment maintenant, mais cela était sans grande importance. Sayuri allait finir par fondre en larmes et c’était une situation, Akogare le savait, qu’il ne saurait pas gérer. Parce que pour lui, Sayuri ne pleurait pas, Sayuri n’était pas triste, Sayuri n’avait pas besoin de lui. Il desserra sa prise et pris le risque, sans savoir exactement pourquoi, de la serrer dans ses bras. La jeune femme ne se débattit pas, elle posa son front au creux de son épaule, les yeux ouverts sur la rue vide. Elle tremblait légèrement, de vagues frissons erratiques. [Sayuri] – Je voulais juste que tu me dises comment il était mort. Juste ça. L’entendre de ta bouche, parce que tu y as assisté, et pas le lire sur un rapport. J’avais juste besoin de ça.[Akogare] – Tu ne te sens pas mieux de toute façon.Sayuri eut un petit sourire. [Sayuri] – Ça, c’est parce que tu es un con.Akogare ressentit le besoin de la serrer plus fort contre lui mais, égoïstement, c’était pour lui plus que pour elle. Chacun y trouverait ce dont il avait besoin, probablement. Quelque part, Akogare restait étonné de se dire que toutes les situations n’étaient pas forcément des conflits ni des crises. Qu’on pouvait aussi n’avoir besoin que de parler, de se dire que la personne qui a assisté à telle ou telle chose est toujours bien là, qu’on peut la toucher, lui parler, se rassurer. Le Hyuuga se recula d’un pas, et Sayuri lui adressa un léger signe de tête. [Sayuri] – J’espère que tu reviendras vite. Il paraît que c’est une mission importante.Elle jeta un rapide coup d’œil à Iki, puis s’en retourna par là où elle était arrivée. Akogare la regarda s’éloigner, s’en retourner auprès de son équipe ou bien de ses cours, et il se dit que cela devait faire un moment maintenant que Sayuri n’était plus aussi heureuse qu’avant. Il s’occuperait d’elle en rentrant, comme on peut s’occuper d’une femme qui estime ne pas en avoir besoin. Akogare poussa un mince soupir, et fit face à Iki. [Akogare] – Bonjour. |
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| Sujet: Re: AK002 - Loin des Yeux... Lun 23 Mar - 12:41 | |
| Iki sembla satisfait. Okugane ne savait pas vraiment s’il s’agissait ici et maintenant d’un sentiment de bonheur intense, d’une joie sans nom, que même lui ne pourrait omettre d’exalter, ou si cela venait simplement de ce plaisir malsain à lui faire comprendre, à lui, Okugane, Jounin de Konoha et pion des administrations, qu’une nouvelle fois, ce n’était qu’une merde. Dans son regard sombre où brillait une petite voix lui cirant les oreilles avec des sarcasmes vantant la joie folle qui animait Iki, il en lisait un peu des deux. Si Okugane avait finalement été, un homme, au lieu de n’être qu’un balai avec lequel on entasse les mauvaises choses, on les rassemble, puis on les jette dans un coin de l’oubli, afin que jamais Konoha ne remette sur pied les mêmes erreurs, s’il avait été humain avant d’être ninja, il aurait compris que dans le visage d’Iki, il n’y avait qu’une seule lueur. Celle de l’espoir. [Okugane] - Vous êtes affecté à une nouvelle mission.[Iki] - La précédente prend-elle fin ? Un éclair ravissant. Faire d’une pierre deux coups, rafler la mise, et empocher celle perdue lors de sa dernière partie. Pari risqué, défi osé, conséquences lourdes. [Okugane] - Non. Voila, l’effroi d’une telle réponse qui se dégageait lentement sur ses deux lèvres du Jounin, dessinant un sourire placide, c’était une queue en érection devant un cul magnifique, mais qui venait de se rendre compte à quel point le reste n’était qu’une intolérance pour les yeux. Oui, c’est inadmissible, ce n’est même pas humain. Mais Okugane serait capable de se déguiser en une ravissante et dévergondée jeune femme, simplement pour voir la bosse sur le pantalon du chuunin rapidement se raccourcir en un simple pli, une plaine plate. Oui, rien ne paraissait apparaitre sur son rictus, mais le vil homme cachait au plus profond de lui d’intenses émotions. Des choses perverses qu’Iki découvrait à mesure qu’il le côtoyait. Et qu’il aurait préféré ne jamais même pouvoir imaginer. [Okugane] - Vous partirez demain. J’espère que vous avez saisi l’importance de la chose. Iki fronça un sourcil. Puis un deuxième. Son sourire avait disparu. Normal, on lui avait annoncé que cette petite balade en forêt n’était que de simples vacances et qu’une fois rentré, ses deux larbins l’attendraient toujours. Les pauvres. Il ferait un très mauvais père. A défaut d’être mère. Le visage serré, il bouillonnait. [Iki] - Les affaires de Konoha ne m’intéressent pas. [Okugane] - Alors à vous d’y trouver votre compte. Il feignit un sourire en coin, un sourire sournois. [Iki] - Bien. Plus que tu ne pourras jamais l’imaginer, pensa-t-il si fort qu’il en devint assez rouge pour que son supérieur ne se pose lui-même quelques questions quant à sa décision. Mais il ne broncha pas. [Okugane] - Votre coéquipier vous attendra aux Portes. Voici son dossier, ainsi que les objectifs à remplir. Il avança avec deux de ses doigts une chemise cartonnée qui gisait sur le bureau de bois. Quelques feuilles seulement semblaient gondoler le paquetage, Iki souffla. [Okugane] - Ne rentrez pas les mains vides. Ou vous aurez besoin d’une très bonne excuse.*** Iki passa une main moite dans ses cheveux. Un à un, ses deux yeux s’ouvrirent, puis se refermèrent immédiatement, comme si ses paupières étaient devenues si lourdes que les soulever seraient trop douloureux. Ses doigts vinrent les caresser, et peu à peu, ils se mirent au gout du jour. La faible lumière était déjà trop agressive. Son autre main chercha aveuglement le réveil qui sonnait mielleusement, un rythme bas et lent. La musique n’était pas violente, elle se répétait comme aliénatrice. Ses genoux se décalèrent et ses deux pieds touchèrent enfin le sol, les yeux toujours fermés. Le silence fut, et Iki peina à sourire. Il souffla doucement et enfila un pantalon, celui qu’il avait posé sur le fauteuil la veille. Dans sa poche, il sentit le contact avec la petite boite de plastique qui lui causait depuis une semaine, des maux insupportables. Au début, il avait dormi calmement. Il s’était étalé sur son matelas et avait regardé le plafond blanc avec un étrange plaisir. Rapidement, il sentit la fatigue lui monter aux yeux, deux lourds cernes décrivant le calvaire que son organisme subissait à chaque fois qu’il avalait ces pilules. Ses jambes s’étaient alourdies, ses bras basculaient lentement d’avant en arrière ; à chaque pas, une nouvelle prise sur le monde. Il avait perdu en quelques jours cette hargne excessive qui lui permettait de vivre au jour le jour. Devant son miroir, il ne voyait plus qu’un légume. La café s’entacha d’une bonne odeur de chaude matinée, et glissa de la cafetière dans la petite tasse de terre cuite. Iki passa un doigt dans l’anse, et se s’enfonça dans son canapé. Il alluma une cigarette et laissa sa tête se reposer en arrière, contre le dossier de cuir moelleux. Etrangement, la joie avec laquelle cette journée était annoncée se dissimulait sous sa peau, comme si elle attendait son tour, patiente. Iki n’arrivait pas à comprendre ce qu’il devait faire pour être plus heureux encore, mais non. Un simple sourire serein et plein s’enticha de sa bonne humeur, et le filtre de sa cigarette, qui ce matin, n’était pas martyrisé par une pression matinale. Sans tirer dessus, le foyer ne cessait de consumer le tabac, délaissant une petite fumée qui s’envolait lentement, chatouillée par quelques courants esseulés ; un fantôme qui sévissait, une âme en perdition qui s’échappait. Il crut s’endormir, mais les antidépresseurs qui prenaient déjà sa Morphée bien à lui, l’empêchait de sombrer vraiment. Et puis, il avait pour lui les émanations du café bien chaud dont les vapeurs se mêlaient avec celles de sa cigarette. Etrangement, il attendait l’arrivée d’Hizu. Des minutes. De longues minutes. Peu à peu la jeunne jounin s’était greffé à sa vie comme un véritable parasite. Un parasite bien chou, un parasite dont on ne pouvait se défaire. Et bizarrement, Iki n’en avait pas envie. Jisuga ne l’avait pas convaincu. Pas même persuadé. Il avait juste ouvert un peu plus ses yeux, que les médicaments avaient vite fait de refermer, comme une lourde porte qu’on peine à pousser, et qu’à la moindre seconde de repos, les puissants ressorts de la vie tirent vers lui, inéluctablement. Il était toujours lui-même, pourtant quelque chose s’était éveillé, et le chuunin n’était pas neutre là-dedans. Foutue amitié ; foutue vie qui le prend, qui l’envole, et qui le lâche comme une vulgaire feuille d’arbre poussée par le vent. Une feuille de granite qui s’effondre et creuse le sol à sa chute. Une boule le prix au ventre. Une boule de stress, une boule de peur, une incertitude qui se mêlait à son habituelle assurance. Le mélange pouvait être violent d’efficacité, mais violent tout de même. Aujourd’hui cependant, il ne faisait que rendre son fin sourire un peu plus humain. Il avala rapidement son café et lécha la dernière latte qui restait sur sa clope. La chaude brise qui traversait les rues de Konoha avait une nouvelle fois failli mettre un terme à la seule amitié qui soit pour le Namikaze : son bob. Sa main avait finalement eut raison du zéphyr et le chuunin ne cessa jamais de marcher, droit, sans vérifier les reliefs des ruelles. Quelques fois il manque de tomber, l’état second dont il était cible et victime en était sûrement la cause. Une semaine que le deuil de sa propre personnalité perdurait, une semaine qu’Okugane venait à même de son outil, son élément, son arme favorite, et paradoxalement, Iki n’avait plus la force de s’en offusquer. Il n’était plus vraiment lui-même, mais les pilules avaient l’avantage de ne pas forger un nouveau « soi » à celui qui les digère ; seulement illuminer ce qui était avant caché au plus profond de lui-même. Peut-être alors qu’il s’en voulait, et qu’il aurait été plus aisé de faire valoir ses colères contre un médicament qui changerait un homme selon les fantasmes d’un jounin mal luné, que contre un homme qui ouvre pleinement les yeux d’un autre. Tu vois mon garçon, tu gueuleras toujours, je serais à jamais celui qui te commanderas. Et aujourd’hui, j’ai encore raison. C’était frustrant. Et pourtant, Iki n’avait qu’à mettre le petit tube de plastique dans une poubelle et de ne plus jamais y repenser. Mais il ne l’avait pas fait. Il était toujours dans sa poche, au chaud, couvert. Peut-être que son dossier n’en mentionnait aucunement l’existence. Alors ce que son coéquipier verrait devant lui, un homme dont il ignorait tout, sinon l’histoire, les brèves lignes que l’administration avait pu écrire de sa courte vie. Un mensonge assez gigantesque, une réalité bafouée et déformée. Et finalement, peut-être bien la vérité. Elle était si simple chez Iki, si prévisible qu’il se félicitait d’être maintenant cet homme si aléatoire, si complexe, tout cela dans une gélule. Chaotique manichéen qui recevait la plus grande des offrandes. Les grandes portes s’élevèrent devant lui. Deux immenses obstacles de bois, supportés par des murs de pierre. Véritable fondation des temps. Mais la plus grande des défenses, ce n’était pas cette gigantesque barrière de pierre qui paradoxalement n’avait de gigantesque que la taille, c’était bien le dôme de chakra qui interceptait toute entrée et sortie inconnues, et non souhaitable. Cette même défense qu’Asahi avait traversée sans même que le vent ne s’en rende compte. Bien misérable puissance… Sur la petite place, quelques uns s’agitaient dans les lueurs des rayons du soleil qui perforait les moindres interstices que le toit de verdure voulait bien céder. Jisuga n’était pas encore là, peut-être avait-il d’autres occupations aujourd’hui. Peut-être était-il dans la couche d’Hizu. Non, cela serait trop simple, l’équation serait résolue. En admettait que tout soit équation. Iki souffla, non, malheureusement. Il l’aurait cru, auparavant, aujourd’hui, il se sentait heureux, et il ne savait pas pourquoi. Dérangeant. Alors tout se remettait dans le désordre, et il fallait reconstruire. Avec quoi, avec qui ? Aucune idée. Akogare était déjà là. Il se sentit petit. Minuscule. L’avait-il attendu ? Il ne savait pas bien, il ne l’espérait surtout pas. Il se fichait bien de ce qu’il pouvait penser de lui et parallèlement, le Hyuuga n’avait pas l’air d’en accorder plus. Pourtant il n’était pas en retard. La jeune femme qui était dans ses bras semblait remplie d’une peine dont il ne savait rien. Et oui, il s’en fichait. On le remarqua, il mit un terme à leur discussion. Iki s’installa doucement contre le mur, releva son bob sur son crâne et alluma une cigarette. Bof, il fumait trop souvent pour qu’il ne puisse le cacher. La jeune femme passa devant lui, le dévisageant rapidement. Iki la suivit du regard jusqu’à ce que seule son ombre ne se dessine sur le sol. « Bonjour » surprise. Le Namikaze se retourna et expira toute la fumée qu’il avait emmagasinée dans ses poumons. Bonjour… [Iki] - Salut.Curieusement, il ne sut qu’ajouter à ça. Akogare savait sûrement déjà assez de chose sur le Namikaze, qu’il n’avait pas même eu à se présenter. L’objectif de leur mission était clair dans leur tête - du moins l’espérait-il - et il semblait inutile d’en dire plus. Pourtant Iki n’avait pas vraiment envie de partir dans une discussion cordiale et polie, les généralités n’avaient pas de place dans son langage. Alors il ignora toutes les questions qui lui venaient à l’esprit, et qu’il refoula avec un certain dégout. La possibilité de lui signifier avec quel plaisir il était ici, devint tout à fait inutile, à partir du moment où celui-ci n’était du qu’à l’annonce de cette mission, et non à celle du nom de son coéquipier. Il n’y avait rien d’autre à ajouter. Sinon qu’ils étaient tous deux dans une belle merde. [Iki] - Il y a un problème ?[Akogare] - Non.Et cela ne me concerne pas, ajouta Iki pour lui-même. Le visage fin de la kunoichi lui revint à la mémoire. Un visage défait, un visage triste et profondément creusé voire détruit. Avec des yeux battus. Il n’y avait peut-être aucun rapport, et finalement, l’art de la vie les rattrapait tous. Akogare aussi. Le jounin fixa son regard, son visage n’afficha rien d’autre qu’une curieuse passivité. Elle était en pleurs, dans ses bras, et… et rien. Il ajouta plus bas : [Akogare] - Elle doit juste penser que je suis un héros de contes de fées et que je peux tout faire. Elle a tort. C'est tout...C’est tout… Iki ne força pas le destin. Savoir ce qui occupait l’esprit des autres n’était pas une passion. D’ailleurs il était très mauvais à ce petit jeu-là. Il voyait bien le fond de larmes qui avaient perlées sur le visage de la jeune femme, ses yeux rougies et sa peau étirée, mais il n’en ressentait rien. Sinon une pitié un peu bâtarde. [Iki] - Sortons d’ici ; je meurs d’envie de passer ses portes.Si longtemps… Trop longtemps que je suis enfermé.
Dernière édition par Iki Namikaze le Dim 9 Aoû - 0:54, édité 1 fois |
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| Sujet: Re: AK002 - Loin des Yeux... Mar 24 Mar - 20:30 | |
| Sans doute qu’encore une fois, la solution la plus facile sera la fuite. Sayuri… Akogare avait pensé avoir enfin trouvé quelqu’un de suffisamment instable pour le supporter, quelqu’un sur la brèche. Mais comme toutes les autres, elle avait fini par glisser dedans et désespérément elle s’agrippait à lui. Depuis la mort de Sabi, il l’avait soigneusement évité ; cela lui rappelait son échec, d’une part, mais ravivait aussi ce que le présent avait de changeant. Sayuri voulait trouver chez lui un peu d’humanité humide, une épaule sur laquelle s’appuyer. Elle voulait voir en lui un héros, alors qu’il y avait avant tout un homme fuyant. C’était une erreur. Peut-être que c’était la dernière fois qu’ils se parlaient. Akogare réfléchit à cette perspective, sans faire écho aux paroles d’Iki. La dernière fois qu’il voyait Sayuri… Oui, ce n’était pas mauvais. Elle était devenue une gêne. Pas exactement. Voilà, elle était devenue une femme à part entière, elle avait acquit des nuances. Akogare préférait les rapports simples, quand ils devenaient compliqués. Ou alors ce n’était pas le problème. Peut-être qu’il s’en voulait d’avoir échoué là où il aurait dû réussir ?
[Akogare] – Oui. Moi aussi, du coup.
Il se retourna pour observer Sayuri, qui avait disparu à présent, mais dont l’image restait dans son esprit. Il avait envie de lui parler à présent. C’était précisément ce qu’il détestait. Les rapports compliqués, où il ne savait plus lui-même ce dont il avait besoin.
[Akogare] – Attends.
Il se passa une main dans les cheveux. Cela le fit sourire, parce que c’était un geste qu’il répétait souvent quand il était jeune. Jeune et amoureux. Mais quel enfer… Il fallait être tordu pour lui mettre le moral au fond quand il allait justement risquer sa vie pour ramener un mec à son village. Il jeta un coup d’œil à Iki. Plus pour lui-même que pour son partenaire il murmura.
[Akogare] – J’avais oublié ce que ça faisait de ne pas savoir quoi faire…
Il désigna la porte et ensemble, ils la franchirent. Akogare se pencherait sur tout cela à son retour. Il allait s’occuper la tête ailleurs, et ne plus penser ni à Sayuri, ni à Sabi. Quel petit imbécile. Non seulement il l’avait empêché de tuer deux ennemis mais maintenant il lui sabotait ses relations lascives… Un petit terroriste montagnard.
Sans un regard en arrière, Akogare accéléra brusquement. Si la mission n’était pas limitée dans le temps, Keira avait bien répété que le plus tôt elle serait accomplie, le plus mieux ce serait. Un Kage à Konoha… La perspective lui paraissait étrange. Il y avait bien eu Kuronishi quand il était jeune, une plaie d’après ce qu’il avait compris, mais Akogare avait passé la majeure partie de sa vie de shinobi sans Kage. L’ombre Keira était entrée dans sa vie – seulement pour le pire – peut après… Quand exactement ? C’était le problème des ombres. On ne sait pas exactement quand elles sont là, mais une chose est sûre, elles sont bien présentes…
Il ne jugea pas utile de rappeler à son partenaire l’objectif de leur mission. On avait dû lui en toucher deux mots, quelle que soit la personne qui s’occupait de lui. Akogare ne parvenait pas à comprendre pourquoi on lui avait refusé un membre des forces spéciales pour lui proposer un Chuunin. Ce n’était pas une mission A comme Amateur, mais A comme… Animée… Potentiellement du moins, mais les shinobi sont censés être tendus vers toutes les possibilités.
Akogare gardait en mémoire ce qui s’était passé pendant son combat contre Kanda, dans cette forêt. Sans Hasu, il serait mort. Konoha l’avait véritablement envoyé à la mort. Pour gagner du temps. Keira avait eu la politesse de le dissimuler, mais elle avait été étonnée de les voir de retour. Subtilement, la vieille harpie avait essayé de savoir par quel miracle ils avaient survécu. Tous turent l’intervention de Hasu, comme d’un commun accord. Peut-être que son esprit s’orientait vers la paranoïa, mais il se méfiait d’Iki. Il y avait des Chuunin infiltrés, qui jouaient double jeu, plus puissants qu’ils n’étaient supposés l’être. Peut-être celui-ci était d’un niveau bien supérieur au sien. Peut-être attendrait-il un certain moment pour l’écraser.
Ou peut-être que Keira était sincère, et les avait mis ensemble parce qu’ils avaient quelques points communs. On préfère toujours croire que les vieux sont gentils.
[Akogare] – Bon. Est-ce que quelqu’un t’a demandé de me tuer ? On sait jamais. Si c’est le cas, j’aimerais assez qu’on règle cela tout de suite afin que le survivant aille se trouver un remplaçant.
Akogare s’était arrêté à la branche d’un arbre, à moitié suspendu dans le vide. Il dévisageait Iki et crut bon d’ajouter, sur le même ton et avec un petit sourire moqueur.
[Akogare] – Je suis sérieux.
Il observa le sol, en bas, à plusieurs dizaines de mètres, puis reporta son regard pâle sur son interlocuteur.
[Akogare] – Si ce n’est pas le cas, comment est-ce que tu es arrivé là ? Pourquoi toi ?
A tous les coups, il n’était pas plus avancé que lui. Akogare réussirait à s’en accommoder. Mais il était bien placé pour savoir qu’il s’était fait des ennemis avec le temps, et qu’il n’avait rien fait pour plaire à ceux qui pourraient le faire tuer au détour d’une mission. C’est la raison pour laquelle Akogare ne partait jamais sans Ten. Jamais, jamais. Parce qu’il connaissait Ten, il avait saisi son essence et l’avait recueillie dans ses mains. Ses yeux avaient percé son âme ; et jamais elle ne le trahirait. Akogare savait que Ten était amoureuse. Oh, il le savait. Cela le peinait. C’est également la raison pour laquelle il ne l’avait pas touché. Il aurait été tenté de l’aimer en retour. Mais Akogare se contentait des relations avec Sayuri. Qui devenaient également compliquées, au fil du temps, et qui s’achevaient à leur tour. Pour Sayuri, la question restait en suspens. Il s’était attaché à elle, d’une manière qui l’étonnait encore. C’était plus que la chaleur de son corps contre le sien. Elle le rassurait.
Mais aujourd’hui, Akogare voyait sa situation avec Sayuri remise en question, Ten éloignée et le sommet de sa montagne encore loin. Alors il se sentait un peu vulnérable et cela ne l’aurait pas surpris plus que ça qu’Iki sorte une lame dont ne sait où et essaye de l’égorger d’un même geste.
Pas plus que ça, non. |
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| Sujet: Re: AK002 - Loin des Yeux... Mer 25 Mar - 23:26 | |
| Regarder la paume de ses mains, comprendre que ces lignes qui la rident ne s’effaceront jamais. Et s’enfuir. Un jour, elles nous rattrapent et on reste bouche bée devant une vérité si flagrante. Jouer un jeu, c’est pourtant si simple. Se cacher des réalités, mensongère garce qui peu peuplent nos âmes. Jouer un jeu et s’éclater à gagner. Lancer les dès et constater sa réussite. Le pur hasard qui nous entoure, le destin, chance de nos pas, nous envoie vers des cieux plus lumineux. S’envoler, puis tomber. Iki imagina le regard éteint d’Hizu, quand elle apprendrait qu’il n’était plus là. Que pendant quelques jours, elle n’aurait personne sur qui se jeter une fois rentrée du travail, qu’elle ne pourrait ni séduire, ni apitoyer. Iki avait l’impression de lui ôter un de ses plus grands plaisirs, de lui soutirer une partie de sa vie. Et peu à peu, il se mit à douter. Etrangement, ce recul l’amenait vers une conclusion qu’il n’avait jamais vraiment voulu admettre. Sa vie était vide sans elle. Et la sienne… ne semblait pas bien meilleure. Quelle idiote.
Allez, c’est le jour des vérités. Il partait enfin en mission, il avait pour lui cette boite de gélule qui lui donnait des yeux écarlates et une âme légèrement apaisée, quoi que secouée par ses propres effets, et peu à peu ses paupières ankylosées s’ouvraient. Il jeta un œil agar vers son coéquipier, ce juunin aux yeux d’une blanche sérénité, mais ne dit rien. Iki avait toujours été d’une sorte de pâle transparence avec les hommes et femmes qu’il avait du côtoyer durant les quelques missions qu’Okugane lui avait donné. Peut-être parce qu’elles étaient, à priori, les seuls moments de plaisir de sa vie, depuis qu’il avait quitté l’Ecole. Peut-être aussi parce que ces gens-là ne l’intéressaient pas, et qu’ils ne s’intéressaient pas à lui.
Dans la neutralité, tout est bon à prendre.
Ce n’était ni de la haine, ni du dégout. Cela ne l’avait jamais été, et ne le sera jamais. C’était un simple dédain passionnel. Iki avait toujours conçu les relations sociales comme une sorte d’hypocrisie morbide qui consiste à sourire aux blagues amusantes, aux moments heureux, à pleurer lorsque la tristesse se penche sur les gens qui vous entourent, à crier lorsque la colère vous prend. Mais tout cela dépendait d’un amour certain pour quelqu’un. Quelqu’un qui un jour, sera heureux, sera triste, ou trahira une fausse confiance, qui de son état émotionnel vous influencerait. Et cet amour, n’était qu’un fil d’araignée. Solide, mais si fin qu’il suffit d’une brève brise pour le couper en deux. Une brise fraîche et agréable. Imaginer le blanc visage d’Hizu qui soufflait, soufflait et soufflait encore, et ce fil, qui tenait bon, malgré la tempête…
Petite garce, tu me manqueras.
Ses yeux décrivirent lentement Akogare. Avec la même touche d’incompréhension, il se retourna, alors que plus rien ne cachait les rues de Konoha. Pas même une ombre mielleuses aux douces courbes énonciatrices d’ébats langoureux. Et si tout cela s’effaçait ? Il suffirait de reconstruire. Iki n’arrivait pas à cerner ce qui était si difficile là-dedans. Peut-être le simple fait que sa vie ne fut jamais bouleverser que par des idiots, et que jamais aucune parole ne l’avait touché au point de ne pas les comprendre. Cela devait être dur, très dur. Ne pas savoir quoi faire.
Il laissa tomber la cigarette sur le sol et l’écrasa du bout du pied. Elle s’éteignait, cela le fit sourire. Deux doigts s’enfoncèrent dans ses yeux fermés comme pour le raccrocher à un présent fuyard. Etourdi, fatigué, il ne dit rien et suivit Akogare. La joie de trouver un compagnon qui ne désirait pas en être un ; simplement indescriptible. D’un accord de la tête, ils passèrent les grandes portes et déjà il s’imaginait le paysage sans la présence du village, ce monticule de pierres, de bois, et d’hommes. Il n’avait pas eu le temps de prévenir de Yasu, mais elle devait déjà être au courant. Ces derniers jours, elle n’avait plus fait apparition dans sa vie. Le remord de l’avoir emmené une nouvelle fois, dans les griffes d’un homme qu’elle n’appréciait pas et que Iki haïssait. Des regrets en tout genre, dont Iki n’avait cure. Pendant de longs mois, il s’était imaginé vivre jusqu’à son dernier souffle à ses côtés, comme mari et femme implicites. Cela lui paraissait aujourd’hui saugrenu. Non, elle ne lui avait pas manqué, à vrai dire ce n’était que maintenant qu’il ne s’en rendait compte.
Le sol défile. Mes pieds s’animent, chaque muscle se tendant puis se tendant avec la même rigueur de bien faire. Et de ne pas tomber. Les branches se plient sous notre poids, les oiseaux ne s’écartent pas, ils nous regardent, intéressés par une étonnante course. Ne pas tomber. Mes yeux se ferment puis s’ouvrent sans que jamais je ne le leur demande. J’avais mis plus d’attention à ne pas oublier mes pilules qu’à prévenir Yasu ; et les autres. Pourtant le petit mot que j’avais collé sur ma porte avant de partir, ce serait Hizu, voire Jisuga qui le trouverait. Pas un mot, une syllabe même pour mon mentor Konohan ; pas même un au revoir. Les portes s’effacent peu à peu de notre vue. Les voir loin ; je sourie. J’aurais aimé dire à Akogare que j’étais heureux de faire cette petite balade avec lui. Mais je ne pouvais pas. Et ce n’était pas une balade.
Et il s’en fichait, sûrement. Moi aussi en fait, alors ça tombait plutôt bien.
Je n’avais pas eu l’occasion de juger le Hyuuga, je ne le ferais pas. Il est là pour une mission, un objectif que nous devions avoir tous deux dans notre tête ; tête vidée dès à présent, de tout le reste, de tout ce qui nous entoure, comme deux petits shinobis sans âme, deux petites billes qu’en envoie d’un coup de pousse sur un parcours de sable. Ne pas rester coincer dans le tunnel, voila ce qu’on leur demandait. Alors pourquoi, petite bille de verre que je suis, je n’arrivais pas à oublier tout ce que je laissais derrière moi, et tout ce qu’apportera ce que je ramènerais - si je reviens, mais étonnement, je ne m’étais pas fait à cette idée là. Je jetais un coup d’œil à Akogare qui filait entre les troncs comme un chat sur les toits de Konoha. Le visage de la femme qu’il avait tenu dans ses bras ne voulait se décrocher de ma mémoire.
Il poussa un murmure, pour lui-même, caché par le bruit des branches plissés, des feuilles poussés par le vent et par les corps et du chant des oiseaux. « Nous avons tous les deux la tête pleine. »
Il répondit à son regard, Iki dévissa sa nuque et reprit la description du sol bien pauvre qui passait sous ses pieds. Akogare accéléra. Surpris ? Vexé ? Ou simplement envie d’en découdre et de rentrer. Etrangement il n’affichait aucun plaisir à partir en mission, même si, finalement, s’échapper ainsi et si facilement lui rendait peut-être service. Un engouement partagé, comme une nécessité dont on remet la conclusion entre les mains de deux hommes qui n’en ressentent aucun besoin.
Alors la question se posait : pourquoi Okugane l’avait-il envoyé ?
Iki sourit. Ils s’étaient tous deux arrêtés sur une branche un peu plus épaisses que les autres et de la bouche du Hyuuga, il sortait ses propres mots. Pourquoi était-il ici, lui ? L’hypothèse du jounin semblait folle. En vérité, Iki ne voyait pas où il voulait en venir. Il ne se sentait pas mal à l’aise, ni trahi ni vexé, non, si Akogare prenait ce ton si sérieux, empli d’une sereine passivité toutefois, c’est qu’il avait des raisons pour échafauder un tel projet. Il fallait tout de même être tordu. Sentant une sorte de tension les entourer, alors que parallèlement la forêt semblait se taire, retenir son souffle attendant sa réponse, attendant son coup-bas, sa trahison, comme dans un mauvais film « Oui Akogare, Konoha ne veut plus de tes services, tu en sais trop, tu vas mourir » ; il mit lentement, sans faire aucun mouvement brusque la main dans la poche extérieur de son manteau et ne lâcha pas le regard pâle et livide qu’était celui du Hyuuga. Il ne réagit pas, il ne frémit même pas, pourtant au fond de lui, il y avait cette option que de ce manteau il sorte on ne sait quelle technique affriolante, une technique qui mettrait à bas un homme dont on mettait la survie politique du village entre les mains. Oui, il fallait être tordu, mais paradoxalement Iki respecta ce choix. Peut-être parce que s’il avait été un peu plus malin, ce serait bien lui qui les aurait arrêtés, et lui encore qui aurait posé cette question saugrenue. Il sortit la main de sa poche et mit en évidence la petite boite de plastique qui contenait ses gélules. Entre deux doigts il en prit une et l’avala.
[Iki] - Je pensais que si quelqu’un devait mourir ici, ce serait bien moi. Mais apparemment je me trompais.
Iki déglutit difficilement et se remit dans le sens de la marche. D'un air triste, il parla doucement, comme s'il préférer éviter le sujet. Ce n'était pas un ordre. C'était une nécessité, fuir, loin, très loin, ne plus reparler du pourquoi du comment, avant longtemps, très longtemps.
[Iki] - Partons.
Partons Akogare, partons, je t'en prie.
Il aurait aimé pouvoir lui répondre. Il aurait aimé trouvé un argument infaillible, être un élément spécial, un chuunin spécialisé dans les recherches, un fin shinobi sur qui on plaçait beaucoup d’espoir. Mais en prenant du recul et à bien y réfléchir, il ressemblait plutôt à celui qu’on envoyait dans une mission suicide pour qu’on raye de cette terre toute trace de l’échec d’Okugane.
Parce que oui, c’est un échec. |
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| Sujet: Re: AK002 - Loin des Yeux... Mar 5 Mai - 16:15 | |
| Le prédateur et la proie.
Peut-être que chaque être humain est destiné à incarner l’un ou l’autre de ces rôles. Selon les circonstances, il devient prédateur ou proie. Certains parviennent à conserver leur masque tout du long, sans jamais l’intervertir. Jusqu’à ce qu’ils meurent. Akogare était souvent prédateur, et plus il s’approchait de sa montagne, plus il muait en proie. C’était une sensation détestable. Beaucoup penseraient qu’une proie est forcément faible et fragile ; c’est un mensonge. Il existe des prédateurs médiocres, et des proies sublimes. C’est simplement… une vue de l’esprit.
Aujourd’hui, à cet instant, Akogare était prédateur et Iki était proie. Et le Hyuuga était bien content. Il ne voulait pas être proie auprès de n’importe qui. Seulement auprès de certaines personnes, très rares. Pas exactement des amis, pas tous. Davantage comme des échos, des résonnances rassurantes qui lui murmuraient que tout allait bien.
[Akogare] – Cela fait plusieurs années maintenant, que j’accomplis des missions pour Konoha. J’étais dans une équipe de trois ; Ten et Yoshimo. Yoshimo est mort plus rapidement que je ne le pensais, et je suis resté avec Ten. C’est la seule personne avec qui je pars en mission. Pas seulement parce que nous sommes complémentaires, ou parce qu’on se connait bien. Mais parce qu’on possède chacun un peu de l’autre et qu’on ne veut pas perdre cette part offerte.
Akogare ne détourna pas les yeux. Son visage témoignait désormais une vague curiosité amusée.
[Akogare] – Je ne suis pas rassuré à Konoha. J’ai du mal avec le concept guerrier, tu sais. Évaluer le potentiel de chacun, les mettre à tel endroit où ils se révéleront le plus utile. J’ai le droit à des missions dangereuses, tout le temps, et cela me pèse. Parce que je suis bon. Et j’aimerais redevenir adolescent, redevenir médiocre, pour pouvoir retomber amoureux et oublier que je suis un Hyuuga, et l’un des plus puissants avec ça.
La lame de Kanda était encore froide dans son corps, partout où elle s’était enfoncée, inlassable, comme la bêche du paysan. Ce jour là, une brillante défaite. Akogare fuyait son passé autant qu’il souhaitait le rattraper. A présent, il était comme suspendu, en l’attente d’un mouvement. Jamais il ne rattraperait ce à quoi il avait dit adieu ; San, Tael, les Hyuuga… Ils appartenaient tous à un passé révolu. Akogare se sentait vieux et usé, à la façon d’un couteau qu’on aurait trop utilisé pour faire quelque chose à laquelle il n’était pas habitué. Il voudrait que ce passé n’ait jamais existé pour pouvoir l’inventer aujourd’hui.
[Akogare] – Mais ce n’est pas possible…
Alors, il s’était fait à l’idée de composer avec. Accepter les liens qui l’unissaient, contre lui, à Tael. Accepter la main tendue par Hasu. Et un jour, il le savait également, il ferait appel à eux pour le sauver, comme avec Kanda.
Cela non plus, il n’y pouvait rien.
[Akogare] – Nous allons au Mont Myouboku. Je pense que tu l’ignores.
Sans rien ajouter, Akogare se détourna et reprit sa route. Le mont s’élevait très loin d’ici, hélas, et on racontait qu’il était impossible de le trouver quand on y était pas invité. Il aurait beau présenter le beau sceau de Keira ; les crapauds ne l’accueilleraient pas à bras ouverts. Quelle idée d’aller s’enterrer là-bas. On espérant que Benkei n’ait pas pris cela trop au pied de la lettre, et n’y soit pas réellement mort. Ce serait gênant pour Konoha, quoique pas insurmontable. Benkei représentait une sorte de grosse bouée au milieu d’une tourmente passagère. Si on l’attrape, on est presque sûr de survivre à cet épisode ; et si on la ratait, et bien, au final, les chances seraient à peu près les mêmes puisqu’on s’inventerait une nouvelle bouée. Une bouée qui n’était pas prévue à cet usage, par exemple.
Akogare frissonna. Ce serpent de Keira l’observait. Deux pupilles fixes, noires, patientes. Jamais personne n’oserait lui présenter cette « opportunité ». Ils savaient tous ce qu’il en pensait. Et pire, il refuserait, quoi que cela lui en coûte. Mais rien que l’idée que Keira ait pu imaginer ce scénario le terrifiait. On pouvait reprocher beaucoup de choses à la vieille femme, mais certainement pas d’être imbécile.
Il lui faudrait un peu de temps pour récupérer. Mais une fois rentré à Konoha, il prendrait cinq minutes pour se poser. Il parlerait à Sayuri, pour mettre les choses au clair, mais cette fois-ci se sera lui qui choisirait le champ de bataille. Il ne laisserait plus son flanc à découvert. Il n’avait pas envie de conclure quoi que ce soit et, dans son esprit, Sayuri non plus. Cette situation lui plaisait ; ils se voyaient quand ils le voulaient, ne profitaient que des bons côtés d’une relation et pouvaient vaquer à d’autres occupations. Saleté de petit cousin, maudit Sabi. Sayuri devait se dire que la mort rôdait dans leurs ombres à tous. C’était une kunoichi expérimentée, mais elle éprouvait une douleur particulière. Elle se disait que tous les êtres qu’elle aimait pouvait disparaître comme Sabi, dans une fulgurance blanche, sans que personne, personne ne puisse rien y faire. Et hélas, peut-être, Akogare était l’un de ces êtres qu’elle aimait. Et hélas, peut-être, elle savait désormais qu’il n’était pas suffisamment fort pour sauver tout le monde, peut-être pour se sauver lui-même.
Et hélas, hélas, elle se disait qu’elle ne voulait pas le laisser s’échapper.
Deux oiseaux qui partagent la même branche. Mais un seul nid.
Et un gros serpent au pied de l’arbre, qui les observe avec délectation en se demandant lequel tombera le premier. Les oiseaux volent, Keira, et les serpents rampent. Hum…
[Akogare] – Alors reprenons. Je suis Akogare Hyuuga, membre des forces spéciales. Normalement je pars en mission avec des gens que je connais, parce que je préfère. Mais il y a un début à tout, et j'ai déjà participé à des missions en tant que remplaçant ou soutien. J'ai lu ton dossier comme tu dois t'en douter, mais comme il n'est pas écrit par toi cela ne m'intéresse pas beaucoup. Qui es-tu, à ton avis ?
Akogare commençait à concevoir qu'il lui serait d'une part difficile d'obtenir Ten rapidement - et que c'était très égoïste de vouloir "posséder" cette jeune femme qui avait bien le droit d'aller aider des gringalets à l'autre bout du pays, après tout - et que s'il souhaitait avoir ton son esprit lors de cette mission, il devait au plus vite baliser le terrain vierge nommé Iki. Il n'avait pas totalement écarté l'hypothèse d'un infiltré, mais même si c'était le cas il aimait discuter pendant ses missions. Après, ils aviseraient, mais ils auront largement le temps de s'ennuyer une fois arrivé aux abords de cette foutue montagne. Même les Senjago sont plus accueillants. Quoique, pas quand on a été surpris avec la fille du Patriarche.
Mais pour sa défense, Akogare portait son masque ce jour-là. |
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| Sujet: Re: AK002 - Loin des Yeux... Sam 6 Juin - 0:48 | |
| Loin des yeux, loin des voix, loin de tout ce qui les rattache au reste, aux autres, à ceux qui jamais ne font que spéculer sur leur propre dos. Mâchoire infernale qui les broie un peu plus chaque jour. Se sentir utilisé était une chose. Se sentir corrompu en était une autre. Et parfois, Iki, dans les pupilles injectées du sang du pouvoir d’Okugane, le chuunin remarquait cette petite teinte de haine à son égard. Il aurait tellement voulu leur répondre oui, leur donner son accord et sa passion pour ce village que parfois il en rêvait. Bien que jamais il ne l’avait admis. Mais non, il avait fallu qu’on ordonne. Il avait fallu un protocole, un processus, des ordres et une équipe. Une équipe pour une mission. Une mission pour un but. Un but pour… Un but pour qui ? Pour les projets fous d’un ambitieux qui ne sait plus s’arrêter ?
Merde, Konoha ne sait-elle pas dire « s’il te plait » ? Un jour au moins il lui aurait répondu « merci »…
L’écho des mots.
Il y avait ceux qui les maniaient comme un assortiment de roses si vives et si lumineuses qu’elle en éclairerait le destinataire qui, ébloui par tant de clarté, ne rencontrerait dans la métaphore et dans la litote, que l’exercice de la franchise, de l’honnêteté, de la sincérité. Parole épurée de toute accréditation. Parole muette. Parler pour ne rien et parler pourtant. La parole politicienne, parodie dramatique effectivement. Parodie dramatique d’un homme qui manque cruellement, mais cruellement, d’amour propre. L’écho des mots. Il nous bouffe parfois de l’intérieur. Les mots en eux-mêmes ne sont jamais que l’addition de plusieurs lettres, de syllabes qui résonnent dans nos tympans comme des sons, des bruits que le décor nous envoie pour nous prévenir, pour agir. Pour contrebalancer ce que le silence a de si terrifiant : la patience, l’inactivité, le second rôle de l’amertume : la mort. Les hommes avaient ça de magique, que de la parole, ils pouvaient en faire arme. Manipulation magique des sens, exercice fantastique des faiblesses même qu’on leur connait : le sentiment, l’impression. L’ambiance houleuse d’un discours passionnant donne aux hommes ce que jamais la femme ne pourra satisfaire : l’impétuosité.
Iki regarda calmement et longuement Akogare. Il avala, dubitatif le comprimé qu’il avait laissé dans sa bouche, sous sa langue, chaude, de sorte qu’il fonde un tant soit peu, qu’il perde de sa superbe, qu’il perde de sa saveur chimique comme si le chuunin pensait qu’ainsi il s’y exposerait moins. Qu’il se débarrasserait peut-être de cet interminable cercle dans lequel on l’avait mis. Mais vraiment, il n’y songeait plus. L’écho des mots, le grand Hyuuga l’avait. Ce n’était plus ce même suintement désagréable qui levait les foules, qui levait les espoirs et les bras en sueur, mais cette frappe forte. C’était comme si on l’avait atteint de la paume de la main sur l’abdomen : un choc sourd aux conséquences internes, une main qui perce la peau et qui attrape les tripes, les vraies, celles que l’on voit, que l’on sent, celles qui font des hommes des êtres de chairs. Et non des âmes frivoles, produits de la rhétorique, pion de l’éloquence.
Il faut de tout pour faire un monde lui avait-on appris, très tôt. Il faut un monde pour les séparer. Ceux qui ordonnent. Et ceux qui obéissent. Un autre encore pour les comprendre. Il faudrait un monde entier à Iki.
Et apparemment, il en faudrait un tout autre pour Akogare.
[Iki] - Au mont Myoubo…
Sa bouche se tût avant qu’elle n’en dise un peu trop sur sa réaction. Alors il leva un sourcil, contempla le visage d’Akogare, s’y retrouva dedans comme une poire fatiguée des saisons qui passent et trépassent et difficilement, il déglutit. Trop de souvenirs, en effet. Iki n’avait pas peur, à vrai dire il ne connaissait pas exactement ce sentiment étrange qui avait, chez nombre de ses camarades fait trembler les mains, les lèvres, laissant les yeux ballant vers le ciel. Comme si le ciel pouvait apporter une quelconque réponse, une solution.
Comme si le ciel pouvait être autre chose qu’une… vulgaire chape de bleu.
Le chuunin renifla dans son coin et alluma une cigarette. Le briquet crissa puis lâcha une gerbe de flamme qui fit gicler une bouffée grisâtre. Doucement le tabac incandescent pénétra dans ses poumons et Iki inspira profondément.
[Iki] - Je l’ignorais, oui.
D’un triste regard, ils convergèrent vers leur nouvelle destination. L’un comme l’autre semblaient avoir leurs raisons mais il était clair que leur cause n’en était que similaire. Les souvenir de cette dernière mission étaient encore gravés dans la chaire du chunnin. Ils étaient inscrits, tailladant la peau, hantant sa mémoire et celle de beaucoup d’autres. Iki n’avait aucune envie de retourner là-bas même s’il se sentait en sécurité, en confiance. Il avait dans ses mains l’impression que ces dix derniers jours avaient été le plus calme de sa vie, que jamais Jisuga n’avait été tant prometteur, que la peau d’Hizu s’était recouverte d’une nouvelle couche de soie et que sur ses hanches ses mains glissaient comme un savon trop épicé, un savon qu’on ne peut attraper.
Un savon qui vous tend les bras mais qui à jamais vous échappe.
Dans sa poche il sentait le contact de la boite qui contenait les antidépresseurs. Elle donnait au tissu de sa poche un relief inhabituel auquel Iki s’était accoutumé.
Se sentir en sécurité, et voir au loin le danger, n’était-ce pas la pire des situations ? A ne pas en douter, Iki avait peur. De ne jamais revenir ? De ne pas s’être donné le temps de régler tout ce qu’il avait à régler ? Il n’en savait rien. Iki n’avait jamais connu la peur. Si c’était cela, alors c’était bien désagréable.
Il ferma son visage un peu plus, cacha le peu d’expression qui lui restait et enfoui un passé trop proche pour être oublié tout au fond de sa mémoire. D’nu pas lent et lourd, dans l’air chaud des forêts de Konoha, il suivit Akogare.
Iki sourit. Il regarda le flanc du visage d’Akogare qu’il pouvait voir, légèrement décalé dans le dos du Hyuuga, comme on le lui avait appris et se rendit compte qu’ils avaient tous deux un peu trop de choses en communs. Il n’appréciait pas plus que cela de devoir faire équipe avec une sorte de miroir, un homme qui préférait sortir du village rapidement, comme s’il s’agissait d’une délivrance, un homme qui ne fait confiance à personne d’autre sinon à lui-même et qui voit dans le regard de tous une possible trahison, un homme sous la coupe d’un autre, un homme manipulé parfois et cela pour le bien d’une chose dont Iki ignorait encore la majeure partie du tout. Un homme qui travaillait seul ou avec les personnes en qui il avait confiance et qu’il appréciait. Sûrement pas pour les mêmes raisons, certes, car Iki avait en lui cette… chose qu’il valait mieux garder secret.
Mais surtout, Akogare avait dans sa vie assez de sacrifices et de douleurs pour envisager la possibilité d’être trahi. Akogare savait qu’il existait des raisons pour que quelqu’un l’élimine. Et ce quasi-légitimement.
Putain, jusqu’où cet homme se mettra-t-il devant lui sans qu’il ne puisse rien y faire ?
Voila. Iki n’était qu’un pion fébrile, une branche suave sur laquelle on se posait doucement mais que la brise comme l’usure pouvaient sonner le glas de la défaite. Akogare, c’était le grand tronc qui la soutenait. Le grand tronc qui, contre le roseau, ne flancherait en fait jamais.
[Iki] - Je m’appelle Iki Namikaze, nommé Chuunin il y a quelques années sur ordre de l’Administration. Je suis resté au frais ces trois dernières années, exécutant quelques rares missions, toutes délicates et toujours avec les mêmes personnes. Pas parce que je préfère. Parce que je n’ai pas le choix. Mais… ce n’est pas très important.
Il tira sur sa clope et sauta d’une branche vers l’arbre, quelques mètres plus loin.
[Iki] - Mon dossier est classé spécial et pas mal d’informations sont confidentielles. Je n’ai absolument rien à faire des secrets que cache Konoha mais il vaudrait sûrement mieux que tu apprennes par toi-même que ce je suis vraiment. Parce que je n’ai pas envie de te parler de ma vie.
Et parce que tu en apprendrais bien plus ainsi.
Il faillit sourire. Cette question avait eu le mérite de remettre les choses dans le bon ordre. Qui était-il ?
Comment lui répondre… qu’il n’en savait rien. |
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| Sujet: Re: AK002 - Loin des Yeux... Jeu 8 Oct - 0:12 | |
| Akogare n’eut pas le cœur à dire à son équipier que son dossier, son vrai dossier, il l’avait déjà lu de bout en bout. Il n’y avait pas énormément d’informations confidentielles à partir du moment où on est le chef de la sécurité du village, un titre pompeux certes, mais aux effets très réels. Akogare ne parvenait pas bien à saisir ce qui l’intéressait dans ce travail, exactement, peut-être la sensation de contrôle sur chacune des vies du village mais cela ne l’avait jamais beaucoup bouleversé. Il pouvait consulter un dossier sur chaque shinobi, en demander un à des personnes spécifiques, faire surveiller des gens, les arrêter sans la moindre preuve autre que son intuition… Et il s’en moquait un peu, quand même.
Et puis ce titre, ça lui avait surtout apporté des emmerdes depuis l’attaque d’Asahi.
Ainsi il connaissait, vaguement, les secrets que couvait Iki. Des secrets qui ne lui appartenaient même pas, que le village s’était approprié. Probablement qu’on a tous ses petits soucis. Akogare ne prenait pas son rôle de surveillant très au sérieux. Keira lui avait demandé un rapport sur son partenaire, certainement pour évaluer les risques qu’il représente pour l’administration et pour lui-même, mais elle savait en le demandant qu’elle attendrait plusieurs mois avant d’y poser ses petites mains fébriles.
Mais Akogare pensait lui aussi qu’un dossier n’était jamais très représentatif de la personnalité de quelqu’un, pour la simple et bonne raison que le dossier ne fournit presque jamais les motivations. Il se contente des faits et c’est là une lacune. On n’apprend actuellement les motivations d’une personne qu’en la fréquentant pour un temps, ou en vivant des choses intenses avec elle. Parfois, on pouvait les deviner d’un coup d’œil à peine, rien qu’avec l’expérience. Là on prenait un avantage certain sur cette personne… une mécanique sociale, en quelque sorte.
[Akogare] – Ok. Je pense aussi. Remettons-nous en route.
D’une impulsion, Akogare repartit. Le Mont Myouboku présentait l’avantage de ne pas être très loin, et le désavantage de leur être parfaitement interdit. Même pour le chef de la sécurité de Konoha. Une honte. La perspective de discuter avec des crapauds le perturbait réellement. Il se demandait comment cela se présenterait. Il n’y avait plus de représentants de ce clan depuis un moment, dans le village. Ils vivaient de leur côté, parfois venaient apprendre l’art ninja, mais c’était le mont leur véritable demeure. Et même, cela faisait des années qu’ils n’étaient venus. Keira n’avait pas indiqué s’il y avait un sujet de tension autre que le départ de Benkei. Mais si Benkei avait voulu aller quelque part, il aurait certainement commencé par là.
[Akogare] – Quelque part, si Benkei est mort, cela nous permettra de rentrer plus tôt.
Il parla tout haut, mais garda le reste pour lui.
Et dans le cas où il s’agit d’un traître, cela nous épargnera l’effort de le tuer. Il était puissant, le bestiaux, d’après ses états de service. Mais Keira n’était pas stupide, en l’envoyant lui elle prenait cette possibilité en compte. Il était peu probable que Benkei puisse lui tenir tête. Mais si c’est un bon shinobi et un bon traître, il aura prévu de prendre l’avantage sur ses adversaires. Mais après tout ce temps, cela semblait peu probable. Akogare préférait autant ne pas avoir à le chasser tout seul. Un Sannin, après tout, doit bien réserver son lot de surprise.
[Akogare] – Tu sais, j’ai longtemps réfléchi sur la condition des shinobi. Si on regarde quelques spécimens, il y a deux bons tiers qui sont déprimés. C’est stupide, non ? Leur espérance de vie est de trente ans, environ, et ils vont gâcher leur expérience terrestre à faire la gueule. Même des gens comme… Ginko… sont plus sains. Et pourtant…
Et pourtant il préférerait être capturé vivant par Asahi qu’être enfermé une heure avec elle. Quoique, quand même, il était curieux. Elle était jolie, pétillante, rose. L’image d’un lit avec Tsubaki et Ginko ensemble s’imposa à son esprit mais en bon professionnel, Akogare s’interdit de s’inclure dans cette image.
[Akogare] – Bref. On doit avoir le plus grand taux de vies pourries. Mais ce n’est pas une raison.
Ils ne tardèrent pas à arriver à la chaîne de montagne qui contenait le Mont Myouboku. En vérité, il était trois heures de l’après-midi et Akogare crevait de faim. Il était impossible de déterminer une durée pour cette mission car cela ne dépendait absolument pas d’eux, mais de l’existence et de la présence de Benkei. S’il était par miracle ici, au Mont Myouboku, et prêt à les suivre, alors ils pouvaient espérer être de retour avant qu’il ne fasse nuit.
Dans tous les autres cas, la mission durerait plusieurs jours. Akogare posa une main sur son ventre.
[Akogare] – Tu sais ce que mange les grenouilles ?
Il grimaça.
[Akogare] – Je sais pas si je vais aimer…
Les montagnes s’élevaient haut au-dessus d’eux, leurs sommets dissimulés derrière des nuages vaporeux. Akogare restait là à les observer, avant de baisser les yeux sur un petit chemin droit qui se faufilait dans leur direction. Il s’avança, légèrement devant Iki, détendu mais néanmoins alerte. Il n’était pas impossible que Benkei dispose de moyens divers de savoir qui s’approchait du mont et il n’était pas non plus impossible qu’il choisisse de les attaquer aussitôt. Rien n’indiquait qu’il était particulièrement violent mais la perspective de voir un Oi-nin - certes en civil - et un autre shinobi de Konoha se présenter chez lui, s’il avait des choses à se reprocher, ne leur attirerait pas sa sympathie.
Toutefois, rien n’indiquait quelle montagne plus qu’une autre représentait le Mont Myoboku.
[Akogare] – Est-ce que tu sais où est le mont ?
Iki renifla et passa un doigt fatigué le long de ses paupières.
[Iki] - Ouais.
Il tira sur sa cigarette. C'était devenu un réflexe, un tic, une action imprécise, floue. Iki fumait sans même s'en rendre compte, sa main allant jusqu'à ses lèvres machinalement.
[Iki] - Cet enfoiré est juste là, à l'Est.
Akogare acquiesça doucement et joignit les mains devant lui. Il ne lui demanda pas pourquoi il tutoyait le mont parce qu’après tout, cela ne le regardait pas.
[Akogare] – Byakugan.
Le monde se teinta de gris et de bleu. Le jeune homme leva la tête sur les montagnes, procédant avec autant de minutie que possible. S’il se dépêchait, il raterait ce qui l’intéressait. La puissance de son dojutsu lui permettait d’avoir une vue dégagée sur plusieurs kilomètres à la ronde mais plus on s’éloignait, plus il fallait ordonner sa vision pour discerner les points qui nous intéressaient.
Et malheureusement, ces montagnes bourdonnaient de vie. Même si les animaux ne disposent pas réellement de chakra, Akogare percevait leur énergie vitale et cela faussait sa recherche. Mais il était inutile de paniquer ; les grenouilles qu’il cherchait possédaient du chakra en quantité. Dès qu’il les verrait…
Elles étaient bien à l’est, sur ce qui devait être le Mont Myoboku. De véritables petites concentrations de chakra. Akogare indiqua la direction et fut quelque peu surpris de la quantité de chakra qui dormait dans son coéquipier. Il désactiva sa technique.
[Akogare] – En effet… J’ai l’impression que les grenouilles nous attendent… Très... loin... |
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| Sujet: Re: AK002 - Loin des Yeux... Jeu 8 Oct - 20:24 | |
| Une fraîche brise balaya leurs cheveux. Aux pieds d’Iki, l’ombre de la grande chaîne de montagne dont Myoubo faisait partie, s’étalait jusque là. D’un côté, la chaleur du soleil, caché par les hautes verdures de grands arbres du Pays du Feu, de l’autre, le froid et la tristesse des roches. Iki n’aimait pas les montagnes. A moins qu’il ne rapporte cela à quelques mauvaises expériences personnelles, ce qui était fort possible en vérité. On ramène trop souvent les choses à un sentiment personnel. Aux pieds du mont, Iki avait faillit trouver la mort et en s’en débarrassant, il l’envoya vers sa coéquipière. Il se souvenait encore de la grande faux qui allait s’emparer de la tête d’Hizu. Une grand faux, noire. Bien réelle, celle-là. Il frissonna et posa sa clope entre sur ses dents.
Son regard se posa méthodiquement sur Akogare. Le shinobi était grand, mais pas assez pour qu’il soit imposant. Simplement élancé, et particulièrement charismatique. Il lui suffisait de marcher pour qu’on comprenne qui il était. Oh, non, pas ce qu’il était vraiment, mais une partie de ce qui faisait de lui, bien plus qu’un shinobi quelconque perdu dans les méandres et les rouages de Konoha. Iki n’éprouvait ni l’envie, ni le besoin de se faire d’Akogare un ami. C’était, d’une part, parce qu’il considérait inutile d’avoir des amis, et qu’il s’agisse d’un Anbu aux yeux blancs ou d’une belle blonde avec des jambes immenses et de gros seins, cela ne changerait à priori rien. Sinon, peut-être aurait-il déjà fait l’amour à Hizu, ce qu’il n’avait jamais fait. Et il trouvait ça à la fois débile et respectueux. L’amour pour l’amour, ce n’est finalement que vivre pour vivre. Et vivre, c’était déjà bien assez compliqué comme cela. Et puis, Akogare n’était pas une personne avec qui il pourrait tisser un quelconque lien, sinon un lien professionnel. Ne l’avait-il pas dit lui-même ? N’avait-il pas été honnête avec lui ? Probablement. Dans les yeux du Hyuuga, si tant est qu’on puisse y lire quelque chose, la femme qui porte le nom de Ten lui manquait.
[Iki] – D’un autre côté, s’il est vivant, on ramènera un Hokage à Konoha…
L’idée qu’une nouvelle puissance s’affirme le surprit agréablement. Les conséquences que cela impliquerait le dépasser, mais dans son esprit, il y avait l’idée qu’on puisse enfin le laisser tranquille, lui, ses dons, sa capacité à tuer, et puis peut-être aussi tout le reste – même si, finalement, il ne restait plus grand-chose à Iki si on lui retirait tout cela. L’idée que Benkei soit un pur salaud lui vint également à l’esprit. Iki ne concevait pas qu’un homme qui ne revendiquait pas lui-même la place qu’il désirait, ne la méritait simplement pas. Il trouvait dingue qu’il faille traverser tout un pays pour botter les fesses d’un homme qui ne voulait pas exercer une quelconque fonction. Et si Benkei acceptait, n’en serait-il pas plus mauvais encore que les précédents n’auraient su l’être ? Keira faisait apparemment confiance à cet homme.
Soit. Il n’en restait pas moins un fichu crétin de s’être barré ainsi. Et puis tout ça, cela lui semblait si loin, si irréel. Iki n’était pas à proprement parler à Konohéen, et on misait sur sa tête, quelques petits billets. Benkei changerait-il plus le monde que le Haut Conseil ne le change déjà ?
[Iki] – Mais franchement, je m’en branle pas mal de Konoha. Alors mort ou vivant, c’est juste une bonne excuse pour prendre l’air quelques jours.
Parler ainsi du village devant l’Anbu n’était peut-être pas la meilleure chose à faire. Akogare était, nécessairement, quelqu’un de loyal et même s’il ne portait peut-être pas spécialement Konoha dans son cœur, il avait certainement trouvé quelques arguments communs à y rester. A être prêt à mourir pour lui. De toute façon, Iki s’en foutait. Il était là, au milieu des bois, et il pourrait se barrer, ou ne plus jamais revenir. Oh, pas maintenant, le Hyuuga lui mettrait la main dessus en moins de temps qu’il ne faudrait pour le dire. Et il lui ficherait une sacrée rouste. Mais le désir de partir, lui, restait stérile, muet, silencieux. Comme si la passion s’était envolée. La passion… voilà une notion qu’Iki oublia très vite. Il avait passé les grandes portes de Konoha, et la passion, elle, rage, haine, celle qui faisait toute sa puissance à Shimenu, oui, elle s’était rapidement essoufflée.
Si Iki avait voulu partir, il aurait pu le faire depuis longtemps. Les occasions n’avaient pas manqué, et ne manquerait certainement pas. Mais il se rattachait sans raison à sa petite vie monotone. L’idée de se lever le matin, de faire quelques recherches, de passer des heures à s’entraîner, à regarder d’un air neutre la poitrine de Yasu, puis celle d’Hizu se balancer devant ses yeux désintéressé, et puis fumer, tout cela l’avait pris à la gorge. Comme un lion prend à la gorge sa proie, et la regarde mourir, patient.
[Akogare] – J'aime cet esprit...
Iki l’observa quelques secondes. Mais chercher quel sens pouvait bien avoir cette phrase était inintéressant et stupide. Il tira sur sa clope et la laissa tomber à même le sol. Son pied l’écrasa.
Il écouta d’une oreille le discours d’Akogare et alluma une autre cigarette. Chez lui aussi la faim commençait à se faire terriblement sentir. Son estomac se contractait régulièrement, mais vide, seule la douleur le rassasiait.
La condition shinobi. C’était une bien étrange notion. Iki n’y avait jamais réellement réfléchi, il avait déjà assez de mal à prendre du recul par rapport à sa vie, rien qu’à lui. Sa petite vie de chuunin protégé, couvé. Et puis lâché en pâture aux loups quand le Haut Conseil avait besoin d’un mouton pour se faire bouffer. Un mouton qui revenait toujours au bercail, paradoxalement. Iki n’était pas déprime, enfin, il ne le pensait pas. Mais pouvait-on vraiment être heureux lorsqu’on a dans le crâne depuis son plus jeune âge que tuer, c’est une chose qui va arrivera, ce plus vite qu’on ne le croit ?
[Iki] – C’est stupide, ouais.
Il laissa un petit nuage de fumée les séparer.
[Iki] – Sûrement pour ça que je fume. Ma putain de nourrice – une grande dame avec un méchant masque blanc – m’a toujours demandé pourquoi je tenais tant à me pourrir la santé. Un léger sourire se dessina sur son visage. Je crois que si je meurs de cette connerie, je pourrais dire que j’aurais eu une belle vie.
Les arbres se raréfièrent. L’herbe verte disparut momentanément pour réapparaitre un peu plus haut, plus rêche, plus sèche et guère plus épaisse que la semelle de leurs chaussures. Le soleil frappait fort sur leur tête, même si la température avait nettement baissé depuis quelques heures. On aurait dit qu’ils se rapprochaient de lui à chaque pas qu’ils faisaient et qu’il les affublait de toute sa colère. Iki voyait toujours l’astre comme une vieille mégère colérique et sénile. Une salope qui ferait chier tout son quartier parce qu’on l’embêterait, ou parce que, simplement, ça lui plaisait. De faire chier tout son monde. Le chemin sous leurs pieds devint de plus en plus pentu, et le vent qui soufflait dans leurs oreilles ne les aidait pas particulièrement dans leur marche.
Pourtant, Iki ne cessait d’avancer ses pieds dans la plus grande des neutralités. Tous ses sens alertés mais la mine décomposée parla fatigue, par la flemme et par les médicaments qu’il avait ingurgité quelques heures auparavant, il montait tranquillement. On s’entraîne à soulever des montagnes, pensa-t-il. Alors leur marcher dessus…
Déjà, tout en bas, les arbres ressemblaient à de petits bouquets de fleurs qu’on avait collé les uns aux autres. L’immense masse verte s’éloignait d’eux et eux, ils montaient inlassablement vers le sommet du monde. Un sommet parmi tant d’autres.
Quelques pavés apparurent sous les pieds d’Iki qui s’était finalement placé en tête de la petite colonne qu’ils composaient à eux deux. Il leva les yeux. D’imposantes statues de pierre à l’effigie des grenouilles avaient été levées de part et d’autre d’un chemin plat. Tout au bout de l’allée, une porte noircie par l’ombre qui gisait en son sein les attendait là, sagement, patiemment. Comme un grosse bouche qui attend qu’on la nourrisse. Iki passa sa main le long de la pierre travaillée et sourit idiotement.
[Iki] - Alors c’est ça, l’art batracien ?
Son estomac gronda. Il replia ses doigts sur eux-mêmes et, violemment, frappa dans une jambe minutieusement polie d’une grenouille assise et sur le rebord d’un rocher. La pierre se craquela, mais Iki ne dit rien, malgré la douleur qui enflait son poing. Elle avait le mérite de faire tomber celle qui paralysait peu à peu tout son corps.
La faim.
[Iki] - BORDEL ! Il pointa un doigt rageur vers Akogare. Je te jure que dès que j’en croise une, je la bouffe !
[Akogare] – Elles sont tellement pleines de chakra que je ne te le conseille pas..
Juste une sourire.
Il tira généreusement sur sa cigarette dont le foyer rougit et soupira. S’énerver paraissait purement inutile, mais Iki se sentait déjà beaucoup mieux. Et puis, parfois, se laisser aller ne pouvait pas être mauvais : après tout, ce n’étaient que de vulgaires statues de pierres représentant un monde oublié, un monde caché. On monde qui pour beaucoup, n’existait même pas.
Iki n’avait pas peur du noir. Mais l’obscurité, mêlée à l’humidité et à la température glaciale n’arrangeait pas les choses. Le chemin ne montait plus, cependant il s’enfonçait au plus profond de la montagne, comme piquant son cœur. Dédaigneux, le chuunin s’empara d’une ancienne torche et clipa son zippo sur sa tenue de combat. La lumière se répandit à travers les dédales et les entoura d’une faible aura de chaleur. Quelque chose d’assez minuscule et d’assez inutile mais qui avait le mérite de les éclairer. Il tirait toujours généreusement sa cigarette, comme infinie et avançait sereinement. Ils parlaient finalement peu, mais dans ce genre de situation, Iki considérait que les mots étaient inutiles. Tout comme Akogare, leur expérience – celle de l’Anbu plus que la sienne très certainement – était à même de répondre à une bonne quantité de questions qu’un novice aurait déjà posé. Ils avaient simplement besoin de marcher, le reste était secondaire.
Quelque chose lui disait qu’il y aurait bien un moment où il faudrait qu’ils en viennent à utiliser les mots. Et que cet instant, Iki le trouverait particulièrement long, et chiant.
Ils déboulèrent sur une petite salle où quelques runes et écritures tapissaient la roche plus ou moins régulièrement. La langue était simplement incompréhensible et ne représentait d’aucune manière un intérêt pour leur mission. A moins que Benkei ne sache écrire en batracien et qu’il aurait laissé ici, soit une parole, soit la solution au problème que les deux shinobi découvraient devant. Il y avait trois tunnels. Le premier laissait passer un petit filet d’air qui ne les réchauffait pas guère et qui fit trembler la flemme un peu plus qu’à l’habitude. Le deuxième paraissait légèrement plus humide, et le bruit lointain d’une eau ruisselante venait jusqu’à leurs oreilles. Le troisième, et dernier, semblait légèrement moins sombre. Assez toutefois pour qu’ils ne puisse passer ni de leurs yeux, ni de la torche.
La cigarette s’éteignit rapidement au contact du sol, mouillé. Le chuunin l’écrasa nerveusement du pied. Un autre reflexe.
[Iki] – Laisse-moi deviner : ton Byakugan ne peut rien déceler n’est-ce pas ?
Il essaya, puis le désactiva.
[Akogare] - Je vois toujours les grenouilles, mais il est impossible de déterminer une trajectoire précise. Ou alors cela me prendrait plus d'une heure pour estimer un trajet et en cas de combat, mes réserves seraient trop sévèrement entamées...
Il avait dit cela sur un ton désespéré. Il n’en voulait pas particulièrement à Akogare, ni à quiconque d’autres qui n’auraient su leur dire avec assurance lequel des trois chemins était le bon – auquel cas il s’en aurait voulu lui-même. Il méprisait ce scénario, ce schéma, qui semblait évident, typique, comme un piège banal. L’espace d’un instant, il pria pour ne pas trouver ces fichues grenouilles. Pour elles, seulement pour elles…
[Iki] - L’eau mène toujours quelque part, le soucis étant de savoir où. L’air peut très vite être trompeur et la lumière…
Il alluma une cigarette et grimaça.
[Iki] - On se fait ça à Pierre-Feuille-Ciseaux, et on en parle plus ?
Akogare acquiesça d’un bref hochement de la tête.
[Iki] - Tu prends celui du milieu et moi celui de droite.
Leurs deux mains gauches se rangèrent derrière leur dos. Ils compètent brièvement jusqu’à trois. Iki mordillait nerveusement la filtre de sa cigarette et se jeta. Une feuille. Pourquoi avait-il sorti une feuille, il détestait Konoha.
[Iki] - Putain… J’ai encore perdu à ce jeu de merde. |
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| Sujet: Re: AK002 - Loin des Yeux... Sam 10 Oct - 21:22 | |
| Akogare comprenait mieux pourquoi personne ne venait ici. Ce n’était pas excessivement hospitalier.
L’ascension s’était passée sans mauvaise surprise et des signes subtils indiquaient que ce n’était certainement pas un endroit très fréquenté, même par les habitants du Mont Myoboku. A mesure qu’il gravissait la montagne, la forêt du Pays du Feu se transformait en une marée uniformément verte. Il leur fallut toutefois moins de temps pour arriver à ce qu’il convenait d’appeler le sommet du mont, même s’il continuait bien plus haut, que ne l’aurait imaginé de prime abord Akogare. Les statues grenouilles ne lui inspiraient pas grand-chose et l’écriture grenouille, un peu après, ne lui inspirait rien de plus.
Les informations qu’il avait collectait avant cette mission était fragmentaires. Il avait effectué quelques recherches sur Benkei, le genre d’homme qu’il était, d’où il venait, les manigances politiques autour de lui, mais il n’avait rien trouvé d’intéressant ou de révélateur. Il tenait cependant pour certain que Benkei avait été le dernier représentant… grenouille… à résider à Konoha. Après son départ, il n’y a plus eu personne pour venir recevoir une formation de shinobi. C’était cela qui avait incité Akogare à fouiller un peu plus profondément, car il n’était pas impossible qu’il se soit passé quelque chose d’un peu plus significatif qu’un choix de Kage.
Keira l’aurait forcément averti s’il y avait une tension politique avec les habitants du Mont Myoboku. Akogare avait acquis la certitude que la femme ne le mettrait jamais en position de danger de façon volontaire ou, pour dire les choses plus clairement, qu’elle ne tenterait jamais de le faire tuer en mission. Il l’avait suspecté longtemps de le désirer, mais après ce qu’il s’était passé contre Kanda, il était tout simplement impossible qu’elle puisse raisonner ainsi. Si les grenouilles étaient des ennemies de Konoha, cela aurait transpiré quelque part. Et s’ils étaient en situation de danger excessive, Keira l’aurait averti.
Le seul danger véritable, c’était probablement que les grenouilles seraient plus fidèles à Benkei qu’à Konoha et qu’ici, dans cette montagne, Konoha ne représentait rien de significatif. Ils étaient davantage des émissaires que des shinobi sur cette mission.
Les trois chemins qui se présentaient à eux se ressemblaient férocement, toutefois Akogare était sûr qu’un seul était le bon. Ce chemin, tout ce trajet, n’était pas celui des grenouilles. C’était celui des étrangers. De ceux qui n’étaient pas forcément les bienvenues. Les amis des grenouilles, ceux qui s’étaient attirés leurs faveurs - cette classe…. - savaient certainement quel chemin emprunter. Et les grenouilles devaient avoir d’autres moyens de voyager, plutôt que se taper cette pénible ascension. Il était donc très possible qu’au moins l’un de ses chemins mène soit dans une impasse, soit dans quelque chose de moins réjouissant encore. Ou alors, que deux des chemins soient en relation et s’enfoncent tous deux dans la montagne afin de les y perdre. Akogare activa son Byakugan et étudia rapidement les lieux. Il discernait toujours les grenouilles, plus haut et plus bas, mais il était impossible de déterminer une voie d’accès.
Ils se décidèrent pour un choix équitable et très logique et Akogare choisit les ciseaux, poussé par une quelconque envie de découper la feuille qui les avait mis au cœur de cette montagne, pour courir après quelqu’un qui ne désirait pas être retrouvé. Ils s’engagèrent ainsi dans le chemin du milieu, duquel on pouvait percevoir en tendant l’oreille le bruit caractéristique de l’eau qui s’écoule. Ils traversèrent des couloirs noirs, suintant d’humidité et d’une vague odeur de moisi. Akogare secoua la tête : l’écosystème des grenouilles, reproduit rien que pour eux. Rien n’indiquait qu’ils suivaient la bonne voie, si tant est qu’une bonne voie pouvait se dessiner à présent. Akogare comptait machinalement les minutes dans sa tête, ne préférant pas parler. Les couloirs creusés à même la montagne risquaient de porter sa voix trop loin et il lui semblait que cette mission ressemblait de plus en plus à de l’infiltration. Il était presque certain que les grenouilles savaient qu’ils étaient là, mais elles ne devaient pas savoir qui était ce « ils ». Elles n’ont jamais été connues pour être particulièrement hostiles, mais elles n’ont jamais apprécié les étrangers.
« Ci-gît Akogare Hyuuga, la légende de Konoha, tué par une grenouille ». Une très bonne conclusion à cette histoire nébuleuse !
Un signe toutefois ranima un peu d’optimisme dans le cœur d’Akogare : le bruit de l’eau s’intensifiait. Il s’agissait soit d’une source, soit d’un lac interne, mais rien n’indiquait qu’ils allaient déboucher sur un ciel ouvert. Avec une telle obscurité, de toute façon, il était difficile d’imaginer que le soleil pouvait encore briller quelque part. Ils débouchèrent finalement sur une surface lisse qui ne pouvait être autre chose qu’un lac, mais dans une obscurité similaire au couloir. C’était à peine si on voyait les doux remous de l’eau calme. On entendait en revanche très bien l’eau qui s’écoulait dans le lac, sur leur gauche.
Les shinobi s’approchèrent. Akogare activa son Byakugan pour s’assurer qu’ils étaient seuls, puis le désactiva aussitôt.
[Akogare] - On est pas beaucoup plus avancés…
Akogare s’accroupit au bord de l’eau, trempa un doigt et le porta à ses lèvres. L’eau était pure, même si l’image de grenouilles barbotant joyeusement dans la source lui arracha une petite grimace. Au moins pourraient-ils en boire s’ils venaient à découvrir une nouvelle multitude de couloirs, bien que cette perspective lui semblât improbable. Le Mont Myoboku n’était pas célèbre pour ses innombrables galeries, mais au contraire pour sa sobriété.
[Akogare] - Il y a de la lumière par là.
Akogare indiqua avec le doigt une partie du lac qui miroitait un peu plus. Il était toutefois délicat d’y attribuer une source, car le sommet de la caverne était uniforme et ne souffrait aucune cavité. Mais il était possible qu’une autre caverne s’enfonce ailleurs et que l’eau du lac s’y écoulerait. Autrement, ces galeries auraient été inondées depuis des années. Akogare et Iki longèrent le lac jusqu’à arriver de l’autre côté, et il était à présent évident que l’eau rejoignait une nouvelle caverne, plus large que les couloirs qu’ils avaient emprunté jusqu’à présent. Akogare chercha sans grand espoir un autre chemin avant de hausser les épaules.
[Akogare] - On dirait que c’est la seule issue. L’eau est glacée, forcément.
[Iki] - Forcément...
Il ne perdit pas davantage de temps et s’enfonça jusqu’à la taille dans l’eau. Cela survint beaucoup plus vite qu’il ne s’y attendait : ce lac était sensiblement plus profond qu’on pouvait l’imaginer. Peut-être les grenouilles avaient-elles percées consciemment une voie d’eau par ici pour la stocker de façon artificielle et profiter d’une excavation plus prononcée que les autres. Ses vêtements lui collaient à la peau et provoquaient une désagréable sensation de constriction que la très légère lumière ne parvenait à atténuer. Akogare nageait droit devant lui, évoluant au milieu de la caverne parfaitement droite. Il dégagea d’une main les cheveux qui lui gênaient la vue et jeta un œil au plafond, les sourcils légèrement froncés. Il poursuivit sur le même rythme, mais s’arrêta à nouveau une vingtaine de mètres plus loin, la tête levée.
[Akogare] - C’est problématique…
Il s’élança à nouveau et s’interrompit définitivement vingt nouveaux mètres plus loin, le bras accroché à ce qui aurait dû être le plafond. Il lança un coup d’œil à Iki, qui venait d’ailleurs de perdre toutes ses cigarettes.
La caverne s’enfonçait dans le mont, de sorte que le plafond n’en était plus vraiment un. Pour poursuivre, ils allaient devoir s’immerger complètement et il était très probable qu’ils ne puissent pas avoir assez d’air pour tenir la distance imposée par ces saloperies à la peau luisante. S’ils faisaient un essai non concluant, ils devraient s’assurer d’avoir les moyens de revenir avaler d’eau. Cela réduisait drastiquement leurs chances d’estimer la distance, et même avec le Byakugan il n’aboutirait à rien de précis et risquerait d’être trompé.
[Akogare] - Je vais faire un essai, peut-être que la galerie s’ouvre tout de suite après.
Il eut du mal à y mettre la moindre conviction. Il bloqua sa respiration, plongea et fila le plus rapidement possible en avant. Il fut à nouveau surpris de la qualité de l’eau qui malgré l’absence de lumière n’était pas sombre ou sale. Rien ne venait lui piquer les yeux et il arrivait, avec quelques difficultés, à voir les excroissances rocheuses avant de s’écraser contre elles. Il estima disposer d’encore un peu plus de la moitié d’air et poursuivit, dans l’espoir de voir une source lumineuse percer l’obscurité. Mais la caverne se poursuivait inlassablement, si bien qu’Akogare préféra jouer la prudence et battre en retraite. S’ils n’arrivaient pas à trouver une solution, il leur faudra alors plonger et aller jusqu’au bout de leurs réserves d’air, pour le meilleur ou pour le pire. Il ne savait pas exactement quelle distance il avait parcourue, mais elle était relativement importante. Si la caverne se poursuivait ainsi encore longtemps, il était humainement impossible de la traverser et cela devait signifier que ce n’était pas la bonne issue.
Akogare sentit son cœur s’emballer doucement quand il s’aperçut qu’il ne savait pas du tout où il était. Certes, il lui suffisait de foncer en avant sans réfléchir, mais était sur le point de recracher le peu d’air qui lui restait dans la bouche et ce n’était certainement pas un signe très encourageant. Finalement, il discerna très vaguement les jambes d’Iki et remonta rapidement.
Akogare perça la surface et inspira brutalement, s’essuyant les yeux d’une main et s’agrippant au plafond de l’autre. Dès que ses poumons l’autorisèrent à ouvrir la bouche pour autre chose qu’aspirer de l’air, il déclara.
[Akogare] - La caverne est très longue. Je suis allé aussi loin que j’ai pu, mais pas la moindre source de lumière ou variation de courant. Je crains qu’en y allant seulement ainsi nous ne parviendrons pas à nous ménager suffisamment d’air.
Il s’écarta sur le côté pour reposer son dos. Mentalement, il passait en revue les choix dont ils disposaient. Rien dans son répertoire ne lui permettait précisément de dépasser cette difficulté. Ils pouvaient certainement se créer une issue à même la roche, bien que cela serait peut-être un peu impoli par rapport aux habitants, mais le risque de se prendre un éboulement n’était pas du tout négligeable. Mourir écrasé dans l’eau n’était pas beaucoup mieux que mourir dans l’eau.
[Akogare] - Tu peux toujours essayer, pour repérer les lieux. |
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| Sujet: Re: AK002 - Loin des Yeux... Lun 12 Oct - 16:57 | |
| Iki bougonna quelques paroles inaudibles. L’eau était froide. Il la sentait s’infiltrer dans la moelle de ses vêtements. Elle atteignit sa peau plus vite qu’il ne l’aurait pensé. Il la maudit pour ça aussi. Dans ses lèvres, une dernière cigarette dégageait un bref nuage de fumée. L’odeur se dissipait rapidement dans l’enceinte du grand lac souterrain pourtant c’était comme si on lui en voulait. Sa main remonta avec amertume. Son paquet de clope avait pris l’eau, le capitaine n’avait pas pu sauver ses matelots. Il soupira et fit tomber la cendre à la surface d’un mouvement des lèvres. On ne touche pas un filtre avec des doigts mouillés. C’était une règle tellement basique.
Akogare avait très justement remarqué la fosse. Le reflet lumineux avait attiré son œil intéressé. Iki s’était assis sur la petite plage de galets gris, dégouté de ne trouver aucune porte de sortie. Ou de ne pas en trouver une qui le ramènerait sous la lumière du soleil les vêtements secs et son tabac intact. Il avait laissé le Hyuuga sondé les eaux le premier puis il l’avait suivi. Parce qu’il n’était pas qu’un connard. Et parce qu’il avait, lui aussi, envie de sortir des méandres du mont Myoboku. L’impatience n’est décidemment pas toujours une tare génétique. La petitesse des lieux, la pression sur leurs épaules – bien qu’il n’en ressentit aucune jusqu’à présent – et l’étroitesse de leur condition en aurait détourné plus d’un de l’objectif final. La consolation de ne pas tomber dans un profond ravin ou de ne pas avoir à faire demi-tour lors de leur précédente décision s’effritait un peu plus chaque minute. Bientôt il n’en resterait plus rien. Akogare ressortit, essoufflé. Il avait nagé, le bougre. Il avait nagé autant qu’il avait pu et sans nulle doute qu’il pouvait beaucoup.
Akogare ressortit et lui annonça la nouvelle. L’Anbu n’ironisait même plus, c’était peu dire. Ikl souffla une cheminée de fumée vers son partenaire. Il n’aimait pas qu’on tourne autour du pot : il n’était pas question de ne pas pouvoir ménager assez d’air. Il était question de crever. Noyé.
Un sourire apparut cependant sur le visage du lion. Il fut surpris de se détacher ainsi de la situation actuelle. Cela le rassurait et le terrorisait à la fois : il était bien lui-même, mais pour combien de temps ?
[Iki] – Euh, non. Je crois que je vais m’abstenir. Mais j’imagine très bien.
Iki se rafraichit la nuque. Sa main mouillée passa lentement dans ses cheveux, prenant bien soin de ne pas laisser couler quelques gouttes d’eau sur son visage. Il tira doucement sur sa clope. Le foyer s’illumina d’un rouge incandescent. Une luciole dans un océan d’obscurité.
[Iki] – Retournons sur la plage, je crois que je peux encore sauver quelques clopes.
Ses doigts se glissèrent entre chacune des lanières de son armure. D’un geste sec, Iki tira, le blouson tomba sur le sol dur. Posant sa cigarette bien en évidence sur un gros rocher, il s’ébroua, serein. Une petite barbe noire était apparue sur son menton et suivait les traits de son visage. Soupirant, il passa une main amère sur ses joues et se maudit de ne pas avoir un bon rasoir et un petit évier. Encore qu’un évier, il en avait un. C’était un gros évier sans bouche d’évacuation. Le chuunin reprit un air soucieux qui ne lui allait cependant pas à ravir. Il resta torse nu et s’assit sur un gros rocher aux pieds de la surface de l’eau. Ses genoux remontèrent jusqu’à son menton et ses bras les entourèrent. La cigarette revint se consumer entre son index et son majeur, avec la même régularité. Il n’y avait aucun courant d’air dans la caverne. Pas une brise, pas un souffle de vie. Iki le savait.
La fumée de sa cigarette filait droit vers le plafond noir du mont. C’était effrayant et si majestueux. Il essouffla sa cigarette et l’écrasa contre le sol.
[Iki] – Il y a peut-être un moyen de passer.
Iki ferma les yeux, silencieux, et inspira. Il n’aimait pas cette solution, mais avaient-ils réellement le choix ? S’ils ne s’étaient pas trompés de direction, s’ils cherchaient bien au bon endroit et s’il y avait encore une chance que le vieillard accepte la proposition du Haut Conseil, alors non, Iki n’avait pas le choix. Il se souvenait des paroles d’Okugane, de ses dizaines d’excuses. La logique, la raison, le juunin avait certainement tout usé pour s’accaparer la confiance de son sujet. Jusqu’au jour où il considéra que sa confiance ne l’intéressait pas et qu’elle n’était pas nécessaire. Ce jour-là, Iki sourit. « Papa Okugane n’aura pas d’enfant aujourd’hui ». C’était stérile. Et laid. Ne pas oublier de les utiliser en dernier recours. Tu es ma bête de foire personnelle, bonhomme. Les autres peuvent aller se faire foutre. Je t’envoie en mission pour tuer, pas pour faire joujou. Alors si tuer il s’avère nécessaire, eh bien…
Son estomac se souleva, Iki se pencha violemment en avant et ouvrit la bouche. Le silence sortit de sa gorge. Il ouvrit violemment ses yeux. Le visage qui peuplait son esprit ne l’effrayait pas ; il le dégoutait. Nerveux, il secoua sa tête de droite à gauche, comme pour terminer de se réveiller.
[Iki] – Okugane est un beau salaud… Il esquissa un râle et cracha. Il assumera ses conneries, héhéhé.
C’était un rire jaune, un rire cynique et sombre. Iki n’était pas particulièrement fier de lui non plus, mais à la différence du village, il ne pouvait changer ce qu’il était réellement. Konoha, si.
Son coéquipier n’était pas n’importe quel homme. Ce qu’il avait du voir, subir et faire subir durant toute sa vie était, quelque part, caché dans le ton de sa voix, dans le pétillant de ses yeux pâles. D’une manière ou d’une autre, on n’envoyait pas un filet troué pécher un gros poisson, aussi Iki ne comprenait pas nécessairement ce qu’il faisait là. Mais Akogare était un Anbu, et un héros. Iki ne croyait pas héros, mais dans l’esprit des gens, cela signifie assez pour qu’on y prête attention. Les faits restaient les faits, qu’elle qu’en soit la manière dont on les narre. L’expérience du Hyuuga le protégeait d’un grand nombre de surprises plus ou moins étonnantes et insolites que le monde provoquait à son égard. Cela ne changeait cependant pas un homme. Iki en était certain.
Le Namikaze allongea son bras droit. Ses muscles se soulevèrent et un crissement immonde et sourd traversa la grande caverne souterraine. Au niveau de son poignet, sa peau s’ouvrit subitement et une masse blanche, plate et fine en sortit. L’autre main du chuunin s’en empara et, comme sûr de ce qu’il entreprenait, tira. Iki grimaça. La douleur n’était pas intense, mais extrêmement désagréable. L’impression qu’on lui ouvrait le bras sous ses yeux était intenable. Il sentait l’organisme qui bougeait, qui criait, et criait encore mais qui, sous l’effet de l’anesthésiant, ne criait qu’un long râle sourd, ténu. Cette sensation était étouffante.
Une grande tige d’os blanc resta dans sa main. Fine de quelques centimètres, presque plate, et longue d’un peu moins d’un mètre, l’humérus avait été façonné à l’image d’une petite pagaie. C’était la première fois qu’Iki créait une arme aussi étrange. D’habitude, il se contentait simplement de tailler la pointe et de l’enfoncer dans la gorge de son adversaire, mais cette fois-ci son utilisation serait purement pratique. C’est ce qui était surprenant. Néanmoins, il n’aimait pas laisser trop d’âmes vivantes au courant de l’existence d’un tel fait. D’habitde, aucune ne survivait.
Mais Iki se demandait qui il pourrait bien tuer, avec une pagaie…
[Iki] – Tiens, prend ça, et attache-le le long de ton avant-bras. Si on ne peut pas respirer plus longtemps, on peut toujours essayer de nager plus vite.
Il lui avait lancé les deux lames d’os sans aucune gêne. Il se fichait de ce que pensait Akogare, même s’il imaginait parfaitement le sentiment de dégout qui l’animait. Ou la peur qui le prenait. Le dégout paraissait le plus crédible. Iki n’était pas sûr de la réussite de cette entreprise, les deux shinobi n’ayant aucune approximation de la distance à parcourir. Il leur suffirait de nager. Et quoi de mieux pour nager dans le monde des grenouilles que des membres de grenouilles eux-mêmes ? Ils ressemblaient un peu à ça. L’os était assez long pour qu’il dépasse de la main d’Akogare et que « l’assiette » lui permette de pousser un plus grand volume d’eau. A la seule force de leurs bras.
Ils lacèrent tous deux les os à leurs avant-bras à l’aide de lacets complémentés par une forte dose de chakra, afin que leurs « seconds » membres ne cèdent pas sous la pression. L’os, lui résisterait, c’était une certitude.
Iki remit son armure sur ses épaules, rangea son paquet de cigarettes dans une poche interne plus confortable et laissa Akogare plonger le premier. Il n’était pas réellement certain de pouvoir supporter son regard jusqu’au bout du couloir sous-marin. Ou jusqu’à ce qu’ils manquent d’oxygène, et qu’ils meurent. |
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| Sujet: Re: AK002 - Loin des Yeux... Mar 20 Oct - 23:27 | |
| Vous allez être surpris, avait dit Keira avec l’ombre d’un sourire.
Non je ne serais pas surpris. J’ai lu son dossier. Faire apparaître des os, ce n’est pas vraiment exceptionnel. Inhabituel, sans aucun doute. Mais il avait vu suffisamment de choses inhabituelles pour ne plus être « surpris ». Quand on a été pratiquement tenu en échec par une petite fille d’un peu moins de six ans - qui courait très vite et qui frappait très fort et dont le contact s’avérait explosif - on finit par se dire que tout est possible.
Vous allez être surpris. Elle avait souri totalement cette fois-ci et si cela lui arrivait plus souvent qu’on voulait bien le croire, elle affichait un sourire amusé. Akogare s’était contenté de plisser les yeux et de s’incliner brièvement pour prendre congé. Il n’aimait pas l’humour de Keira. Il aimait bien rire, mais ce qu’il avait dans les mains ne le lui permettait pas.
Akogare était surpris. Il tournait les os entre ses doigts, les observant sous toutes les coutures. Contrairement à ce qu’il avait imaginé au moment de s’en saisir, ils n’étaient absolument pas poisseux. En réalité, il aurait aussi bien pu les ramasser dans la caverne à l’instant. Il frappa l’air avec le premier et les heurta l’un contre l’autre pour estimer leur solidité. Intéressant. Il n’imaginait pas exactement l’utilité de la chose une fois sous l’eau, les efforts à déployer seraient prodigieux pour que la… palme… puisse avoir une utilité. Si les os ne faisaient que dépasser de sa paume, les mouvements qu’il ferait seraient approximativement les mêmes et la quantité d’effort égale. Mais il gagnerait quelques dizaines de centimètres à chaque impulsion et cela était certainement ce qui avait le plus de chance de les sauver.
[Akogare] - Merci...
Akogare ne s’engagea pas immédiatement dans l’eau. Ils n’étaient pas trop pressés. Il avait forcément envie de revoir le soleil et de joyeuses grenouilles multicolores, mais au cours de ses missions il avait appris à ne jamais hâter ce qui pouvait être un élan mortel. Il faut en savourer chaque seconde. Il fixa solidement les os sous ses bras et testa l’assemblage mais ses mouvements étaient gênés. Son corps protestait et l’os s’enfonçait méchamment sous son aisselle. Akogare retira les os et délivra à chacun d’entre eux un coup précis et net du tranchant de la main. Un halo bleu et pâle l’entourait. Il y eut une résistance, supérieure à ce qu’il aurait imaginé, mais sa main traversa l’os dont le morceau superflu tomba à terre. Il jeta un coup d’œil à Iki pour voir s’il prenait ombrage du traitement qu’il faisait de ce qui avait été un morceau de lui, quand même, mais visiblement il n’y prêtait pas une attention forcenée.
Akogare s’attacha à nouveau les os et fut satisfait de voir que l’amplitude de ses bras était intacte. Les palmes dépassaient de sa main et formaient ce qui pouvait ressembler de loin à une protubérance anormale. Les liens, renforcés en chakra, ne devraient pas lui faire faux bond. Un moment d’inattention et il perdrait de précieuses secondes.
Il s’engagea sans un mot dans l’eau et ils nagèrent un moment jusqu’à atteindre le même point que précédemment. Akogare n’était pas très enthousiaste à l’idée de replonger sous l’eau, surtout si cela devait être la dernière chose qu’il devait faire. C’était tout de même stupide d’avoir combattu et vaincu des dizaines et des dizaines d’adversaires redoutables pour finir noyé sous la montagne des grenouilles. Mais comme souvent dans ces cas-là, le Hyuuga se refusa de s’attarder sur ce point, retint son air et plongea brusquement.
Il n’arrivait pas à estimer exactement la distance gagnée grâce aux effets des palmes même si elle devait exister. Il commençait à douter de l’efficacité de la stratégie mais il était trop tard pour y réfléchir, aussi donna-t-il plus de force à ses mouvements. Ils atteignirent le point où il s’était arrêté plus tôt et Akogare fut quelque peu rassuré en estimant ses réserves d’air à quelques degrés supérieurs à ce qu’il pouvait avoir lors de sa tentative précédente. Il poussa davantage, guettant le moindre signe qui puisse lui indiquer l’ombre d’une sortie. Mais la galerie sous-marine se poursuivait sans jamais s’ouvrir sur autre chose que des pics bruns et des ombres trompeuses. Par prudence, Akogare activa son Byakugan. Cela ne puiserait pas dans ses réserves d’air, ne lui demanderait pas d’efforts et aurait l’avantage de lui indiquer toute source de vie alentour.
Il n’y avait rien à proximité immédiate, même s’il percevait des ombres bleues un peu partout au-dessus et au-dessous de lui. Il le désactiva et poussa un peu plus sur ses bras. Il n’avait jamais particulièrement aimé le contact de l’eau. Ou plutôt, la sensation d’être immergé. Ce n’était pas quelque chose qui le grisait, les sensations altérées, ne plus voir clairement, ne plus avoir d’odorat, entendre des sons transformés et indistincts ; il n’aimait rien de cela. Pour lui, l’eau s’arrêter à la douche, même pas le bain. Et dans la mesure du possible, une douche avec Sayuri pour joindre l’utile à l’agréable. Mais là, il fallait vraiment creuser pour discerner une Sayuri quelque part dans cette galerie terne et grise.
Akogare aimait en revanche son corps qui, malgré les errements de son esprit, poursuivait ses efforts au rythme exact où il l’avait laissé. Il relâcha toutefois un peu d’air et estima ses réserves à moins de dix pourcents. Il résista à la tentation de jeter un œil par-dessus son épaule pour voir si son compagnon le suivait toujours, jugeant que cela le ralentirait au final de plusieurs secondes cumulées, et utilisa du chakra le long de ses bras pour brasser l’eau avec encore plus de puissance. Il n’allait certainement pas mourir ici, avec des os qui ne lui appartenaient pas accrochés sur les bras et la noyade était une mort qu’il redoutait un peu plus que les autres. Il avisa une mince inclinaison de la caverne vers le haut et les battements de son cœur s’accélérèrent légèrement. Si la logique ne le défiait pas, et si l’aspect se prolongeait, la fin du calvaire était pour bientôt. Une lueur plus lumineuse que ce qu’il avait pu voir jusqu’à présent ne le détrompa pas et la galerie s’incurva plutôt brutalement vers le haut. Akogare relâcha une importante quantité de bulles et s’empêcha d’ouvrir la bouche. Il enfonça l’os dans un revêtement de la roche et tira avec force pour se propulser en hauteur. Il réitéra l’opération plusieurs fois, observant la galerie s’élargir mais sans jamais se décider à se terminer pour de bon, mais le soleil les fit enfin plisser les yeux. Akogare jaillit hors de l’eau, avala une importante quantité d’air, posa les mains sur le rebord herbeux de la galerie et se hissa définitivement hors de cette galère. Avant de se laisser aller dans l’herbe, il jeta un regard circulaire autour de lui mais ne détecta la présence d’aucun nuisible, puis observa le trou en attendant que son coéquipier apparaisse à son tour. S’il fallait aller le chercher avant que son cerveau ne se noie, c’était mauvais pour lui parce que dans l’état actuel Akogare peinerait à faire plus de trente mètres.
Heureusement Iki émergea et Akogare tomba dans l’herbe moelleuse, les yeux fixés sur le ciel et les… nuages. Il y avait une espèce de brouillard, ici, qui sans être réellement opaque avait cette humidité caractéristique des hauteurs. Akogare retira les os d’une main lasse et les laissa par terre. Pour une raison ou pour une autre, ils avaient eu la chance de ne pas avoir droit à un comité d'accueil crapoteux...
... Akogare sourit bêtement. |
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| Sujet: Re: AK002 - Loin des Yeux... Mar 27 Oct - 23:40 | |
| Iki ne savait pas vraiment comment il devait prendre pour lui ce « merci » quelque peu dubitatif d’Akogare. Consciemment, il s’en fichait. Inconsciemment, la réponse à cette question était on ne peut plus primordiale quant à la suite des évènements. Le chuunin avait toujours pris la réaction de ses partenaires avec plus ou moins de dédain même s’il lui arrivait rarement de faire acte de ce don que lui avait légué la nature – ou cet enculé qui avait mis sa mère sur sa couche et qui avait jeté dans son vagin ses saloperies génétiques. En fait, il n’avait du utilisé ses os qu’à deux ou trois occasions et toujours avec les mêmes personnes. C’était ça, le plan d’Okugane. Jisuga et Hizu étaient les dépositaires de sa confiance, les dépositaires de leur confiance à eux. De leur survie. Etrangement, il sourit. C’était la première fois qu’il usait de ce que son corps était capable de faire si rapidement et pour un objectif si … comique. Haussant les sourcils, il balaya cette idée de ses pensées et continua plutôt de nager.
Iki avait un avantage sur son partenaire : il pouvait faire ce qu’il voulait de son corps, aussi n’eut-il pas besoin d’extraire totalement les os et de les désolidariser de son squelette initial. Il avait simplement plié sa main vers le bas et laissé pousser un appendice à l’os de son bras, au dessus de son poignet, créant une grande palme qui couvrait les interstices entre ses doigts et augmentait ainsi la superficie de ses deux mains. Comme une grenouille, mais ça n’avait rien de drôle. Il ne risquait ainsi aucune cassure – Akogare non plus à vrai dire, mais, ne sait-on jamais, depuis combien de temps n’avait-il pas utilisé cette combinaison organique et chakratique ? Trop longtemps pour qu’il soit sûr et certain de la bonne composition des armes qu’il avait fourni à l’Anbu, ce qui, en soi, était bien plus amusant que l’image des grosses grenouilles qu’ils imitaient – aucune rupture. Et de toute manière, quoi qu’il arrive il serait toujours à même d’en fabriquer, et d’en fabriquer encore.
L’idée que ses os ne lui servent pas à tuer mais à survivre l’intrigua. Il regarda sa main et décida de ne pas comprendre ce que cela pouvait signifier. Une chose était sûre cependant : c’était la première fois qu’il n’enfonçait pas ses poings dans la chaire. Mais dans l’eau.
Ils plongèrent. Akogare passa naturellement devant. Iki haussa les épaules : comptait-il sur son soutient s’il venait à peiner ? C’était absurde, Iki ne laisserait pas sa vie pour celle d’un autre. Quoi que, c’était ainsi que fonctionnait un partenariat, à son sens. A moins que l’objectif initial ne soit de retrouver Benkei. Auquel cas ce n’était une sécurité : si l’un d’eux venait à mourir … L’autre finirait tranquillement le travail. Oui, c’était plus juste et plus drôle à la fois. Un toussotement rompit le silence. La cigarette, il ne pensait pas qu’elle le tuerait, du moins, bien après Konoha. Il fallait peut-être croire que non …
Ses poumons se gonflèrent jusqu’à ne plus pouvoir grossir plus, sinon en déchirant ses limites – ce qui serait parfaitement inutile, se permit-il de juger. Iki sourit intérieurement, son ventre était très gros, très large, très rempli d’air. Très rassurant, en réalité. Il fit une moue dubitative et plongea.
Retenir sa respiration était un entraînement intéressant. Extrêmement effrayant mais intéressant. Iki nageait aussi rapidement qu’il pouvait – et il pouvait beaucoup, à vrai dire. Les pieds d’Akogare battaient l’eau avec une régularité saisissante et provoquaient un petit courant juste derrière lui si bien qu’Iki décida de se décaler légèrement sur le côté afin de profiter de ce courant dans son autre dimension : là où quelqu’un pousse, un autre tire, c’était une loi de la physique. Une loi simplement bête, mais une loi tout de même. Iki se demandait encore comment il put en arriver à une telle conclusion, lui qui n’avait jamais étudié ni la physique, ni la natation, néanmoins il n’était pas difficile de constater que lorsqu’il y a une probabilité non nulle que son corps finisse gonflé d’eau, moisi de l’intérieur et la peau bleu, dans le fond d’une cuvette empêtrée sous l’épaisse montagne des batraciens, que lorsqu’il y a une probabilité non nulle de se noyer sans que personne ne vienne à, ne serait-ce que penser à chercher son corps, la réalité et la vérité se mêlent dans une évidence à la fois concrète et étrangement compréhensible. Iki ne chercha pas plus et profita des sensations que captaient son âme par le biais de son corps au contact de l’eau ; et de la mort.
Le tunnel se resserrer autour d’eux, à moins que ce ne soit un mirage provoqué par sa longueur et par le temps qu’ils passaient à l’intérieur. Quelques bulles s’échappèrent de ses narines sans qu’il ne pu les retenir. Iki sentait ses muscles se crisper, son cœur battre de plus en plus intensément comme s’il avait trop de sang à recevoir, à laver puis à redistribuer dans toutes les parties de son corps. Paradoxalement, c’était l’inverse. Et à mesure que le sang circulait dans tout son organisme avec le même oxygène peu à peu sali à mesure qu’il réapprovisionnait ses organes et les réapprovisionnait encore et encore, son cœur pompait de plus grandes doses de sang. Iki imaginait cela comme une bonne vieille machine à laver dont le circuit d’eau serait fermé : à mesure que l’eau est de plus en plus sale, la pompe aspirait plus d’eau afin d’en retirer la même quantité de savon. Et une dose de crasse toujours plus impressionnante.
Finalement Iki arriva au bout de leur petite balade aqueuse sans avoir eu la sensation de ne manquer de rien. Il s’était naturellement reclus au plus profond de lui-même et avait laissé son corps nager avec la même régularité, la même cadence, comme une vulgaire machine dont on constaterait les dégâts une fois l’effort nécessaire fourni.
Il accueillit la lumière avec un soulagement inattendu toutefois. Alors qu’ils nageaient presque verticalement, les deux shinobi remarquèrent sans grand mal que l’eau auparavant presque noire, d’un bleu profond et opaque, se muait dans un azur vitreux. Le cercle blanc juste au dessus d’eau grossissait à vue d’œil mais ne semblait ne jamais vouloir arriver jusqu’à eux. Iki tendait ses bras vers l’avant dans l’espoir de percer la surface, puis les rabattait sous ses côtes lorsqu’il se rendait enfin compte que ce ne serait pas pour ce mouvement-là. Et il tendait ses bras à nouveau avec la même attente, et les rabattait alors, dans l’espoir que le prochain soit le bon. Lorsqu’enfin sa peau rencontra le contact de l’air chaud, à la différence de l’eau qui glaça leur corps – de la peau jusqu’à la moelle - durant de longues minutes, Iki ne pensait plus y arriver. Ses bras répétaient toujours le même mouvement comme un automatisme mais sa tête, elle, avait perdue tout espoir d’entrevoir, là-haut, l’espoir d’une quelconque issue.
Iki gonfla si férocement ses poumons d’air qu’il échappa un petit cri de douleur. Le manque d’air ne l’avait pas tant affligé que sa motivation – qui avait fondue comme un glaçon dans un océan de sable et de soleil à chaque poussée – néanmoins le contrecoup physique fut sec et rude. Tous les muscles de son corps se détendirent d’un coup, expulsant tout l’air qu’ils y avaient emmagasiné en prévision de l’effort qu’il leur faudrait fournir dans un futur très proche. Son cœur s’emballa devant l’afflux conséquent d’oxygène, comme surpassé par l’évènement et comme s’il avait fait coutume de ce manque cruel d’air. Ses vaisseaux sanguins et ses artères se gonflèrent dangereusement si bien qu’il put sentir son pouls rien qu’en fermant les yeux et en écoutant son cerveau frapper avec insistance le long de son paroi crânienne. Il s’éjecta de l’eau et se mit à quatre patte sur l’herbe haute. Il laissa l’eau d’abord tomber en trombe sur le sol puis, peu à peu, s’écouler le long de ses membres pour terminer par s’égoutter des plis de son manteau. Lentement, toujours à quatre pattes, reniflant et hâlant avec difficulté, il sortir son paquet de cigarettes imbibé d’eau et le posa délicatement sur l’herbe, face au soleil. Il cracha et soupira, un léger sourire satisfait et amusé sur son visage.
« On s’est bien fait baisé, tiens. Baisés par des grenouilles, putain ». Il dit cela tout bas, de sorte que ce ne fut qu’un chuchotement qui se perdit dans son souffle bruyant.
Sans même y faire attention, il imita Akogare et s’allongea sur le dos, laissant ses yeux se perdre dans l’immensité du ciel et des quelques nuages de cotons qui le peuplaient. Quelque part, Iki était déçu : à part la température, c’était le même bleu, le même blanc, la même herbe et le même air qu’en bas. Le mont ne tenait pas ses promesses. Mais il n’en attendait pas réellement plus de sa part. Il sourit.
Lentement, ses os se rétractèrent et sa peau se ferma presque immédiatement, comme si on la guérissait de ses blessures en même temps. Ils restèrent là, allongés, durant quelques minutes sans rien dire. Ou, pour être plus précis, communiquant par le son de leur respiration qui peu à peu reprenait sa finesse habituelle.
[Iki]- C’est dingue comment on peut envoyer chier des dizaines de mecs tous plus puissants les uns que les autres et se faire mal contre des putains de grenou …
Il ne finit pas sa phrase et ne s’en voulut pas. Akogare l’avait très certainement terminée pour lui et, peut-être même, l’approuvait-il lui-même. Toutefois Iki s’était retenu. Son regard avait dévié sur une ombre qui, immobile, s’était confondue dans le décor mais qui en fait n’avait rien de vraiment naturelle. Elle l’avait d’abord intrigué mais puisqu’elle n’avait fait aucun mouvement durant plusieurs minutes, il ne s’était pas plus inquiété que nécessaire. C'est-à-dire qu’il l’avait très vite effacé de sa mémoire. Mais dans son tour rapide du décor, il reconnut l’éclat du soleil sur sa surface.
Certains affirment que la grenouille est un met délicieux. A bien y regarder, Iki la trouvait plutôt détestable.
Il pointa un doigt vainqueur et son sourire s’étira.
[Iki] – Il est temps de partir, je crois qu’on a trouvé notre déjeuner.
Il se leva difficilement et remit doucement ses cigarettes encore humides dans sa petite poche pectorale. Il se tourna finalement vers le batracien qui les épiait sans rien dire, sans rien faire sinon cligner de temps à autres de ses immenses paupières. Iki ouvrit la bouche mais la referma tout de suite après.
Une question lui vint à l’esprit : c’était con mais, qu’est-ce qu’on pouvait bien dire à une grenouille ? |
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| Sujet: Re: AK002 - Loin des Yeux... Lun 2 Nov - 18:25 | |
| Au sortir de l’eau, Iki présentait un tel visage qu’Akogare se demanda s’il n’allait pas faire une crise cardiaque sous ses yeux. Le Hyuuga observait tour à tour son visage rougi et les cigarette qu’il devinait rangées, en se disant que c’était tout de même bête d’avoir survécu au tunnel et de mourir à la sortie, sans même pouvoir en fumer une. Vu la tête qu’elles devaient avoir de toutes façons, avec un goût de flotte et de tabac humide… Mais non, son coéquipier devait avoir une constitution plus solide que cela et c’était très rassurant.
Toute cette aventure batracienne, Akogare ne pouvait l’empêcher de la trouver amusante. Il ne perdait bien sûr pas de vue que l’objectif de la mission était de la toute première importance pour Konoha et que son succès pouvait réellement redéfinir en profondeur les rapports de force. Un Hokage à Konoha, une première depuis des années. Il y aurait tellement à faire pour lui… Car si le village s’était forcément relevé bon gré, mal gré de la gestion catastrophique de Kuronishi, Keira avait toujours été plus ou moins limitée et entravée par sa fonction même de chef du Haut Conseil. Impossible de faire des réformes profondes sans socle solide sur lequel s’appuyait et si la femme, grâce à son charisme et à sa poigne, n’avait plus besoin de se faire respecter de qui que ce soit, elle possédait l’intelligence politique de savoir quand agir, et quand attendre.
Et Konoha avait attendu longtemps. Benkei, qu’il le veuille ou non, représentait cette attente. Personne à Konoha ne s’attendait à retrouver un Hokage. Bien sûr, la rumeur de cette mission avait filé. La prétendue légende de Konoha (un titre par ailleurs faux et sorti de son contexte, car Akogare n’était pas la seule de ces légendes, tout le groupe qui avait survécu était pareillement traité - seulement, c’était lui le chef et celui qui s’était battu en combat presque singulier contre Kanda Shiuuku et lui qui l’avait, toujours prétendument, vaincu), partie avec un Chuunin inconnu chercher un homme à la stature suffisante pour endosser le rôle de Hokage : Benkei Orochi. Dans le genre vendeur, ça se pose là…
Mais malgré cette charge, cette mission lui changeait les idées. Quoi, plus de Sayuri, avec tous les problèmes que cela engendrait : des problèmes qui devraient être réglés tôt ou tard, d’une façon ou d’une autre et, si possible, de la meilleure des façons. Mais il n’avait pas le temps de s’embrouiller avec ça, pas le temps de réfléchir à ses échecs successifs contre Kanda et lors de l’attaque d’Asahi ; il n’y avait plus que le présent et personne autour de lui pour lui rappeler ce passé. L’absence de Ten avait peut-être cela de positif, même si… l’instantanéité… qu’il ressentait avec elle lui manquait toujours. Mais il n’y avait qu’Iki, avec ses problèmes qui n’étaient pas les siens, ses os qui sortaient de sa peau et son propre passé qui, comme souvent, le poursuivait de son côté. Et peut-être, aussi, pour une fois sa mission n’était pas de tuer quelqu’un. Il ne portait pas de masque, il n’était pas ancré dans cette curieuse et fascinante logique de mort qui le prend quand il s’apprête à partir en tant qu’Oi-nin du Village Caché de la Feuille. Peut-être au final devront-ils tuer Benkei, peut-être était-il un traître, un intriguant, un salopard à qui ils essaieraient de faire la peau. Mais ce sera à la fin. Pendant le déroulement, actuellement, Akogare envisageait cette mission comme une enquête et de la diplomatie : trouver Benkei, le faire rentrer à Konoha. L’assassinat, ce n’était qu’un accessoire du travail, une option possible et vraisemblable, mais pas la première pour autant.
Et Akogare savait que s’il devait le tuer, il n’hésiterait pas un centième de seconde… parce que ça faisait partie du travail et que cela lui était devenu un peu trop naturel.
En revanche, il n’était pas totalement sûr que l’épisode du tunnel soit moins dangereux qu’affronter un tueur professionnel. Après tout, si on peut toujours s’arranger pour forcer un peu sur son corps afin de prendre l’avantage sur un adversaire, difficile de demander à ses poumons d’engranger plus d’air et de ne pas se noyer. Akogare se redressa et dévisagea la grenouille indiquée par Iki. Elle les observait en clignant des yeux de temps à autre mais sans le moindre autre mouvement. Akogare se demanda s’il s’agissait d’une grenouille douée de parole, un Kuchiyose en somme, ou d’une grenouille, eh bien, normale. Elle était rouge et pas beaucoup plus grande qu’une grenouille normale, d’ailleurs, alors qu’il s’était imaginé ces créatures plus impressionnantes, même pour les spécimens les plus petits.
Il pouvait toujours vérifier qu’elle dispose de chakra en elle, mais cette faculté à toujours avoir la réponse avant même de lire l’énigme était lassante.
[Akogare] - Bonjour.
La grenouille ne répondit pas, mais se tourna vers lui. Peut-être. Elle croassa au bout d’un moment, mais n’ajouta rien - pas même un autre croassement. Très décevant, ces batraciens. Se coltiner une montagne telle que celle-ci pour un résultat aussi médiocre, c’était tout de même un peu blasant.
[Iki] - Salut ma belle, tu pourrais nous mener à ton papa ?
La grenouille se tourna alors vers Iki - plus nettement, du point de vue d’Akogare - et croassa à nouveau. Elle porta toutefois la main à sa bouche et toussota.
Grenouille - Eh. Excusez-moi. Je me remettais de ma surprise. Il faut dire que voir des humains utiliser cette voie privilégiée par les grenouilles et ne pas utiliser le chemin en pierre est assez étonnant en soit. Je suis satisfaite que vous soyez sauf, vos corps auraient empuanti toute la montagne! Sans compter vos os, qui sortent et rentrent à leur guise, j'analysais. Admettez qu'il y avait de quoi se poser des questions… Que voulez-vous ?
Akogare résista à la tentation d’écarquiller les yeux et conserva le visage impassible du gars qui sait toujours ce qui va se passer. Mais une telle logorrhée après cette déception, c’était pour le moins inattendu. Elle parlait bien, sans arrière son de croassement, sans accent, pensa Akogare.
Akogare résista même à la tentation de lui dire que non, il n’y avait pas eu d’autres chemins et que de toutes façons, c’était très mal indiqué. Enfin, si les os étaient un secret pour Iki, à présent une grenouille rouge le connaissait. Voilà qui devait considérablement nuancer la perspective du jeune homme sur l’importance de son secret.
[Iki] - Nous sommes des shinobi de Konoha. Nous avons pénétré le mont Myoboku dans l'espoir de rencontrer quelqu'un qui serait à même de répondre à quelques questions plus ou moins importantes. Est-ce que vous pourriez nous y mener ?
Grenouille - Plus, ou moins importante ? Ce n'est pas la même personne.
Akogare et Iki répondirent d’une même voix.
[Akogare] - Plus.
[Iki] - Grave plus.
Grenouille - Ah! J'espère que vous n'êtes pas venus faire des bêtises. Ce serait très imprudent. Ne me regardez pas comme ça, vous n'êtes pas en train de vous faire menacer par une grenouille de vingt centimètres... Je vous avertis juste. Suivez-moi, ninjas de Konoha, nous ne sommes pas loin.
Encore heureux… Si cette petite bête était capable de leur tenir tête… Akogare demandait une permission de quelques années à l’étranger, histoire d’oublier cette humiliation de trop. Ils emboîtèrent le pas à une grenouille plus rapide qu’elle ne le laissait présager, avec de petits bonds habiles. Ils voyaient la montagne défiler autour d’eux et de fréquents nuages traversaient leur champ de vision. Akogare n’avait pas la sensation d’être aussi haut, pourtant. Un lac à cette hauteur l’interrogeait mais au final, ce n’était pas exactement le plus important. Iki avait retrouvé ses cigarettes et ils marchaient en silence, pendant plus de temps que ce que la grenouille avait annoncé. Peut-être que l’écoulement du temps n’était pas le même pour elle…
Ils finirent par croiser quelques autres grenouilles dans ce qui ressemblait à des salles, ornées de piliers ou de statues de grenouilles. Elles les observaient en silence, ou tout en discutant entre elles, sans véritablement s’interrompre. Akogare découvrait des grenouilles plus grandes que celle qu’ils suivaient, dont au moins deux proprement gigantesques qui leur jetèrent difficilement un regard. Il n’avait pas besoin de son Byakugan pour deviner le chakra crépiter en elles et, il l’admettait, il y avait une puissance certaine en elle. La pensée bizarre de combattre l’une de ces créatures émergea dans son esprit. Est-ce qu’il pouvait gagner contre quelque chose qui n’était pas réellement humain ? Probablement que oui. A partir du moment où elle dépendait de son chakra, il pouvait l’exploser de l’intérieur et en laisser un petit tas de chairs sanguinolentes. Mais il n’était pas très pressé de recevoir un coup de pattes, même palmée, ou de ce katana aussi large qu’un enfant.
Ils finirent par déboucher dans une salle similaire aux autres, mais une seule grenouille était présente. Jaune, à peine plus petite qu’Akogare, elle les dévisageait alors qu’ils approchaient. Elle rajusta ses lunettes lorsqu’ils s’arrêtèrent et la petite grenouille rouge sauta sur une dalle surélevée.
Grenouille - Fuji, des invités de Konoha. Ils sont venus pour un sujet important.
Le grenouille ne répondit pas mais ne les quitta pas du regard.
[Akogare] - Bonjour. Je suis Akogare Hyuuga, et voici Iki Namikaze. Nous sommes ici pour vous entretenir de Benkei Orochi, originaire de cette montagne et shinobi de Konoha. |
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| Sujet: Re: AK002 - Loin des Yeux... Sam 7 Nov - 19:02 | |
| Iki tapota avec un acharnement qu’il voulait des plus discrets dans le fond de son paquet de cigarette. Il en ouvrit le rabat et jeta un œil désespéré à l’intérieur. Les feuilles encore humides collaient mollement au carton et l’empêchait d’en retirer une sans arracher les autres. Il ronchonna et releva subitement la tête lorsqu’il se rendit compte qu’il n’était toujours pas seul, mais bien entouré d’une communauté de grenouilles, toutes différentes. Celle qui les avait conduits jusque dans la salle s’était rapidement reculée pour finalement disparaitre de leur champ de vision. Dommage, hormis sa petite taille et ses membres palmés, elle était plutôt mignonne. Iki renifla et posa son regard sur celui qui s’était fait appelé Fuji. Le batracien arborait une peau de couleur jaune et de petites lunettes posées sur son nez, dont Iki n’arrivait pas à saisir l’utilité vu la taille de ses yeux globuleux. Il émanait de Fuji une aura bien plus intéressante que chez les autres grenouilles. Un peu de sagesse, beaucoup de vieillesse, comme si le temps n’avait pas de prises sur-lui – peut-être n’en a-t-il sur aucun des autres batraciens – et surtout, sa grande taille – presque celle d’un homme adulte – le haussait parmi toutes les autres. Une autre grenouille à la peau rouge se tenait à côté de lui et fixait droit devant lui sans jamais trembler.
Fuji se pencha du regard sur Akogare et Iki et les scruta durant quelques instants. Un soupire s’échappa de sa bouche. Comme fatigué, il répondit lentement au Hyuuga.
[Fuji] – Il n’est plus là.
Ses yeux se projetèrent par la porte vers laquelle les deux shinobi étaient passés, puis il reprit.
[Fuji] - Après son départ de votre village, il n’a fait que passer ici. Deux, trois mois. Puis … parti.
Iki lâcha un fin sourire presque provocateur mais l’éteint presque immédiatement.
[Iki] - Mince. C'est plutôt dommage.
Il jeta un regard à la fois interrogateur et blasé à Akogare. Évidement, cela ne pouvait pas être aussi simple. Néanmoins, ils n’avaient pas bravé les limites de leur organisme pour s’arrêter si près du but. Même si du but, ils n’y étaient peut-être pas encore arrivé.
[Iki] - Il ne vous aurait pas prévenu d'une quelconque destination ? Vous n'auriez pas une idée d'un lieu qu'il apprécie particulièrement où nous pourrions le trouver ?
Les pupilles du crapaud s’illuminèrent. Etrangement, Iki eut la sensation que Fuji savait qu’ils en viendraient ici, qu’il maîtrisait parfaitement ses deux grandes paluches humaines et que d’une manière comme une autre, il irait jusqu’au bout des choses.
[Fuji] - Je n'ai pas dit que je souhaitais vous aider.
Akogare s’engouffra dans la brèche.
[Akogare] - Nous ne souhaitons pas le retrouver pour le tuer, et crois-moi père crapaud, on aurait les moyens de le faire. Si Benkei vous a quitté en même temps que nous, il a un problème et s'il a un problème, nous allons le régler. Où est-il ?
Fuji plissa ses grands yeux. L’âge, l’expérience, la sagesse et l’intelligence qu’il semblait avoir pour lui, l’aidaient grandement. Et c’était presque logiquement que la grenouille déclinait dans sa tête toutes les étapes de la diplomatie, tous ses visages et toutes ses manières de frapper dans l’estomac de son opposant. Iki n’avait pas eu véritablement l’occasion de réfléchir à la manière dont ils agiraient tous deux. Il ne savait pas s’il devait rester en retrait – après tout, il n’était que chuunin – ou s’il pouvait prendre la parole pour lui. Akogare n’avait donné aucune consigne et comme à chaque fois depuis le début de leur voyage, les deux hommes s’écoutaient et choisissaient en conséquence leurs agissements. Toutefois, Iki savait pertinemment bien qu’il ne pourrait s’occuper de Fuji comme il s’occupait d’Okugane. Comme il s’occupait de sa vie. Il n’y avait pas réellement pensé, mais il n’avait rien d’un diplomate. C’était un lion, à moitié façonné encore, et pour le moment il ne savait que frapper. C’était indéniable, il devrait se mordre la lèvre inférieure, prendre irrémédiablement sur lui et rangé les multiples sarcasmes provocateurs et railleurs qui venaient par petits paquets de dix dans sa tête chaque fois que la grenouille bougeait les lèvres.
Akogare avait parlé fort et avec assurance. Chacun des mots qui sortaient de sa bouche étaient méticuleusement articulés de sorte que Fuji ne lui demande pas de répéter. Parce que ce sont ce genre de chutes qui vous font plier. Iki resta droit à côté d’Akogare et continuait de raisonner sur leur situation. C’était certain, les grenouilles avaient peut-être l’avantage en connaissant les méandres de la science de la diplomatie, de la parole, simplement. Il y avait toute sorte de manière d’arriver à ses fins, et Iki avait aussitôt envisagé de s’emparer du crapaud et de fermer sa main sur ce qui lui servait de cou jusqu’à ce qu’il crache un nom, un lieu, une idée. Un mot. Il aurait pu également sortir la bourse qu’il avait laissée dans son sac, la sortir et la leur offrir, en échange d’un renseignement. Et puis, ils auraient simplement pu se mettre à genou et les supplier. Mais ils ne faisaient rien de tout cela, parce que se serait soit se trahir, soir se morfondre dans la faiblesse.
Akogare avait lancé la première pique. Sinueuse, délicate, elle restait menaçante. Parce qu’on a beau être des grenouilles, on ne prend jamais Konoha à la légère.
[Fuji] - Jeune homme, je pense avoir quelques siècles de plus que vous... Vous devriez apprendre à ne pas vous occuper des problèmes des autres et à vous intéresser aux vôtres, tout le monde s'en porterait mieux. Mais comme à leur habitude, les ninjas sont interventionnistes ... Il marqua une petite pause. Je ne sais pas où il est.
Fuji sembla hésiter, mais il n'ajouta rien.
Iki sourit. Il posa son regard sur le crapaud. Un mélange de respect et de moquerie. Quelque chose d'assez étrange qui disparut aussi vite.
[Iki] - Nous n'en attendions pas moins de votre part.
Il visait le refus de la grenouille. Un refus qui lui paraissait totalement logique. Iki n'avait pas envisagé les bêtes autrement que par des personnalités centrées sur elle-même et peu enclin à s'ouvrir au monde extérieur. C'était très certainement une façon de survivre, il fallait croire que ça fonctionnait plutôt bien. Il n'empêchait, Iki trouvait cela horriblement égoïste.
[Iki] - Toutefois, comprenez-nous. Nous ne sommes pas venus jusqu'ici, nous n'avons pas traversé la montagne en long, en large et en travers pour renoncer aussi facilement. Je suis à même de comprendre que protéger un être cher, de shinobi dont vous appréciez relativement la compagnie vous parait juste. A tous. Je peux également saisir l'idée que ces même shinobi se prêtent d'orgueil et de caprices que ni leur âge, ni leur sagesse ne les y autorisent. Il n'empêche. Konoha a besoin de Benkei, il ne tient qu'à lui de décider si oui ou non, le village mérite ses services. Et à personne d'autre.
Iki sourit, certain et incertain à la fois.
[Iki] - Fuji-sama, je vous en prie. Si vous avez une idée de là où nous pourrions trouver Benkei Orochi, faites nous en part. Je vous assure que ce que nous avons à lui faire part mérite qu'il s'y intéresse.
[Fuji] - Détrompe-toi, jeune homme. C'est toi qui es venu nous voir. Pas l'inverse. Il n'appartient qu'à moi de décider de partager mes informations avec vous. Et à personne d'autre.
Akogare enchaîna très vite, de peur de se perdre dans quelques rouages de la langue plus ou moins inutiles – plus que moins, en vérité.
[Akogare] - Konoha n'est pas votre ennemi et n'est pas l'ennemi de Benkei. Nous avons patienté cinq longues années. Avez-vous entendu parler de nous pendant ces années ? Un émissaire de Konoha s'est-il présenté à vos portes pour punir Benkei ou protester ? Non. Si nous sommes là aujourd'hui, c'est parce que nous avons besoin de Benkei et que si Benkei a besoin de nous, nous l'aiderons.
Il précisa sa pensée. Parce que c’était l’autre tenant de leur mission : si Benkei avait volontairement fait défaut à Konoha, alors ils le tueraient.
[Akogare] - Si nous avions voulu voir Benkei mort depuis lors, il le serait aussi certainement que vous nous voyez devant vous. Mais nous ne le voulons pas, vous ne le voulez pas et je suis à peu près certain qu'il ne le veut pas non plus. Aidez-nous.
Fuji resta silencieux plusieurs longues secondes. Il observa les rares parchemins sur son bureau, échangea un regard avec la petite grenouille rouge qui restait silencieuse juste à côté de lui puis les fixa intensément l'un après l'autre. Il s'arrête sur Akogare.
[Fuji] - Ce que tu dis est vrai. Quand Benkei est revenu, nous savions qu'il y avait des troubles politiques à Konoha. Cela... était important pour lui. Mais il y avait plus important encore, des urgences. Il nous a averti qu'il ne reviendrait peut être plus et en effet, il n'est pas revenu.
Il soupira l’espace d’un instant puis reprit, presque déçu.
[Fuji] - Mais nous avons eu de ses nouvelles. Souvent. Il invoquait des grenouilles pour nous tenir au courant. Alors en effet, je sais où il est, plus ou moins, mais je sais également qu'il ne souhaite pas que Konoha aille y mettre son nez.
Les deux shinobi subirent le regard intrigué de Fuji et de sa copine rouge. Iki se rendit compte à quel point c’était désagréable de se faire dévisager par un batracien. Pourtant, il avait la très nette impression qu’ils avaient progressé. La question que posa Fuji le remit sur le champ en doute. D’un seconde à l’autre, ils pouvaient tout perdre.
[Fuji] - Désirez-vous encore une fois qu'il devienne votre Hokage ? |
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| Sujet: Re: AK002 - Loin des Yeux... Ven 13 Nov - 19:52 | |
| Tout au long du dialogue préliminaire, Akogare n’avait cessé de peser ses chances s’il optait pour une solution un peu plus expéditive.
Keira ne lui avait donné aucune limite, comme lorsqu’elle lui donnait personnellement un contrat. C’était une façon, pour elle, de sous-entendre que la finalité de la mission importait plus que les moyens d’y parvenir et qu’elle lui faisait confiance pour faire les bons choix. Malheureusement, Akogare n’avait pas toujours fait ces bons choix, mais Keira ne lui avait jusqu’à présent jamais retiré sa confiance. Elle devait savoir, la bougresse, qu’une vie de shinobi est essentiellement constituée de ces choix et que parvenir au bout sans avoir fait la moindre erreur relève de la chimère. C’était, en partie, l’une des raisons pour lesquelles Akogare était si férocement attaché à Ten. Elle lui permettait de garder sa lucidité, car s’il faisait erreur, elle le lui soufflerait.
Akogare gronda intérieurement. Il avait décidément moins confiance en lui qu’il l’estimait. Mais tant mieux. Cela lui donnait l’impression de vivre un peu.
Les chances de faire parler Fuji par la force étaient risibles. D’un côté, il pouvait bien se révéler plus forts qu’eux deux réunis. Après tout, la petite grenouille les avait mené auprès de lui parce qu’il pouvait répondre aux questions plutôt corsées. Cela pouvait indiquer une position confortable dans la hiérarchie grenouille, pour peu qu’ils disposent d’une organisation similaire - Akogare avait conscience qu’il n’avait pas exactement révisé ses leçons à la perfection avant d’entreprendre cette mission, mais il avait été relativement pressé par le temps et jusqu’alors, les grenouilles et lui, ça faisait bien deux.
Et de l’autre côté… Akogare ne souhaitait vraiment pas affronter les grenouilles géantes à côté de là, ni devoir expliquer à Keira pourquoi, à ses yeux, la meilleure des solutions avait été de briser le crâne de Fuji et de heurter sa tête contre les dalles jusqu’à ce que sa cervelle lui coule par le nez.
Akogare] - En effet. D'après ce que vous nous dites, il nourrissait quelques volontés politiques mais n'avait pas le temps de s'impliquer dedans, pour des raisons personnelles. Si tel est bien le cas, nous ne perdons rien à lui proposer à nouveau.
Akogare hésita intérieurement. Cela pouvait se révéler un argument, mais il renâclait à en parler devant Iki. Ses états d’âmes par rapport à Konoha ne concernaient plus que lui à présent, ils lui avaient valu des soucis divers et variés, étouffés depuis qu’il était Oi-nin et qu’il n’avait plus le temps de s’en préoccuper. Mais cela lui restait sur le cœur et c’était le genre de choses qu’il préférait aborder avec son entourage très proche. Il choisit ses mots avec soin.
[Akogare] - Konoha, qu'on aime ou non les shinobi, travaille à protéger ce pays. On peut discuter de la méthode et de l'attitude, et personnellement, sachez que je n'apprécie pas tous les tenants et les aboutissants. Raison de plus pour les faire changer. Nous avons besoin d'un chef. Nous sommes en guerre, nous ne demandons pas votre aide, nous voulons seulement retrouver Benkei Orochi. Par respect pour lui, ne choisissez pas à sa place je vous prie.
Akogare estima qu’il avait atteint les limites de sa diplomatie. Si Fuji refusait, il chercherait par ses propres moyens. Cela serait plus long, sans aucun doute, mais il disposait de nombreux contacts à travers le monde, de par sa fonction d’Oi-nin. En stimuler quelques uns lui permettrait de faire ce qu’il faisait de mieux : retrouver un homme, même disparu depuis cinq ans. Ce n’était pas comme si le chat de la voisine s’était enfui ; Benkei était puissant, célèbre à l’époque, et il avait un objectif en tête autre que passer ses journées à pêcher à la ligne dans un coin perdu. Si Fuji ne les aidait pas, ils n’avaient pas encore abattu toutes leurs cartes.
[Fuji] - Vous êtes têtus, ninjas de Konoha.
L’hôpital qui se fout de la charité… Fuji s’interrompit, sans que rien dans son allure ou dans les traits de son visage ne puisse marquer la moindre hésitation. Il regardait ses doigts s’ouvrir et se fermer, et Akogare rêva un instant de posséder ces doigts palmés pour traverser les galeries sous-marines vicieuses et claustrophobiques.
[Fuji] - J'entends vos arguments. Je vous dirai où est Benkei, mais je dois vous avertir.
Son ton varia subtilement, comme menaçant mais sans forcer. Tout en douceur…
[Fuji] - Je ne tolérerai pas de vous avoir donné l'information qui aura contribué à la mort de Benkei. Si tel est votre désir, si vous pensez avoir une infime chance de devoir le tuer, ne me demandez pas mon aide et cherchez-le, seuls. Ceci est une promesse.
Fuji fit apparaître cinq flammes mauves au bout de ses doigts ; Akogare se tendit. Un sceau ? Et sans doute pas le plus flatteur de tous, au vu de sa couleur…
[Fuji] - J'ai confiance en vous. Sinon, je n'envisagerai pas de vous aider. Mais mon amour pour Benkei est plus puissant que ma confiance. Si vous acceptez, je poserai ce sceau sur vous. Si une envie de tuer Benkei vous prenez, vous mourriez. Ceci n'est pas négociable, ninjas de Konoha.
Akogare dévisagea Fuji. Cela ne lui plaisait pas… du tout. Il ne dit toutefois rien et jeta un coup d’œil à Iki.
[Iki] - Ouais. Et nous on vous confiance aussi. Je suis sûr que ces petits machins-là ne nous trahiront pas.
Quel élan de confiance tout à coup ! Akogare avait toutefois suffisamment d’expérience dans ce domaine pour être à peu près convaincu que Fuji ne mentait pas et que son but premier n’était certainement pas de les tuer dans des souffrances peu avouables. Mais la perspective d’avoir un couperet au-dessus de sa tête lui déplaisait fortement. Peut-être qu’avec son chakra il parviendrait à contourner ce foutu sceau, mais si Fuji l’apprenait, il pourrait mal interpréter son geste. Tout de même, est-ce que dans sa situation il aurait aimé avoir la main d’Akogare serrée autour de son cou ? Juste au cas où ? Il n’aimait pas cela du tout… D’autant plus qu’il ne connaissait pas du tout la personnalité de Benkei. Peut-être aurait-il envie de le tuer comme il avait envie de tuer plein de gens, chaque semaine, sans penser à mal.
Tout compte fait, ce n’était peut-être pas un excellent argument.
[Akogare] - Mmh… Fais-toi plaisir père crapaud...
Fuji acquiesça solennellement et s’approcha de lui le premier. Akogare l’observa sans ciller appliquer ses doigts frais mais secs sur sa poitrine et presser très légèrement. Le Hyuuga fronça les sourcils et se retint d’attraper le bras du crapaud. C’était plus puissant qu’il ne l’imaginait.
[Akogare] - Tu es plus balèze que je ne le pensais, crapaud.
Fuji retira sa main et passa à Iki. Akogare observait le sceau, un cercle ornementé qui n’avait pas réellement de signification précise. Il irradiait d’une légère lueur mauve, puis celle-ci sembla être absorbée par le sceau proprement dit et seuls les contours apparaissaient de façon subtilement violacée. Une si petite chose… Akogare espérait sincèrement que Benkei aurait un caractère facile. Parce que s’obligeait à ne pas vouloir le tuer risquait de l’agacer suffisamment pour avoir réellement envie de le tuer.
[Akogare] - Je compte sur vous pour me retirer cela dès que notre mission sera achevée. Il est hors de question que je laisse ma vie dans les mains d’un crapaud plus longtemps que nécessaire.
[Fuji] - Benkei est capable de le retirer et je suis convaincu qu’il existe à Konoha des personnes capables d’en faire autant. Si ce n’est pas le cas… vous avez vraiment besoin de Benkei.
Ah… l’humour d’un crapaud… toute une histoire.
[Akogare] - Alors, il est où ?
[Fuji] - Au Pays des Vagues. A l’extrême nord-est. |
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| Sujet: Re: AK002 - Loin des Yeux... Lun 18 Jan - 21:29 | |
| Akogare : +104 XP Iki : +80 XP |
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| Sujet: Re: AK002 - Loin des Yeux... | |
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